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mercredi 30 mai 2018

Les mousquetaires dans l'histoire de France




Le corps des mousquetaires de la maison militaire du roi de France a été créé en 1622 lorsque le roi Louis XIII dota de mousquets (arme d'infanterie) une compagnie de chevau-légers de la Garde aussi appelés carabins (cavalerie légère), elle même créée par son père, Henri IV. De 1622 à 1629, les mousquetaires dépendent du capitaine-lieutenant des cheveau-légers. En 1622, le premier d'entre eux fut Jean de Bérard de Montalet. En 1634, le roi le fait capitaine de la compagnie des mousquetaires, laissant le commandement effectif au sieur de Tréville.

Les mousquetaires sont recrutés uniquement parmi les gentilshommes ayant déjà servi dans la Garde. Le passage aux mousquetaires est une promotion. Il permet de rejoindre un corps d'élite, proche du roi. De plus, il est prévu que les hommes quittant ses rangs soient nommés enseigne ou lieutenant (grade bien plus élevé alors, surtout dans les corps d'élite) dans les Gardes ou officiers dans les régiments. En l'absence d'école militaire, le passage sous les yeux du souverain permet de vérifier la compétence et la fidélité de chaque homme.


On y lit la devise : « Quo ruit et letum » (« Où elle tombe [allusion à la bombe représentée], 
la mort aussi », « Où elle tombe la mort vient avec elle »)



Ces mousquetaires avaient la particularité de combattre indifféremment à pied ou à cheval. Ils formaient la garde habituelle du roi à l'extérieur, la garde à l'intérieur des appartements royaux étant celle des gardes du corps et des gardes suisses. Mazarin, n'appréciant guère les turbulents mousquetaires du roi, fit dissoudre leur compagnie en 1646. Elle ne reparut qu'en 1657, comptant alors 150 hommes. À la mort de Mazarin en 1661, la compagnie des mousquetaires du cardinal passa au roi Louis XIV. Elle fut réorganisée sur le modèle de la première compagnie en 1664 et reçut le surnom de « mousquetaires gris » dû à la robe de ses chevaux, alors que la deuxième compagnie fut appelée « mousquetaires noirs ».

À cette même époque, les effectifs des compagnies furent doublés. En effet les mousquetaires étaient l'un des corps militaires les plus prestigieux du royaume, ne rassemblant que des nobles en principe. Nombre d'entre ces derniers, forcés depuis les réformes de Le Tellier à passer un certain nombre d'années dans la troupe avant d'accéder au grade d'officier, préférèrent effectuer ce service dans un corps privilégié. Ainsi, aussi bien des militaires comme le maréchal de Montesquiou que des écrivains comme le duc de Saint-Simon furent mousquetaires.

En 1776, les mousquetaires furent supprimés pour raisons d'économie par Louis XVI. Reformés en 1789, ils furent supprimés peu après.

La Restauration les recrée le 6 juillet 1814, et les dissout définitivement le 1er janvier 1816.
Alexandre Dumas les a immortalisés dans sa trilogie dont le premier volume s'intitule Les Trois Mousquetaires, en s'inspirant de mémoires apocryphes de Gatien de Courtilz de Sandras
Ce roman rendit populaire les mousquetaires mais ne doit en aucun cas être considéré comme une œuvre historique tant les libertés avec l'histoire sont nombreuses. À l'aide des très libres et déjà fort romancées Mémoires de Monsieur d'Artagnan publiés en 1700 par Courtilz de Sandras, Dumas construisit avec virtuosité et talent une vision romantique du règne de Louis XIII.

Quelques erreurs historiques fort remarquables :

Les Mousquetaires, gardes du Roi, ne s'engageraient certainement pas dans la défense de la reine. Celle ci était fort mal perçue pour son origine étrangère et ses intrigues contre le roi et Richelieu. Cette vision fort romantique constitue ni plus ni moins qu'un cas de lèse majesté.

Rendre service à George Villiers de Buckingham, premier ministre et général Anglais, alors en état de guerre et ennemie de la France est de la Haute trahison.

Le véritable d'Artagnan, mousquetaire avant tout sous Louis XIV fut avant sa lieutenance la créature de Mazarin, qui l'utilisa pour des missions secrètes, à l'instar de Rochefort dans le roman.

Le peintre Pablo Picasso s'est aussi inspiré des mousquetaires pour peindre plusieurs tableaux d'eux.



La Première Compagnie des Mousquetaires du Roi

Cette première compagnie est créée par Louis XIII en 1622.

Il s’agit de sa garde personnelle, formée par son père Henri IV, qui avait alors le nom de « Carabins » car elle portait des carabines. Louis XIII remplace ces dernières par des mousquets et la compagnie prend alors le nom de « Mousquetaires ».

L’événement a lieu juste après la reddition de la ville de Montpellier, alors que les troupes marchaient sur Avignon.

Puységur le relate ainsi dans ses Mémoires :

« Sa Majesté demanda à M. d’Epernon six de ses gardes pour mettre ladite Compagnie. Elle voulut, et je puis même dire qu’elle me força à prendre une Casaque de Mousquetaire. La difficulté que j’en faisais n’était pas que je ne susse fort bien que ce m’était un grand honneur d’être dans la Compagnie ; mais j’appréhendais fort que cela ne m’éloignât de la charge d’Enseigne qui m’avait été promise à Montpellier en 1622. Le Roi m’assura que cela ne me reculerait pas, et qu’il me mettait dans les Mousquetaires parce qu’il savait bien que j’étais un vaillant homme et qui avait fait de belles actions : qu’il était résolu de ne mettre que des Gentilshommes dans cette Compagnie qu’il prendrait dans ses Gardes, comme aussi quelques soldats de fortune ; mais qu’il ne voulait pas en prendre qui n’eussent servi et qui ne se fussent trouvés aux occasions…»

La Compagnie des Carabins cesse donc d’exister au profit de cette nouvelle Compagnie, dite des Mousquetaires, d’une composition toute différente où le Roi n’admet que des sujets d’une extraction noble ou des personnes d’un mérite connu.

Lorsqu’en Henri IV monta sur le trône, il hérita de son prédécesseur Henri III, assassiné par Jacques Clément à Saint Cloud en 1589, d’une Maison militaire assez restreinte, les compagnies des gardes du corps, des gardes de la Porte et de la Prévôté, la compagnie des Cent-Suisses, hallebardiers géants, et le fort régiment des gardes françaises, créés en 1563.

Les deux-cents gentilshommes à bec de corbin (sorte de hallebarde), infidèles à leur serment, s’étaient presque tous ralliés à la Ligue. Henri IV, cependant, les reconstituera lorsqu’il aura entièrement reconquis son royaume (1594) mais ne les réunira que lors des grandes cérémonies dynastiques.

A sa Maison militaire, il va adjoindre en 1593, la compagnie des chevau-légers (les carabins) qu’il avait constitué quand il était Roi de Navarre, et créera pour son fils aîné, les « gendarmes du dauphin ». Louis XIII devenu roi par l’assassinat de son père en 1610, va très vite faire entrer ses gendarmes dans sa Maison militaire (1611). Roi guerrier, aimant les soldats, les « montres » (les revues), les parades et les expéditions, il va mettre sa Garde sur une grand pied, fondant le régiment des gardes suisses, avec les fidèles vétérans helvétiques de son père (1616) puis, en 1622, la compagnie des 100 mousquetaires, anciens « carabins ».

En créant, la Compagnie des Mousquetaires, Louis XIII veut former un corps d’élite de combattants qui lui sont entièrement dévoués. Les mousquets replacent donc les carabines et la casaque bleue devient l’uniforme. Une hiérarchie stricte régit la compagnie selon des grades. Ainsi, il ne faut pas confondre l’appellation de « Mousquetaires » en général – glorieuse - avec le grade de simple mousquetaire qui est celui de l’homme de rang qui porte et charge son mousquet ; ce qui peut parfois entraîner la confusion. Pour ce dernier, Michel Pétard a fait un travail complet de présentation dans un article intitulé Le Mousquetaire de Rocroi.


• Le Sous-Lieutenant
Il est l'assistant direct du Capitaine Lieutenant de la Compagnie.

• Cornette & Enseigne
C'est le plus bas des grades d'officiers. Un de ses rôles est de représenter et de rallier les hommes de la compagnie au cours de la bataille.

Les hommes de rang

• Le Maréchal des Logis
Le grade de Maréchal des Logis est l'échelon supérieur des hommes du rang.

• Les Brigadiers
Grade intermédiaire dans les hommes de rang.

• Les Gendarmes, Chevaux-Légers et Mousquetaires.
Il s'agit du rang le plus bas des compagnies.

Les officiers

En plus des avantages dus à leurs grades, tous les officiers sont exemptés du paiement des taxes royales. En effet, par leur présence au champ de bataille, on considérait quels avaient acquitté " l'impôt du sang ".

Le Capitaine Lieutenant

Il commande la compagnie. Il peut proposer volontairement sa compagnie pour une campagne ou assigner des missions personnelles à certains de ses hommes, etc. Les Charges d'Officiers des mousquetaires et des gardes étaient autrefois vénales, celle de Capitaine Lieutenant étaient vendues plus de 200 000 livres et les autres à proportion. Louis XIV favorisa ensuite la promotion au mérite.

« La compagnie combat à pied et à cheval, les hommes s’habillent à leur guise, mais ils portent, par-dessus leurs vêtements – et comme signe distinctif – la casaque bleue, fort courte, puisqu’elle s’arrête sur la croupe du cheval ; c’est une sorte de pèlerine, à larges manches ouvertes, sur laquelle ressortent quatre croix blanches : une de chaque côté, une devant, une derrière. Ces taches bleues à croix blanches, en face d’eux, terrorisaient leurs adversaires, tant était grande la science au combat et la bravoure des mousquetaires ! »

« La première compagnie resta quelque temps sans avoir d'autre habit d'ordonnance, mais lorsque le roi voulait passer une revue avec éclat, il faisait connaître à l'ordre la manière dont il désirait que ses mousquetaires fussent habillés. Une fois, ayant ordonné que la compagnie prit une tenue de buffle, les plus riches mousquetaires mirent une quantité de diamants sur leurs manches; une autre fois, il leur prescrivit de se vêtir en noir. »

On entrait très jeune chez les mousquetaires, c’est-à-dire aux alentours de seize ou dix-sept ans et une bonne recommandation était souhaitable ainsi que - comme l’on fait remarquer de nombreux chroniqueurs - un lignage gascon ou béarnais qui ouvrait plus facilement les portes… Cette tradition remontait déjà aux Carabins qu’Henri IV avait recrutés parmi ses fidèles sujets de Navarre. Elle se maintient pendant pratiquement tout le XVIIe siècle, dans la Compagnie des Mousquetaires.

« (…) les Gascons demeurent en force parmi les troupes. A côté des petits gentilshommes, l'armée royale assure la promotion de vaillants roturiers. Gassion, Maréchal de France et Tréville, tous deux fils de marchands d'Oloron, en sont l'illustration. Les apprentis guerriers gascons trouvent, dans le régiment des Gardes françaises notamment, une authentique école militaire dont ils ont l'usage presque exclusif. Au début au moins, sur dix compagnies, huit sont commandées par des capitaines gascons. De même, au fur et à mesure que se mettent en place les régiments, comme unité qui compte dans l'armée, ceux-ci portent, le nom de leur titulaire, et le plus souvent celui d'une maison gasconne. Sous le règne de Louis XIII, la formation de la Compagnie des Mousquetaires du roi constitue, également, un nouveau pôle d'attraction pour les jeunes gentilshommes désireux d'apprendre, dans cette troupe d'élite, à la fois le métier de soldat et les devoirs de l'homme de cour.

Ainsi, on peut légitimement soutenir qu'il existe une sorte de mafia gasconne qui confisque largement les gouvernements ou les lieutenances dans les provinces, les commandements militaires comme les charges de cour ou les offices royaux. »

Rien d’étonnant donc que Dumas, en narrant l’histoire des Mousquetaires, dote son héros gascon, d’Artagnan, d’une recommandation paternelle pour Monsieur de Tréville, également gascon et Capitaine des Mousquetaires.

Il ne s’agit d’ailleurs que de rendre justice à ces cadets de Gascogne qui se sont toujours montrés fidèles et vaillants sur les champs de bataille.

Lors de la création de la première compagnie, M. de Montalet en est nommé Capitaine commandant. Il meurt empoisonné - rapporte M. de Puységur dans ses Mémoires - et a pour successeur un autre M. de Montalet, son neveu, précédemment cornette de la compagnie.

En 1627, c’est lui qui conduit les Mousquetaires au secours de l’île de Ré, première grande bataille que livre la nouvelle compagnie.


Suit ensuite le siège de La Rochelle

« Les Anglais ayant envoyé en 1627 une flotte considérable aux Calvinistes de France pour les aider à faire la conquête de l’île de Ré qu’ils avaient entreprise, Louis XIII se rendit avec son armée dans la Province d’Aunis pour s’opposer à ce dessein, et en même temps châtier les rebelles. Il fit passer dans cette île la Compagnie des Mousquetaires le 8 novembre pour être employée à sa défense.

Le succès des armes de ce Prince en cette occasion l’encouragea à faire le siège de La Rochelle, alors le boulevard du calvinisme. Cette ville fit une longue et vigoureuse résistance et sollicita des secours de tous côtés. Elle en obtint surtout de la part des Anglais dont la flotte parut le 16 mai 1628 à la vue de celle de France. Louis XIII en étant informé, envoya sur le champ ses mousquetaires au Maréchal de Bassompierre, avec ordre de les faire monter sur les vaisseaux, ce qui fut exécuté. Les Anglais s’approchèrent mais après avoir tiré toutes leurs bordées, ils s’en retournèrent et ne reparurent plus. »

Le Cardinal de Richelieu est alors impressionné par la fougue et la vaillance des mousquetaires et décide de les engager dans toutes les campagnes où une petite troupe d’élite peut agir avec efficacité.

« Richelieu put vérifier l’excellence de son choix dès l’année suivante. Le roi d’Espagne et le duc de Savoie revendiquaient le marquisat de Montferrat et avaient entrepris le siège de Casal. Tout à la joie de la capture de la Rochelle, le Conseil du Roi sut convaincre Louis XIII de ne pas compromettre son prestige en abandonnant le Prince Charles de Gonzague, son allié. Le 15 janvier 1629, entouré de ses Gardes et suivi des Mousquetaires, il quitte Paris pour la Savoie. Le Cardinal et un état major imposant sont du voyage. »

« (Le Roi)  envoya le 6 mars demander au Duc de Savoie le passage pour ses troupes ; ce qui lui ayant été refusé, on résolut de forcer le Pas-de-Suze que le Duc de Savoie et le Prince de Piémont défendaient en personne.

Les dispositions faites, on fit entrer dans la gorge, pour commencer l’attaque, sept compagnies des gardes françaises, six des Gardes suisses, plusieurs autres de différents régiments et les Mousquetaires à cheval du Roi. Il fut décidé que chaque corps jetterait en avant cinquante Enfants-perdus (les tirailleurs) et Louis XIII ordonna à ses Mousquetaires de marcher avec les Enfants-perdus des Gardes. Le Roi dit à cette occasion que ce qui lui plaisait toujours dans ses Mousquetaires, c’était cette gaîté célèbre avec laquelle ils se présentaient à tout ce qu’on leur disait d’attaquer.

