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mercredi 17 octobre 2018

«Le droit suisse au lieu de juges étrangers»: de quoi est-il question?




Le droit suisse doit-il être ou non subordonné au droit international?
(Keystone)


Le 25 novembre, le peuple suisse vote sur une initiative populaire intitulée «Le droit suisse au lieu de juges étrangers». Celle-ci demande que la Constitution suisse prime sur le droit international. L’idée de base est que des décisions populaires ne soient pas mises en échec par des traités internationaux. Les opposants voient dans cette proposition un danger pour les droits de l’homme.

L’initiative populaire «Le droit suisse au lieu de juges étrangers (initiative pour l’autodétermination)» a été lancée par l’Union démocratique du centre (UDC / droite conservatrice). Elle entend inscrire dans la Constitution un article stipulant que la Constitution suisse est la source suprême du droit helvétique – et pas le droit international.

L’idée de base est que les décisions prises par le peuple suisse priment sur le droit international ou, en d’autres termes, que la démocratie directe ne soit pas mise en échec par des traités internationaux. Selon les auteurs de l’initiative, celle-ci est une réaction au fait que le gouvernement, le Parlement et le Tribunal fédéral traitent de manière bien trop légère les résultats d’une votation, afin d’éviter des atteintes au droit international.

Quelle est la situation actuelle?

Le droit suisse actuel n’établit pas de manière claire et détaillée de hiérarchie entre droit international et Constitution suisse. La doctrine et la jurisprudence partent du principe de la primauté du droit international, bien que cela ne soit pas explicitement précisé dans la Constitution.

Etant donné que la Constitution est vague, cela laisse une grande marge d’interprétation aux tribunaux. Le Tribunal fédéral a par exemple dû à plusieurs reprises déterminer qui du droit international ou de la Constitution primait lorsque qu’il y avait collision entre ces deux droits. L’article 190 de la Constitution suisse se borne en effet à indiquer que les deux droits sont applicables.

La Constitution suisse n’est pas qualifiée de déterminante. Cela a pour conséquence que le Parlement peut relativement facilement amoindrir une initiative qui ne lui convient pas en la mettant mollement en œuvre. Il faut se rappeler qu’une initiative populaire ne peut porter que sur une modification de la Constitution et que la loi d’application qui en découle ensuite est élaborée par le législateur, c’est-à-dire le Parlement. Pour les tribunaux, c’est bien cette loi de mise en œuvre «diluée» qui est applicable et non pas l’article constitutionnel introduit par le biais de l’initiative populaire. Or c’est exactement ce qui dérange les auteurs l’initiative pour l’autodétermination.

Que prévoit l’initiative?

L’initiative stipule notamment que la Constitution suisse doit obligatoirement primer sur le droit international. Des exceptions sont prévues pour les règles impératives du droit international, comme l’interdiction de la torture et de l’esclavage. En cas de contradiction entre la Constitution suisse et le droit international, la Suisse devrait modifier ou dénoncer les traités de droit international. Autre nouveauté, les tribunaux seraient tenus d’appliquer uniquement les traités de droit international qui ont été soumis au référendum.


Quels sont les arguments des auteurs de l’initiative?

Les auteurs de l’initiative considèrent que la démocratie directe est actuellement en danger et veulent, avec leur initiative, la protéger ou la restaurer. Selon l’UDC, l’autodétermination «unique au monde» dont les Suisses disposent sous la forme de la démocratie directe a perdu de sa force depuis que le Tribunal fédéral a décidé en 2012 de placer le droit international au-dessus de la Constitution suisse. Par conséquent, le Conseil fédéral et le Parlement n’auraient tout simplement pas mis en œuvre les décisions populaires relatives à l’accord de libre circulation des personnes avec l’UE ou à la Convention européenne des droits de l’homme.





Les auteurs comprennent donc leur initiative populaire comme un «Oui à la démocratie directe». Les décisions populaires ne pourraient plus à l’avenir être vidées de leur substance sur la base du droit international, comme ce fut le cas avec l’initiative «Contre l’immigration de masse» ou l’initiative «Pour le renvoi des criminels étrangers». Pour les partisans de l’initiative, il s’agira donc, le 25 novembre, de déterminer si la Suisse veut ou non rester une démocratie directe.

Quelles serait les conséquences de l’initiative?

Voici les points d’achoppement.

Résiliations de traités: selon les adversaires de l’initiative, quelque 5000 traités internationaux devaient être examinés pour voir s’ils contreviennent à la Constitution suisse, et si nécessaire renégociés ou résiliés. Environ 600 traités importants pour l’économie seraient menacés. L’UDC conteste cette analyse et indique qu’aucun traité vital pour l’économie nationale n’est menacé, car ces traités ne sont pas contraires à la Constitution suisse.

Droits de l’homme: les adversaires de l’initiative avertissent qu’en particulier la Convention européenne des droits de l’homme devrait être dénoncée et que les Suisses ne pourraient par conséquent plus recourir auprès de la Cour européenne des droits de l’homme à Strasbourg. Selon l’UDC, la dénonciation de la CEDH n’est pas le but de l’initiative, mais le parti dit pouvoir vivre avec cette résiliation. Pour l’UDC en effet, les «juges étrangers» de Strasbourg ne sont pas indispensables, car la Suisse garantit les droits de l’homme dans sa propre Constitution.

Partenaire contractuel peu fiable: selon les opposants, l’initiative aurait des conséquences négatives sur l’image de la Suisse en tant que partenaire contractuel fiable. L’UDC relativise cette critique, du fait que la Suisse ne violerait que rarement des traités. Les accords internationaux importants étant toujours soumis au référendum, ils resteraient donc à l’avenir aussi applicables aux yeux des tribunaux.

Problèmes avec l’UE: les adversaires de l’initiative craignent que les accords bilatéraux conclus avec l’UE ne doivent être résiliés. L’UDC ne semble pas vouloir les conserver à tout prix. Le parti a déjà déposé une autre initiative qui veut explicitement annuler l’accord de libre circulation des personnes avec l’UE.

Conséquences économiques: l’organisation faîtière de l’économie suisse est d’avis que l’initiative d’autodétermination menace la place économique suisse. L’UDC considère en revanche que la démocratie directe est garante d’une place économique stable et attractive.








Sibilla Bondolfi