La généalogie passionne de plus en plus de monde dans le canton. Encore faut-il savoir retrouver ses racines! Pour aider les historiens en herbe partis à la recherche de leurs ancêtres, l’archiviste cantonal adjoint Leonardo Broillet vient donc de sortir un ouvrage qui leur permet de s’y retrouver dans les méandres des archives. Une démarche inédite en Suisse.
La généalogie passionne de plus en plus les citoyens. Avec le mot-clé sexe, le terme généalogie est – paraît-il – celui qui est le plus utilisé pour des recherches sur la toile. Notre canton de Fribourg n’échappe pas à ce phénomène planétaire. Les Fribourgeois sont toujours plus nombreux à se lancer dans cette pratique qui consiste à rechercher qui étaient nos chers aïeux. Cette tendance n’a pas échappé à Leonardo Broillet. Ce dernier, archiviste cantonal adjoint depuis septembre 2010, a rédigé un guide pratique sur la recherche généalogique à Fribourg qui vient de sortir de presse. Entretien.
Leonardo Broillet, pourquoi publiez-vous un tel ouvrage?
L’intérêt pour la généalogie est en pleine croissance. Le canton de Fribourg constitue un terreau particulièrement fertile pour cette science auxiliaire de l’histoire. En 2010 par exemple, plus de 40% des usagers des Archives cantonales de Fribourg étaient des généalogistes, soit 347 personnes sur 819 lecteurs. Il est peu aisé pour le personnel des archives, pour des raisons de temps, de répondre à toutes les questions des généalogistes. Ce guide leur permettra de travailler de manière plus autonome et d’améliorer la qualité de leur travail. Il leur permettra en outre de donner de la sève et de l’écorce aux arbres généalogiques, souvent trop secs, en joignant de riches éléments biographiques.
En fin de compte, votre guide est une manière habile de dire aux généalogistes de se débrouiller eux-mêmes et de cesser d’importuner les archivistes…
Non, telle n’est pas notre intention, au contraire. Il est vrai que les généalogistes, parfois mal préparés, souvent exigeants et impatients, ne sont pas des clients faciles. Mon livre permettra de dissiper certaines incompréhensions qui surgissent parfois entre eux et les archivistes, faute de moyens. Certaines archives, comme celles de Berne, ont décidé de limiter l’accès aux généalogistes pour diminuer les dépenses. A Fribourg, nous avons une tout autre stratégie. Nous encourageons les généalogistes à venir consulter nos riches archives. Car nous sommes conscients que ces amateurs participent à la diffusion et à la démocratisation du savoir.
Vous êtes-vous inspiré d’un modèle créé ailleurs?
Non, ma démarche est inédite. Il n’existe pas de guides généalogiques similaires en Suisse, ni à l’étranger à ma connaissance. A noter que mon ouvrage s’adresse aussi bien aux chercheurs débutants que chevronnés.
Concrètement, qu’offre votre ouvrage?
Il s’agit d’un instrument pratique qui permet aux chercheurs de se retrouver dans les méandres des archives. Il leur permet de localiser rapidement des documents utiles à leur travail. Pour répondre à leurs questions, comme par exemple: qui vivait dans le ménage de mon arrière-grand-père en 1880? Où trouver la trace des baptêmes célébrés à Montbovon en 1750? Qui était propriétaire de telle ferme à Domdidier en 1632?
Pourquoi se perdre dans les archives, alors qu’internet regorge d’informations?
Croire que l’on peut constituer son arbre généalogique par de simples clics sur sa souris est totalement illusoire. Ceux qui affirment cela sont des escrocs ou des fumistes. Internet peut donner quelques informations, mais rien ne peut remplacer la consultation in situ des archives et des documents.
Vous êtes avant tout historien du Moyen Age et archiviste, pourquoi cet intérêt pour la généalogie?
La généalogie a été mon premier amour. A l’âge de 14 ans, j’ai commencé à rédiger l’arbre de mes aïeux.
Comme je suis à moitié Fribourgeois et Tessinois, je voulais mieux connaître mes racines des deux côtés des Alpes.
Qui sont les généalogistes d’aujourd’hui?
Monsieur et Madame tout le monde. Des universitaires aussi bien que des non-universitaires. Il y a davantage d’hommes, mais les femmes ne sont pas en reste. Les retraités forment le gros du bataillon, pour la simple et bonne raison qu’ils disposent de plus de temps. Et fait nouveau, les jeunes s’y mettent aussi. C’est très réjouissant.
Comment expliquez-vous ce boom de la généalogie, depuis une vingtaine d’années?
En premier lieu, il y a internet qui a dopé la discipline, de manière plus ou moins fiable comme je l’ai déjà évoqué. D’autres facteurs expliquent également cet essor: les familles sont de plus en plus désunies et éclatées, la mobilité augmente et les repères s’amenuisent. Conséquence: de nombreux citoyens éprouvent le besoin de se retrouver, de rechercher leurs racines. La preuve: aux archives de Fribourg, nous recevons des gens qui viennent d’un peu partout en Suisse et en Europe.
«Mes aïeux! Guide des recherches généalogiques et biographiques aux Archives de l’Etat de Fribourg», par Leonardo Broillet, 148 pages, 30 francs, édité par la Société d’histoire du canton de Fribourg (SHCF). L’ouvrage est disponible en librairie, ainsi qu’auprès de la SHCF à info@shcf.ch.
SAMUEL JORDAN