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jeudi 30 juin 2016

Une Suisse de pendulaires


En dix ans, le trajet moyen pour se rendre au travail s’est allongé de 12%. Avec le développement d’un phénomène nouveau: les pendulaires longue distance.

Confort Plus le trajet est long, plus les pendulaires privilégient le rail, qui leur permet de travailler, 
de se détendre ou de dormir.
Image: Keystone


Toujours plus loin, pour des trajets toujours plus longs. Et une fois sur deux en voiture. Tel serait le portrait-robot du pendulaire helvétique si l’on en croit les derniers chiffres publiés par l’Office fédéral de la statistique.

De plus en plus de femmes

La pendularité concerne désormais neuf actifs sur dix, soit pas moins de 3,9 millions de personnes. En sont exclues: les personnes qui travaillent à domicile, comme les petits indépendants ou les paysans, ou celles qui n’ont pas de bureau fixe, comme les voyageurs de commerce. 70% des pendulaires travaillent à l’extérieur de leur commune, et 19% à l’extérieur de leur canton. De plus en plus de femmes se déplacent aussi: de 1990 à 2014, leur part est passée de 39% à 47%. En revanche, les hommes parcourent de plus longues distances (+20%). Et plus on a une formation élevée, plus on va loin: les universitaires et les diplômés des hautes écoles parcourent en moyenne 17,2 km, contre 10,6 km pour les personnes sans formation post-obligatoire. «Les personnes avec une formation supérieure sont confrontées à un marché de l’emploi plus spécifique, et qui reste encore la plupart du temps concentré dans les centres urbains pour ce qui concerne les activités tertiaires. Elles doivent donc davantage se déplacer», analyse Emmanuel Ravalet, du Laboratoire de sociologie urbaine de l’EPFL.

Un trajet qui s’allonge

En dix ans, le trajet moyen pour se rendre au travail s’est allongé de 12%. Si un tiers des pendulaires arrivent au bureau en moins de 5 kilomètres, la longueur moyenne des déplacements atteint désormais 14,5 kilomètres. Conséquence de cette augmentation des distances: les pendulaires sont toujours moins nombreux à rentrer chez eux à midi ou durant les pauses. La fréquence des trajets a donc baissé. Quant à leur durée, elle s’est accrue: en 2014, il fallait compter en moyenne trente minutes pour rejoindre son bureau, alors que vingt-trois minutes étaient suffisantes en 2000. Cependant, 36% des pendulaires arrivent au travail en moins de quinze minutes. Les réalités sont assez différentes selon les régions. Avec ce paradoxe: en règle générale, les pendulaires qui habitent dans les grandes agglomérations et autour de celles-ci mettent davantage de temps que les autres, alors même qu’ils parcourent des distances souvent plus courtes. Cela s’explique par le fait qu’ils utilisent des moyens de transport assez lents (transports publics ou mobilité douce). Enfin, dans les régions périphériques tournées surtout vers l’agriculture et le tourisme, les trajets sont relativement courts. L’essor du rail

Le moyen de transport favori des pendulaires? Malgré un léger recul depuis 2000, c’est encore et toujours la voiture, privilégiée par 52% des actifs. Presque un tiers des pendulaires optent pour les transports publics (14%) et le train (16%). Ce dernier moyen de transport est d’ailleurs en nette progression: ses usagers ont quasi doublé depuis 1990, passant de 327 000 à 636 000 pendulaires quotidiens. L’amélioration de l’offre, tant sur les longues distances (Rail 2000) que sur les réseaux régionaux express, y est pour beaucoup. «Mais ces pendulaires sont loin d’être une clientèle facile à gérer. Ils occupent les trains uniquement durant les heures de pointe et sont très exigeants», note Emmanuel Ravalet.

