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jeudi 21 avril 2016

Réforme de l’orthographe : un enterrement trop vite annoncé ?




Le secrétaire perpétuel de l’Académie française, Mme Hélène Carrère d’Encausse, a récemment fait à la Radio Télévision Suisse une déclaration relayée par de nombreux médias : « La réforme [de l’orthographe] a été mise au frigidaire. » Elle se dit convaincue que les éditeurs renonceront à l’appliquer dans les manuels de collège préparés pour la rentrée, suite à la publication des nouveaux programmes. Le tollé suscité par cette annonce en février dernier aurait donc fait reculer les maisons d’édition ?

Pour en avoir le cœur net, nous avons interrogé trois éditeurs spécialisés dans les manuels scolaires, qui nous ont invariablement répondu qu’ils appliquaient la réforme pour la rentrée. L’un d’entre eux nous a précisé que ce serait le cas pour les manuels de français, de grammaire, d’histoire-géographie, de mathématiques, de physique et d’allemand. Un autre l’appliquera pour toutes les disciplines. Le troisième, au moins pour le français.

Le secrétaire perpétuel aurait-il pris ses désirs pour des réalités et parlé trop vite ? Sans doute, si l’on en croit une mise au point de son directeur de cabinet à laquelle fait référence Le Figaro. En réalité, elle n’a pas reçu d’information spéciale à ce sujet. Elle suppose simplement que les éditeurs ne se vanteront pas d’appliquer la réforme en arborant sur la couverture des manuels un logo signalant l’adoption de la nouvelle orthographe. Elle a sans doute raison. Mais que n’a-t-elle, avant de parler, interrogé les éditeurs ?

Il n’en reste pas moins vrai que Mme Hélène Carrère d’Encausse a rappelé, à juste titre, que les Français sont attachés à l’orthographe, qui est une « marque d’identité ». Il est, d’ailleurs, probable que les éditeurs se demandent s’ils ont bien fait de prendre un vent qu’ils croyaient à tort favorable. Beaucoup d’enseignants de collège ne mettront guère de zèle à changer de manuels pour la prochaine rentrée. D’autant plus que le budget risque de manquer pour de nouveaux achats.

Et au cas où ces manuels leur seraient imposés, suggérons pour leurs élèves un exercice pédagogiquement efficace : restaurer l’orthographe ancienne et les accents circonflexes honteusement disparus sur les i et les u. Ce serait une bonne manière de leur faire comprendre que l’orthographe n’est pas réservée à une élite, quand le peuple pourrait se contenter d’une orthographe simplifiée.

« Assurons-nous bien du fait, avant que de nous inquiéter de la cause », écrivait Fontenelle, précurseur du siècle des Lumières, dans une anecdote souvent étudiée en classe sous le titre de « La dent d’or ». De nombreux savants s’interrogent sur les raisons pour lesquelles il est venu à un enfant de sept ans une dent d’or à la place d’une de ses molaires. Jusqu’à ce qu’on s’aperçoive qu’« il ne manquait autre chose à tant de beaux ouvrages, sinon qu’il fût vrai que la dent était d’or ». Beaucoup de journalistes et, peut-être, quelques académiciens devraient le relire.

Jean-Michel Léost