Les chiens sont vraiment nos meilleurs amis. Une étude publiée cette semaine (lien plus bas) montre non seulement que les chiens et les humains distinguent des émotions dans la “voix” de l’autre, mais ils sont également tous deux plus à l’écoute des sons “joyeux”. Et l’étude non invasive, qui a utilisé des techniques de neuro-imagerie à faible contrainte pour comparer les cerveaux des humains et d’autres espèces, peut être félicitée.
Attila Andics et ses collègues de l’université Loránd Eötvös à Budapest, en Hongrie, ont formé des chiens à se coucher et à rester immobiles dans un scanner en portant un casque audio, permettant aux scientifiques de cartographier les zones de leur cerveau sensible à la voix.
Deux des auteurs de l’étude, Ádám Miklósi et Marta Gácsi, sont bien connus pour leurs recherches sur le comportement du chien et du loup, ainsi que sur la relation homme-chien en tant que chercheurs pour le Family Dog Project, le premier groupe de recherche a enquêter sur les fondations évolutives et éthologiques du rapport entre l’homme et son plus fidèle ami.
Pour effectuer une analyse réussie du cerveau de l’animal éveillé (non anesthésié), en utilisant l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle ou IRMf, celui-ci doit rester immobile tout au long de l’analyse. L’information recueillie peut aider à cartographier les fonctions cognitives supérieures, alors que les différentes zones du cerveau "s’illuminent" lorsque l’animal est exposé à divers stimuli (comme des sons).
Malheureusement, la plupart des animaux ne pourront rester immobiles dans une machine IRMf sans être retenus. En conséquence, des décennies de recherche sur les singes ont été menées dans des laboratoires où on leur implanté chirurgicalement des capteurs dans la tête, des broches crâniennes pour les maintenir alors qu’ils étaient retenus sur des chaises.
Plus récemment, des casques spéciaux ont été conçus et les singes ont été entrainés à s’assoir sur une chaise dans une tentative de trouver des techniques de neuro-imagerie moins invasives.
Les chiens feront tout pour plaire à leurs propriétaires, alors peut-être n’est-il pas étonnant qu’ils puissent facilement former leurs chiens à rester immobile dans une machine IRMf.
La vidéo de dressage ci-dessous appartient à une autre étude récente qui a examiné deux chiens en utilisant une technique légèrement différente où ceux-ci étaient assis dans la position du sphinx plutôt que couchée vers l’avant.
Non seulement chacun des 11 chiens dans cette étude devaient être immobile sur la plaque du scanner pendant six minutes consécutives, dans trois analyses séparées, mais ils devaient aussi porter des écouteurs afin que les divers sons leur soient diffusés.
Afin de comparer l’activité du cerveau humain et du chien dans les aires sensibles à la voix, les 11 chiens et les 22 humains ont écouté le même ensemble de près de 200 sons à travers les écouteurs, qui comprenait les vocalisations d’autres chiens, d’humains, des sons de l’environnement (non vocales) ou un silence de base.
Les sons d’humain et de chien variaient dans leur "valence émotionnelle" avec certains sons représentant des émotions négatives ( stressé / "malheureux ", comme gémir ou pleurer) et d’autres émotions positives (“heureux” / détendu , comme les aboiements de jeux ou le rire).
Les plus frappantes similitudes étaient dans les réponses communes à l’émotion chez les chiens et les humains. Les images IRMf ont montré que les sons liés à des émotions négatives ou positives étaient traités de la même manière dans le cortex auditif, la partie du cerveau principalement responsable du traitement des sons, des deux espèces. Les chercheurs soulignent que les deux espèces sont sensibles à l’émotion exprimée par la voix des autres humains et chiens, et les aires du cerveau pour la voix chez les mammifères pourraient avoir une plus longue histoire évolutive qu’on ne le pensait, remontant à environ 100 millions d’années.
Quand les humains et les chiens ont écouté des sons “joyeux”, une zone localisée dans le gyrus ectosylvien caudal droit, près du cortex auditif primaire, s’est activée. Ce n’était pas le cas lorsque les participants ont entendu des sons "tristes".
Tous les résultats n’ont pas présenté de telles similitudes. Certaines des aires auditives ou sensibles au bruit étaient localisées dans différentes régions du cerveau. Chez les chiens, 48 % de leurs aires sensibles au son se sont activés quand ils ont entendu des sons environnementaux (non vocal), comparativement à seulement 3 % pour les êtres humains avec les mêmes sons. Pour les humains, 87 % de leurs aires sensibles aux sons se sont activées quand ils ont entendu d’autres vocalisations humaines, et 10 % pour les vocalisations de chien. Pour les chiens, c’était 39 % quand ils ont entendu d’autres vocalisations de chiens et 13 % pour les vocalisations humaines. En d’autres termes, les chiens et les humains ont des zones pour la voix dans le cerveau qui privilégierons (répondront aux) vocalisations des membres de leur propre espèce.
Les humains et les chiens appartiennent des espèces dites sociales avec une longue histoire commune, si bien qu’il n’est pas surprenant qu’elles aient la capacité de lire les émotions des uns et des autres dans la “voix” et il est intéressant de noter que nous sommes plus sensibles aux sons "joyeux".
Il apparait également que les humains sont particulièrement attentifs aux sons de leurs congénères, alors que les chiens sont peut-être plus attentifs à d’autres sons dans leur environnement.
Les auteurs concluent que le fait d’être capable de traiter les voix des autres espèces peut permettre la reconnaissance d’appel interespèces (très utile pour éviter les prédateurs et pour chasser ou pour se faire de nouveaux amis).
Tout est expliqué dans cette vidéo réalisée par les chercheurs de l’université Loránd Eötvös :
Current Biology