Chu de che / Je suis d'ici / Sono di qui / Ich bin von hier ! Notre liberté ne nous a pas été donnée, mais combattue et priée par nos ancêtres plus d'une fois! Aujourd'hui, comme autrefois, notre existence en tant que peuple libre dépend du fait que nous nous battions pour cela chaque jour. Restez inébranlable et soyez un gardien de la patrie pour que nous puissions remettre une Suisse libre telle que nous la connaissions à la génération suivante. Nous n'avons qu'une seule patrie!

mercredi 21 juillet 2010

« l'i-dosing », la défonce au MP3

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Qu'est-ce qu'une drogue ? Etymologiquement, selon le Littré, le terme pourrait venir du néerlandais « trook », une « chose sèche ». Un MP3 (algorithme de compression audio) étant rarement mouillé, il peut donc étymologiquement être une drogue.

Et ce serait bien le cas à en croire la presse ces derniers jours. De quoi s'agit-il ? Depuis quelques années, des sites internet mettent en vente des fichiers MP3 censés reproduire l'effet de différentes drogues. Sur YouTube, des dizaines de vidéos toutes plus spectaculaires les unes que les autres attestent de l'effet massif de ces « drogues digitales » également appelées « i-doses ».

Techniquement, le principe est celui du battement binaural, dont Wikipédia nous apprend qu'il a été découvert en 1839 en Allemagne. En gros, le fait d'entendre deux sons de fréquence légérement différente dans chaque oreille produirait un effet sur les ondes du cerveau. Evidemment, rien n'est prouvé à ce stade.

Mais depuis que des étudiants de l'Oklahoma se sont présentés, au mois de mars, défoncés en cours en prétendant n'avoir pris ni drogue ni alcool, et que l'info a été reprise par une chaîne de télé américaine en plein marasme journalistique estival, tout le monde en parle. Rajoutez là-dessus que tout ce qui vient d'Internet, c'est mal, et vous avez un début de scandale.

Alerté par des collègues (« Non mais t'as vu c'est trop dingue, il y a des jeunes Américains qui se défoncent aux MP3 »), je décidai donc de tordre le cou à cette vilaine rumeur en testant pour vous le i-dosing.

Trente minutes de « sexual simulation »

1 heure du matin, toutes lumières éteintes, je me rends au péril de ma vie sur le site i-Doser, principal dealer du Net selon mes infos. Alléché par les promesses de m'aider à « ressentir le Big Bang », à devenir meilleur aux jeux vidéos (et oui, on peut même s'améliorer à la Wii grâce à trente minutes de i-dosing) ou à ressentir le même effet qu'avec une dose de LSD, je ne sais à quelle drogue numérique me vouer.

N'ayant pas de Wii, je décide, au hasard, de télécharger, pour la modique somme de 13,90 euros, le package complet « Sexual simulation » censé « aider mon cerveau à reproduire l'effet de chaleur, de liesse, de tantrisme et enfin d'apogée »…

C'est donc parti pour quinze minutes de « First love », seul dans le noir. Premier sentiment : je crois entendre de l'eau qui coule sur fond de musique vaguement new age, agrémentée de cris de cormorans le soir au-dessus des jonques. Il y a aussi un bruit de fond lancinant et aigu dont je suppose qu'il est censé me faire chavirer. Le fameux battement binaural.

« You're fucking amazing »

Après dix minutes, le rythme de la musique d'ascenseur s'accélère. Je me dis que c'est le moment où ça y est, on est censé être dedans. Se libérer. Ça y est… Ouiiiiii… Mais non. Rien. Encore quelques minutes de free jazz toujours sur fond de battement binaural et me voilà toujours seul, toujours dans le noir, toujours sans aucun effet et toujours comme un con.

Pas découragé, je saute les fichiers « Ecstasy » et « Extend », pour aller direct à « Orgasm ». A fond les ballons dans mon casque. Toujours ce sentiment que quelqu'un a oublié d'éteindre la douche en enregistrant son battement binaural. Une vague chanson en bruit de fond. Des voix de femmes passées au vocoder à ultrasons.

A la huitième minute, j'ai envie d'arrêter le massacre, mais je suis en reportage. On ne sait jamais… Et j'ai bien fait. Car à la dixième minute, il se passe enfin un truc. La musique s'arrête. Et là démarre l'enregistrement d'un orgasme féminin (évidemment, pour le MP3 « Orgasm » c'est un peu cliché, mais bon…)

Et à la quatorzième minute, on sort du binaural pour entrer dans le Journal du hard : « I wanna cum » (« Je veux jouir »), « Fuck me » (« Baise-moi ») « You're fucking amazing » (« T'es trop incroyable »). Merci mademoiselle. Mais si la chanteuse a joui (même si je la soupçonne d'avoir simulé), moi rien.

Si vous voulez faire vous-même un essai sans dépenser la somme de 14 euros et en maximisant vos chances, chaussez votre casque, volume à fond, passez le player ci-dessous en mode plein écran et fixez le point rouge. Le son est plus basique, mais il y a l'image qui peut aider. A tout à l'heure (si vous devenez fou, je décline toute responsabilité). (Ecouter et voir la vidéo, épileptiques s'abstenir)






Bon si vous arrivez encore à lire ces lignes, c'est que vous n'êtes pas sous l'effet de la drogue numérique. Et que la drogue numérique, c'est donc pas vraiment de la drogue. Et que le battement binaural, ça fait surtout mal à la tête.

Mais il en fallait plus pour décourager les croisés de la vertu, pour qui l'i-dose est bien un danger de plus pour notre jeunesse. Car ces « drogues numériques » peuvent pousser les jeunes à consommer d'autres drogues et révèlent en tous cas un appétit de conscience modifiée. CQFD. Donc prudence. C'est en tous cas la théorie défendue par le Bureau des narcotiques de l'Okhlaoma

Allez, le mois prochain, si vous êtes sage, je testerai l'herbe synthétique qui fait rire tout comme de la vraie.
Arnaud Aubron