Les Indiens Kogis sont les derniers héritiers des Tayronas, l’une des plus grandes sociétés précolombiennes du continent sudaméricain.
Au nombre de 12.000, repliés dans les hautes vallées de la Sierra Nevada de Santa Marta, en Colombie, ils ont développé leur culture au coeur d’un territoire géographique unique : un massif montagneux culminant à 5.800 mètres et situé à 42 km de la mer des Caraïbes (le plus haut du monde en bord de mer).
Cette pyramide aux sommets enneigés présente une variété unique de climats et d’écosystèmes. Plus qu’une montagne, la Sierra Nevada représente le coeur du monde, la Mère Terre, qui a transmis au peuple Kogi son code moral et spirituel.
De la Sierra Nevada de Santa Marta, ceux qui l’ont connue disent qu’elle est étrange, mystérieuse, attachante. Sans doute est-elle un peu tout cela.
Sa localisation à seulement 45 km de la mer, sa forme, une pyramide aux parois vertigineuses, la variété de ses climats, font de cette île montagneuse, cernée par la mer et les déserts, un monde à part.
C’est là que vivent les Kogis, les Aruacos et les Arsarios, derniers héritiers de l’une des plus brillantes civilisations du continent sud-américain, les Tayronas.
Des 500.000 habitants approximativement dénombrés au XVIème siècle, on ne compte plus aujourd’hui que 25.000 représentants.
Plus qu’une simple montagne, la Sierra Nevada représente à leurs yeux, le centre du monde, la mère terre qui leur a transmis le code moral et spirituel qui régit leur civilisation. Peuple de sages et de philosophes, ils connaissent une vie spirituelle intense. Privilégiant les choses de l’esprit, très tôt, ils initient certains de leurs enfants aux mystères de leur religion, selon un rite et une éthique particulièrement rigoureuse. L’acquisition de ce savoir n’a qu’un but, s’efforcer d’être en harmonie avec soi-même et avec le monde. Au centre de cet univers, les Mamus – prêtres et philosophes – règlent l’ordre social et spirituel de la communauté. Grands observateurs des phénomènes naturels, assurant les fonctions de juges et de médecins, ils veillent au bien-être de leur communauté et à l’équilibre de l’univers. Menant une existence secrète et isolée, les Indiens Kogis, derniers héritiers de l’une des plus brillantes civilisations du Continent sud-américain, les Tayronas, pratiquent une immuable transhumance entre leurs fermes et les villages où ils se retrouvent lors de cérémonies religieuses.
Plus qu’une simple montagne, la Sierra Nevada représente à leurs yeux, le centre du monde, la mère terre qui leur a transmis le code moral et spirituel qui régit leur civilisation. Peuple de sages et de philosophes, ils connaissent une vie spirituelle intense. Privilégiant les choses de l’esprit, très tôt, ils initient certains de leurs enfants aux mystères de leur religion, selon un rite et une éthique particulièrement rigoureuse. L’acquisition de ce savoir n’a qu’un but, s’efforcer d’être en harmonie avec soi-même et avec le monde. Au centre de cet univers, les Mamus – prêtres et philosophes – règlent l’ordre social et spirituel de la communauté. Grands observateurs des phénomènes naturels, assurant les fonctions de juges et de médecins, ils veillent au bien-être de leur communauté et à l’équilibre de l’univers. Menant une existence secrète et isolée, les Indiens Kogis, derniers héritiers de l’une des plus brillantes civilisations du Continent sud-américain, les Tayronas, pratiquent une immuable transhumance entre leurs fermes et les villages où ils se retrouvent lors de cérémonies religieuses.
Les petits frères abîment tout, pas seulement la Sierra, non ils abîment la terre, la nature, ils ne respectent rien.
Au début, beaucoup de Kogis ne vous croyaient pas.. Ils pensaient que vous étiez comme les autres, que vous veniez acheter la terre pour vous.
Beaucoup de gens viennent ici pour prendre, utiliser, se servir. Ils ne protègent pas les choses, ils ne les pensent pas, ils les utilisent.
Maintenant on voit que si, c’est vrai, vous travaillez vraiment pour la Sierra, pour essayer de redonner de la force à la nature.
