lundi 1 août 2011

Les biscuits militaires se vendent comme des petits pains en épicerie

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(Photo Keystone)


 
 
 
Pour la Fête nationale, la chaîne de magasins Volg a obtenu le droit de vendre les biscuits que Kambly produit pour l’armée. Les stocks sont pris d’assaut.

L’armée suisse a perdu un bastion historique qu’elle tenait depuis 1959. Elle ne détient plus l’exclusivitié des biscuits militaires Kambly. A l’occasion du 1er Août, son unique fournisseur livre les magasins de village de la chaîne alémanique Volg – propriété du groupe Fenaco, elle possède notamment des enseignes à Tavel et Heitenried. Et comme le rapportait hier le «Blick», pour les épiciers de village, les affaires sont... canon. Certains commerces seraient déjà en rupture de stock!

«Par fidélité à l’armée»

Directeur du marketing de Kambly, Matthias Hoffmann affirme que ce sont 100000 portions de biscuits qui ont été livrées aux commerces de la chaîne, pour un montant gardé confidentiel. A l’entendre, toutefois, ce n’est pas avec cette transaction que l’entreprise familiale centenaire, qui ambitionne de devenir numéro un mondial des biscuits haut de gamme (120 millions de francs de chiffre d’affaires), fera son beurre. «Nous continuons la production des biscuits militaires avant tout par fidélité à l’armée. Leur fabrication et leur emballage sont en effet extrêmement dispendieux, car ils exigent que nous modifiions toute notre chaîne de fabrication», explique Matthias Hoffmann. «C’est pourquoi nous n’en fabriquons que deux fois par année.» Ce sont 700000 portions, l’équivalent de 70 tonnes, qui sortent chaque année de l’usine bernoise de Trubschachen, dans l’Emmental. Direction, les cantines de l’armée ainsi que quelques petites échoppes spécialisées.

Pas de secret défense

En élargissant la diffusion aux commerces, à un prix majoré de 50 centimes qui fait s’étouffer les puristes, Kambly vendrait-il une miette du patrimoine helvétique? Contacté par «La Liberté», le porte-parole de l’armée Daniel Reist confirme que la recette des biscuits est propriété du seul fabricant, et qu’elle n’est pas frappée au sceau du «secret défense». Les ingrédients de sa pâte sont d’ailleurs connus: farine, amidon de pomme de terre, sucre de raisin, sucre, poudre de lait écrémé, extrait de malt d’orge, sel, graisse végétale. La recette vieille de plus de cinquante ans répond à des critères nutritifs stricts fixés par l’armée. Et comme la Suisse, ses biscuits militaires, qui se conservent pendant trois ans, sont d’une parfaite neutralité – au niveau du goût, s’entend. «Ils sont conçus comme substitut au pain et doivent par conséquent pouvoir accompagner tant du fromage et de la saucisse que du chocolat», rappelle Matthias Hoffmann. Et apparemment, il y a encore des amateurs. Alors, à quand des friandises «Swiss Military» dans les grandes surfaces? «Nous n’avons reçu aucune demande à ce jour. Voyons d’abord comment marche cette action», précise le directeur marketing de Kambly. Qui ajoute: «Volg convient bien à une telle opération, car elle possède des enseignes dans des petites localités qui continuent d’abriter des cours de répétition.» Le problème, c’est qu’il y a de moins en moins de militaires, qui effectuent de moins en moins de jours de service. Tant et si bien que «le produit est de moins en moins ancré dans la population», admet Matthias Hoffmann. Résultat: les soldats d’aujourd’hui ne sont plus harcelés par les enfants comme l’étaient leurs aînés. Certains miliciens disent même qu’on leur rit désormais au nez quand ils proposent leurs biscuits...
 
SERGE GUMY
La Liberté