Ils passèrent sous le feu des ennemis logés sur les montagnes et essuyèrent celui du canon du fort de Talasse. Arrivés au pied du premier retranchement, ils fondent, l’épée à la main, sur les Piémontais, les culbutent et les mènent si vertement qu’ils emportent, avec la même rapidité, les deux autres barricades, y entrant pêle-mêle avec les fuyards. Ils montèrent sans s’arrêter jusqu’au haut de la montagne, à la vue de Suze, d’où on leur tira force canonnades de la Citadelle. »
Le Thueux

C’est une des occasions où Monsieur de Tréville se fait remarquer pour sa bravoure et sa pugnacité, en poursuivant le Duc de Savoie qui fuyait, ce qui lui vaudra une lieutenance dans la Compagnie des Mousquetaires.

Au final, la victoire est totale. Le 11 mars, Suze et son château capitulent et Louis XIII est particulièrement fier de ses mousquetaires.

« Le prestige de la Compagnie dans l’armée et auprès de la jeune noblesse monta considérablement. On commença à penser qu’il valait mieux risquer de mourir au « lit d’honneur », selon la formule du temps, sous la casaque de mousquetaire plutôt que chez les Gardes. Cet état d’esprit nouveau apparut en particulier chez les Gascons, race maigre et sobre dont le métier des armes était la religion exclusive. »

« En 1632, le Duc d’Angoulême fit attaquer par les Mousquetaires deux régiments de troupes lorraines qui gardaient le bourg de Rouvroi. Ils les chassèrent, leur tuèrent deux cent hommes et firent beaucoup de prisonniers. Cette action fut conduite avant tant d’ordre de la part du Comte de Troisville et soutenue avec tant de valeur par les Mousquetaires, que Louis XIII résolut, dès cet instant, de s’en faire Capitaine. »

De fait, M. de Montalant, le Capitaine commandant de la compagnie des Mousquetaires démissionne en 1634 et Louis XIII décide de s’en faire lui-même le Capitaine. Certains diront qu’il avait suggéré cette démission à Montalant qu’il récompense largement en lui donnant le Gouvernement du Duché et de la ville de Bar, car il souhaite prendre la tête de sa compagnie des Mousquetaires afin d’en assurer davantage encore la position. Il en nomme Tréville Lieutenant et dès lors, le commandant de la compagnie ne porte plus que le titre de « Capitaine lieutenant ».

« Les Mousquetaires ne furent guère étonnés d’apprendre que le Roi se mettait à leur tête : sa Majesté les avait convaincus de longue date de l’intérêt qu’elle prenait à leur vie quotidienne, en ne manquant aucune revue et en se faisant présenter les nouvelles recrues. »

Cette première compagnie a son hôtel au 15, rue du Bac. Les mousquetaires font partie de la Maison du Roi et non de la Maison militaire. Ils ne font donc, à la cour, que le service du roi; lorsqu'ils l'accompagnent, ils sont à cheval, deux à deux, devant toutes les autres compagnies de gardes.

« Les mousquetaires à cheval de la garde du Roy ne font garde que quand le Roy sort; alors ils marchent à cheval devant tous les autres gardes, deux à deux. Ils ont tous la casaque bleue avec la croix d'argent; leur capitaine est monsieur de Tréville, que le défunt Roy a avancé à cette charge à cause de son grand courage. Ils sont au nombre de cent trente et ont quarante sols par jour. » (Estat de la France en 1648 - 1649 -  F. Danjou. Archives. curieuses de l'histoire de France, 2e série, t. VI, p.432)

Lorsqu’ils sont à la guerre, les Mousquetaires logent aux quartiers du Roi et combattent avec le Roi, en garde rapprochée.

La plupart des jeunes rêvent alors de faire partie des Mousquetaires tant leur prestige est grand, mais leur nombre étant limité, beaucoup sont obligés de se rabattrent sur les autres corps de l’armée.

Il paraît que de 1636 à 1646, les Mousquetaires n’ont pas participé, de manière systématique, à toutes les campagnes qu’il s’agisse de la Lorraine, de la Picardie ou de la Flandre car le Roi qui les aimait tant, ne souhaitait pas qu’ils soient sacrifiés… Peu de pertes sont donc enregistrées et le nombre des recrues est infime.

« Heureusement, le Roi et Troisvilles veillèrent à ce que soient largement ouvertes aux autres les compagnies de Cadets et l’éphémère Académie Royale pour la Noblesse créée par Richelieu pour les concurrencer. »

Les Gardes du Cardinal

"D'après les règlements, il faut qu'il y ait quotidiennement soixante gardes de service en permanence dans la résidence du Cardinal. Ces soixante gardes seront « nourris et auront leurs tables servies par des gens à ce préposés dans leurs salles d'armes ». la faction fait par chaque garde dure une heure. Le factionnaire doit se tenir droit, « le pistolet bandé, amorcé et le chien abattu caché sous la casaque écarlate ». Les mousquets restent au râtelier de la salle des gardes où on peut aller les prendre en cas d'alerte. Les gardes ne laissent entrer personne sans ordre exprès.[...] Si le Cardinal sort, ils montent à cheval, escortent le carrosse de son Eminence qu'ils entourent. Mais si on va au Louvre, ils ne doivent pas pénétrer dans la cour du palais. Là où le Roi se trouve, il ne peut y avoir que ses propres gardes." 


Au XVIIe siècle, le fait de posséder des Gardes était une marque d’honneur et de prestige assez exceptionnelle. C’était d’ailleurs un privilège d’autant plus rare qu’il donnait à celui qui possédait ainsi sa garde personnelle, un pouvoir qui pouvait compromettre la sécurité de l’Etat.

Le clergé des Etats Généraux de 1614 disait dans l'article 137 de ses remontrances au Roi : « Les gardes représentent quelque marque de souveraineté et pour ce, les Etats supplient Votre Majesté de ne permettre, spécialement en temps de paix, qu'aucun en votre royaume, en quelle qualité qu'il soit, ait des gardes ».

Les Rois en étaient avertis et n’octroyaient pas cette faveur facilement.

Henri III l’avait fait savoir par des ordonnances qui interdisait à quiconque « de quelque qualité et condition qu'il pût être, quelque dignité, titre d'office et charge qu'il eût dans le royaume », d'entretenir « des gens de guerre soit de cheval, soit de pied... sous quelque prétexte qu'on pût prendre ».

Mais il y avait des exceptions.

Ainsi, sous Louis XIII, la Reine mère Marie de Médicis avait des gardes du corps, tout comme le frère du roi, Gaston, Duc d’Orléans, ainsi que le connétable, chef suprême des Armées.

« Enfin, le Roi avait même dû tolérer que les gouverneurs des provinces circulant « dans l'étendue de leurs charges » pour assurer l'ordre, se fissent accompagnés de cavaliers armés; dans certains cas même, il le leur avait prescrit, par précaution. 

(...) Mais sauf ces exceptions, qui avaient leur raison d'être, la défense générale était maintenue et appliquée. Nul dans l'Etat, fut-il ministre et ministre prépondérant, n'avait le droit de s'entourer d'une garde particulière quelconque. »
Louis Batiffol

En 1624, le Cardinal de Richelieu entre au Conseil du Roi, en qualité de simple conseiller. Il est alors assez antipathique à Louis XIII qui voit son arrivée d’un mauvais œil et ne le tolère que par nécessité.
Richelieu ne possède bien évidemment aucune garde personnelle, d’autant plus qu’il ne souhaite pas commettre d’imprudence envers le Roi.

« Loin de s'afficher par d'inquiétantes prétentions, il allait, à force de respect, de circonspection, de dévouement, tâcher de faire revenir le souverain de ses préventions contre lui, et, lentement, au moyen du règlement heureux de difficiles questions politiques, modifier à la longue les dispositions hostiles de Louis XIII en lui faisant apprécier la valeur de ses services, au point que des intrigues de cour désordonnées ayant suscité contre le Cardinal des inimitiés ardentes, Louis XIII, qui, maintenant, estimait son ministre de jour en jour davantage, allait le soutenir, le défendre ; puis, les oppositions grandissant pour aboutir à des menaces de troubles alarmantes, le Roi qui, décidément, tenait à Richelieu et même l'aimait, allait résolument prendre fait et cause pour lui.

Ce sont ces circonstances et des incidents particulièrement graves de l'année 1626 qui vont amener Louis XIII à donner spontanément des gardes au Cardinal. » Louis Batifol

En fait, Richelieu se trouve être victime d’une conspiration générale à la suite de l’annonce du mariage de Gaston, duc d’Orléans avec Mademoiselle de Montpensier et des menaces de mort planent sur sa personne.

Louis XIII est furieux et décide de protéger Richelieu en lui octroyant une Garde personnelle… en le forçant même à accepter cette Garde.

Il semble au départ, que Richelieu ne soit pas très enthousiasmé par cette idée comme il l’écrit à Bouthillier, secrétaire des commandements de Marie de Médicis :

Je vous avoue que c'est une fâcheuse chose d'être contraint de se faire garder, étant certain que dès l'heure qu'on est réduit à ce point, on peut dire adieu à la liberté. Cependant... plus ils chercheront ma vie, plus chercherai-je à servir le Roi.

Le 27 septembre 1626, Louis XIII signe un brevet par lequel « il ordonne a monseigneur le Cardinal de tenir toujours près de sa personne cinquante hommes à cheval avec les chefs pour les commander, par lui choisis » ce qui est l'autorisation de principe, pour Richelieu, d'avoir des gardes.

D’après le Mercure français, les cavaliers en question auraient été des « mousquetons, par conséquent des mousquetaires à cheval, mais cette dénomination n'a pas été maintenue. »

Cette Garde, aux yeux du Roi, comme à ceux de quelques observateurs de l’époque, semble fort nécessaire car Richelieu ne compte pas que des amis.

Et le Prince de Condé disait ainsi  à Guron en 1627 :

Le Cardinal a plus de raison de se garder que jamais... Le Roi sait bien qu'il y a entreprise sur sa vie, qu'elle y est encore et qu'il doit se garder de poison et prendre garde à tout ce qui entre dans sa maison.

Et Richelieu écrira à ce propos en 1629 :

J'ai entretenu trente gardes à mes dépens depuis deux ans pour me garantir de la haine de beaucoup d'ennemis que la seule considération de l'Etat a mis sur les bras.

En 1631, Louis XIII décide d’ailleurs d’augmenter l’effectif des troupes du Cardinal et de lui accorder le privilège d’avoir une Garde réglée sur le modèle de sa propre Garde Royale.

Comme le dit Saint-Simon :

« Le Cardinal de Richelieu a eu la même maison militaire que nos rois : des gardes, des gens d'armes, des chevau-légers et, le dernier, des mousquetaires;  de plus, tous commandés par des seigneurs et par des gens de qualité sous eux. »
« Par acte en effet d'abord du 1er août 1631, Louis XIII donne « commission au Cardinal de lever une compagnie de chevau-légers » de cent vingt maîtres pour sa garde personnelle. Cette compagnie va bientôt perdre son nom de chevau-légers et devenir simplement « la garde à cheval de Son Eminence ».
Le 30 août suivant, le Roi donne à Richelieu « commission pour la levée d'une compagnie de cent hommes d'armes ». Ces cent hommes d'armes s'appelleront « gens d'armes ». Mais cette compagnie ne sera guère employée qu'aux armées...
(...) Puis le Roi attend trois ans et, le 4 mai 1634, il signe une « commission donnée à monseigneur le Cardinal pour la levée d'une compagnie d'hommes de guerre à pied pour résider auprès de sa personne et servir à sa garde ordinaire ».
Archives Affaires Etrangères Fr. 823, fol.147 r° et « Rolle des cavaliers de la compagnie de Monseigneur », ibid., fol. 281 r°

En fait, tout comme la Compagnie des Mousquetaires du Roi fait du mot « Mousquetaire » son terme générique, cette compagnie choisit le sien qui sera celui de « Garde ».

Un contemporain parlant de cette Garde, la décrit ainsi :

Il me souvient que la première fois que Son Eminence marcha en équipage dans Paris, je la vis passer dans la rue des Lombards : on admirait la belle tenue de ces soldats  qui étaient les plus qualifiés et les plus braves du royaume.

« D'après les règlements, il faut qu'il y ait quotidiennement soixante gardes de service en permanence dans la résidence du Cardinal. Ces soixante gardes seront « nourris et auront leurs tables servies par des gens à ce préposés dans leurs salles d'armes ». la faction fait par chaque garde dure une heure. Le factionnaire doit se tenir droit, « le pistolet bandé, amorcé et le chien abattu caché sous la casaque écarlate ». Les mousquets restent au râtelier de la salle des gardes où on peut aller les prendre en cas d'alerte. Les gardes ne laissent entrer personne sans ordre exprès.(...) Si le Cardinal sort, ils montent à cheval, escortent le carrosse de son Eminence qu'ils entourent. Mais si on va au Louvre, ils ne doivent pas pénétrer dans la cour du palais. Là où le Roi se trouve, il ne peut y avoir que ses propres gardes. Les pamphlétaires n'ont pas manqué de s'élever contre le spectacle, à leurs yeux scandaleux, qu'offrait le ministre circulant dans les rues de Paris « pressé de capitaines, disent-ils, lieutenants, enseignes et gardes, ayant tous des pistolets dans leurs poches et des dagues dans leurs chausses. »

A l'hôtel même du Cardinal, le capitaine des gardes ne doit pas quitter en principe son Eminence. Il a sa chambre dans chaque résidence du ministre. »

En fait, à côté de ce décorum, les Gardes de Richelieu ont aussi d’autres fonctions et servent à remplir les missions délicates de Richelieu. Ils sont ainsi souvent envoyés en campagne, afin de vérifier les opérations sur le terrain et d’en faire un rapport au Cardinal. Ce type « d’espionnage » n’était d’ailleurs pas pour plaire aux armées.

Richelieu envoie aussi ses Gardes au combat, lorsque cela s’avère nécessaire. Si la réputation des Mousquetaires du Roi, dans ce domaine, leur est supérieure, elle n’en reste pas moins une troupe imposante et bien entraînée.

« Il existe pour 1636 un tableau de l'ensemble des troupes, destinées aux opérations militaires de cette année-là, mises sous le nom de Richelieu. Avec sa compagnie des gardes à cheval, sa compagnie des mousquetaires et celle des gendarmes,  le Cardinal entretient des troupes qui montent au total à près de 3000 hommes. »

Le fait même que l’armée de Richelieu était conséquente, ne manquait pas d’effrayer et de soulever des plaintes et contestations. L’importance de ses Gardes mettait en défi le Roi lui-même et pour de nombreux pamphlétaires, le Cardinal « avait autant de sortes de gardes que le Roi. Il allait dans Paris avec cet équipage mieux servi que n'était Sa Majesté ».

« Le peuple s'y trompait souvent et criait en le voyant passer « Vive le Roi » .

N'était-ce pas là afficher un mépris du monde extraordinaire ?

Ne semblait-il pas que « la personne du Roi fût abandonnée », puisque le ministre « prenait toutes les marques de la royauté » et souffrait même que « plus de cent gentilshommes, payés aux dépens du Roi, marchassent devant lui  »?