Nous ne vous demandons pas seulement de nous aider pour retrouver des terres, non, nous vous demandons surtout de nous aider à protéger ce que vous appelez la nature, les êtres vivants, les animaux, les plantes, les arbres, mais aussi les pierres. Quand on vous parle de protéger la nature, des terrasses ou sont les ancêtres, des sites d’offrandes pour les pagamientos, nous ne savons pas si vous comprenez de quoi nous parlons. Qu’est ce que la nature pour vous ? Est-ce que vous voulez vraiment la protéger ?
Ne pensez pas seulement à l’argent, l’argent c’est utile bien sur, mais pensez aussi à ce qui est important, à la mémoire, à vos anciens, ce qu’ils savaient, ce qu’ils faisaient pour la nature. Retrouvez ces connaissances, pour sauver la nature et nous sauver. Retrouvez cette mémoire. L’argent, il vous en faut toujours plus, pour faire toujours plus de choses, toutes très importantes. Mais quand il n’y aura plus rien, a quoi vous servira votre argent ? à quoi serviront ces choses « importantes » ? C’est comme si vous aviez oublié la nature, les pères et les mères de toutes choses, qui donnent la vie.
Sans doute ne le savez vous pas, mais lorsque vous nous rendez de la terre vous ne nous rendez pas seulement des terres pour que nous puissions cultiver, vous nous rendez aussi des lieux sacrés, les sites de nos ancêtres ou l’on peut faire notre travail traditionnel pour protéger les choses. Sur ces terres et dans la Sierra, grâce aux « cuentas », que vous nous ramenez, nous pouvons faire les offrandes nécessaires pour garder la loi. Tout ce matériel que vous nous ramenez comme cela, cela nous permet de retrouver des mots, de faire vivre la mémoire et d’élargir notre pensée pour qu’elle reste vivante, forte.
De l’autre côté, là bas, vous pouvez apprendre à refaire les choses avec la nature. C’est pour cela que nous avons accepté cette construction chez vous, cette kankurua, pour que vous soyez un peu avec nous dans la Sierra, pour que nous puissions apprendre à penser ensemble, comme des frères. Il faut que vous gardiez cela dans vos têtes et dans vos cœurs, que vous le gardiez vivant.. vraiment vivant.. pas seulement sur un papier.. ou dans des mots. Il faut allez à la Loma, penser, penser là ou sont les choses, c’est à la Loma que l’on voit les choses importantes, celles de l’intérieur.
Après, quand vous serez dans la Kankurua, avec le feu, nous serons tous là, avec vous, comme maintenant, vous êtes un peu avec nous, vous serez un peu avec nous, dans la Sierra. Nous pourrons penser ensemble.. penser pour anticiper.. penser pour protéger la mère.
Alors, en quoi consiste cette sagesse des kogis ? Elle tient à quelques principes simples : » La relation respectueuse, harmonieuse et de réciprocité bienveillante entre les hommes et la “Terre-mère” ou la Nature – tout le contraire de notre style de vie articielle et maintenant virtuelle, fondée sur la peur de la Nature, le mépris, le combat ou le déni. » La relation privilégiée et pourvoyeuse de sens, avec le monde des Esprits ou monde spirituel, assurée par l’intermédiaire des chamanes (les mamus). Tout le contraire de notre culture matérialiste, enlisée dans un consumérisme frénétique, égocentrique et déboussolé. » La nécessité de veiller sans cesse à la cohésion et à l’harmonie du groupe ou de la tribu – c’est encore le rôle des chamanes garant de la justice et de la solidarité nécessaire. Tout le contraire de notre environnement social, délétère, basé sur la compétition, l’exploitation, et le combat de tous contre tous pour la course au profit personnel. »
Une éducation globale, holistique qui commence très tôt auprès des enfants pour leur inculquer de manière pratique la relation juste avec la nature, avec les esprits, avec soi-même et avec le groupe, éducation de sagesse prise en charge par des sages, les chamanes. Tout le contraire de cette éducation coupée du réel, dans l’accumulation des savoirs livresques, déconnectés de la vie. La santé chez les kogis J’ai eu le privilège de rencontrer récemment Eric Julien, porte-parole des kogis, pour un interview dans le journal Santé Intégrative n°13 et n°14, au sujet de leur conception de la santé. Quel ne fut pas mon étonnement, quand je lui ai demandé comment on guérissait les personnes malades chez les Kogis. Voici ce qu’il m’a répondu : “il y a une question à se poser d’abord : est-ce qu’il y a des personnes malades chez