Les jeunes sont particulièrement touchés par la révision de la Loi sur l'assurance-chômage soumise au peuple le 26 septembre. Et du coup elle ne leur plaît pas. Du côté politique, on le sent dans l'opposition des sections jeunesses des partis fribourgeois, les socialistes bien sûr, mais les démocrates-chrétiens aussi. Les radicaux, eux, s'abstiennent.
Est-ce que les jeunes savent de quoi sera faite la révision de la loi sur l'assurance-chômage (LACI) sur laquelle la population votera le 26 septembre? «Euh... franchement, non», admet l'une d'eux. Les jeunes, pourtant, sont particulièrement concernés par les mesures destinées à éponger la dette de 7 milliards de francs qui plombe l'assurance. Neuf mois d'indemnisation au maximum (contre 18 à l'heure actuelle) pour les moins de 25 ans. Quatre mois maximum (contre 12 actuellement) pour les jeunes terminant leurs études (et qui n'ont donc pas cotisé) et un délai de six mois avant de toucher les premiers subsides. Des mesures acceptées en mars par le parlement qui ne s'appliquent toutefois pas aux jeunes qui ont une famille à charge. De plus, les assurés de moins de 30 ans devront accepter n'importe quel travail, même dans un domaine qui n'a rien à voir avec leur formation.Ces mesures vont-elles fragiliser les jeunes demandeurs d'emploi ou au contraire les stimuler et faciliter leur arrivée sur le marché du travail? Réactions des principaux intéressés.
LES JEUNES ONT LA PAROLE
Vanessa Fernandois, 20 ans, a obtenu l'été passé un CFC dans la vente, avant de travailler pendant une année dans un commerce de détail. Jusqu'au mois dernier, date de la fin de son contrat. Depuis lors, elle cherche un nouvel emploi et s'est inscrite à l'Office régional de placement (ORP). «Mais ce n'est pas un choix», précise-t-elle. La révision de l'assurance-chômage lui paraît-elle justifiée? «Oui et non. Bien sûr, il faut bien trouver des moyens d'éviter les abus et d'assainir les finances. Mais nous, on se retrouve au chômage et on n'y peut rien», estime-t-elle.«Cette révision n'est pas correcte», s'insurge Maude Chassot. A 19 ans, elle est inscrite au chômage depuis trois mois après avoir dû interrompre une formation pour des raisons personnelles. «Cela ne sert à rien de devoir attendre six mois avant de toucher des subsides. Et il faut bien qu'on mange, après tout», clame celle qui a déjà quitté le domicile familial. Les deux jeunes filles pensent-elles qu'une aide moins confortable puisse stimuler les nouveaux diplômés et les jeunes sans emploi pour qu'ils trouvent plus rapidement un travail? «Non, la motivation pour trouver du travail, je l'ai de toute façon. C'est quelque chose de très important pour moi», répond Maude Chassot.Vanessa Fernandois est plus nuancée: «Peut-être que la peur de ne plus rien avoir pousse à chercher plus vite.» La jeune femme pense également que devoir accepter un emploi qui n'est pas dans sa branche n'est pas forcément une mauvaise chose. «Les gens au chômage doivent être plus ouverts. Il faut bien faire quelque chose en attendant, même si ça ne nous plaît pas», indique-t-elle.
QUELQUES STATISTIQUES
Où en est actuellement le chômage dans le canton de Fribourg? En matière de statistiques, il implique de différencier deux notions. D'un côté les chômeurs, c'est-à-dire les personnes inscrites auprès des ORP, qui n'ont pas d'emploi et sont immédiatement disponibles en vue d'un placement. De l'autre les demandeurs d'emploi, à savoir les personnes à la recherche d'un emploi. Plus nombreux, les demandeurs d'emploi comprennent aussi les personnes en programme d'emploi temporaire, en programme de reconversion et de perfectionnement ou en gain intermédiaire. Pour une comparaison entre cantons, c'est le taux de chômage qui est le plus pertinent. En août, il était de 2,9% dans le canton de Fribourg, soit 3746 chômeurs, contre 3,6% à l'échelle nationale.Et qu'en est-il des jeunes, particulièrement nombreux dans un canton universitaire comme Fribourg? En août, le taux de chômage était de 3,7% parmi les 15-19 ans et de 4,7% parmi les 20-24 ans. Au même moment, le taux de chômage des 15-24 ans était de 4,5% en Suisse et de 6,3% en Suisse romande et au Tessin. Quand au nombre de demandeurs d'emploi entre 20 et 29 ans, il est passé de 1945 à 1667 entre août 2009 et août 2010. Des chiffres en baisse, donc, mais supérieurs aux 1299 demandeurs d'emploi d'août 2008, avant la crise.
L'AVIS DU SPE
Mais les statistiques ne disent pas tout. «Chaque jeune représente un cas individuel», estime Marc Genilloud, chef du Service public de l'emploi (SPE) du canton de Fribourg. Lequel voit derrière la révision de l'assurance-chômage un débat autour de l'intégration des jeunes sur le marché du travail. «Elle doit se faire plus tôt. C'est un domaine que nous allons renforcer. Depuis plusieurs années, nous avons par exemple augmenté le nombre de stages en entreprises», explique-t-il, rappelant que des mesures sont en place pour aider les chômeurs à retrouver un emploi.Marc Genilloud rappelle également que les jeunes qui ont déjà cotisé, par exemple par le biais d'un petit job parallèle aux études, auront droit, à certaines conditions bien sûr, à des indemnisations. Mais la réforme universitaire de Bologne n'est-elle pas justement connue pour laisser peu de temps libre aux étudiants pour trouver un emploi? «Il y en a toujours qui diront qu'ils n'ont pas le temps. Mais, pour s'intégrer ensuite sur le marché du travail, il faut aussi influencer la chance», répond le chef du SPE.En clair, c'est la notion même d'assurance que Marc Genilloud tient à mettre en évidence. «Nous sommes dans un système qui dit que qui cotise a des droits», résume-t-il. Mais les jeunes, notamment les sections jeunes des partis politiques ont du mal à avaler la pilule.
Nicolas MARADAN