Mieux même, ne pouvait-on dire que Richelieu, « se faisant environner de Gardes non comme un roi mais comme un tyran » témoignait ainsi de la crainte qu'il avait des "effets du désespoir dans lequel il jetait tous les hommes  ?

Et on attaquait ce qu'on appelait « la tyrannie » du Cardinal ! Elle était un véritable danger pour l'Etat !
On disait  à Richelieu : « Vous avez tellement irrité les particuliers et le public qu'il vous semble que tous les hommes qui vous approchent soient des assassins, tous leurs doigts des poignards et tous les fers de leurs aiguillettes des stylets ! »

Louis XIII ne se laissait pas impressionné par tous ces quolibets car il tenait à la sécurité de son ministre. Jusqu’à la mort de Richelieu, puis de Louis XIII, la Compagnie des Mousquetaires du Roi et celle des Gardes cohabitèrent au sein de l’Etat, malgré tous les bavardages qu’elles ne manquaient pas de provoquer.

Les Mousquetaires du Roi et les Gardes du Cardinal



La co-existence de ces deux compagnies d’élite au sein de l’Etat, l’une dévolue au Roi et l’autre à son ministre, ne s’est pas faite sans heurt et c’est bien la raison pour laquelle Alexandre Dumas a pu user de leurs rivalités comme un des éléments essentiels de son roman.

Il faut encore rappeler que les « Mousquetaires du Roi », tous à cheval et gentilshommes les plus qualifiés, n'avaient aucune raison de rivaliser - et ne se seraient certainement pas commis - avec les mousquetaires du Cardinal, modestes fantassins recrutés dans la plèbe errante des militaires de profession du temps.

Comme on peut le voir dans la composition de la compagnie des Gardes de Richelieu, celle-ci comprenait :

• Une compagnie de chevau-légers de 120 hommes,
• Une compagnie de 100 hommes d'armes dits "gens d'armes" qu'on écrit aussi "gendarmes",
• Une de 100 mousquetaires à pied, portée ensuite, semble-t-il, occasionnellement à 200, soit 420 hommes en tout.
Richelieu fait d’ailleurs passer sa garde à cheval avant ses mousquetaires et ne donne même le nom de "Gardes" qu'à ses seuls cavaliers.

De l’autre côté, celui du Roi, on présente la Compagnie dans un Etat de la France dressé en 1642 comme :

"La compagnie des mousquetons du Roi ; Elle a pour capitaine le Roi, et pour lieutenant M. de Tréville, et pour soldats des enfants des meilleures familles de France, portant une casaque bleue et distinguée par des croix d'argent. Ils sont 150, qui suivent le Roy partout, même quand il va à la chasse."

La rivalité a été entre les Mousquetaires cavaliers du Roi, tous gentilshommes, et les Gardes à cheval de Richelieu, également tous gentilshommes.

Le recrutement dans ces deux corps d’élite différait.

Richelieu veut qu'on lui soit présenté par quelqu'un de connu et de sûr, qu'on ait plus de vingt-cinq ans et autant que possible qu'on ait servi trois ans aux armées, condition qui n'est pas exigée s'il s'agit d'un gentilhomme de très bonne maison.

Pour sa compagnie de ses gendarmes, le Cardinal paraît ne vouloir accepter comme officiers que des Bretons.

« Le recrutement des mousquetaires devenait de plus en plus régional, voire familial : Montalan, Troisvilles engageaient tous ceux qui, entre Orthez, Pau, Tarbes et Auch, s’étaient illustrés dans un duel spectaculaire. »

L’autre immense différence entre les deux compagnies était la solde.

Richelieu entretient ses Gardes à ses frais et ne semble pas compter à la dépense. En face, les Mousquetaires du Roi ne sont pas aussi bien traités.

« Dans la maison de Richelieu, les soldes sont réglées très exactement. Comme il est loin d'en être de même dans le reste de l'armée du Roi, par suite des perpétuelles difficultés d'argent de l'Etat, et que l'on y attend souvent longtemps pour être payé, voire même parfois, ne reçoit-on rien du tout, les pamphlétaires ennemis de Richelieu ont eu beau jeu pour attaquer à cet égard le Cardinal. » Louis Batifol

Richelieu est très exigeant envers la tenue de ses Gardes qu’ils souhaitent même ériger en modèle pour les autres corps de l’armée.

Comme les Mousquetaires du Roi, les Gardes du Cardinal ont un uniforme.

« L'habit ordinaire que les gens portent sous Louis XIII se compose essentiellement d'un pourpoint, sorte de veste ajustée et fermée allant du cou à la ceinture, au-dessous de laquelle elle peut se prolonger par des basques plus ou moins longues; puis de hauts-de-chausses, culottes amples, descendant jusques au-dessous des genoux. Il faut ajouter les bottes et, sur la tête, un feutre ou castor à larges bords orné d'un panache.

A la ville, les gens de bon ton mettent par-dessus leur habit un manteau, vêtement sans manches, tenu sur les épaules par des agrafes et descendant aux genoux. L'hiver, ce manteau peut être doublé de fourrures avec passepoils débordants; il s'ajuste avec des manches à revers fourrés et il s'appelle alors "la hongreline".

Les gardes à cheval du Cardinal en tenue n'ont pas le manteau à proprement dit, mais un vêtement analogue, uniforme, qui les fait tout de suite reconnaître de loin et qu'on appelle "la casaque". C'est une sorte de manteau sans manches, court, c'est-à-dire ne descendant pas trop au-dessous de la ceinture et formé de quatre pièces d'étoffe réunies au cou par la partie supérieure. La première de ces pièces couvre le devant de la poitrine, la seconde la surface du dos, les deux dernières tombent des épaules et s'évasent en trapèze. Ces quatre pièces sont flottantes et séparées, mais peuvent se réunir en se boutonnant les unes aux autres, constituant ainsi une manière de vaste pèlerine fermée.

Ce qui fait reconnaître de loin les Gardes de Richelieu, c'est que leur casaque est rouge et que, bordée de galon blanc, elle porte sur chacune des quatre pièces, au milieu, une croix grecque également en galon blanc très voyante. On devine, avec le grand feutre à panache blanc et les bottes, l'aspect brillant que peut présenter le défilé de la compagnie à cheval de Son Eminence.

Les pamphlétaires ne manqueront pas de se moquer d'ailleurs, dans leurs écrits contre le Cardinal, de cette casaque de ses gardes à laquelle ils donneront, par dérision, le nom d'un vêtement du même genre espagnol de cette époque qu'on appelle la "roupille".

Le rouge, c'est-à-dire "la couleur du feu",  "l'écarlate", "l'incarnat" est par ailleurs la couleur de la livrée de Richelieu. Ses pages ont un pourpoint et des hauts-de-chausse rouges.» Louis Batifol

En revanche, les Mousquetaires du Roi devaient s’acheter leur uniforme avec leur solde qui était bien plus maigre que celle des Gardes.

Enfin, les Mousquetaires reprochent aux Gardes d’être davantage des soldats de représentation ou d’antichambre que de champs de bataille, alors qu’eux se retrouvent sur tous les fronts, aux combats à côté du Roi.

" Les Capitaines et les soldats du Roi (qui font durement la guerre dans les tranchées) dit l'un d'eux, sont au désespoir de se voir réduits à l'aumône, lorsque les Gardes (du cardinal) qui sont toujours à l'ombre d'une salle, reçoivent de bonnes monstres (la solde) et bien réglées, pour être en faction à la porte d'une chambre"  (dans la très humble, très véritable et très importante Remontrance au Roy, 1631, dans M. de Morgues, Diverses pièces pour la défense de la Reine mère, 1636)

La rivalité entre les deux compagnies les poussait donc à se provoquer facilement et en venir à des duels, fréquents bien qu’interdits, pour lesquels ni le Roi, ni le Cardinal, n’aient cherché à intervenir, trop heureux de voir leurs corps d’élite s’affronter et donc se mesurer.

« La Compagnie des Mousquetaires était très belle et le Cardinal de Richelieu avait une Compagnie de Gardes composée aussi de très braves gens qu’il avait choisis lui-même.

Fiers de la puissance de ce Ministre, ils se croyaient en parité avec les Mousquetaires, ce qui occasionnait de fréquents combats entre ces deux corps.

Louis XIII, qui se dissimulait cette audace, se contenter seulement de marquer sa joie lorsque, dans ces combats, les Gardes du Cardinal avaient eu du désavantage, et ce Ministre impérieux s’applaudissait à son tour lorsqu’il apprenait que les Mousquetaires avaient succombé. Il fit plusieurs tentatives pour engager le Roi à casser cette Compagnie, mais elles ne lui réussirent pas. »

« Les deux troupes faisaient assaut de réputation entre elles et ne cessaient d’en découdre pour prouver qu’elles se piquaient à juste titre d’avoir des gens dont le courage l’emportait sur tous les autres. Si les Gardes venaient à croiser des Mousquetaires au hasard d’une flânerie, ils convenaient aussitôt du lieu de la rencontre et se mettaient, au besoin, en quête de compagnons disponibles afin que chacun ait un partenaire ! Chaque jour le Cardinal vantait la bravoure de ses Gardes et le Roi essayait de les rabaisser en invoquant les exploits de ses Gascons. »

Ces escarmouches entrent les deux troupes sont également nourries par la haine que se portent les deux hommes qui les dirigent au plus près. Richelieu d’un côté et Tréville de l’autre qui, en tant que Lieutenant Capitaine, est le commandant des Mousquetaires. Le caractère indomptable et impétueux de Tréville, sa bravoure et son dévouement sans borne au Roi, en font un personnage difficile à asservir. De plus, ses Mousquetaires lui sont fidèles et, malgré la réputation des Gardes, plus renommés que ces derniers. Et Tréville est tolérant envers ses jeunes soldats qu’ils ne réprimandent pas malgré leurs fréquentes incartades.

Dissolution de la Compagnie des Mousquetaires

A la mort de Louis XIII, qui survient quelques mois après celle de Richelieu, s’instaure la Régence avec Anne d’Autriche secondée par le Cardinal Mazarin.

Si Richelieu n’a jamais aimé les Mousquetaires du Roi et en particulier la personne de Tréville, on peut dire que Mazarin porte l’inimitié envers ce dernier à son paroxysme.

Rapidement, Mazarin obtient un pouvoir immense, presque aussi absolu que son prédécesseur et l’indépendance de Tréville l’irrite. D’autant plus que ce dernier affiche clairement sa position qui consiste à continuer à servir le Roi, soit donc la Couronne seule, et toujours sans concession aucune.
Par ailleurs, Mazarin avait des projets très personnels concernant la Compagnie des Mousquetaires à la tête de laquelle il souhaitait mettre son neveu Mancini.

Une guerre sourde commence entre les deux hommes.

Mazarin essaie la rouerie et la flatterie, mais c’est un terrain sur lequel ne s’enlise pas Tréville. Il tente ensuite de l’excéder à l’extrême, notamment en l’obligeant à n’engager aucun mousquetaire sans qu’il n’ait été, au préalable, présenté au Roi (un enfant), ou en écartant systématiquement tous ceux que Tréville recommandait.
Au cours de leur querelle, Tréville résiste et se bat pour protéger ses acquis, s’en remet parfois même à l’arbitrage de la Reine pour lui rappeler ses nombreux et loyaux services et l’amitié qui l’unissait au feu Roi Louis XIII.

Plus que tout, Tréville n’avait aucune intention de démissionner de sa charge de Capitaine-Lieutenant de la Compagnie.
« M. De Tréville qui, pour avoir perdu le feu Roi qui avait été son soutien contre les assauts que lui avaient livrés le Cardinal Richelieu, n’avait rien rabattu de sa fierté, crut qu’après avoir résisté à la puissance d’un homme comme celui-là, il pourrait bien résister encore à celle de celui-ci. Ainsi, n’étant pas plus complaisant envers l’un qu’il l’avait été envers l’autre, il tint ferme contre lui, sans vouloir écouter toutes ses promesses. Il répondit à ceux qui lui en parlèrent de sa part, que cette charge lui ayant été donnée comme le prix de ses bonnes actions, il voulait la conserver tout autant qu’il aurait un moment de vie. Il était bien aise que Sa Majesté l’en trouvant revêtu à sa majorité, il se pût informer de c eux qui approcheraient alors le plus près de sa personne, des raisons qui avaient pu obliger le feu Roi son père en l’en revêtir plutôt qu’un autre. » 
Mazarin tente encore la médisance, mais se heurte à la fidélité des Mousquetaires envers leur Commandant qu’ils apprécient et respectent.

« Cette situation sans issue ne pouvait  se prolonger très longtemps. La compagnie justifiait par son excellente tenue toues les convoitises du Cardinal ; elle gardait une discipline très contraignante. Habitués à vivre ensemble, les Mousquetaires s’estimaient grandement. Pas un d’entre eux qui ne soit un brave : on était particulièrement exigeant sur le courage individuel. L’esprit de corps était très puissant parce que fondé sur une amitié et une confiance réciproques entre tous les hommes de chaque détachement. La compagnie était devenue la meilleure école pour apprendre à la fois le métier de soldat et les devoirs de l’homme de cour. » 

Mazarin était tellement obnubilé par son conflit avec Tréville qu’il ne voyait, dans la Compagnie, qu’un « dangereux foyer de sédition ». Devant son incapacité à faire fléchir Tréville et obtenir gain de cause, il choisit la solution radicale qui consiste à casser définitivement la Compagnie.

En 1646, par ordonnance du Roi, il obtient ainsi la cassation de la Compagnie des Mousquetaires. Pour que cette mesure soit acceptée publiquement, Mazarin prétexta le coût trop élevée de la dite Compagnie qui occasionnait ainsi à l’Etat, des dépenses non nécessaires.

Les Mousquetaires furent alors dispersés dans les autres corps militaires existants.

La Compagnie des Mousquetaires reconstituée par Louis XIV

L’absence de ce corps d’élite se fit malheureusement ressentir pendant le terrible épisode de la Fronde. 

« La superbe et vaillante compagnie des « mousquetaires gris » manqua à Turenne dans le combat sanglant qu’il livra au Prince de Condé sous les murs de Paris. On a vu que gendarmes et chevau-légers tentèrent (avec succès) d’y suppléer en chargeant à fond les frondeurs le 2 juillet 1652. Ils y perdirent beaucoup de monde et nombre d’officiers de valeur. » 
Le Roi, Louis XIV, est couronné en 1654. Dès 1656, il cherche à augmenter sa Garde et Mazarin profite de l’occasion pour suggérer le rétablissement des Mousquetaires. 

En 1657, Louis XIV décide donc officiellement de rétablir la Compagnie des Mousquetaires.
 
« Si on prend l’Etat général des officiers de la Maison du Roi pour l’année 1657, on voit que les mousquetaires à cheval de la garde ordinaire du roi sont composés de 150 hommes de guerre, ayant pour capitaine le roi, pour lieutenant-capitaine M. de Mancini, avec en outre un sous-lieutenant, un cornette, deux maréchaux des logis, un fourrier, un trompette et un maréchal ferrant. Comme la première Compagnie, ils ne sont obligés d’escorter le roi que quand le roi sort ; alors, ils marchent à cheval, deux à deux, devant tous les autres gardes. La solde des mousquetaires est de 35 sous par jour. Quant à leurs privilèges, exemptions et prérogatives, ils sont les mêmes que ceux dont jouissent les autres officiers domestiques et commensaux du roi. » 

Des vétérans reprennent leur place dans cette Compagnie reconstituée et il semblerait que Mazarin l’ait encouragé pour pallier l’inexpérience de son neveu. 