les Kogis, au sens de personnes alitées, avec des infections, ne pouvant plus bouger, etc ? Cela arrive, mais c’est assez rare. Les maladies sont souvent liées, soit à la réduction des territoires, ce qui génère une promiscuité trop étroite avec les animaux domestiques, des parasitoses peuvent s’installer ; soit à l’arrivée d’infections d’origine externe à leur communauté (grippes) et donc difficile à soigner par les mamus. En revanche, je n’ai pas eu l’occasion de croiser de Kogis atteints de cancer ou confrontés à des difficultés d’ordre psychologiques. C’est une société ou la notion de « prévention » des déséquilibres est omniprésente. Les Kogis sont régulièrement invités à verbaliser leurs émotions, leurs intentions réelles ou imaginaires dans des lieux, et des instants spécifiques, adaptés à chaque situation. (conflits de voisinage, conflits familiaux, mauvaises récoltes, travail collectif non réalisé, jalousie etc..).
Dès leur plus jeune âge, les enfants sont habitués à verbaliser, mettre des mots sur leurs maux, dialoguer, poser et se poser des questions. Pourquoi ? revient en permanence dans leurs échanges. Ils considèrent que la connaissance est au cœur de la vie juste et harmonieuse d’un être humain.Il y a des mamus spécialisés pour chaque domaine, chaque type de difficultés, et des lieux spécifiques, dont, en particulier dans chaque village, la “nuhé”, une sorte de temple symbole de l’univers et du corps humain. Il symbolise aussi l’utérus protecteur d’où vient la vie, dans lequel on se sent protégé pour libérer la parole en toute confiance. C’est pour cela que pénétrer dans la « Nuhé », nécessite tout un travail préalable de purification et de « purges » de ses émotions négatives, de ses colères et rancoeurs ; on ne peut pas rentrer dans ce lieu sacré avec des énergies négatives.
L'histoire est un peu folle bien qu' elle ne manque pas d'être cruelle pour les Indiens Kogi. Au nord de la Colombie, ces descendants de la civilisation des Tayronas, massacrés au XVIe siècle par les conquistadores, vivent aujourd'hui un autre cauchemar, celui de leur possible disparition. Repliés dans les hautes vallées de la Sierra - Nevada de Santa Marta, la plus haute chaîne côtière au monde, culminant à 5 800 mètres d'altitude et à moins de 45 km de la mer des Caraïbes, les Kogi sont au nombre de 12 000, plus du double si l'on inclut trois autres communautés, Aruacos, Arsarios et Wiwas, quand l'ensemble de cette population précolombienne était de 500 000 au moment de la conquête espagnole. La menace est bien réelle sur cette pyramide montagneuse, « centre du monde » et « mère terre », prise dans l'étau des violences entre paramilitaires et mouvements de guérilla (FARC et ELN), convoitée par les pilleurs de tombes et les colons, repaire également des narcotrafiquants...
Au fur et à mesure qu'ils sont dépossédés de leurs terres ancestrales, 70 % en l'espace de trente ans, les Kogi meurent à chaque fois un peu plus. Car ces terres sont les « racines » qui leur permettent d'accomplir leurs rituels et leur mission en préservant l'équilibre d'un univers dont ils font partie intégrante. Pour eux, la perte de la terre signifie aller toujours plus haut, dans des conditions extrêmes, là où toute survie devient impossible. Auquel cas les Kogi, inexorablement, seraient condamnés à l'extinction. Le fatalisme d'une telle vision a fait soulever bien des montagnes à nombre de « petits frères », comme le disent les Kogi à propos des membres de nos sociétés modernes (pour qualifier ceux qui ne pensent pas), afin de rendre leurs terres aux Kogi. L'un d'eux, Éric Julien (1), géographe de formation, guide de montagne « dans une autre vie », était en 1985 coopérant en Colombie quand il les découvre : atteint d'un oedème pulmonaire lors d'une course dans la Sierra à 4 500 mètres, il ne survivra qu'après avoir été recueilli et soigné par les Kogi, sans qu'il sache aujourd'hui trop comment. Durant sa convalescence il se passionne pour la culture de ces héritiers des Tayronas et, pour les remercier de lui avoir sauvé la vie, il promet de les aider à récupérer leurs terres ancestrales. Dix ans plus tard, l'idée lui « trottant dans un coin de la tête », il crée l'association Tchendukua-Ici et ailleurs (2), pour mobiliser des dons en France pour permettre aux Kogi de racheter leurs terres. L'opération est alors baptisée « Mille personnes pour une terre ».
