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lundi 23 avril 2018

Le jour où un pilote allemand a sauvé la vie de ses ennemis américains


Plusieurs Boeing B-17 Flying Fortress


Cette histoire se déroule juste avant Noël, le 20 décembre 1943. À tout juste 21 ans, Charlie Brown, sous-lieutenant au sein de la prestigieuse Air Force américaine et commandant de bord d’un Boeing B-17 Flying Fortress, part en mission pour pilonner plusieurs usines à proximité de Brême, au nord de l’Allemagne, accompagné par des dizaines d’avions. Son puissant bombardier quadrimoteur, surnommé le Ye Olde Pub, comprend un équipage de neuf hommes : un copilote, un navigateur, un bombardier, un mitrailleur de la tourelle supérieure et ingénieur de vol, un opérateur radio, un mitrailleur de queue, un mitrailleur latéral gauche, un mitrailleur latéral droit et un mitrailleur ventral.


B-17 de l’US Air Force


Les usines visées sont protégées par de nombreux canons anti-aériens, ainsi qu’une flotte de chasseurs allemands, des Messerschmits et des Focke-Wulf. Rapidement, l’attaque tourne au désavantage des Américains et le Ye Olde Pub se retrouve forcé de quitter sa formation, poursuivi par une douzaine de chasseurs.


Oberleutnant Ludwig Franz Stigler


Le B-17 de Charlie Brown subit alors de nombreux tirs de la chasse allemande, son avion est endommagé de toutes parts. Plusieurs membres de l’équipage sont blessés, l’un d’entre eux meurt sur le coup. Charlie Brown ne peut rien faire d’autre que se traîner à quelques centaines de pieds au-dessus du sol. C’est ainsi qu’un autre pilote va entrer en scène, le véritable héros de cette histoire, il est allemand et son nom est Franz Stigler.

Le bombardier de Charlie Brown se traîne donc ainsi au ras du sol et survole sans le savoir un terrain allemand parfaitement camouflé. Franz Stigler l’aperçoit. « C’est impossible qu’un avion puisse encore voler dans cet état-là », pense-t-il. Sur un simple coup de tête, et sans aucune autorisation de ses supérieurs, il décolle alors à bord de son Messerschmitt Bf 109 G-6 pour abattre le bombardier. Charlie Brown se débat avec les commandes de son avion pour tenter de reprendre quelques mètres d’altitude et pouvoir donner la chance à son équipage d’évacuer le Ye Olde Pub en parachute. Préférant être prisonnier de guerre plutôt que d’être tué par un obus allemand.

Mais à la grande surprise du pilote américain, Franz Stigler n’ouvre finalement pas le feu sur le bombardier. « J’ai vu son mitrailleur, allongé sur le dos, saignant abondamment. Donc, je n’ai pas pu tirer. » Les paroles de son supérieur lors des opérations en Afrique du Nord, Gustav Rödel, lui sont revenues en mémoire : « Vous êtes pilotes de chasse aujourd’hui, demain, toujours. Si jamais j’apprends que l’un d’entre vous a attaqué un pilote en parachute, je le tuerai moi-même. »


Charlie Brown


Franz Stigler expliquera beaucoup plus tard son geste : « Pour moi, c’était comme s’ils avaient été sous leur parachute, je ne pouvais pas les abattre. » Franz Stigler décide alors de faire comprendre par geste à Charlie Brown de le suivre car la radio du B-17 est également hors service. Il lui indique les côtes du nord-est, c’est-à-dire la Suède (pays neutre pendant la Seconde Guerre), plus facilement accessible que l’Angleterre. Difficile de se faire comprendre sans radio, ni Charlie Brown ni aucun membre de l’équipage ne comprennent au début les véritables attentions de Franz Stigler.

Reconstitution de synthèse

Le pilote allemand continua à voler en formation avec l’avion de Charlie Brown, sur le côté gauche, pour empêcher la défense anti-aérienne allemande de tirer sur le bombardier, et continua son escorte jusqu’à la côte pour leur permettre d’échapper aux murailles de DCA mises en place par les Allemands sur toute la façade nord-ouest de l’Europe, également connues sous le nom de « mur de l’Atlantique ». Charlie Brown, n’étant pas certain des intentions de Franz Stigler, ordonna que la tourelle dorsale reste pointée vers le chasseur pour le mettre en garde mais ordonne à ses hommes de ne pas tirer. Franz Stigler s’assure que le bombardier quitte l’espace aérien allemand, le salue puis rentre à sa base.



Aucun des deux pilotes ne parla de cet incident en rentrant chez eux, avec un tel comportement, Franz Stigler risquait la cour martiale tandis que pour Charlie Brown, il était inconcevable, à l’époque, de voler aux côtés d’un avion ennemi, aux yeux de l’opinion publique. C’est ainsi que le pilote américain a reçu l’ordre de ne jamais divulguer ce qu’il s’était passé pour ne pas générer un sentiment de compassion envers les pilotes allemands. Charlie Brown soulignera plus tard : « Quelqu’un avait décidé qu’on ne pouvait pas être humain et voler au côté d’un avion allemand. »



Après avoir raconté cette histoire lors d’un rassemblement militaire de pilotes, en 1986, Charlie Brown a recherché le pilote qui a sauvé sa vie et celle de son équipage. Ce n’est que quatre ans plus tard qu’il retrouva Franz Stigler, et qu’une grande amitié commença. Ils s’éteindront tous les deux la même année, en 2008.


Anaelle Smaili