Le vieux système de logement chez l’habitant qui avait été d’usage est alors supprimé et on attribue aux mousquetaires leur ancien quartier – le faubourg Saint-Germain - dans lequel des logements leur sont proposés, chacun composé d’une chambre à deux lits (le mousquetaire et son valet) et pourvu d’une écurie pour deux chevaux.

« Dès lors, le peuple de Paris et les étrangers se firent fête d’aller voir parader ou manœuvrer, à Vincennes, à Neuilly, ces hommes d’élite, vêtus magnifiquement de casaques d’azur aux croix d’argent. On choisissait les jours où le roi les commandait lui-même. »

Voici que l’on pouvait lire dans le Journal d'un voyage à Paris en 1657-1658, (publié par M. Faugère en 1862 ) à propos de la belle tenue des mousquetaires :

"Certainement, ce sont des hommes bien choisis et qui sont couverts magnifiquement, car chacun a une casaque bleue avec de grandes croix d'argent à flammes d'or qui finissent en fleur de lis. Sur toute la casaque il y a un grand galon d'argent. On n'y reçoit personne qu'il ne soit gentilhomme et qu'il soit brave à outrance. M. Mancini (le duc de Nevers) en est capitaine. Ils ont deux tambours et deux fifres… ". L'auteur de ce journal ajoute plus loin, à la date du 20 novembre 1657: "Nous apprîmes de M. Lemonon que le Roy avait commandé à ses Mousquetaires de se pourvoir de chevaux gris, voulant que la compagnie fut montée, et qu'ils eussent la queue longue."
Mais les mousquetaires ne se contentent pas de parader et cette même année 1657 ils suivent le roi à Sedan pour assister au siège de Stenay formé par le marquis de Fabert. Le Duc de Nevers est fort heureusement secondé par un vieux soldat, le sous-lieutenant Isaac de Baas, capable de suppléer au peu de compétence du neveu de Mazarin et le grade d’enseigne est occupé par un compagnon de jeu du roi, Joseph-Henri, fils de Monsieur de Tréville.

Après s’être distingués à la prise du fort, les mousquetaires continuent les combats et vont acquérir leur glorieuse réputation, comme le relate Puységur, avec forces détails :

« Cette même année 1657, la guerre continuant avec l’Espagne, le Maréchal de Turenne conquit sur cette Couronne plusieurs places maritimes de Flandre et entre autres la ville de Mardik, qui se rendit le 3 octobre. Afin de s’assurer la conservation de cette place qui était absolument liée à ses projets pour la campagne suivante, ce Général y mit une nombreuse garnison, jointe à un Corps considérable de troupes anglaises. Mais Louis XIV, craignant que les Espagnols ne fissent toutes sortes d’efforts pour remettre cette ville sous leur domination, joignit aux précautions qu’on avait prises pour la sûreté un détachement de ses Mousquetaires qu’il y envoya sous la conduite de Monsieur de Nevers. 

L’année suivante, le Maréchal de Turenne, qui avait résolu d’ouvrir la campagne par le siège de Dunkerque, fit investir cette place dans le mois de mai, et y arriva le 25. Alors, la ville de Mardik, n’ayant plus rien à redouter de la part des Espagnols, le détachement des Mousquetaires en sortit et rejoignit le Corps qui était auprès du Roi, aux environs de Calais. Sa Majesté, voulant qu’ils ne perdissent aucune occasion d’acquérir de la gloire, en confit  un détachement à Lauroïde, l’un des Maréchaux des Logis, avec ordre de se rendre au camp du Maréchal de Turenne.

Le Prince de Condé qui, par mécontentement contre le Cardinal Mazarin, s’était retiré chez les Espagnols, commandait alors leur armée sous Dom Juan d’Autriche. Il résolut de secourir Dunkerque et vint camper le 13 juin dans les dunes à trois quart de lieue des lignes de M. de Turenne. Ce Général, ayant été reconnaître la position des ennemis, prit la résolution de leur livrer bataille le lendemain. Le détachement des Mousquetaires arriva un moment avant que l’armée française se mit en marche. Lauroïde, qui les commandait, fit mettre pied à terre à sa troupe, et la rangea en bataille à la première ligne. Un officier vint lui dire que ce poste ne lui était pas dû. « Je vais en prendre un, répondit Lauroïde, que vous ne m’envierez pas. » 

Dans l’instant même il marche, dépasse les Régiments de Bretagne, de Montgommery et les Dragons du Roi, postés sur la droite des dunes près des Gardes Françaises, et se porte en avant de la première ligne. Le Prince de Condé remarqua cette hardiesse et en fut étonné. La position de ce détachement des Mousquetaires contribua beaucoup au gain de la bataille.

Le Régiment de Guitaut, Cavalerie, s’étant avancé pour charger les Gardes Françaises, les Mousquetaires font feu si à-propos qu’ils le mettent en désordre. Il est chargé à son tour par le Régiment Royal et celui de Grammont qui achèvent de le rompre et de le disperser.

Le Prince de Condé, qui voit ce commencement de déroute,marche à la tête des nouveaux escadrons et attaque le Régiment Royal et celui de Grammont. Forcés de céder à la supériorité du nombre, ils firent leur retraite sous le feu des Gardes Françaises qui les sauvèrent d’une entière défaite en s’ouvrant pour les laisser passer.

Le feu des Mousquetaires contrariant toujours le Prince de Condé dans son plan d’attaque, il tenta de les déposter et les fit charger vivement, et à plusieurs reprises par des forces supérieures ; mais ils se maintinrent, malgré tous ses efforts, dans le poste qu’ils avaient choisi et ne cessèrent d’y servir utilement jusqu’à la fin de la bataille.

Louis XIV n’a jamais oublié cette action brillante et se plaisait souvent à la raconter. » 

C’est à cette époque que Charles de Batz de Castelmore, dit d’Artagnan, fait son entrée dans la Compagnie des Mousquetaires en qualité de sous-lieutenant, en remplacement de Baas qui quitte sa charge pour des raisons de santé.
 
« Lui donnant deux beaux chevaux gris pommelés de son écurie, Mazarin demande à d’Artagnan, pour toute récompense, de porter son neveu à prendre goût au métier des armes. Sur ce point, d’Artagnan se garde bien d’être trop zélé. Nommé lieutenant, il trouve un agrément infini dans le mépris que Mancini semble avoir pour sa charge. Le Roi prend un goût tout particulier pour sa nouvelle compagnie et reçoit très fréquemment d’Artagnan pour lui donner ses ordres.

Seule la considération qu’il a pour l’oncle lui fait supporter la présence du neveu à la tête de la Compagnie. Louis XIV veut en effet avoir une troupe incomparable à son entière disposition. » Courtilz de Sandras. 

Dans cette nouvelle Compagnie, le Roi choisit désormais chaque Mousquetaire. Le règlement est strict et la discipline impitoyable. 

« Le Roi accorde à un Mousquetaire un emploi d’officier ou la possibilité d’acheter une compagnie, voire un régiment, lorsque le rapport du capitaine-lieutenant ne contient que des éloges. Ce fait contribue à entretenir une émulation permanente au sein de la Compagnie. »

Les « Mousquetaires gris » et les « Mousquetaires noirs »

Entre 1659 et 1660, les transactions qui sont poursuivies par Anne d’Autriche et Mazarin pour conclure le Traité des Pyrénées qui scelle la paix avec l’Espagne, aboutissent au mariage entre Louis XIV et l’infante Marie-Thérèse. 

Durant ces deux années d’Artagnan et ses mousquetaires escortent le Roi dans son périple à travers la France et jusqu’à St Jean de Luz où le mariage est célébré. 

Le retour à Paris et surtout l’entrée triomphale dans la Capitale est marquée par l’escorte en grande pompe que forme la Compagnie des Mousquetaires autour du Roi. Cependant une deuxième compagnie vient prendre place à côté de la première.

La compagnie de d’Artagnan a même laissé la préséance à cette compagnie récemment donnée au Roi par Mazarin. Elle se trouve sous le commandement de Marsac et du Marquis de Montgaillard, mais Mazarin n’a pas osé lui donner des chevaux de la même couleur que celle de la première compagnie. C’est sa première apparition officielle. 

Les chroniqueurs n’ont pas manqué de relater l’événement qui était grandiose. 

« Sur les croupes des chevaux (de la nouvelle compagnie) s’étalaient les longues casaques bleues à galon d’argent, ornées aux manches et aux quatre coins du chiffre du Roi en broderie.Ensuite chevauchaient les Anciens ou Grands Mousquetaires, vêtus de neuf pour la circonstance. Ils étaient divisés en quatre brigades, distinguées chacune par un panache de couleur différente ; blanc, blanc-noir-jaune, blanc et bleu, blanc et vert.

Les grandes croix brodées sur les manches et au milieu du dos tranchaient sur l’azur des casaques. En tête « le Sieur d’Artagnan, tout à fait bien ajusté, et sur un cheval de prix », ressemblait, tant il était couvert de dentelles, de rubans et de longues plumes, à un « autel de confrérie ».
Le Cardinal Mazarin meurt en 1661 et Louis XIV prend en main son destin de Roi.

Il se soucie particulièrement des armées qu’il va réorganiser avec l’aide de Le Thellier, puis de son fils, Louvois.

« Il (Louis XIV) réforma, pour diminuer les dépenses, un grand nombre de troupes, mais, voulant en conserver les officiers, il en mit une partie dans ses Compagnies de Gendarmes et de Chevaux-Légers, et dans les Mousquetaires, et donna des pensions à tous les autres. C’est ainsi qu’en se faisant la plus belle garde qu’eut aucun autre souverain, il se réservait, en cas de besoin, un grand nombre de sujets en état de former en peu de temps de bons soldats. Ce Prince était persuadé, avec raison, que d’anciens officiers sont infiniment plus propres que de nouveaux à discipliner promptement ses troupes. »

La France jouissant alors d’une paix entière, la deuxième Compagnie des Mousquetaires demeure à pied jusqu’en 1663. A partir de cette date, Louis XIV consacre son attention sur cette compagnie qu’il souhaite restructurer et perfectionner. La première Compagnie lui sert davantage dans les affaires politiques. Cependant, l’une comme l’autre sont extrêmement prestigieuses.

« Outre une incomparable Ecole de Cavalerie, les Compagnies des Mousquetaires ont la réputation d’être une pépinière pour le corps des officiers : leurs plus brillants sujets passent rapidement dans les meilleurs régiments avec le grade de lieutenant. On cite les noms de jeunes chefs à peine âgés de vingt ans, issus des Mousquetaires où ils ont passé leurs deux ou trois années d’apprentissage, qui peuvent escompter une carrière fulgurante. »

En 1663 donc, Louis XIV qui vient de renouveler sa deuxième Compagnie, l’envoie en Lorraine avec ses Grands Mousquetaires et il semblerait qu’elle n’est pas à la hauteur des espérances du Roi. Aussi, Monsieur de Marsac, qui se croit déshonoré, vend sa charge au frère de Colbert, le Comte de Maulévrier. 

Louis XIV casse tous les officiers et disperse les hommes.

Un an plus tard, il rétablit la Compagnie qu’il met sur un pied d’égalité avec les Grands Mousquetaires, s’en fait Capitaine titulaire, souhaite abolir les différences avec l’autre compagnie mais choisit tout de même un signe distinctif entre elles.

Cette deuxième compagnie sera dotée de chevaux à la robe noire alors que la première Compagnie a des chevaux à la robe grise. Dès lors ces compagnies seront désignés du nom de la couleur des chevaux et on parlera des « Mousquetaires gris » et des « Mousquetaires noirs ».

Les chevaux gris ou blancs de la 1ère compagnie et ceux de couleur noire de la 2ème sont à l'origine des noms de " mousquetaires gris " et de " mousquetaires noirs "qu'on leur donnait parfois


L’abolition des différences n‘est pourtant pas totale car les officiers de la première compagnie ont la préséance « et reçoivent le privilège de commander à grade égal ceux de la deuxième compagnie. »
« L’installation du Comte de Maulévrier dans son grade de capitaine-lieutenant se fait avec une grande solennité. Les six cents Mousquetaires du Roi rangés en bataille dans la cour du vieux Louvre attendent, immobiles, le Roi et ses courtisans. Les mousquetaires noirs étrennent de nouvelles casaques pour la circonstance et offrent un alignement impeccable. Chaque homme tient son mousquet appuyé sur la cuisse droite. De l’autre main gantée de buffle, il retient son cheval frémissant. Non sans peine d’ailleurs car les mèches des mousquets, fixées à la têtière entre les deux oreilles, agacent les montures. Face aux compagnies sont rangés vingt musiciens au port rigide, habillés de longs manteaux bleu azur. Il y a là douze tambours et huit hautbois. C’est la première fois qu’ils vont jouer sans fifres ni trompettes, comme le Roi l’a ordonné, la marche déjà célèbre des Grands Mousquetaires. (…) L’air sévère, Louis XIV passe en revue les escadrons, puis va se placer au centre de la cour. Sur son ordre, Maulévrier prend la tête de la première compagnie et défile suivi de tous les Mousquetaires groupés en une seule masse. Puis il commande seul les évolutions savantes des brigades ? Les longues files de cavaliers s’entrecroisent et virevoltent sans fin en un éblouissant carrousel. » 

Les mousquetaires avaient le drapeau, les tambours  et les fifres quand ils étaient à pied et les étendards et les trompettes pour le service à cheval


Cette deuxième Compagnie devient vite la coqueluche de Paris et de la Cour. Lulli lui compose même une Marche. Maulévrier, assez imbu de sa personne et suffisamment riche, tente de rivaliser avec la première compagnie, soit celle commandée par d’Artagnan, en dotant ses Mousquetaires de tenues fort coûteuses et en jouant la surenchère.
Cette rivalité finit par agacer Colbert, particulièrement excédé par l’arrogance de son frère et les dépenses inutiles d’un corps militaire devenu beaucoup trop fastueux.

Plus mystérieux est le surnom de " grands mousquetaires " décerné aux membres de la 1ère compagnie : il est probable qu'il marquait la différence d'origine de cette troupe par rapport à la seconde et reflétait la vieille rivalité qui opposait les gardes du roi à ceux du cardinal. Un autre nom se rencontre encore dans les textes de l'époque: celui, commun aux deux compagnies, de "maison rouge du roi ". Il évoque tout simplement l'habillement de drap écarlate des mousquetaires, l'habit et la culotte dont ils devaient se fournir à leurs frais, alors qu'ils recevaient du roi la casaque et la soubreveste caractéristiques de leur corps.



« Quand un mousquetaire à la basse paye - dit-il - aura consommé la solde de 360 livres en ornements inutiles, de quoi veut-on qu'il vive cette année ? Il faut que par douceur ou par force, il vive aux dépens de son hôte ».
La réalité de la guerre ramena les pieds sur terre aux uns comme aux autres. 

