Lancé en 2001, le site de petites annonces Anibis fait partie des rares entreprises numériques romandes à avoir acquis une portée nationale. Après avoir décliné le concept en Suisse alémanique, il a lancé une version en italien.
Immobilier, automobile, emploi, animaux de compagnie… Sans oublier l’érotisme! Qui n’a jamais consulté les petites annonces en ligne du site internet Anibis? En dix ans, ce marché a largement quitté le papier pour migrer vers le Net. Et la société établie à Flamatt (FR), qui emploie dix personnes, sait profiter de cette tendance: entre 2009 et 2013, le nombre moyen d’annonces présentes sur la plateforme est passé de 160′000 à 500′000 et les visites par mois de 2,7 à 5,7 millions. Ce qui en a fait le plus grand portail suisse du genre, en nombre de petites annonces publiées.
Forte de sa domination du marché romand, qui constitue toujours les trois quarts de son chiffre d’affaires (non communiqué), Anibis s’attaque à présent au pays entier. Après avoir lancé une version en allemand en 2011, l’entreprise a inauguré sa déclinaison italienne en mai dernier. «Nous investissons beaucoup dans la publicité pour nous faire mieux connaître outre-Sarine, où nous avons enregistré une croissance continue du trafic, souligne son directeur, Patrik Hagi. Quant au marché italophone, il est réduit mais très prometteur. Une expansion à l’étranger n’est pas prévue pour le moment.»
Fondée par l’informaticien Laurent Boatto à l’EPFL en 2001, rachetée en 2009 à son créateur par le groupe Ringier (propriétaire de L’Hebdo), pour qui cette activité est aujourd’hui devenue un pilier stratégique, Anibis a conservé les ingrédients initiaux qui ont fait sa réputation: un site à l’architecture simple, peu de publicités, des annonces de base gratuites. La société tire ses revenus à la fois des annonces payantes, qui garantissent une durée de parution plus longue ainsi qu’une meilleure visibilité, et des encarts publicitaires.
Sur son créneau, Anibis affronte directement des sites comme petitesannonces.ch, le précurseur américain craigslist.org ou encore tutti.ch, fruit d’un partenariat entre le groupe suisse Tamedia et la société norvégienne Schibsted. Mais aussi, dans un registre un peu différent, Ricardo, une filiale du groupe sud-africain Naspers, qui propose un système d’enchères. Autre modèle d’achat en ligne ayant connu un certain succès récemment en Suisse, quoique plus éloigné des petites annonces: celui des ventes groupées, avec Groupon ou Qoqa par exemple.
Patrik Hagi concède que cette multiplication des possibilités d’achat et de vente en ligne a grignoté une part du marché des petites annonces. Mais il se dit confiant de la viabilité du modèle de la vente directe, sans rabais: «Nous mettons en avant la simplicité. C’est notre avantage compétitif. Les consommateurs en ligne n’ont pas forcément le temps ni la volonté de participer à des ventes aux enchères. D’ailleurs, un site comme Ricardo place de plus en plus d’annonces à prix fixe.»
La concurrence est aussi interne, puisque Ringier Digital détient 49,9% du capital de la plateforme Scout24 (le reste appartient à Deutsche Telekom), qui se compose de sites spécialisés dans la vente dans l’immobilier et l’automobile, ainsi que dans la recherche d’emploi. Un doublon? «Non, c’est volontaire, répond Thomas Kaiser, qui dirige la division numérique du groupe zurichois. Les clients en profitent, car leur annonce, contre paiement, est publiée sur les deux canaux et peut être vue par un maximum de personnes, augmentant ainsi les chances de vente.»
En plus de son extension au niveau national, le site investit aussi beaucoup dans le mobile, avec une application qui draine aujourd’hui 35% du trafic total. «D’ici à quelques semaines, nous proposerons une nouvelle application pour chercher et trouver les annonces plus rapidement et plus facilement», annonce Patrik Hagi.
L’un des plus gros défis pour la crédibilité du site de petites annonces restera néanmoins sa capacité à garantir l’authenticité des produits vendus et à éviter les «arnaques internet», comme les fausses annonces immobilières, particulièrement nombreuses en période de pénurie de logement.
«C’est le revers de la médaille, vu le succès du site et le nombre d’annonces et de pages consultées: en Suisse romande, la plupart des cas d’escroqueries en ligne par petite annonce sont véhiculés à travers cette plateforme», explique Valérie Muster, à la Fédération romande des consommateurs (FRC). La responsable note toutefois qu’Anibis a rédigé une mise en garde à l’intention des internautes. «Nous lui signalons par ailleurs des fausses annonces, en demandant que la société les retire dans un délai court.»
Patrik Hagi se veut rassurant: «Toutes les annonces sont soumises à un contrôle automatique et à une vérification manuelle. Nous avons été le premier site de petites annonces à introduire, l’an passé, une vérification par SMS. Ce principe nous aide à conserver un site propre, même si nous ne pouvons pas offrir une garantie à 100%. Au final, les internautes sont toujours invités à respecter des règles élémentaires de prudence.»
Collaboration: Céline Bilardo