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lundi 13 novembre 2017

Monsanto face à ses juges





À la lumière du procès symbolique de Monsanto tenu en 2016, Marie-Monique Robin expose l’ampleur du scandale sanitaire lié au Roundup, herbicide le plus vendu au monde. Un réquisitoire accablant, paroles de victimes et d'experts à l'appui.

C’est l’histoire d’une colère citoyenne, jusque-là quasi inaudible, et d’une lutte contre un écocide, ou crime contre l'environnement, commis en toute impunité par la firme championne des OGM. En octobre 2016, à La Haye, victimes et experts témoignent – une première – devant le Tribunal international Monsanto, au fil d’un édifiant procès symbolique contre le Roundup, l’herbicide le plus vendu au monde, et sa très toxique molécule active, le glyphosate. Cette année-là, quelque 800 000 tonnes de ce "tue-tout" (son surnom en espagnol) ou de ses génériques ont été déversées sur la planète. Si la multinationale a refusé de comparaître, les victimes ont raconté à la barre les conséquences de son épandage : malformations des enfants, cancers, maladies respiratoires ou rénales et destructions environnementales. Éclairé par des scientifiques, cet accablant réquisitoire révèle l’ampleur de ce scandale sanitaire, qu’illustrent des reportages bouleversants sur la tragédie en cours, de la France à l’Argentine en passant par les États-Unis et le Sri Lanka – premier pays à interdire le glyphosate. "Ce pulvérisateur nous a apporté la mort, alors qu’on voulait simplement gagner notre vie", lâche, amer, un riziculteur sri-lankais contaminé.

Lanceuse d’alerte

Presque dix ans après son enquête "Le monde selon Monsanto", Marie-Monique Robin démontre, faisceau de preuves à l’appui, l’extrême nocivité du Roundup, à l’heure où l’Union européenne doit décider de prolonger ou non l’autorisation du glyphosate sur le marché. Déclaré en mars 2015 "cancérigène probable" par le Centre international de recherche sur le cancer (Circ), et reconnu comme tel par des études scientifiques secrètes commanditées par Monsanto, l’herbicide, omniprésent dans l’eau, l’air, la terre et les aliments, est aussi un perturbateur endocrinien, un antibiotique et un chélateur de métaux – il séquestre les minéraux. Face au silence coupable des agences de santé et à l’inertie des gouvernements, le film, à travers ce procès, montre également la mobilisation à l’œuvre de la société civile mondiale pour faire reconnaître l’écocide. L’enjeu ? La poursuite au pénal des multinationales dont les activités menacent la sûreté de la planète et la santé des hommes.





Le nouvel herbicide de Monsanto, le dicamba divise 



Le désherbant dicamba? «Les agriculteurs en ont désespérément besoin», affirme Perry Galloway. «Si j'en ai sur mes produits, je ne peux plus rien vendre», rétorque Shawn Peebles.

Les deux hommes se connaissent bien, ils habitent à quelques kilomètres l'un de l'autre, à Gregory et Augusta, dans un coin de l'Arkansas où les champs s'étendent à perte de vue et les maisons sont souvent isolées. Mais ils se sont profondément divisés cette année sur l'usage du dicamba.

Le géant de l'agrochimie Monsanto a commencé l'an dernier à vendre des semences de soja et de coton génétiquement modifiées pour tolérer cet herbicide. Ce produit chimique est particulièrement efficace contre une mauvaise herbe qui prolifère dans la région, l'amarante de Palmer ou «herbe à cochons», depuis qu'elle est devenue résistante à un autre désherbant, le fameux glyphosate qui fait polémique en Europe.

Problème: le dicamba n'est pas toujours resté dans les champs sur lesquels il était épandu, s'éparpillant parfois sur les cultures alentours et les affectant à divers degrés allant jusqu'à la destruction des récoltes.

Les autorités de l'Arkansas (sud) ont, face à un afflux de plaintes, suspendu en urgence au début de l'été sa commercialisation. L'Etat s'apprête à interdire son utilisation entre le 16 avril et le 31 octobre, au moment où les plantes sont sorties de terre et où les conditions climatiques favorisent sa dispersion.

Dispute mortelle 

«Le dicamba a affecté l'ensemble de ma famille», raconte d'une voix tremblante Kerin Hawkins. La santé de ses parents s'est dégradée depuis que son frère, Mike Wallace, est mort en octobre 2016 au cours d'une dispute avec un voisin à propos du dicamba. La justice doit déterminer dans un procès à venir si l'autre agriculteur a commis un homicide ou a agi en état de légitime défense.

Et cette année dans l'exploitation familiale, le dicamba a touché environ 4 hectares de légumes et une trentaine d'hectares d'arachides, réduisant son chiffre d'affaires. Pour se protéger de l'impact éventuel du produit, ils se sont résolus à planter des semences de coton génétiquement modifiées. «Ce n'est pas seulement une histoire de dicamba, ce n'est pas seulement une histoire de Monsanto, il s'agit de la façon dont des êtres humains traitent d'autres êtres humains», lâche-t-elle.

Elle témoignait mercredi à une réunion publique organisée à Little Rock, la capitale de l'Etat, par l'agence en charge de la réglementation des pesticides dans l'Arkansas. Le panel s'est dans la foulée prononcé pour la restriction de l'utilisation du dicamba, une décision qui doit encore être approuvée par les législateurs.

Année fantastique

Face à l'affluence attendue, la réunion avait été organisée dans la salle d'un hôtel et non dans les bureaux de l'agence. Quelque 37 personnes se sont succédé au pupitre pour expliquer, parfois avec émotion, pourquoi elles étaient pour ou contre le produit. «Je suis ici pour vous dire qu'on a utilisé du dicamba et qu'on a eu une année fantastique», raconte Harry Stephens qui cultive avec son fils du soja dans le comté de Phillips. Alors que les fermiers peinent parfois à joindre les deux bouts, retirer ce produit «pourrait forcer de jeunes agriculteurs à mettre la clé sous la porte», clame-t-il.

L'apiculteur Richard Coy a lui vu un impact certain sur les ruches placées près de terrains où était pulvérisé du dicamba. «J'ai perdu 500'000 dollars de production de miel et 200'000 dollars de contrats pour l'installation dans des fermes californiennes de ruches destinées à la pollinisation en raison de la mauvaise santé de mes abeilles», affirme-t-il.

Diversité

Sur les bords d'un champ en face de son exploitation, Perry Galloway montre les fameuses mauvaises herbes, mortes mais encore sur pied, qui ont gâché plusieurs de ses étés. Les plus hautes le dépassaient. Il a épandu du dicamba deux fois sur environ 1.600 hectares. «Cela faisait longtemps qu'on n'avait pas eu des champs aussi propres», dit-il. Il serait favorable à un compromis, n'autorisant par exemple qu'une application du désherbant une fois que les plantes sont levées.

A la tête d'une exploitation de légumes organiques, Shawn Peebles emploie lui plusieurs personnes pour arracher à la main l'amarante de Palmer. «Le dicamba se répand, c'est un fait», affirme-t-il. S'il s'en déverse sur ses champs, «je dois détruire la récolte». «L'agriculture aujourd'hui est faite de diversité», remarque l'agriculteur. «Il n'y pas que du soja tolérant au dicamba, il y aussi des exploitations bio comme la mienne, des vignes, et il faut qu'on travaille tous ensemble.»