dimanche 18 juillet 2010

LE PATOU EST LE PLUS APTE À TENIR TÊTE AU LOUP

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Qui a peur du loup? Pas le patou! De l'avis des connaisseurs du loup, ce chien venu des Pyrénées est le meilleur atout pour contrer les attaques du carnivore sur les troupeaux. Sous l'impulsion du Parc naturel régional Gruyère Pays-d'Enhaut, une randonnée a été organisée hier à Rossinière autour de ce fameux patou. Reste que le loup n'est de loin pas la première cause de mortalité chez le mouton. L'an dernier, 200 ovins ont péri sous ses crocs en Suisse, contre plus de 10 000 de maladies ou d'accidents.


Qu'il nous fascine, qu'il nous fasse peur ou qu'il nous rende fou, le loup est à nouveau bien installé en Suisse et notamment dans les Préalpes. Si 11 loups ont été formellement identifiés sur l'ensemble du territoire national l'an dernier, on en dénombre près de 150 en France et 80 en Italie. Avec, chaque année, une vingtaine de jeunes qui cherchent de nouveaux territoires. Pourquoi pas en Suisse... Fort de ce constat, le Parc naturel régional (PNR) Gruyère Pays-d'Enhaut organisait hier une randonnée sur le loup et le chien de protection. Les personnes intéressées se sont retrouvées sur l'alpage de Jean-Robert Henchoz, éleveur de brebis laitières à Rossinière. Pas moins de 480 de ses ovins, sur un total de 900, passent l'été à la montagne. A la merci du lynx et du loup. Conscient qu'il ne peut pas lutter contre les grands prédateurs, l'homme a opté pour les chiens de protection. Il a eu son premier patou en 1995. Aujourd'hui, il en possède quatre. L'éleveur est convaincu que c'est la meilleure solution «même si elle n'est pas satisfaisante à 100%». Explications.

200 moutons croqués

«L'année passée, j'ai eu affaire pour la première fois au loup, qui a tué neuf de mes brebis. Le lynx en a aussi tué auparavant. Je dirais que si je perds une petite dizaine de bêtes par an, c'est bien. Le patou me permet donc de limiter les dégâts. Si je n'en avais pas, je pense que je perdrais une quarantaine de bêtes par saison d'estivage», analyse l'éleveur.Selon Daniel Mettler, responsable du projet «protection des troupeaux» pour Agridea, sur mandat de l'Office fédéral de l'environnement, le chien de protection est la mesure la plus efficace pour tenir les loups à l'écart des troupeaux. «Et ça ne va pas changer si l'on regarde les expériences que vivent d'autres pays, comme la France ou l'Italie», prévient-il. En Suisse, on compte actuellement 200 patous encadrés par Agridea, alors que le nombre total de moutons passant l'été à l'alpage est estimé à 250 000. Daniel Mettler estime que 58% de ces 250 000 moutons sont contrôlés. Les autres sont libres... de se faire croquer. Une phrase à relativiser cependant: l'an dernier, 200 moutons ont péri en Suisse sous les crocs du loup, alors qu'entre 8000 et 12 000 sont morts de maladie et d'accidents. A cela, il faut ajouter que le met préféré du loup reste le cerf, loin devant les ovins.

Certains inconvénients

Si tout le monde s'accorde à dire que le patou est la meilleure solution pour tenir tête au loup, qui est un animal extrêmement intelligent, n'en demeurent pas moins certains inconvénients. Comme le temps qu'il faut consacrer aux chiens, ne serait-ce que pour les nourrir. Jean-Robert Henchoz compte trois heures quotidiennes pour faire le tour de ses chiens. Il existe aussi des problèmes de cohabitation entre patous et humains...

Entente à trouver

«Les randonneurs sont nombreux à téléphoner à la gendarmerie, à se plaindre à l'Office du tourisme ou auprès de nous, par oral ou par écrit, en reprochant aux chiens de troupeaux d'être agressifs», relève Jean-Claude Roch, surveillant de la faune pour les Préalpes vaudoises. «Les promeneurs doivent apprendre à se comporter face aux patous (voir repères). Nous faisons d'importants efforts de communication, notamment avec des panneaux sur les alpages, mais la route est encore longue», reconnaît Daniel Mettler.

Parfois trop agressifs

Eleveur de patous pour Agridea et répondant pour les cantons de Vaud, Valais et Fribourg, Jean-Pierre Vittoni admet que certains chiens sont parfois trop agressifs. Dans les cas extrêmes, ils peuvent être euthanasiés. Passionné par ces chiens, le Vaudois, lui-même moutonnier, affirme qu'il faut au moins deux ans pour dresser un bon patou.Hier les chiens de protection de Jean-Robert Henchoz n'ont pas goûté le monde venu les admirer. L'un s'est réfugié au milieu du troupeau, rassemblé dans l'étable pour fuir la chaleur. L'autre a pris le large dans l'alpage. Pour l'agressivité, prière de repasser.

Aurélie LEBREAU