Les pendulaires longue distance

Ils parcourent plus de 50 kilomètres par trajet pour se rendre au travail. Ceux que la statistique suisse appelle les pendulaires longue distance sont désormais 122 000 en Suisse (4% de l’ensemble des pendulaires). Une catégorie qui a bondi ces dernières années: on en compte 13% de plus entre 2010 et 2014! D’après le Laboratoire de sociologie urbaine de l’EPFL, qui a mené une étude sur plusieurs pays européens, la Suisse, avec son réseau très développé de transports publics à la fois confortable et performant, est particulièrement propice à la pendularité longue distance, qui s’y développe davantage qu’en France ou en Allemagne. Le profil de ces nouveaux pendulaires? En majorité des hommes – ou des femmes sans enfants – très bien formés. 7% des universitaires et des titulaires d’un diplôme supérieur sont des pendulaires longue distance, contre 3% chez les diplômés du secondaire II et 2% chez les diplômés du secondaire I.

Deux tiers des grands pendulaires accomplissent moins de 75 kilomètres par trajet. Mais on compte quand même 17 000 personnes qui en font plus de 100 (14%). La fréquence des allers-retours diminue à mesure que la distance augmente. Entre 50 et 75 kilomètres, voiture (49%) et train (51%) font jeu égal, alors que le train (67%) domine pour les trajets plus longs. «Dès que le déplacement dépasse une heure, les gens privilégient le confort. Le train leur permet de travailler, de se détendre, de dormir ou d’entretenir leur réseau social au téléphone. Et, au-delà de deux heures, on a noté que les gens choisissaient le train, même si la voiture leur aurait permis de gagner du temps», explique Emmanuel Ravalet. A noter que le développement de réseaux de transports ferroviaires et routiers très performants de même que les loyers élevés et la difficulté à trouver un logement ont favorisé le phénomène de la pendularité longue distance.

La mobilité estudiantine

Aux 3,9 millions d’actifs pendulaires, il faut ajouter 800 000 étudiants de plus de 15 ans qui se déplacent pour acquérir leur formation. Un phénomène qui s’est accru depuis les années 1990. Les étudiants parcourent en moyenne 20 kilomètres par trajet, pour une durée moyenne de quarante minutes. Là aussi, on relève de grosses disparités régionales. Les plus mobiles sont les étudiants glaronais, qui accomplissent en moyenne 36 kilomètres par trajet, pour une durée de cinquante-deux minutes! C’est quatre fois plus qu’à Genève, où le trajet moyen est de 9 kilomètres mais nécessite quand même trente-cinq minutes. Les transports publics sont leur moyen de déplacement favori: 41% prennent le train, 26% le bus. Seuls 16% utilisent une voiture. Cyclistes et piétons représentent respectivement 7% et 8% des étudiants pendulaires

La bougeotte des loisirs

Si les déplacements liés au travail se sont nettement accrus depuis les années 1990, il n’empêche que les loisirs sont toujours la première cause de mobilité et représentent 40% des kilomètres parcourus en Suisse, contre 24% pour le travail. D’autres activités telles que la formation, les achats ou les voyages de service, etc., constituent les autres motifs de déplacement.

Bouleversement en un siècle

Contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, la pendularité n’est pas un phénomène nouveau en Suisse. Dès 1910, le recensement de la population lui consacre un chapitre.

A l’époque, dans une société encore très agricole, à peine un dixième de la population active travaille en dehors de sa commune de résidence. Les pendulaires sont désignés sous le terme de «masses itinérantes», et on voit se dessiner une séparation progressive entre la commune de résidence et la commune de travail. Les principales raisons citées par les personnes interrogées: le renchérissement des loyers dans les villes ainsi que le développement des infrastructures de transport. Le tramway est en plein essor.

Qui sont les pendulaires du début du XXe siècle? Essentiellement les classes économiquement faibles de la population active. Ce constat alimente un vif débat politique. La pendularité génère une charge pour les communes de résidence qui abritent ces travailleurs pauvres et qui doivent assurer l’instruction des enfants et l’assistance sociale.

Un siècle plus tard, les choses se sont inversées. Plus les personnes ont une formation élevée, plus elles pendulent – et de plus en plus loin!