« L’Evêque de Munster, qui avait déclaré la guerre aux Hollandais, était entré dans leur pays avec une armée de vingt mille hommes, et y faisait de grands progrès. Cette République, occupée alors à se soutenir contre les Anglais, sollicita Louis XIV de lui envoyer des secours. Ce Monarque fit partir six mille hommes sous le Commandement de Monsieur de Pradel et y joignit un détachement de cent vingt Mousquetaires de chaque Compagnie. Cette distinction était d’autant plus flatteuse qu’en les employant ainsi dans toutes les occasions, le Roi les désignait comme l’exemple du zèle, du courage et de l’émulation. Ce secours obligea l’Evêque de Munster de faire la paix deux mois après avec les Hollandais, et de leur restituer les places qu’il avait prises sur eux. » 

L’épisode de Munster se trouva être fort bénéfique à l’entente des deux compagnies qui furent forcées de se juger et de s’apprécier sur le terrain, sur des critères plus sérieux que l’apparence. Il en résulta une vraie fraternité et une cohésion entre les deux corps, bénéfique pour leur réputation mutuelle. Les Mousquetaires devinrent « frères et compagnons d’armes », scellant ainsi leur appartenance à des compagnies solidaires et visant les mêmes objectifs.


Les grandes actions de guerre des deux compagnies

La mort de Philippe IV, Roi d’Espagne, en 1665, est la cause d’une nouvelle guerre entre la Couronne et la France. Louis XIV prétend qu’en vertu de son contrat de mariage avec Marie-Thérèse, les Pays Bas et la Flandre lui reviennent. 

Toutes les démarches destinées à faire valoir les droits de la Reine de France auprès de la Régence d’Espagne sont cependant vaines et Louis XIV en est réduit à passer aux armes.

Au début de l’année 1667, il envoie donc une armée en Flandre composée de trente-cinq mille hommes et commandée par le Maréchal de Turenne. En Mai, le Roi le rejoint devant Tournai qui capitule le mois suivant. Le Roi entre dans la ville, précédé de ses deux compagnies de Mousquetaires suivies des Gendarmes, des Chevaux-Légers et d’une partie de ses Gardes du corps.

D’autres places tombent facilement (Douai, Courtrai, Oudenarde et Aloft) sans l’aide des Mousquetaires, mais le siège de Lille requiert une vraie mobilisation.

« Les Espagnols, revenus de leur première surprise, et qui craignaient pour cette importante ville, n’oublièrent rien pour la mettre à couvert de toute entreprise. Une garnison de trois milles hommes de troupes réglées, sans compter la bourgeoisie dont la plus grande partie prit les armes et un gouvernement aussi habile que brave ; rien ne manquait à la défense. Cette entreprise parut si difficile dans la conjoncture des choses, que Monsieur de Turenne lui-même, le Marquis de Louvois et une bonne partie des officiers généraux tâchèrent de dissuader le Roi de ce dessein. Mais ce Pince avait résolu de finir la campagne par cette conquête dont les difficultés ne pouvaient qu’augmenter la gloire. » Le Thueux

La bataille de Lille est valeureuse, rondement menée avec l’appui stratégique de Vauban et audacieuse. Louis XIV encourage ses armées en étant lui-même aux premières lignes, ses Mousquetaires font merveille tant et les Espagnols capitulent.
« Lorsque les Mousquetaires s’emparèrent de la porte qui leur fut livrée au moment de la capitulation, le Gouverneur ne pouvait comprendre comment la plupart d’entre eux n’étaient que des jeunes gens de dix-sept, dix-huit et vingt ans. » Le Thueux

Louis XIV ne se satisfait pas de cette seule victoire et décide de continuer son combat sur les Espagnols, en Franche-Comté qu’il soumet en moins de trois semaines.

La rapidité de ces deux victoires étonne les Espagnols qui signent la paix à Aix-la-Chapelle au mois de mai suivant. Le traité ne permet cependant à la France de ne garder que les villes des Pays-Bas. Louis XIV voit en la Hollande l’ennemi à abattre pour lequel il commence ses préparatifs.
En attendant, les Mousquetaires continuent de se distinguer sur des champs de bataille plus…exotiques.

Par souci de prestige en effet, Louis XIV décide d’envoyer des galères et des vaisseaux avec sept mille hommes, cent six Mousquetaires de la première Compagnie et cent dix-huit de la deuxième, pour soutenir Candie, en Crête, aux prises avec les Turcs.

« Ce Monarque, avide de réputation et fier de ses victoires, saisit cette occasion de répandre son nom et la gloire de ses armes parmi les Infidèles. » Le Thueux
 
La bataille dura plus d’un mois dans des conditions difficiles, avec de nombreuses victimes.
« Le 31 juillet, la flotte s’éloigna enfin de ces rivages où deux mille cinq cents Français avaient trouvé la mort pour sauvegarder l’honneur de la Chrétienté et du Roi de France (…) Le récit du dernier combat qui opposa les Mousquetaires aux plus braves des Janissaires dans les éclatements de bombes à main entra dans la légende des Mousquetaires et fut répété dans tout Paris, celui des hôtels huppés comme celui des faubourgs. » 

En 1672, la guerre contre la Hollande commence. Les préparatifs avaient occupés toute l’année précédente. L’armée française était en poste entre Maastricht et Charleroi avec cent douze mille hommes sous le commandement de Condé et Turenne. Réformées, les deux compagnies des Mousquetaires étaient incorporées à la Maison du Roi. D’Artagnan, bien que gardant le commandement de la première compagnie était restée à Lille à la demande du Roi. Maulévrier était remplacé, pour la deuxième compagnie, par le Comte de Montbron.
Les troupes avancent assez facilement le long du Rhin et toutes les places se rendent. De l'autre côté du Rhin, les Hollandais s'organisent. L'armée française réussit à franchir le fleuve et pourchasse l'ennemi jusqu'à Utrecht, ville dans laquelle Louis XIV fait une entrée triomphale. Les Mousquetaires et toute la cavalerie continuent leur avancée vers Amsterdam, mais ces victoires faciles se retournent contre le Roi ; Les Hollandais se ressaisissent, luttent avec acharnement et protègent la ville d'Amsterdam. Après la conquête d'une partie des territoires, les troupes françaises se replient pour leurs quartiers d'hiver dans les pays de Trêves et près d'Utrecht.

Au début de l'année 1673, Louis XIV décide d'entreprendre le siège de Maastricht, place forte dont il estime parfaitement la capacité de résistance. Il demande le soutien aux Anglais pour cette entreprise qu'il sait délicate.

En mai, le Roi rejoint son armée en Hollande. D'Artagnan a repris la tête de la première compagnie des Mousquetaires et il a même été promu au grade de maréchal de camp ; Montbron continue d'assurer le commandement de la deuxième compagnie.

Le premier assaut est violent et la défense de Maastricht est bien organisée.

« Pendant la nuit, la première compagnie des Mousquetaires eut ordre d'attaquer la demi-lune sèche, pendant que la seconde se porterait sur les palissades entre cette demi-lune et l'ouvrage à corne. Le signal donné, elles fondent sur l'ennemi et, malgré les éclats terribles des grendes qu'il jette sans cesse, ces ouvrages sont emportés en même temps et on s'y loge. Le Roi et les officiers généraux qui étaient témoins de cette attaque, convinrent unanimement, dit Pélisson, qu'on n'avait jamais vu un feu aussi violent et aussi soutenu que celui des assiégés dans cette occasion. Lorsque les Mousquetaires furent rentrés au camp, les ennemis firent jouer un fourneau qu'on n'avait pas découvert dans la demi-lune. Farjaux, Gouverneur de la place (Maastricht), se mit à la tête des meilleures troupes de la garnison et, profitant de l'alarme que cet accident causa parmi les troupes françaises, il rentra dans cet ouvrage et les chassa. » 

Le deuxième assaut du lendemain est encore plus vif et meurtrier.

« Les Mousquetaires, dit encore Pélisson, donnèrent dans cette occasion des preuves d'une valeur extraordinaire. On n'en vit jamais reculer un seul, et ceux qui en revinrent avaient tous les épées faussées et sanglantes jusqu'aux gardes. » 

Cet assaut permet de récupérer la demi-lune au prix de la vie de d'Artagnan et de quatre vingt Mousquetaires. Cinquante autres sont blessés dont quinze meurent rapidement des suites de leurs blessures.

La deuxième compagnie s'illustre le surlendemain et Maastricht se rend. Louis XIV y fait son entrée précédé de trois cents mousquetaires. Un ancien major des Gardes du Corps, Louis, chevalier de Forbin, remplace d'Artagnan à la tête de la première compagnie.
« Les Mousquetaires gardèrent un souvenir cuisant du double assaut de Maastricht qui inspira à leurs officiers le désir d'outrepasser les ordres afin de n'avoir jamais à reprendre une position déjà conquise. 

Poussant toujours leurs avantages au maximum, les Mousquetaires permirent ainsi la prise de la citadelle de Besançon le 21 mai 1674 et la capitulation de Dôle lors de la seconde conquête de la Franche-Comté . » 

En 1675, les Mousquetaires ont en Bretagne pour réprimer une sédition.

En 1676 et 1677, ils retournent en Flandre où ils excellent dans les techniques de sièges. Valenciennes tombe face à leurs exploits, puis Cambrai et St Omer.

Leur courage et leur intrépidité fait d'ailleurs dire au Prince d'Orange : «  Si j'avais de pareilles troupes, je serais invincible ! ».

Leurs derniers succès de 1678 aboutissent à la paix du Traité de Nimègue par lequel la France garde la Franche Comté et plusieurs places en Flandre.
Pendant les années de paix, les Mousquetaires rentrent à Paris.

La première compagnie avait son hôtel au 15, rue du Bac. Cette caserne, de trois étages, était grandiose et restera attribuée aux Mousquetaires gris jusqu'en 1775. La seconde compagnie logeait au faubourg Saint Antoine, au 28 de la rue Charenton où une caserne fut construite spécialement pour elle.

« Robert de Cotte en dessina les plans ; sa construction incomba à la ville de Paris en échange de facilités consenties par le Roi pour l'achèvement de la place Vendôme. Ce fut aussi un bâtiment à trois étages avec un comble. Il comportait trois cent quarante chambres, disposant toutes d'une cheminée, ce qui était un luxe étonnant pour l'époque. »

A partir de 1673 les deux compagnies eurent le même uniforme : habit écarlate et soubreveste en drap bleu ornée d'une croix d'argent, avec les boutons et les galons d'or pour la première, et d'argent pour la seconde. L'habit écarlate leur fit donner vulgairement le nom de Maison rouge.

La vie parisienne des Mousquetaires était souvent tumultueuse, même si une discipline stricte continuait de régner à la caserne. Cela peut d'ailleurs se comprendre aisément compte tenu de leur jeunesse extrême, des risques qu'ils encouraient sur les champs de bataille et donc de l'énergie qu'ils avaient à dépenser quand ils revenaient à une vie mondaine. Cependant, les sanctions pour mauvaise conduite étaient sévères. Le Roi était très exigeant envers eux et dans l'ensemble, ils méritaient amplement la confiance qu'il leur accordait.

Ce corps d'élite était la pépinière d'officiers la plus renommée dans lequel tous les jeunes nobles rêvaient d'y faire son apprentissage.
En 1683, Louis XIV part inspecter ses places fortes d'Alsace avec ses Mousquetaires et saisit l'occasion pour offrir « une dernière grande revue de la Maison du Roy, à l'apogée de sa gloire » près de Besançon.

Et puis les hostilités reprennent avec l'Espagne. Les Mousquetaires retournent aux combats en Flandre et sur le Rhin où ils occupent toujours les postes d'attaque les plus avancés. Toute l'Europe est alors en guerre contre la France.

Les Mousquetaires se couvrent encore de gloire que ce soit dans les Flandres, ou en Normandie contre les Anglais.

A partir de 1702, Louis XIV est vieillissant et la France commence à rencontrer des difficultés. Les Mousquetaires restent pourtant le fer de lance de l'armée. Ils en sont le stimulant, n'hésitant même jamais à se sacrifier dans les batailles.

« Dans ces années cruciales, en effet, les généraux français eurent à cœur de porter cette troupe admirable partout où le danger paraissait le plus pressant. Cette cavalerie était la principale force de l'armée où elle était employée, offrant un modèle constant de zèle et de ténacité, gardant une sérénité et une gaieté stimulantes pour tous devant le combat et la mort. Partout ils éviteront des désastres ; leur fermeté anéantit bien des efforts des coalisés. » 

A la mort de Louis XIV, durant la Régence , Maupertuis démissionne de la première compagnie et le marquis de Vins quitte également la seconde.

Les deux compagnies sont encore présentes lors des batailles contre les Anglais de 1743 et 1745 et font à nouveau preuve de leur esprit de corps, de leur déterminisme et de leur courage.

D'ailleurs, Cumberland disait qu'on ne pouvait se flatter d'avoir gagner une bataille avant d'avoir battu la Maison du Roi ! Et c'est effectivement grâce aux Mousquetaires que les français remportent la victoire de Fontenoy sur les Anglais.

C'est aussi le dernier fait d'arme de ce corps d'élite. « Leur glorieux point final ».

Les deux compagnies sont cassées le 1er janvier 1776.

« Du Pas-de-Suze à Ramilies, de Malplaquet à Fontenoy, les Mousquetaires de la Maison apparurent en toutes circonstances comme la troupe par excellence, celle que l'on fait donner à l'instant décisif de la bataille, celle qui force la victoire ou atténue les revers. Jamais elle ne se retira vaincue d'un champ de bataille.

Ses actions d'éclat forment le tableau le plus frappant du courage de la noblesse française et de son amour pour le service du Roi et de la Nation. Elles font aussi connaître qu'à la guerre, rien ne paraît impossible à des hommes qui ne consultent que leur courage et leur honneur .» Arnaud Jacomet

Réorganisées en 1789, la République les licencia en 1791, et la Restauration , après avoir compris les mousquetaires dans la Maison du roi, en 1814, les supprima définitivement en 1815.


Description de l’épée dite « à la mousquetaire »

Morphologie de l’objet 

La monture est du type « à la mousquetaire » c’est-à-dire que la garde est en coquille avec les « pas-d’âne » partant de l’écusson. La lame d’après les objets que j’ai pu étudiés mesure entre 26 et 28 pouces. Elle est a section losangique donc à tranchant double.

Fabrication 

Toute la monture est faite de laiton fondu et composée de quatre pièces distinctes : la coquille, la branche de garde elle-même accompagnée du quillon et des pas-d’âne, la fusée et enfin le pommeau (ce dernier toujours creux est réalisé soit à noyau, soit en deux parties, il en est de même pour la fusée).
Disons tout de suite que l’assemblage est des plus frustes et la finition au brunissoir ne réussit pas à cacher les défauts multiples d’une fonderie très médiocre ! 

Quand à la lame, elle est très probablement produite à St Etienne en Forez, manufacture qui ne bénéficie pas d’une grande réputation dans le domaine des armes blanches ! 

Le fourreau, lui, est traditionnellement de bois gainé de veau avec une chape à crochet et une bouterolle de laiton.

Les avantages de l’épée d’infanterie

Avant tout et presque exclusivement économiques, entretien des plus faciles et petites dimensions. Nous l’avons vu, la fabrication est simplifiée par la nature de la matière, d’où le faible coût d’une épée à la portée des colonels les plus démunis.

