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jeudi 9 février 2012

La lutte antipiratage se mondialise

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Alors que les Etats-Unis légifèrent pour lutter contre le téléchargement illégal sur internet, un traité international intitulé ACTA, auquel a participé la Suisse, est également en gestation, déclenchant des vagues de protestations.

Depuis que vingt-deux pays de l’Union européenne ont signé, le 26 janvier dernier, le traité ACTA (pour «Anti-Counterfeiting Trade Agreement», à traduire par Accord commercial anticontrefaçon), la planète web est en émoi. De nombreux internautes s’indignent en effet contre ce texte qui a pour but, notamment, de mettre un terme au téléchargement illégal sur internet.

Sur son site web, le collectif d’internautes nommé «La Quadrature du net», très actif dans la défense des libertés sur internet, qualifie notamment le traité de «mesure répressive extrémiste pour protéger un régime dépassé du droit d’auteur».

La rage des internautes est d’autant plus grande que l’ACTA fait suite aux lois antipiratage sur lesquelles travaille en ce moment même le Congrès américain (des textes intitulés SOPA et PIPA, voir «La Liberté» du 21 janvier 2012). Des lois dont on redoute qu’elles finissent par paralyser la Toile.

Manifestants dans la rue

En résumé, l’ACTA est un traité international visant à protéger les droits à la propriété intellectuelle. Cela concerne les infractions au droit d’auteur sur le web, bien sûr, mais aussi les contrefaçons de manière plus générale (comme dans le domaine pharmaceutique avec les médicaments génériques, par exemple). De nombreux pays (dont la Suisse) ont participé à l’élaboration de ce projet qui a abouti en octobre 2010 sous la forme d’un traité que huit Etats (Australie, Canada, Corée du Sud, Etats-Unis, Japon, Maroc, Nouvelle-Zélande et Singapour) ont d’ores et déjà signé à l’automne 2011.

Comme principale arme, l’ACTA prévoit de faire pression sur les fournisseurs d’accès à internet afin d’atteindre les pirates. «L’ACTA donnera aux industries de la musique et du cinéma une arme forçant les fournisseurs d’accès à faire la police», reproche «La Quadrature du net», qui craint que les données privées des internautes soient ainsi divulguées.

La fronde n’a pas lieu que sur internet. Depuis fin janvier, de nombreux manifestants sont également descendus dans le rue, dans plusieurs grandes villes de Pologne et de République tchèque, afin de protester contre le traité. Face à ces réactions, les gouvernements polonais et tchèques ont pour l’heure préféré geler le processus de ratification.

La situation en Suisse

Et qu’en est-il en Suisse, sachant que la Confédération a également participé aux négociations qui ont mené au traité ACTA? Le Parti pirate suisse s’y oppose avec virulence et a notamment créé le site stopp-acta.info afin de sensibiliser la population. Le traité ACTA y est comparé au Big Brother de George Orwell. Une pétition a également été lancée.

Sur son site internet, l’Institut fédéral de la propriété intellectuelle (IPI) répond à ces attaque. Il explique pour sa part que «l’ACTA est compatible avec le droit suisse et ne nécessite pas de modification législative», ajoutant que le traité ne prévoit pas d’obliger les fournisseurs d’accès à soumettre les internautes à une surveillance systématique. L’IPI précise toutefois qu’aux «termes de l’accord, les Etats contractants peuvent habiliter leurs autorités compétentes à obliger les fournisseurs d’accès à internet à communiquer l’identité d’un abonné dont il est allégué que le compte aurait été utilisé aux fins de commettre des violations de droits».

Cependant, la Confédération semble pour l’heure avoir freiné ses ardeurs. Elle n’a en effet pas encore ratifié le traité ACTA. Et, dans un rapport sur le téléchargement illégal sur internet publié en décembre dernier, le Conseil fédéral précisait même, au sujet d’ACTA, que «cette approche ne semble pas très prometteuse d’un point de vue pratique», ajoutant que le verrouillage d’internet par un fournisseur d’accès ne serait «guère compatible avec le droit à la liberté d’expression». I


Pas facile de télécharger légalement

Mettre toujours plus d’entraves au téléchargement illégal est une noble intention. Mais, dès lors, comment faire pour télécharger films et séries télévisées en toute légalité? Tout d’abord, rappelons qu’en Suisse le téléchargement de fichiers (musique, films, etc.) depuis internet est légal pour les particuliers si l’usage qui en est fait reste privé. Et cela devrait rester ainsi pour le moment, comme l’a annoncé récemment le Conseil fédéral (voir «La Liberté» du jeudi 1er décembre 2011).

