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mardi 13 décembre 2011

Un tiers de la nourriture disponible dans les pays riches n'est jamais consommée

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Des décennies de course à la production agricole ont longtemps occulté l’évidence: le gaspillage de la nourriture est considérable. «Tous les experts sont d’accord: environ un tiers de la production agricole mondiale n’est pas utilisée», dénonce Barbara Redlingshöfer de l’Institut national français de la recherche en agriculture (INRA).

Dans les pays riches, c’est l’abondance qui est responsable: un tiers de la disponibilité alimentaire n’est jamais consommé, selon l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). Soit quelque 300 kg par an et par habitant en Europe et aux Etats-Unis. Près de 100 kg finissent dans les poubelles des consommateurs, le reste est jeté par les distributeurs ainsi que par les producteurs en raison de surproduction, ou lorsque les supermarchés refusent la marchandise périssable pour cause d’un aspect déficient.

«Il y a une réponse à apporter à chaque étape de la chaîne alimentaire, avance Barbara Redlingshöfer. La difficulté est que dans nos pays, le prix de la main-d’œuvre fait qu’il est souvent moins cher de jeter et qu’on laisse des récoltes pourrir sur pied.» Ce qui arrive lorsque des agriculteurs apprennent de leur fournisseur que leur production ne sera pas achetée, ou que le prix qu’on leur propose serait trop bas pour couvrir les frais de récolte.

La grande distribution affirme bien gérer ses stocks — chaque produit jeté représente après tout un manque à gagner. Mais le gaspillage, dans la pratique, reste considérable.

«Aujourd’hui, la réutilisation des invendus relève de l’initiative individuelle des distributeurs, souligne Barbara Redlingshöfer. On pourrait imaginer la mise en place d’un véritable réseau d’échange d’informations qui associerait les distributeurs — même concurrents — et les producteurs.» Une telle initiative permettrait d’anticiper les surplus et de les orienter vers les banques alimentaires, les industries de transformation, l’alimentation animale ou, au pire, la transformation en biogaz.

«Il faut également éduquer les consommateurs dès l’école, poursuit Barbara Redlingshöfer. Par exemple, expliquer la différence entre une date limite d’utilisation et une recommandation d’utilisation optimale.» Autre piste, plus technologique: mettre au point des emballages sophistiqués capables de mieux protéger les aliments ou encore d’indiquer leur état de conservation à l’aide de capteurs pouvant signaler si la chaîne du froid a été rompue ou si les produits ont été exposés à une humidité excessive.

Dans les pays en développement, les pertes sont aussi élevées qu’au Nord, mais surviennent juste après la récolte. Chaleur et humidité dégradent rapidement les produits et occasionnent des pertes pouvant atteindre 70%. Les piètres conditions de stockage font des céréales une proie facile pour les rongeurs et les moisissures. «Nous travaillons sur ces problèmes depuis 1978, mais les pertes restent élevées, concède Jibril Drame, de la FAO. La réponse est plus économique que technique: il faut développer les infrastructures: stockage, routes, camions et bien sûr électricité et matériel pour le froid.»

«Il faut favoriser l’apparition d’une industrie locale de transformation des produits, qui reste le plus souvent inexistante, ajoute Didier Montet, spécialiste de la sûreté sanitaire au Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad). Produire des jus, des compotes ou des conserves permettrait de réduire les pertes de manière importante.» Une orientation qui réclame un meilleur accès au microcrédit, souligne Barbara Redlingshöfer.

Un espoir porte sur le développement de technologies simples et particulièrement efficaces à l’image des silos métalliques développés dès les années 1980 en Amérique centrale par l’Agence suisse de développement (DDC): fabriqués localement pour quelques dizaines de dollars, ils réduisent les pertes en céréales de 30%, avec une durée de vie d’une vingtaine d’années. Une autre technique peu onéreuse qui commence à se développer, notamment aux Philippines, est l’utilisation de cartons d’emballage compartimentés qui évitent que les produits en vrac ne s’abîment lors du transport sur des routes cahoteuses.

«On peut également imaginer la mise au point de films alimentaires capables de préserver les fruits et légumes des bactéries et des moisissures, souligne Didier Montet. Par exemple, à partir d’amidon, ou de chitosane, une substance extraite de la carapace des crustacés.» Une solution encore à l’étude et qui pourrait favoriser le développement économique au Sud en rendant possible les exportations par bateau, beaucoup moins onéreuses que l’avion.

Rapprocher consommateurs et producteurs

En plein essor dans les pays du Nord, la vente directe de fruits et légumes livrés par les agriculteurs à domicile court-circuitent les réseaux de distribution usuels. La suppression des intermédiaires améliore la rémunération des producteurs et, surtout, provoque une réappropriation du produit par le consommateur, souligne Barbara Redlingshöfer de l’INRA: «Le consommateur achète un produit brut qu’il transforme lui-même et se soucie alors beaucoup moins de l’aspect.» Une situation qui peut faire espérer une baisse du gaspillage, mais qui ne présente pas que des avantages, prévient Didier Montet: «Dans ce type de circuits courts, il est beaucoup plus difficile de garantir la sécurité sanitaire.»

Denis Delbecq