Ses inconvénients

Cette épée reste un objet grossier et fort mal en main, en un mot inutilisable. C’est d’ailleurs le problème soulevé par de nombreux chefs de corps vers 1710 qui pensent à la supprimer car cette arme encombre des soldats dont la seule efficacité réside dans le fusil. Louvois n’acceptera jamais cette idée pleine de bon sens sous prétexte que l’épée est l’objet qui distingue le soldat du paysan.
Les différentes parties de l'arme et leurs appellations :




A. Le pommeau et son bouton de rivure ;

B. La fusée ;

C. La branche de garde et son crochet l'assurant au pommeau ;

D. Le pas d'âne ;

E. Le quillon ;

F. L'écusson ;

G. La coquille ;

H. La soie sur laquelle s'ajuste la monture ;

I. Le talon.


 








Michel Pétard : historien spécialisé sur le sujet des armes blanches militaires françaises et du costume de guerre, notamment du règne de Louis XIV à nos jours ; il est l'auteur de la collection Des sabres et des épées évocant le complet des armes blanches réglementaires françaises en trois tomes, étudiant 1192 armes en 245 planches sur 661 pages.


La disparition des Mousquetaires

de Narcisse-Achille de Salvandy (1795 – 1856) - A.Egron Imprimeur de SAR Monseigneur Duc d’Angoulème - Rue des noyés n° 57 – décembre 1815.

« Que peu de jours s’écoulent, et la Maison Militaire aura cessé d’exister et l’œuvre de la révolution sera toute entière accomplie ; car de notre vielle France, il ne restera plus que des traditions éparses, des souvenirs douloureux, et la perspective d’un trône inopinément séparé de ses antiques appuis.
Ce n’était point cet avenir que présageaient nos cœurs, aux jours fortunés du retour, quand le monarque-père venait, après plus de vingt ans d’absence, reconstruire la monarchie sur ses anciennes bases, étayés de la charte constitutionnelle, dont la Patrie reconnaissante lui a du le bienfait. Oh ! alors fiers d’être appelés à faire revivre une institution qui a prêté un si noble éclat aux pompe triomphales du siècle de Louis XIV nous pensions que, puisque notre reconnaissance accompagnait la restauration du trône, nous étions réservés au partage de toute la prospérité que doivent attendre l’auguste dynastie des Rois. Et pourtant, c’est quand l’autorité royale prend une vigueur capable de braver les efforts des factions et des siècles, c’est quand un long avenir de sécurité prépare nos institutions la garantie de la durée, c’est quand la représentation nationale cherche à environner le trône de tout ce qui peut lui donner le caractère de la stabilité, quand les sujets fidèles espèrent jouir enfin des bienfaits du gouvernement paternel de leurs princes ; c’est alors, c’est par les soins d’un ministre, héritier des grands talents, comme du nom de ce Richelieu qui créa une partie des compagnies rouges, que les compagnies rouges, après avoir victorieusement traversé les jours de l’ancienne gloire et des dernières adversités de la France, succombent, et n’auront ainsi, dans l’exil, décoré le trône fugitif de tout l’éclat dû à la majesté royale que pour perdre aujourd’hui tous les droits acquis à leur dévouement.

Sans doute, en 1814, lorsque s’appropriant des souvenirs qui lui étaient étrangers, le petit-fils d’Henri IV s’environnaient de toutes nos vieilles bandes, le ministère pouvait craindre de présenter à l’armée le spectacle de ces brillantes compagnies, qui éternisant d’autres trophées que les siens, il était facile de prévoir, qu’orgueilleuse de ses triomphes, elle ne reconnaîtrait point une fraternité d’armes qui n’avait pas été contracté dans les plaines de Marengo et d’Austerlitz.

Mais aujourd’hui a-t-on pu redouter une pénible rivalité ? Les troupes se recomposent, moins anciens que nous, encore inconnus à la victoire,les nouveaux corps ne peuvent plus voir en nous que les héritiers d’une gloire vraiment nationale, d’une gloire contemporaine des beaux jours de Louis XIV, et ils nous auraient salués du titre de leurs devanciers dans la carrière de la fidélité et de l’honneur.

Tandis que, de toutes parts, de nouvelles enseignes se lèvent appelant les braves autour du panache blanc, les chefs de ces légions qui devront à l’héroïsme d’une bravoure toute française les grandes destinées des légions romaines, n’auraient pas manqué de proposer à l’homme d’armes l’exemple des seuls corps qui fussent encore debout en France ; ils lui auront dit «  Voyez ces valeureuses compagnies ! Composées le plus souvent de vos anciens camarades de périls et de suées, elles sont demeurées inébranlables dans leur dévouement au meilleur des rois. Sans doute comme elles, vous auriez, par votre fidélité, acquis un titre de plus à la reconnaissance de la patrie, si vous aviez eu comme elles, le bonheur de contempler incessamment toutes les vertus des Princes que la providence nous a rendus. Mais, dorénavant que leur exemple, secondé des grandes remontrances du sort, vous apprenne à ne plus avouer d’autres drapeaux que ceux de vos pères ; qu’elles seules vous guident, car vous les verrez toujours au sentier de l’honneur »

Oui, voilà le langage qu’on aurait pu maintenir dans l’armée, et quand l’heure du combat aurait sonné, quand la fortune de la France aurait confié ses antiques lauriers à ses nouvelles bannières, on aurait vu la victoire, par familiarité aux autres armées, reconnaître ces corps éclatants que ses mains couronnaient autrefois dans les murs de Valencienne, ou sur le champ de bataille de Cassel.

Inutiles regrets ! Le jour qui a pour jamais rendu au roi désiré le sceptre de ses pères, a vu s’évanouir toutes nos destinées, toutes nos espérances et tout notre avenir. Ce jour qui a comblé tant de vœux et consolé de tant d’infortunes, ne devait être empoisonné d’amers regrets que pour les plus zélé défenseurs de l’autorité royale ; ce jour qui était le premier de bonheur de la France, devait être le dernier ou il nous fut permis de recueillir, en environnant le trône la récompense de notre fidélité ; ce jour qui éclairait la résurrection inespéré de la monarchie, a vu condamner le dernier monument qui restât à la France de son ancienne splendeur.

O vous qui fûtes les instruments de la désastreuse usurpation du 20 mars, avant d’avoir été les victimes, soldats de Waterloo, nous n’aurions pas du être associés à votre fortune – le même arrêt nous frappe.

Puisse l’avenir répondre aux espérances du présent ! Puisse le vertueux monarque, dont l’âme fut assez forte pour ne pas succomber au faix de tant d’adversité, ne jamais se souvenir que la révolution préluda par la suppression des gardes royales, aux sanglantes scènes dont elle préparait à la France l’affreux spectacle ! Puisse-t-il rencontrer autour de lui tant de fidélité et d’amour, qu’il n’ait point un jour à regretter la Maison Militaire dont le sacrifice lui est arraché !

Et nous, quoique résignés à notre destinée, pour la première fois, l’obéissance nous paraîtra pénible. Tout nous unissait, mêmes sentiments d’affection et de respect pour les dignes chefs que le roi nous avait données, même dévouement à l’auguste sang de Saint-Louis, même amour pour nos princes- Hélas – aussi, même espérances et mêmes vœux ! Si les regrets qu’inspire à nos cœurs notre séparation, pouvaient approcher le cœur du roi, il conserverait auprès de lui les plus zélés défenseurs de sa couronne.

Du moins une consolation bien douce nous restera, quelles que soient les diverses carrières que nous serons appelés à fournir, nous y porterons la confiance d’avoir bien mérité du roi, dans les circonstances difficiles où la providence nous avait portés. Ce témoignage, la France entière nous le donne, et jusqu'à notre dernier soupir, nous nous souviendrons avec orgueil que nous l’avons reçu de la bouche auguste d’un Princesse destiné à soulager toutes les afflictions. Elles sont à jamais gravées dans nos cœurs ces paroles que vous dictait la bonté la plus touchante, à vous que la fortune a donné en spectacle au monde, comme la plus noble victime de ses vicissitudes, et qui semblez n’avoir traversé tant de tempêtes que pour arriver dans le port, environnée de plus de gloire. Digne fille de Louis XVI ! Il n’est pas un des mots consolateurs que vous avez daigné accorder à nos regrets, qui soit échappé à notre reconnaissance ; il n’en est pas un qui ne nous ait payés de tous nos sacrifices et de tout notre dévouement ; il n’en est pas un qui n’ait ajouté à notre désespoir, en nous rappelant que l’heure approche où nous ne serons plus appelés à jouir de votre auguste présence, où il ne nous sera plus permis de venir chaque jour déposer à vos pieds l’hommage respectueux de notre amour.

Qu’il était plein de souvenirs pour tous les français, ce jour qui vous vit naître deux fois (l’anniversaire de la naissance de Madame et aussi celui de sa délivrance), la première à la vie, pour consoler plus tard la France et lui rendre toutes les vertus qu’elle devait trop tôt perdre, la seconde à la liberté, pour prêter à la vieillesse et au malheur l’appui de votre tendresse filiale et de votre héroïque constance ! Combien surtout il nous commandait d’émotions à nous qui, seuls en France, ne pouvions consacrer qu’un tribut de plus à cet heureux anniversaire ! Que dis-je, nous n’étions pas les seuls dont la douleur attristait cette fête de famille.

L’auguste père de Marie-Thérèse, celui qui revit tout Henri IV, n’était pas étranger à nos regrets, quand il s’écriait ; les pauvres rouges ! Et dans les yeux du plus aimé des rois nous n’avons pas craint de deviner quelques-unes de ces précieuses larmes, preuves touchantes du plus tendre intérêt. Hélas ! il était digne du grand cœur de Louis le désir de se laisser émouvoir, comme un de ses pères, au sacrifice de ses compagnies, mais quand Louis XV pleurait d’accorder au duc de Richelieu (1) une séparation qui lui était si douloureuse, nos devanciers, plus heureux que nous, ne quittaient pas leur roi pour toujours !

Ils allaient se montrer dignes de lui et de leur renommée, ils allaient forcer la victoire jusque dans les bataillons anglais, ils allaient immortaliser les champs de Fontenoy en confirmant dans tous les cœurs français, le sentiment de la supériorité nationale. Mais nous ! on nous dissémine, on nous éloigne, sans qu’aucun haut fait d’armes ait illustré notre renaissance, sans que nous ayons pu par de nouveaux exploits recommander les noms qui nous décorent en souvenir de la postérité. Nos épées vont rentrer dans le fourreau, et nous n’aurons rien ajouté à tous les lauriers dont nos compagnies furent couvertes.

Adieu donc, casques étincelants, superbes armures que l’Europe rencontrait autrefois dans toutes les tranchées et sur tous les champs de bataille !

Foudres du Gendarme et du chevau-léger, voix du Mousquetaire : vous ne brillerez plus au milieu des hasards de la guerre, nos armées vous chercheront en vain dans leurs lignes ; vous ne serez plus là pour guider leur bouillante valeur dans le sentier de la victoire.

Oisifs trophées de notre fidélité, vous serez transmis à nos enfants comme monuments et comme leçons ; vous leur rappellerez les grandes épreuves que nous avons traversées ; vous leur transmettrez l’amour que nous portions au sang de nos rois ; vous leur imposerez le devoir d’imiter l’inébranlable dévouement de leurs pères ; et, condamnés à dormir éternellement dans la poudre, vous serez encore utiles à la Sainte cause de l’autel et du trône.

Et vous, famille bien aimée des rois, daignez accueillir la dernière expression de notre inviolable attachement et de nos éternels regrets. Vous pourrez bien dissoudre nos compagnies, vous ne pourrez pas les détruire. Ce n’est pas assez que dans nos cœurs vivent toujours les glorieux témoignages de votre auguste bienveillance, notre esprit vous environnera sans cesse ; et si jamais la patrie est menacée, vous n’aurez pas besoin de frapper du pied la terre, vous verrez apparaître tout à coup, sous leurs éclatantes couleurs, ces familles de braves dispersées aujourd’hui, rassemblées alors par l’ardeur de notre zèle, toujours prêtes à revivre malgré vous et pour vous, quand la voix du péril se sera fait entendre.

(1) Au moment où la bataille de Fontenoy paraissait perdu, Monsieur le Duc de Richelieu vint demander au Roi sa maison militaire, et Louis XV ne l’accorda qu’en versant des larmes.

Liste des capitaines des deux compagnies


1ère Compagnie



I. Jean de Bérard, chevalier, marquis de Montalet, en 1622 (création).

II. Hercule-Louis de Bérard de Montalet Vestric, neveu du précédent - 1627. Il fut blessé à Castelnaudary en 1632 et mourut des suites de ses blessures.

III. Jean de Vieilchastel, seigneur de Montalant, de Saint-Hilaire, de Frety, de Mardilly, de Savigny et autres lieux, maître d'hôtel de la maison du roi et gentilhomme de sa chambre, qui fut nommé en 1632; il démissionna en octobre 1634, et fut pourvu du gouvernement du duché de Bar.

IV. Jean Arnaud du Peyrer, alias Armand-Jean de Peyré, comte de Troisvilles (mieux connu sous le nom de Comte de Tréville) 1634 à 1646 (cassation).

V. Philippe Julien Mancini Mazarin, duc de Nevers et de Donzy, chevalier des ordres du roi, gouverneur général du Nivernais, capitaine lieutenant de la 1re compagnie de 1657 à 1667, date à laquelle il démissionna en faveur de M. d'Artagnan.

VI. Charles de Batz Castelmore, comte d'Artagnan, de 1667 à 1673. Dans deux rôles de la 1re compagnie datés des 10 août et 19 novembre 1668 qui débutent ainsi « Le Roy, capitaine, Charles de Castelmore, Sr d'Artagnan, lieutenant, le Sr de la Rivière, sous-lieutenant, le Sr de Jauvelle, enseigne, le Sr de Maupertuis, cornette » ; on remarque, parmi les mousquetaires: le Sr de Saint Martin, le Sr de La Plagne, le Sr de Vignolles, le Sr d'Artagnan, le Sr de Labadie, le Sr de Sainte Colombe, un autre Sr de La Plagne, le Sr de Lavardac, le Sr des Bordes, etc., tous parents, alliés ou compatriotes du capitaine d'Artagnan.

VII. Louis de Forbin, appelé le bailli de Forbin, était major des gardes du corps lorsque le roi le nomma capitaine lieutenant de la 1re compagnie. Il fut aussi lieutenant général des armées du roi. Il mourut en 1684.

VIII. Louis de Melun, marquis de Maupertuis, capitaine de cavalerie, admis aux mousquetaires comme maréchal-des-logis, le 7 novembre 1661, fut successivement cornette, enseigne et sous-lieutenant de la 1re compagnie, mestre de camp en 1674, brigadier des armées du roi en 1678, et capitaine lieutenant de la 1re compagnie de mousquetaires le 13 mai 1684, gouverneur de Saint-Quentin en 1686, maréchal de camp en 1693, grand croix de Saint-Louis en 1706. Il donna sa démission de capitaine lieutenant en 1716, et mourut le 18 mai 1721.

IX. Joseph de Montesquiou, comte d'Artagnan, capitaine lieutenant de la 1re compagnie par commission du 18 février 1716, était déjà lieutenant général depuis le 23 décembre 1702. Il fut fait chevalier des ordres le 3 juin 1727. Le roi lui avait fait prendre la casaque en 1668 ; en 1673, il se trouva à l'attaque de la demi-lune où fut tué Charles de Batz d'Artagnan, son cousin, et en 1684, le roi lui donna l'agrément de la cornette des mousquetaires avec rang de mestre de camp dans la cavalerie légère, moyennant 45.000 livres.

