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jeudi 19 janvier 2017

18 janvier 1574 : le loup-garou Gilles Garnier est brûlé vif pour avoir dévoré quatre enfants


Pour parler des loup-garous, il faut faire attention à ne pas tomber dans le délire paranormal. Il faut aussi se rappeler que les gens ne se transforment pas en loup spontanément. Du moins, logiquement. Mais, il y a quelques siècles, on croyait à ces hommes se transformant en bête pour attaquer et dévorer les humains. Il y a tout plein de facteurs qui favorisent ces croyances, comme l’image terrifiante qu’avait le loup dans la culture occidentale, mais aussi l’existence de maladies ou de troubles psychiatriques faisant ressembler certaines personnes à des bêtes.

Je pense à la porphyrie, la rage, ou l’hypertrichose, diverses maladies pouvant modifier l’apparence de certaines personnes. Au niveau des maladies mentales, il y a bien sur la lycanthropie clinique, où le patient se croit transformé en loup. Et puis surtout, la psychopathie. La psychopathie est la véritable malédiction qui transforme l’homme en bête. Il est parfois plus aisé de croire qu’un homme a tué de façon inhumaine parce qu’il était maudit, que de se dire qu’il a agi consciemment en commettant les pires atrocités. Mais on est pas là pour parler de ça, puisque cela prendrait des heures, et qu’à la base je voulais vous raconter l’histoire de Gilles Garnier, un loup-garou français.

Le cas de Gilles Garnier est un des seuls cas de lycanthropie répertoriés dans les annales de la justice française. Je veux dire par là que c’est l’une des seules fois que la justice française a condamnée officiellement quelqu’un pour lycanthropie, et l’a écrit noir sur blanc dans son jugement.


Gilles Garnier devient grognon a l’heure du repas…


Nous sommes à l’automne 1573, près de Dole, en Franche-Comté. Gilles Garnier, notre héros du jour, vit en ermite dans les bois. Enfin, pas tout à fait en ermite, puisque son repli n’a rien de religieux : il a simplement choisi de vivre en marge de la société, avec sa femme. Décrit comme un homme « méfiant, rude et un peu désespéré », il arpente sans cesse la foret, à la recherche de gibier, ou à la découverte de lieux abandonnés. C’est durant l’une de ces promenades qu’il a, selon le doyen de l’église de Sens, rencontré un fantôme qui lui proposa de lui enseigner comment se transformer en loup à sa guise. Sympa, le fantôme. Le problème avec cette histoire, c’est que le doyen la raconta après la condamnation de Gilles Garnier. Et puis qu’il avait aucune preuve étayant cette histoire, aussi. Mais, c’est pas grave, continuons.

Arrive le froid, et avec lui, la famine. Toute la Franche Comté est touchée, mais c’est encore pire pour un ermite qui n’a ni champs, ni bétail. Le butin de sa chasse ne suffit bientôt plus à subvenir à ses besoins et à ceux de sa femme. Alors, il trouve une autre solution.

Un jour, il rencontre au cours de sa chasse une petite fille d’environ 10 ans. Il n’y a pas de témoins, et personne pour entendre crier. Gilles Garnier se jette sur la fillette, l’étrangle, et la dépouille, avant d’arracher des morceaux de chair sur le corps encore chaud de l’enfant. Il ramènera des morceaux dans la foret pour nourrir sa femme. Quelques temps après, les villageois découvrent le corps et arrivent tous à une même conclusion, à la vue du carnage : elle a été attaquée par un loup. D’autres attaques suivront. A la Toussaint, il attaque une petite fille, en la poursuivant en hurlant, avant de se jeter sur elle et la mordre à pleine dents. Des paysans entendront ces hurlements et se précipiteront. L’ermite s’enfuit, et les paysans diront l’avoir reconnu.

D’autres, cependant diront avoir reconnu… un loup.

Après cette attaque, le parlement de Dole autorise la chasse au loup-garou, avec « piques, hallebardes, arquebuses et bâtons« . Ce n’est pas une grande réussite, puisque Garnier attaquera de nouveau un garçon de 10 ans, se nourrissant à même le corps, arrachant des lambeaux de chair encore palpitante, et ramenant une jambe pour plus tard. Un homme prévoyant. Mais un jour, il commettra le crime de trop : s’attaquant à un garçon trop près d’habitations, il se fera attraper, sans qu’on puisse sauver le garçon. Au total, au moins 4 enfants sont morts. Peut-être plus, on ne sait pas. Mais l’affaire n’est pas fini. Arrive le procès, et surtout les aveux de Gilles Garnier.

Gilles Garnier, après avoir été arrêté, est soumis à la question. Durant ces interrogatoires un poil violent et sans assistance d’un avocat, il avouera les meurtres, mais surtout, il avouera en avoir commis certains sous la forme d’un loup… Notamment, le deuxième meurtre, celui ou des témoins ont justement cru voir un loup…

Gilles Garnier sera condamné au bûcher et à la réparation des frais du procès pour avoir « en forme de loup-garou dévoré plusieurs enfants et commis d’autres crimes ». Comme si un homme réduit au cannibalisme pouvait payer des frais de justice. Il sera brûlé le 18 janvier 1574, et c’est ainsi que ce termine cette macabre histoire.

Maintenant vient le temps des questions. Pourquoi certains témoins disent avoir vu un loup et d’autres l’ermite ? Pourquoi l’ermite a t’il reconnu pouvoir se transformer en loup ? Était-il réellement un loup-garou ? (La dernière question est stupide, je l’admet)

Peut-être certains ont cru voir un loup car ils n’osaient pas reconnaitre un homme dans la forme qui déchiquetait un enfant à pleine dents. Peut-être que l’ermite a reconnu pouvoir se transformer en loup parce que l’on avouerait n’importe quoi sous la torture. Et peut-être que les bourreaux, les juges, et tout le monde en général, préféraient condamner un loup-garou que de se dire qu’un homme a soudainement déchiqueté et mangé des enfants, poussé par la faim et par la folie. Et que cet homme n’avait finalement pas grand chose de différents d’eux, si ce n’est cette mince couche de vernis qui sépare civilisation et sauvagerie…

Pour les curieux, ou ceux qui ne me croient pas, voici l’arrêt rendu par le parlement de Dole, en 1574, en intégralité sur Gallica