En revanche, mettre des fichiers illicites à disposition d’autres internautes est contraire au droit suisse. Utiliser un réseau «peer-to-peer» (abrégé 2P2, c’est-à-dire un système de partage de fichiers) entre par exemple dans cette catégorie. Et un site comme Megaupload, récemment fermé par la justice américaine (voir «La Liberté» du 21 janvier 2012) est donc également illégal en Suisse. Même si l’internaute qui l’utilise n’est pas à proprement parler coupable de violation du droit d’auteur.

Cela étant, la vague de répression contre le téléchargement illégal qui sévit actuellement dans le monde entier pose la question de savoir où et comment les internautes qui veulent rester en bons termes avec leur conscience peuvent télécharger des fichiers en toute légalité. Premier constat: le marché numérique du film est bien moins développé que ne l’est celui de la musique, qui est actuellement en plein boom (voir ci-contre).

Ainsi, la Fédération internationale de l’industrie phonographique (abrégé IFPI, en anglais) estime que, en 2011, l’industrie du film a retiré, à l’échelle mondiale, seulement 1% de ses revenues des ventes numériques. Contre 32% pour l’industrie du disque. Effectivement, des services comme ceux offerts par iTunes, Amazon, Deezer ou encore Spotify pour avoir accès, moyennant paiement, à un vaste catalogue de chansons en ligne n’ont pas d’équivalent pour les films et les séries télévisées. Sur son magasin en ligne, iTunes permet bien de télécharger quelques films. Mais le catalogue est peu étendu et les séries en sont absentes. Amazon, de son côté, offre un service efficace de vidéo à la demande. Grâce à «Amazon Instant Video», il est par exemple possible de télécharger, d’un seul clic, le dernier épisode de sa série préférée sur son ordinateur pour une somme avoisinant les deux dollars. Mais, malheureusement, il faut pour cela résider sur sol américain. Il en va de même pour des sites comme Epix, Vudu ou encore Netflix, tous réservés à l’Amérique du Nord.

Idem pour les services de vidéos à la demande de chaînes comme M6 ou Arte. Pour le moment, les téléspectateurs helvétiques n’y ont que peu ou pas accès. En Suisse, la vidéo à la demande passe par des systèmes comme ceux proposés par les grands opérateurs nationaux (Swisscom TV, Sunrise TV, Orange TV) ou encore celui de la start-up genevoise Swiss TV ou de Hollystar.ch. Mais ces services, qui incluent de la vidéo à la demande, nécessitent l’installation d’un matériel spécifique sur sa télévision et parfois le paiement d’un abonnement. Si l’offre en nombre de films est intéressante, elle reste plus que restreinte en ce qui concerne les séries télévisées.

Musique en plein boom

Si le modèle économique peine à s’imposer dans le domaine des films et des séries télévisées, les ventes numériques de musique sont en revanche en plein boom. Selon Nielsen Soundscan, organisation récoltant les statistiques de l’industrie du divertissement américaine, plus de 330 millions d’albums ont été vendus en 2011 aux Etats-Unis (contre 326 millions en 2010), dont 103 millions au format numérique, soit une hausse de presque 20% par rapport à l’année précédente. Pour la toute première fois, l’augmentation des ventes numériques de musique a donc permis de compenser la baisse des ventes physiques. Un constat identique a été fait en France par le Syndicat national de l’édition phonographique (SNEP): le téléchargement légal a progressé en 2011 de près de 26%. Au niveau mondial, la Fédération internationale de l’industrie phonographique évalue cette hausse à 23%.

Nicolas Maradan
La Liberté.ch