X. Louis de Bannes, comte d'Avejan, était capitaine aux gardes françaises lorsqu'il acheta la charge de sous-lieutenant de la 1re compagnie le 1er avril 1716. Nommé capitaine lieutenant le 4 janvier 1729, à la mort du comte d'Artagnan, il fut aussi lieutenant général des armées du roi.

XI. Pierre-Joseph Chapelle, marquis de Jumilhac, sous-lieutenant de la 1re compagnie, succéda au comte d'Avejan en 1736 et fut lieutenant général et gouverneur de Philippeville.

XII.  François de Portalès, chevalier, puis comte de la Chèze, lieutenant de grenadiers aux gardes, fut nommé deuxième cornette de la 1re compagnie de mousquetaires le 10 mai 1741, avec le grade de mestre de camp, brigadier des armées du roi le 20 mars 1747, premier cornette le 5 mai 1750, deuxième enseigne le 8 octobre 1751, premier enseigne le 7 juillet 1754, deuxième sous-lieutenant le 13 juin 1756, maréchal de camp le 1er février 1759, premier sous-lieutenant le 7 octobre suivant, et lieutenant général le 25 juillet 1762. Il était capitaine lieutenant lors de la suppression des mousquetaires en 1776.

2ème Compagnie



I. M. de Marsac, capitaine des mousquetaires du cardinal Mazarin, garda le commandement de cette compagnie, lorsque Son Eminence la donna au roi, en 1660, et jusqu'à son licenciement en 1665.

II. Edouard-François Colbert, comte de Maulévrier, chevalier des ordres du roi, lieutenant général de ses armées et gouverneur de Tournai, frère puîné du grand Colbert, fut nommé capitaine lieutenant de la 2e compagnie le 9 janvier 1665 lors de sa création.

III. François, comte de Montberon, chevalier des ordres du roi et lieutenant général de ses armées, fut pourvu de la sous‑lieutenance de cette compagnie le 27 janvier 1665, et de la charge de capitaine lieutenant par provisions du 20 avril 1672, sur la démission du comte de Maulévrier. Il mourut le 16 mars 1708.

1V. Henri de  Hautfaye, marquis de Jauvelle, était mestre de camp de cavalerie lorsqu'il fut nommé sous-lieutenant de la 2e compagnie, le 6 mars 1672. Au siège de Maastricht, en 1673, il reprit à la tête de ses mousquetaires un étendard que l'ennemi leur avait enlevé dans une sortie. Il fut nommé capitaine lieutenant le 2 mai 1674, sur la démission du comte de Montberon, et lieutenant général le 24 août 1688. Il mourut le 1er juin 1692.

V. Jean de Garde d’Agoult, marquis de Vins, mestre de camp de cavalerie, sous-lieutenant de la compagnie depuis le 3 mai 1671, fut nommé brigadier des armées du roi, maréchal de camp, capitaine lieutenant de la 2e compagnie le ler juin 1692, et lieutenant général le 30 mars 1693. Il se démit du commandement des mousquetaires au mois de juin 1716, et vécut dans la retraite jusqu'à sa mort arrivée le 9 février 1732.

VI. Jean de Montboissier-Beaufort-Canillac, comte de Canillac, capitaine lieutenant le 30 juin 1716, lieutenant général et chevalier des ordres en 1724, mourut à Paris le 10 avril 1724.

VII. Philippe-Claude de Montboissier-Beaufort-Canillac, marquis de Montboissier, brigadier des armées du roi, nommé capitaine lieutenant le 11 avril 1729, maréchal de camp le 20 février 1734 et ensuite lieutenant général, se démit du commandement de la compagnie en 1754.

VIII. Joseph-Yves-Thibault-Hyacinthe, marquis de la Rivière, capitaine lieutenant en 1754. Il se démit en 1766.

IX. Philippe-Claude de Montboissier-Beaufort-Canillac, comte de Montboissier, succéda au marquis de la Rivière en 1766 et occupa la charge de capitaine lieutenant jusqu'en 1776. Il fut aussi chevalier des ordres, lieutenant général et gouverneur de Bellegarde.

Liste des Mousquetaires béarnais et basques

La fortune du premier comte de Troisvilles attira aux mousquetaires un certain nombre de gentilshommes béarnais et basques. Voici la liste de ceux dont nous avons pu retrouver les noms :

• Jacques de Terride, seigneur de Labenne et de Floris, mousquetaire en 1624; à l'attaque du Pas-de-Suze, il fut blessé d'un coup de mousquet à l'épaule gauche et resta estropié.

• Fortis d'Auga, Cyrus de Camps et Isaac de Baas, mousquetaires en 1633. Ce dernier fut, comme on l'a vu, sous-lieutenant de la compagnie du mois de janvier 1657 au mois de mai 1658.

• Charles de Larralde, mousquetaire vers 1635 ; il fut ensuite capitaine au régiment du Havre et servit plus de 30 ans.

• Jean de Lagarrigue, de Thèze, sergent de la compagnie, Mestre de camp du régiment de Languedoc, fut admis aux mousquetaires, vers 1635.

• François d'Espalungue, mousquetaire, fut nommé capitaine au régiment de Bellebrune en 1636, puis gentilhomme servant du roi.

• David de Marmont, mai 1640.

• Pierre de Saint-Jean, mai 1640.

• Jean de Lanne, mai 1640.

• Pierre de Forbet, 1659-1661.

• Jean‑Arnaud de Terride, seigneur de Floris, dit le vicomte de Terride-Floris, né en 1639, prit du service à 18 ans, dans la compagnie du cardinal Mazarin, devenue 2e compagnie des mousquetaires en 1660; il fut ensuite capitaine au régiment de Turenne, puis colonel d'un régiment.

• M. de Caumia-Baillenx, dit d'Andrein, mousquetaire, fut nommé lieutenant au régiment Royal en 1663.

• Arnaud de La Salle, seigneur d'lzeste et de Gurmençon, 1671.

• Jean de Casedepats, abbé de Bilhères, 1663-1671.

• Etienne de Terride, dit de Monlong, enseigne de la Colonelle du régiment de Schomberg en 1667, servit depuis dans la 2e compagnie des mousquetaires, et fit partie du détachement envoyé à Candie. Il y mourut le 28 juin 1669, d'une blessure à la tête.

• Henri d'Abbadie, abbé de Bastanès, mousquetaire de la 1re compagnie, fut nommé lieutenant d'une compagnie de chevaux-légers en 1673.

• Jacques de Casamajor, seigneur de Gestas, mousquetaire de la 2e compagnie, obtint un brevet de capitaine dans les Bandes béarnaises, en 1673.

• Jean-François d'Esquille-La Garde, vers 1675.

• Daniel de Martin, seigneur de Domec de Lucq et de Belluix de Morlanne, mousquetaire en mars 1676.

• Bertrand d'Arnaudat, seigneur de Cassagne en 1678.

• Abraham-Joseph de Casenave, mousquetaire du roi le 16 septembre 1670, était aide-major de la 1re compagnie en 1670-1687.

• Jean de Terride, dit le chevalier d'Artigolles, né vers 1665, servit longtemps dans la 1re compagnie. Son fils, Pierre de Terride, seigneur du Hillaut, fut aussi admis dans la même compagnie, et y mourut.

• Arnaud de Claverie de Lahourcade, mousquetaire en 1685-1693, était, de 1709 à 1718, chevalier de Saint-Louis et lieutenant-colonel du régiment de Médoc.

• Jean de Baradat, brigadier, 1694-1703.

• Armand de Caumia-Baillenx, seigneur de Baillenx et d'Andrein, entra dans la 1re compagnie en 1697, et fut nommé capitaine au régiment de Montlévrier, trois ans plus tard.

• Henri-Bernard, comte, puis, marquis de Lons, mousquetaire noir, nommé capitaine de dragons au régiment d'Avaray le 5 février 1701, et lieutenant du roi en Navarre et Béarn, en 1717.

• Pierre de Camou-Lagarde, seigneur de Parenties, ancien page de la petite écurie, était officier aux mousquetaires en 1700.

• Jacques de Terride, seigneur de Barinque et d'Escurès, mousquetaire en 1710-1725, mourut en 1754.

• Guillaume de Larroque, mestre de camp de cavalerie, ancien enseigne de la 1re compagnie des mousquetaires, 1730.

• Barthélemy de Canton, ancien mousquetaire, 1722.

En 1716-1720, la 1re compagnie, commandée par Joseph de Montesquiou, comte d'Artagnan, avait dans ses rangs :

• Armand-Jean de Mont-Réal, dit de Moneins, comte de Troisvilles, marquis de Moneins, vicomte de Tardets, baron de Montory, seigneur de Domezain, Barcus et autres lieux, grand sénéchal de Navarre, capitaine châtelain de Mauléon et gouverneur du pays de Soule, premier enseigne; puis sous-lieutenant de la compagnie, démissionnaire le 8 décembre 1727.

• Charles de Saint-Martin, seigneur de Saint-Martin de Larressorre, ancien page de la petite écurie, maréchal des logis. On le trouve déjà qualifié officier des mousquetaires du roi le 16 décembre 1701. Blessé au siège de Mons, il fut, depuis, chevalier de Saint-Louis et mestre de camp d'un régiment de cavalerie.

• Pierre de Saint-Martin, seigneur de Saint-Martin de Janitz, sous-brigadier.

• Jacques de Casamajor de Jasses, depuis marquis de Jasses, pourvu le 21 août 1721 d'une charge de conseiller au parlement de Navarre, et nommé président à mortier au même parlement le 19 juillet 1731.

• Alexis, chevalier de Haraneder.

• Jean de Larralde, baron de Harriette ; il avait d'abord fait partie de la 2e compagnie.

• Jean-Baptiste de La Lande-Favas, ensuite chevalier de Saint-Louis et lieutenant-colonel du régiment de Chambo.

• Gilbert de Mont-Réal-Moneins d'Armendarits, seigneur de la Salle de Saint-Palais, depuis chevalier de Saint-Louis et capitaine de grenadiers au régiment de La Sarre.

• M. d'Armendarits d'Arberats. Paul d'Armendarits d'Arberats, ou Jean, son frère, chevalier de Saint-Louis les deux moururent en la même année, à l'armée d'Allemagne.

• M. de Vic.

• M. de Navailles.

• M. de Casenave, en 1729.

• M. de Gassion, en 1729.

• Jean-Henri-Josué de Baas de Sivord, ancien mousquetaire du roi en 1734, fils de Jean-Josué de Sivord, dit de Baas, aussi mousquetaire du roi et capitaine de cavalerie.

• Jean-Louis d'Olhassarry, seigneur d'Olhassarry d'Aroue, fut admis dans la 1re compagnie le 10 septembre 1735 et la quitta au mois d'août 1741. Il fut chevalier de Saint-Louis, conseiller du roi, commissaire ordonnateur des guerres et inspecteur général des hôpitaux d'Alsace, des Evêchés et de Lorraine.

• Claude-Théophile de Boeil, baron de Boeil et de Coarraze, mousquetaire dans la seconde compagnie, 1737-1741, puis, successivement, capitaine de cavalerie au régiment de Sabran, chevalier de Saint-Louis, colonel du régiment de Royal-Cantabre, et colonel du régiment de Languedoc en 1762.

• Bernard de Terride-Barinque, seigneur d'Escurès, mousquetaire du roi en 1738.

• Pierre de Caro, mousquetaire en 1742.

• M. de Laistre de Champgueffier, mousquetaire en 1742, fils de Jacques de Laistre, seigneur de Champgueffier, chevalier de Saint-Louis, major de la citadelle de Saint-Jean-Pied-de-Port, et de Jeanne de Saint-Esteben.

• Pierre-Paul d'Espalungue, mousquetaire de la 1re compagnie en 1742, fut nommé chevalier de Saint-Louis et capitaine de cavalerie

• M. d’Olhabarrats.

• Nicolas d'Abbadie, de Nay, ancien mousquetaire en 1747.

• Jean Domenger, seigneur de Hayet, ancien mousquetaire, fut pourvu d'une charge de conseiller secrétaire du roi en 1750.

• Armand-Jean d'Uhart, baron d'Arbouet, mousquetaire en 1750, puis major du régiment de Royal-Cantabre et chevalier de Saint-Louis.

• Jean-Vincent de Casamajor, marquis de Charritte, ancien mousquetaire de la garde du roi et cornette de la Colonelle-générale des dragons en 1753.

• Philippe-Mathieu-Marie, comte, puis, marquis de Lons, entra dans la 1re compagnie des mousquetaires, en 1753, à l’âge de 15 ans; il fut nommé capitaine de dragons en 1755 et mourut en 1819, lieutenant général des armées du roi et commandeur de l'ordre de Saint-Louis.

• Henri-Auguste d'Espalungue, baron d'Arros. capitaine au régiment des Bandes béarnaises depuis 1747, entra dans la 1re compagnie de mousquetaires en 1754 et fut ensuite aide de camp du duc de Tresme et du duc de Castries, et capitaine au régiment de Chartres.

• Jean-Dominique de La Salle de Harader, mousquetaire dans la 2e compagnie, 1756-1759.

• Joseph-Balthasar Dalier, ancien mousquetaire, époux d'Anne de Noguès, en 1756.

• Jean-Louis de Fouron, seigneur d'Artiguelouve, né en 1734, servait dans la 1re compagnie vers 1754 ; il fut ensuite conseiller au parlement de Navarre en 1756 et gouverneur de Lescar.

• Paul de Camou-Dadou, seigneur de Blachon, mousquetaire en 1760. Il mourut à Pau le 11 octobre 1781, étant capitaine au régiment de Royal-Cantabre.

• Joseph de Casamajor, baron, puis marquis d'Oneix, en Béarn, admis dans la 2e compagnie en 1766, fut ensuite capitaine au régiment Colonel-général de la cavalerie.

• Martin-Louis de Périer, baron d'Ussau, gouverneur de Saint-Jean-de-Luz, mousquetaire en 1769.

• Antoine-Hubert d'Espalungue, seigneur de Louvie, abbé de Béost, mousquetaire de la 1re compagnie en 1770.

• Gabriel-Xavier-Bernard d'Abbadie de Barrau, abbé laïque de Bastanès, seigneur de Laà de Maslacq et de Capdevielle de Bugnein, servit aux mousquetaires du 12 juin 1774 au 12 juin 1775 ; il était lieutenant-colonel d'infanterie et exempt des Cent-Suisses de la garde du roi en 1780.

• Jean d'Agest, ancien mousquetaire en 1778.

• Jean-Germain d'Abidos, ancien mousquetaire du roi en 1786.

• Jean-Salvat d'Esquille, ancien mousquetaire du roi, chevalier de Saint-Louis, mort à Pau le 10 octobre 1787, âgé de 55 ans.

L'armement des mousquetaires

La compagnie des mousquetaires de Louis XIII est donc armée du mousquet ‑ presque certainement du mousquet à mèche, moins délicat en campagne que l’arme à rouet - de l'épée bien sûr et d’une paire de pistolets dans les fontes de la selle. Le père Daniel écrit dans son Histoire de la Milice Française, terminée vers 1721... les brigadiers et les sous‑brigadiers dans la suite prirent des fusils. Depuis plusieurs années, les mousquetaires ont eu aussi des fusils à l'armée et ne se servaient de mousquets que dans les revues. Aujourd'hui, ils ne s'en servent plus du tout.



