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vendredi 17 novembre 2017

Comment une entreprise suisse a conquis le marché des sécateurs


Felco, une entreprise encore peu connue du grand public mais dont le succès commercial suscite les convoitises des grands groupes internationaux. 
(swissinfo.ch)



L’industrie helvétique a su maintenir sa vitalité en misant sur des produits haut de gamme dans les domaines de la chimie, des montres, des machines, des instruments de précision ou encore des techniques médicales. Mais elle est également leader mondial dans des niches plus insolites: c’est le cas des sécateurs avec l’entreprise neuchâteloise Felco.

Niché dans un écrin de verdure à mi-chemin entre le lac de Neuchâtel et les crêtes du Jura, le village des Geneveys-sur-Coffrane – 1600 habitants – jouit d’un panorama imprenable sur les Alpes. «Lorsque le ciel est totalement dégagé, on peut voir le Mont-Blanc d’ici», affirme Michèle Charpié, responsable de la communication de Felco, en pointant son index à travers les larges baies vitrées de l’usine en direction du Sud-Ouest.



Situés en plein cœur des Geneveys-sur-Coffrane, les ateliers Felco, qui se sont agrandis au fur et à mesure de la croissance de l’entreprise, font partie intégrante de la vie locale depuis plus de 70 ans. La plupart des 200 employés vivent d’ailleurs ici ou dans les villages avoisinants, qui ont récemment fusionné pour donner naissance à la commune de Val-de-Ruz.

Felco a été fondée en 1945 par Félix Flisch, un Suisse alémanique aux origines appenzelloises et grisonnes. «Comme beaucoup d’autres jeunes à l’époque, mon grand-père fut envoyé en Suisse romande à l’âge de 15 ans pour y apprendre le français. Après avoir effectué un apprentissage de mécanicien dans la région, il racheta à bon prix une ancienne usine de cadrans de montres pour y installer son atelier de fabrication de sécateurs», raconte Pierre-Yves Perrin, qui avec son frère Laurent représentent la 3e génération de la famille fondatrice et sont tous deux actifs au sein du groupe Flisch, la société-mère de Felco. 

Pierre-Yves Perrin est administrateur de la holding Flisch, la société-mère de Felco. Il représente la 3e génération de la famille fondatrice de l'entreprise. 
(swissinfo.ch )


Vers une année record

A l’époque, Félix Flisch eut l’idée visionnaire de produire un sécateur léger, précis, robuste et à lame interchangeable destiné aux professionnels et de le commercialiser au-delà des frontières nationales.
Trois quarts de siècle plus tard, Felco n’a plus rien à voir avec le petit atelier des débuts qui employait quatre personnes. Chaque année, ce sont plus d’un million d’outils de taille et de coupe qui sont produits et assemblés dans l’usine neuchâteloise.

Les fameux sécateurs aux manches rouges sont désormais exportés dans plus de 120 pays au-travers d’un large réseau de distribution. Malgré les difficultés liées au franc fort, Felco prévoit de réaliser un chiffre d’affaires record de plus de 45 millions de francs en 2017.

Cette PME tournée vers les marchés internationaux – Felco exporte plus de 90% de sa production – n’en a pas moins gardé un fort ancrage local et un esprit familial bien vivant. «Certes, la gestion paternaliste instaurée par mon grand-père tend à disparaître, mais nous avons toujours à cœur de régler les problèmes de manière pragmatique et humaine», souligne Pierre-Yves Perrin.

«Droite humaniste»  

Lui-même se définit comme le représentant d’une famille d’entrepreneurs appartenant à une certaine «droite humaniste» en perte de vitesse. En près de trois-quarts de siècle d’existence, Felco n’a jamais connu le moindre conflit social, tient-il d’ailleurs à souligner.

Il faut dire que les syndicats sont très peu présents dans l’usine. «Notre entreprise n’est pas soumise à une convention collective de travail (CCT). Cela ne nous empêche pas de verser un salaire minimum largement supérieur à 4000 francs par mois et d’offrir de nombreux avantages sociaux à nos employés. Il n’est ainsi pas rare de compter dans nos effectifs des collaborateurs travaillant chez nous depuis plusieurs dizaines d’années», affirme Pierre-Yves Perrin. 

Même si le directeur général de l’entreprise, Christophe Nicolet, en poste depuis 2011, n’est pas issu de la famille fondatrice – une première dans l’histoire de Felco -, toutes les actions de la société-mère sont restées en mains familiales. «Nous préférons réinvestir les bénéfices dans la société plutôt que d’augmenter nos dividendes. Felco est ainsi capable depuis très longtemps de s’auto-financer et de ne faire appel à l’argent des banques qu’à de rares occasions», explique Pierre-Yves Perrin.

Des sécateurs électriques

Contrairement à beaucoup d’acteurs de l’industrie suisse, Felco ne produit pas en majorité des technologies à haute valeur ajoutée mais des outils a priori plutôt basiques vendus quelques dizaines ou centaines de francs. Le prix du modèle classique de la marque, Felco 2, un sécateur déjà écoulé 15 millions de fois dans le monde, s’affiche ainsi à 65 francs sur le marché suisse.

Pour rester compétitive, Felco mise sur les possibilités de la quatrième révolution industrielle. L'entreprise possède une douzaine de robots totalement autonomes. 
(swissinfo.ch)



La concurrence est donc âpre sur tous les marchés nationaux. Pour y faire face, Felco est contraint d’innover sans cesse. Depuis quelques années, la marque suisse s’est ainsi lancée dans la conception de sécateurs électriques, via sa société-soeur Felco Motion.

«Il s’agit de répondre à des besoins exprimés par nos clients. Nous ne craignons pas pour autant la disparition de nos outils manuels traditionnels. Les deux produits sont complémentaires», assure Stephan Kopietzki, directeur commercial et marketing de Felco.

Une marque générique

L’automatisation d’une grande partie des processus de production permet également de faire baisser les coûts élevés inhérents à la Suisse. Felco produit actuellement deux de ses outils à l’étranger. Pour le reste, la société est aujourd’hui trop attachée au label «Swiss Made» et aux conditions offertes par la place économique de l’Arc jurassien helvétique pour envisager une délocalisation de ses activités, avance Pierre-Yves Perrin.

Couplée au «Swiss Made», l’image de marque acquise par Felco au cours des décennies reste l’argument de vente le plus important lorsqu’il s’agit de convaincre les professionnels mais aussi de nombreux amateurs passionnés de jardinage de payer jusqu’à quatre fois plus cher pour acquérir le sécateur de référence.

Une notoriété qui a aussi son revers de la médaille. «Nous sommes en quelque sorte victimes de notre succès, affirme Pierre-Yves Perrin. A l’instar des fenêtres de toit Velux, Felco est devenu un nom de marque générique. Aujourd’hui, tout le monde essaye de copier nos sécateurs, du moins leur design, et il est très difficile de lutter contre ce type de contrefaçon qui ne dit pas toujours son nom».

Samuel Jaberg