Chu de che / Je suis d'ici / Sono di qui / Ich bin von hier ! Notre liberté ne nous a pas été donnée, mais combattue et priée par nos ancêtres plus d'une fois! Aujourd'hui, comme autrefois, notre existence en tant que peuple libre dépend du fait que nous nous battions pour cela chaque jour. Restez inébranlable et soyez un gardien de la patrie pour que nous puissions remettre une Suisse libre telle que nous la connaissions à la génération suivante. Nous n'avons qu'une seule patrie!

dimanche 16 juillet 2017

14 Juillet : les coulisses du spectacle présidentiel


D’abord, l’accueil de Vladimir Poutine et de Donald Trump de façon à la fois amicale et protocolaire dans des cadres prestigieux permet de redonner à la France sa place dans le concert des nations qui en a grandement besoin. À travers des lieux connus du monde entier, c’est l’image de la France qui est restaurée. Très concrètement, les reportages réalisés seront sans doute bénéfiques au tourisme dans et à l'économie.

En second lieu, Emmanuel Macron, en occupant l’espace médiatique en tant que chef de l’État très tourné vers la gestion des affaires du monde, fait coup double : il redore la fonction et il démontre qu’il est « à la hauteur ». Enfin, et c’est le plus inattendu pour un homme issu de la gauche, il paraît tourner une page, et même plusieurs, par rapport à ses prédécesseurs, comme si la dignité et ce qu’il faut de distance avaient retrouvé leur place dans le comportement présidentiel.

Tant de soins et d’intelligence dans la mise en scène laissent toutefois percer deux soupçons;

Le premier s’inquiète légitimement d’une dérive vers l’État spectacle. Concrètement, Macron n’a rien obtenu ni de Poutine ni de Trump. La France va-t-elle transformer cet essai de relations publiques en influence politique ? Rien n’est moins sûr. On ignore les buts de sa politique pour l’avenir de la Syrie. Combattre le terrorisme, ne plus faire de l’élimination du président syrien une priorité, brandir la menace d’une intervention militaire aérienne, en cas de recours aux armes chimiques, constituent des signaux. Ils ne désignent pas un cap.

La vanité n’est pas absente de la mentalité française, surtout à droite. C’est cette dernière que le locataire de l’Élysée vise. Depuis Orléans et le Puy du Fou, la stratégie est en marche. Beaucoup de Français « de droite » sont friands de gloriole, au point d’avoir un jour porté au pouvoir le neveu de celui qui avait fini son aventure à Waterloo parce qu’il avait aussi gagné Austerlitz, dont la France n’a tiré aucun bénéfice. Le résultat, ce fut Sedan.

Mais si la scène est brillante et attire les regards, les coulisses ne semblent pas aussi lumineuses.

Tandis que l’armée défile, le budget des armées se défile, au point de faire parler la grande muette par la voix du chef d’état-major, le général Pierre de Villiers.

Jupiter a donc dû descendre de ses nuées pour « recadrer » ces propositions. Il n’est pas facile, en effet, de réconcilier les ambitions du spectacle avec le terre-à-terre de la comptabilité publique.

La sévérité des propos présidentiels a paru excessive. Certes, le jeune Président joue son rôle, mais une élection par surprise permet-elle de surjouer l’autorité d’une fonction face à un militaire qui, lui, a fait ses preuves ?

On retiendra donc que M. Macron n’aime pas qu’on débatte de sa politique sans son autorisation.

Il est pourtant nécessaire que l’autre pouvoir, le législatif, soit informé des conséquences des décisions prises par le gouvernement, et il est légitime que l’opposition les conteste. Cela s’appelle la démocratie parlementaire.

Même la majorité pléthorique et moutonnière d’En Marche ! ne peut lui substituer un pouvoir personnel pour lequel le Président manifeste un penchant inquiétant.

Par ailleurs, il préfère le discours à l’interview et donne, certes, à cet emploi unilatéral de la parole une hauteur que les journalistes lui font souvent perdre quand ils ramènent la politique à leur niveau.

Mais de là naît un second soupçon, particulièrement grave;

un personnage aussi narcissique, qui n’aime pas être pris en défaut ou mis en difficulté, qui refuse par exemple de répondre à une question pertinente sur son déplacement à Las Vegas comme ministre, est-il tout à fait compatible avec la démocratie ?

Celle-ci ne repose pas sur la ferveur d’un public mais sur le soutien éclairé et lucide des citoyens à un système qui doit être transparent et viser le bien commun. Il n’y a pas de démocratie sans opposition, sans critique, sans mise en cause des gouvernants.

De la part de ceux-ci, le prestige distant est nécessaire à l’exercice de l’autorité, le mépris qui repose sur le sentiment d’une supériorité que couronne la réussite est malvenu.

Le Général de Villiers : « La confiance est une vertu vivante qui a besoin de gages »



La confiance justement. Hasard ou coïncidence, c’était le thème que le général Pierre de Villiers, le chef d’état-major des armées (CEMA), avait promis d’aborder dans sa prochaine « Lettre à un jeune engagé ». Alors qu’il vient d’être séchement rappelé à l’ordre par le président Macron pour sa sortie contre les économies de 850 millions demandées aux armées, il a tenu parole, en publiant le texte promis le 14 juillet.

« La confiance, c’est le refus de la résignation. C’est le contraire du fatalisme, l’antithèse du défaitisme. Et, en même temps, il y a dans la confiance une forme d’abandon. Agir sans s’abandonner, c’est faire preuve d’orgueil. S’abandonner sans agir, c’est se laisser aller », a ainsi écrit le CEMA, après avoir cité le général Delestraint, le chef de l’Armée secréte mort en déportation en avril 1945 et dont le « discours est une exhortation ferme à rejeter toute ‘mentalité de chien battu ou d’esclave' ».

« Choisissons, donc, d’agir comme si tout dépendait de nous, mais sachons reconnaître que tel n’est pas le cas. Autrement dit, si toute notre foi, tout notre engagement et notre détermination sont nécessaires, ils sont à jamais insuffisants pour envisager la victoire. La vraie confiance réconcilie confiance en soi et confiance en l’autre », continue le général de Villiers.

Mais l’essentiel de cette lettre du CEMA tient dans sa conclusion. Et certains y verront sans doute une réponse au recadrage du président Macron, qu’il doit conseiller pour qu’il reste un chef des Armées et non un chef désarmé.

« Parce que la confiance expose, il faut de la lucidité. Méfiez-vous de la confiance aveugle; qu’on vous l’accorde ou que vous l’accordiez. Elle est marquée du sceau de la facilité », écrit ainsi le général de Villiers.

« Parce que tout le monde a ses insuffisances, personne ne mérite d’être aveuglément suivi », poursuit le CEMA, pour qui « la confiance est une vertu vivante » qui « a besoin de gages. » Et de conclure : « Elle doit être nourrie jour après jour, pour faire naître l’obéissance active, là où l’adhésion l’emporte sur la contrainte. »

Peut-être qu’il sera question de confiance lors de l’entretien, en tête à tête, qu’aura le général de Villiers avec Emmanuel Macron le 21 juillet prochain. « Si quelque chose oppose le chef d’état-major des armées au président de la République, le chef d’état-major des armées change », a déjà prévenu le chef de l’État.

Egger Ph.