Le premier lot de 50 hectares est acquis pour 70 000 francs en 1998, suivi par d'autres, représentant actuellement un total de plus de 1 500 hectares. Une aide indissociable de celle de son « frère de coeur » colombien, Gentil Cruz. Depuis les cités de pierre ont revu le jour à Santa Marta, des terres reprennent vie, des rituels sacrés sont réinstaurés, des objets précieux précolombiens (objets en or, perles, flûtes, quartz) récupérés auprès des pilleurs de tombes sont rachetés et restitués aux autorités spirituelles de la communauté, les Mamu. Une mémoire ainsi reprend vie. Et comme celle d'Éric Julien autrefois, la voie de la guérison est - ouverte. « Ce qui est fascinant, explique-t-il, c'est le potentiel dont est pourvue une société précolombienne qui n'a pas connu de rupture historique depuis 4 000 ans. C'est un cas unique en Amérique latine. Les Kogi ont toujours gardé leur langue, leur système politique, juridique, éducatif pour qu'ils puissent réinvestir et réveiller les cités de leurs ancêtres. » Pour Éric Julien, une telle société peut choisir son futur. Lorsqu'elle refuse, par exemple, de cultiver le café, elle paraît « primitive » en rejetant une forme de logique économique. Mais pourquoi le ferait-elle au risque de détruire l'équilibre social du groupe ? Ce peuple aurait-il préservé ce que nous, en - revanche, nous aurions perdu ? Des liens étroits, multiples, sont tissés avec leur milieu naturel, interrogeant notre propre futur. Ils veulent l'équilibre et la préservation du monde et non sa domination. Ils sont pacifiques et veulent vivre en paix ensemble.
De fait, les Kogi sont loin de la modernité, tout au plus achètent-ils des bottes en caoutchouc pour se protéger des serpents, ou des machettes nécessaires à leurs travaux. « On ne peut pas qualifier d'archaïque une société qui veut garder sa mémoire, hautement démocratique, où la pauvreté n'existe pas, dont les membres tentent de vivre mieux ensemble, en paix, à leur juste place, où la femme est respectée, et où la finalité de vie est d'être heureux », poursuit Éric Julien. Tout cependant ne va pas de soi. Dans la longue quête des Kogi, tout dialogue est souvent remis en question. Il y a environ un mois, deux terres rachetées pour les rendre aux Kogi ont été volées par des « paras » colombiens d'extrême droite. Les familles ont été chassées et on a dénombré une cinquantaine de morts. Le « frère » d'Éric Julien, Gentil Cruz a disparu depuis quatre mois sans « qu'on est de trace de lui ». L'État colombien de son côté ne fait pas grand cas de ces « indigènes ». La Sierra pourrait voir apparaître des téléphériques et, si ce projet devait aboutir, il en serait fini des Kogi. Avant 1991, les Indiens (800 000 dans l'ensemble de la Colombie soit 88 communautés) étaient considérés comme des mineurs, sous tutelle de l'Église et ils ne disposaient d'aucune pièce d'identité. Avec la nouvelle Constitution, les Indiens sont reconnus du point de vue juridique, ils peuvent organiser le système politique de leur choix et ont une relative autonomie. Toutefois les fonds gouvernementaux mis à la disposition des préfectures pour contribuer au financement de projets de - développement constituent autant de bombes à retardement pour les Indiens, qui comme les Kogi veulent redonner vie à leur mémoire et à leurs terres.
Egger Ph.