Genève, Vaud et Neuchâtel accusent Assura et Supra de vouloir transférer leurs réserves vers d'autres cantons sous-dotés au lieu de réduire les primes de ceux qui ont permis ces réserves. Les trois cantons ont informé l'Office fédéral de la santé publique de cette tentative de transfert inadmissible. Ces réserves sont en effet constituées par leurs assurés dans le cadre de l'assurance-maladie. Ils désignent explicitement les deux assureurs romands Assura et Supra.
Les trois cantons ont informé l'Office fédéral de la santé publique (OFSP) d'une «tentative de transfert inadmissible» de réserves constituées par leurs assurés dans le cadre de l'assurance-maladie. Ils désignent explicitement deux assureurs romands: Assura et sa «petite soeur» Supra. Il s'agirait de surplus de réserves, de 165 millions pour Genève, de 54 millions pour Neuchâtel et 52 millions pour Vaud. Ces montants seraient distribués vers d'autres cantons pour égaliser les taux de réserves.Cette opération est jugée «inadmissible» par les trois cantons: «Les réserves accumulées résultent des primes payées par les assurés de ces cantons et, s'il y a des surplus, ils doivent leur revenir sous forme de diminution de primes», disent-ils. L'OFSP est ainsi avertie. Si, «contre toute attente», il approuvait les primes fondées sur ce transfert, les trois cantons s'adresseraient au Conseil fédéral pour qu'il prenne des dispositions urgentes afin de préserver les intérêts de leurs assurés.
Et la solidarité?
Si le canton de Genève se dit «scandalisé» par cette opération des deux assureurs, le ton est tout aussi ferme à Neuchâtel. «A quoi bon consentir de gros efforts pour maîtriser et réduire les coûts de la santé si le bénéfice, au niveau des réserves et des primes, est détourné vers d'autres cantons?», demande Gisèle Ory, ministre neuchâteloise de la Santé. Si les primes sont le reflet des coûts, elles doivent diminuer de 2% en 2011, et non augmenter de 2,5% comme annoncé, souligne-t-elle.Berne et Saint-Gall sont en sous-couverture et craignent de fortes hausses de primes? Et la «solidarité confédérale» devrait fonctionner à leur égard? «Il faut parvenir à un équilibre, mais on reparlera de solidarité lorsque tous les cantons paieront les primes qui correspondent aux coûts réels, compte tenu de leurs efforts pour les maîtriser», répond Gisèle Ory. Le Département genevois de la santé rappelle que, lorsque Neuchâtel et le Jura ont dû rattraper leur sous-couverture, personne n'a bougé. A l'OFSP, on ne peut que «comprendre» la réaction des trois cantons. D'autant que, l'an dernier, l'office avait tenu le même raisonnement et tenté de faire baisser des primes en raison de réserves excédentaires. Mais, sur recours d'Assura, le Tribunal administratif fédéral (TAF) a rendu un jugement sec en décembre dernier: il n'y a aucune base légale pour faire ce lien: les réserves ne peuvent pas être prises en compte pour la fixation des primes. L'OFSP est dès lors tenu de s'y conformer.
Réserve minimale
C'est aussi ce qu'ont fait valoir Assura et Supra hier: la loi oblige les assureurs à atteindre une réserve minimale au niveau national, et non cantonal. C'est donc en accord avec la loi (avec la confirmation du TAF) que ces assureurs ont décidé de répartir «équitablement et de manière équilibrée» leur réserve natio- nale entre les différents can- tons. C'est d'ailleurs pourquoi Genève, pour créer la base légale en question, a déposé une ini- tiative visant à «cantonaliser» les réserves.En attendant, le Conseil fédéral a donné mandat à l'OFSP de rechercher une solution et de nouveaux instruments pour mieux évaluer les coûts futurs dans les cantons et, par conséquent, calculer plus précisément les primes des caisses en fonction de leur effectif d'assurés.
François NUSSBAUM