Forte épée de la deuxième compagnie des mousquetaires.

Il ne semble pas possible, sur la base des documents connus, de dater avec certitude cette arme qui remplace celle dite «  à la mousquetaire » soit à coquille et pas-d’âne. Christian Ariès détermine avec pertinence sa création vers 1759. Le fourreau est en cuir de vache noirci, sans alèse. Le pommeau, le bouclier de suspension, la boucle du ceinturon, sont ornés de la croix du corps ciselé.

Collection : musée de l’Empéri, Salon de Provence. Photo Raoul Brunon.

En 1657, ils portent encore le mousquet à mèche. 

Voici ce qu'on peut lire dans le Journal d'un voyage à Paris en 1657-1658 : 

« Le 19 janvier 1657 nous fûmes voir entrer le Roy par la porte Saint‑Antoine avec ses nouveaux cent vingt mousquetaires qui luy servent aussi de garde... ils portent le mousquet et attachent la mesche à la testière entre les deux oreilles du cheval . » 
Or, le mousquet à mèche entre les mains des mousquetaires est efficace. 
Le Pippre, que nous avons déjà cité, relate un épisode du siège de Dunkerque par l'armée royale commandée par Turenne, alors que Condé et Don Juan d'Autriche, à la tête de l'armée espagnole (juin 1658), tentent de secourir la ville :

« ...le prince de Condé fait avancer le régiment de cavalerie par une brèche dans les dunes où ils ne pouvaient être que vingt de front. Les mousquetaires les arrêtent à coup de fusil et les mettent en désordre, ensuite continuent à importuner les troupes de Monsieur le Prince par leur feu bien ménagé... »


Intérieur de la platine du fusil de mousquetaire, vers 1690. La noix n’a pas encore sa bride que l’on verra sur le modèle 1717. (Copenhague)




Platine du mousqueton des gardes du corps. Elle porte l’incription : Magazin royal et derrière le chien : A.Penel. C’est encore le chien et le corps de platine « ronds » alors qu’ils seront carrés (c’est à dire plats) sur le fusil modèle 1717. Le magasin royal de Paris, à la Bastille, servait de dépôt pour les armes blanches et à feu que le roi achetait pour ses régiments et où les capitaines pouvaient s’approvisionner pour l’armement de leur compagnie. A.Penel semble le premier de cette dynastie d’armuriers de Saint-Etienne qui travaillait encore au XIXe siècle. (Copenhague)

A quelle époque le fusil remplace‑t‑il le mousquet ?

Rappelons qu'en 1671, le roi crée le régiment des fusiliers, corps d'élite affecté à la garde de l'artillerie et armé de fusils à silex en remplacement des mousquets; on peut admettre que les mousquetaires, aussi corps d'élite, reçurent l'arme nouvelle dans le même temps. Il est, hélas! pratiquement impossible d'avoir une précision quelconque sur l'armement de la maison militaire, celle-ci ne relevant pas de l'administration de la guerre mais de celle de la maison du roi; les archives de cette dernière n'ont pas été retrouvées.



Haut : Fusil de mousquetaire. Quatre porte-baguettes vers 1690

Bas : Mousqueton de garde du corps. Le canon est maintenu au fût par des goupilles passant à travers les tenons brasés sous le canon. Trois porte-baguettes, vers 1690. Avec le modèle 1731, sera introduit sur l’arme le système à batterie tournante.



Haut : Mousqueton à silex de garde du corps. Inscription sur le pan supérieur du canon : Au tonnerre, les armes du roi. Sur la queue de culasse, le numéro 54. Platine signée : A.Penel. Vers 1690. (Copenhague)

Bas : fusil à silex portant sur le pan supérieur l’inscription : mousquetaire du roy et sur le pan gauche le nom de l’armurier : A.Penel, précédé d’une fleur de lis et suivi du fer à cheval. Les queues de culasse, terminées par une ligne droite, sont semblables. Sur le fusil français, modèle 1717, la queue de culasse est arrondie. La platine est aussi signée A.Penel avec le fer à cheval. L’inscription Magazin royal présente un autre graphisme que celui de la platine du mousqueton de garde du corps. 
Vers 1690. (Copenhague)
Comment se présente l'épée des mousquetaires à l'époque de la création du corps ?

Aucun objet n'est venu jusqu'à nous avec une attribution certaine, mais on peut conjecturer, sans grave risque d'erreur, en étudiant un document contemporain Le Maneige royal, écrit par Antoine de Pluvinel (1555-1620), directeur de la grande écurie du roi. Cet ouvrage, illustré de nombreuses planches par Crispin de Pas, représente les leçons au manège et les seigneurs qui y assistent. Leurs épées sont du type dit "à branches", avec un pommeau lourd en olive, ou rond, la branche de garde, les quillons droits ou recourbés, plusieurs anneaux de garde obliques, le pas-d'âne, l'anneau de côté joignant ses deux bases et des anneaux ou branches de contre-garde. La lame est large et puissante car les mousquetaires menaient toujours l'assaut à l'épée - et non à la baïonnette - ainsi que l'attestent de nombreux textes citant leurs héroïques prises d'ouvrages fortifiés. Ce livre, publié en 1626, est donc une référence valable pour l'épée des mousquetaires lorsqu'en 1622 ils entrent dans la garde du roi.



Forte épée de la deuxième compagnie des mousquetaires vers 1759. La garde argentée est dite « à palmettes » elle comporte un anneau de pouce. La branche principale est fixée au pommeau par un crochet. La fusée présente une particularité rare : elle est en métal fondu dans lequel sont ciselés le filigrane et les virolles. C’est l’atelier de la Mouchette à Solingen qui a livré les armes de ces épées ; c’est aussi le fournisseur des gardes du corps. Rappelons ici les couleurs de chaque compagnie : dorée pour la première et argenté pour la deuxième. (Collection : musée de l’Empéri, Salon de Provence. Photo Raoul Brunon.)
Il semble que l'épée à branche, probablement simplifiée par rapport à celle de 1622, ait été en usage chez les mousquetaires pendant la plus grande partie du XVIIe siècle. Une fresque de l'un des anciens réfectoires de l'hôtel des Invalides, attribuée à Adam-Frans Van Der Meulen (1632-1690), en collaboration avec son élève Jean-Baptiste Martin (1659-1735) ou à Joseph Parrocel (1646-1704) représente un groupe de mousquetaires au siège de Gand de 1678. L'un de ceux-ci a été reproduit par M. Eugène Leliepvre. Son épée présente une monture à branches, assez sommaire.

La cavalerie de France, vers 1680, semble être armée d'une wallonne, à large lame, avec une branche de garde, deux pontats constitués de deux feuilles de tôle. Un pontet reliant la nervure de contre-garde au noeud du corps forme pièce de pouce. Cette arme, trop simple, n'a probablement pas été utilisée par les mousquetaires.


Monture d’un sabre de la deuxième compagnie des mousquetaires. Restauration. Magnifique lame de Klingenthal, droite, à dos plat et doubles pans creux. Fourreau en cuir de vache verni, sans alèse, avec trois garnitures argentées.

(Collection du musée de la manufacture nationale d’armes de Saint-Etienne, photo Christian Ariès)


Sabre de récompense pour services rendus à la monarchie. Restauration. Il a suffi de remplacer la plaque portant la croix par une autre avec les armes de France. (Collection J.Pageot, Nantes ; photo Christian Ariès)

Comment se présente l'épée des mousquetaires à la fin du XVIIe siècle ? 

Essayons de trouver la réponse en consultant un savant ouvrage terminé en 1695 : Les Mémoires d'artillerie recueillies par M. Surirey de Saint-Rémy, lieutenant du grand maître de l'artillerie de France. 

L'auteur présente une importante série d'armes militaires. En épées et sabres, il s'arrête à trois types: un sabre et deux épées. La planche qu'il nous soumet montre ces armes : l'une est une épée à large lame avec un gros pommeau, la branche de garde principale prolongée par le quillon de parade, le pas-d'âne au-dessus des coquilles. En bref, c'est exactement l'épée qui sera appelée plus tard épée à la mousquetaire et qui se présente ici comme une puissante épée de combat. 

Or, cette épée-là est portée par des mousquetaires sur de nombreux documents de la première moitié du XVIIIe siècle. Son appellation, toutefois, est consignée beaucoup plus tard et, semble-t-il, pour la première fois dans le texte de l'ordonnance du 25 avril 1767.



A gauche, Sabre d’officier de la première compagnie de mousquetaires. Restauration. Différence avec l’arme du rang : la monture est ciselée.la lame bleuie, rehaussée d’un sobre décor, porte la croix du corps. Le fourreau est en tôle alros que celui de la troupe est en cuir de vache verni, sans alèse.
(Collection : musée de l’Empéri, Salon de Provence. Photo Raoul Brunon.)

ÉPÉES 

A gauche : épée de ville de la première compagnie des mousquetaires. Restauration. Le pommeau est ciselé d’une dépouille de lion. Lame plate à dos et à large pan creux, bleuie, ornées de décorations dorés.

A droite : épée de ville de la deuxième compagnie de mousquetaires. Restauration. Le pommeau, en forme d’une urne, est orné d’un simple cannage vertical ; le filigrane de la fusée est plus riche que celui de l’épée de la première compagnie. Lame triangulaire, aussi bleuie et décorée de motifs dorés. 
(Collection : musée de l’Empéri, Salon de Provence. Photo Raoul Brunon.)

Dés leur retour à Paris, avant les Cent Jours, les mousquetaires portent un sabre différent de celui de l'Ancien Régime. La monture est composée de la branche de garde et de deux ou quatre branches de côté, avec, dans la palmette, le motif caractéristique des mousquetaires: la croix fleurdelysée et enflammée. La lame est droite ou avec une légère flèche et  une longueur de 33 pouces (89,3 cm).

Les épées conservées, les plus anciennes des deux compagnies, sont celles de la collection Christian Ariès et du musée de l'armée à Salon-de-Provence (ancienne collection Jean et Raoul Brunon). Christian Ariès les fait succéder, dès 1759 environ, aux modèles dits "à la mousquetaire". 

Ces épées à gardes, à palmettes dorées pour la première compagnie et argentées pour la deuxième compagnie, sont surmontées d'un pommeau rond légèrement aplati avec, ciselé sur chaque face, la croix du corps. La lame est plate, puissante, longue de 34 pouces (92 cm), large de 14 lignes (32 mm) et épaisse de quatre lignes (9 mm). C'est vraiment une forte épée. Et pourtant, à cette époque, les mousquetaires ne sont plus utilisés qu'à des besognes de garde ou d'estafette. 

La maison militaire du roi a vécu ses derniers jours de gloire à la bataille de Fontenoy, le 12 mai 1745.


A gauche : 

sabre d’hommes de la troupe de la première compagnie des mousquetaires. 
Restauration. Quatre branches latérales relient la banche principale au médaillon portant la croix fleurdelisée.

A droite : 

sabre d’homme de troupe de la deuxième compagnie des mousquetaires. 
Restauration. Le dessin de la monture est assez différent de celui du sabre de la première compagnie. Deux branches latérales au lieu de quatre ; le médaillon et son support accusent encore la dissemblance.

(Collection : musée de l’Empéri, Salon de Provence. Photo Raoul Brunon.)

Dés leur retour à Paris, avant les Cent Jours, les mousquetaires portent un sabre différent de celui de l'Ancien Régime. La monture est composée de la branche de garde et de deux ou quatre branches de côté, avec, dans la palmette, le motif caractéristique des mousquetaires: la croix fleurdelysée et enflammée. La lame est droite ou avec une légère flèche de 33 pouces (89,3 cm).

Les épées conservées, les plus anciennes des deux compagnies, sont celles de la collection Christian Ariès et du musée de l'armée à Salon-de-Provence (ancienne collection Jean et Raoul Brunon). Christian Ariès les fait succéder, dès 1759 environ, aux modèles dits "à la mousquetaire".
 
Ces épées à gardes, à palmettes dorées pour la première compagnie et argentées pour la deuxième compagnie, sont surmontées d'un pommeau rond légèrement aplati avec, ciselé sur chaque face, la croix du corps. La lame est plate, puissante, longue de 34 pouces (92 cm), large de 14 lignes (32 mm) et épaisse de quatre lignes (9 mm). C'est vraiment une forte épée. Et pourtant, à cette époque, les mousquetaires ne sont plus utilisés qu'à des besognes de garde ou d'estafette. 

La maison militaire du roi a vécu ses derniers jours de gloire à la bataille de Fontenoy, le 12 mai 1745.


Sabre, épée de ville et soubreveste de la 1re compagnie des mousquetaires, période restauration.

Invisible sur ce document, l’intérieur de la coquille de l’épée présente à droite et à gauche, la traditionnelle croix fleurdelisée des Mousquetaires.

(Collection Musée de l’armée, photo Mardini)

Le sabre des mousquetaires : arme de récompense

A peine un mois après son entrée à Paris, Louis XVIII prévoit la constitution d'une commission pour l'attribution des récompenses, entre autres à ceux qui ont participé aux mouvements royalistes cherchant à s'opposer à la Révolution. Il s'agit de reconnaître les actions d'éclat accomplies dans les armées de Bretagne et de Basse-Normandie et dans l'armée royale de l'Ouest.

La commission royale, dans sa séance du 30 juillet 1816, adopte les types d'armes de récompense prévues (épées, fusils, sabres) et notamment pour « …les sous-officiers et soldats... ayant fait le service de la cavalerie, un sabre conforme au modèle du sabre de MM. les mousquetaires du roi, auquel on ne fera que subtiliser les armes de France à la croix placée entre les branches de la poignée. » Il s'agissait des armes de la deuxième compagnie (garde argentée), produites par les ateliers de la manufacture de Versailles, lors de la reconstitution du corps, sorties du château de Vincennes où elles avaient été mises en dépôt pour être modifiées. La croix est remplacée par un médaillon portant les armes de France sur un fond de drapeaux. Sur la lame: Vive le roi. 
Les armes de récompense sont remises aux ayants droit le 25 août 1824, jour de la Saint Louis.

Ainsi se termine près de deux siècles d'histoire, dont 123 ans de gloire militaire.



Mousquetaire gris


On voit toutes ses armes : 

l’épée «  à la mousquetaire » la dragonne enveloppant l’arc de jointure.
 
Au-dessus de l’épée, la baïonnette d’estoc dans un fourreau de cuir brun. 

Les pistolets dans leurs fontes. 

Le canon du fusil est accompagné par le fût jusqu’à la bouche.

(Aquarelle de Pierre-François Cozette (1714-1801- vers 1763) documentation : Christian Ariès).



Sabre de la première compagnie des mousquetaires (gris), garde dorée.

Casque de la deuxième compagnie (noirs). Pièces d'époque Première Restauration, collection musée de l'Armée.

Chaque compagnie possède une devise : Quo ruit et lethum (la mort où elle passe) pour la première, et Altérius jovis, altera tela (autre Jupiter, autres foudres) pour la deuxième. On la voit ici frappée sur le bandeau du casque.



Egger Ph.