La centrale hydroélectrique qui doit voir le jour au-dessus de Zermatt (VS) menace le glacier du Gorner, avertit la «NZZ am Sonntag». Projet phare de la transition énergétique, le barrage du Gornerli, dont l’inauguration est prévue entre 2032 et 2035, doit permettre d’accroître la production d'électricité renouvelable, notamment en hiver. Le hic: l'eau du lac de barrage inondera certaines parties du deuxième plus grand géant de glace des Alpes et provoquera sa fonte plus rapidement. «À cette échelle et dans de telles dimensions, c’est sans précédent», affirme Daniel Farinotti, glaciologue et professeur à l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ).
Jamais, en Suisse, de telles masses de glace n’ont été sacrifiées pour un barrage. D’après ses mesures, la zone concernée par le futur réservoir contient encore par endroits une épaisseur de glace supérieure à 300 mètres. Sans le lac, il faudrait un certain temps pour que cette calotte glaciaire fonde. «Nous détruisons délibérément l’un des derniers grands glaciers de Suisse pour produire de l’électricité», se désole dans le journal dominical alémanique, le guide de montagne zermattois, Benedikt Perren.
«Même sans le barrage»
Beat Imboden, directeur de l'entreprise électrique Grande Dixence SA, à l'origine du projet, reconnaît que le nouveau lac de retenue va accélérer le processus de fonte du glacier. «Mais même sans le barrage, le paysage du Gornerli va considérablement changer en raison du changement climatique. Dans un avenir proche, un lac naturel se formera dans la vallée au-dessus de Zermatt et inondera également partiellement le glacier», nuance-t-il.
Toutefois, la présence de l'immense masse de glace aura également un impact négatif sur la production d’électricité. Le réservoir ne pourra être utilisé que de manière limitée au début. «Dans un premier temps, nous ne disposerons que d’environ 40% du lac comme volume de stockage, la plus grande partie de la surface restera remplie de glace», admet Beat Imboden. La production ne devrait augmenter de manière significative qu’à partir des années 2040. «Nous espérons pouvoir utiliser l’intégralité du volume de stockage, d’ici 2055 environ», déclare le directeur.
Manon Blanc
