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dimanche 24 juin 2012

Bottled Life




Comment transformer de l’eau en or? Il existe une entreprise qui en détient la recette: Nestlé. Cette multinationale suisse est le leader mondial du commerce de l’eau en bouteille.

Le journaliste Res Gehriger s’apprête à jeter un coup d’œil derrière les coulisses de ce marché qui brasse des milliards. Nestlé se rebiffe. La direction de l’entreprise considère que c’est le mauvais film au mauvais moment. Mais le journaliste ne baisse pas les bras. Il entame un voyage de prospection, concentrant ses recherches aux Etats-Unis, au Pakistan et au Nigéria. Ce périple dans le monde de l’eau en bouteille met en lumière l’attitude et les stratégies du plus puissant groupe agroalimentaire mondial.

A une époque où le nombre d’habitants sur la planète grimpe en flèche, l’eau potable devient de plus en plus une denrée rare. «Bottled Life» se penche sur le florissant marché de l’eau en bouteille en se concentrant sur le numéro un de la branche: la multinationale suisse Nestlé.

Nestlé possède plus de 70 marques d’eau disséminées partout dans le monde. Parmi les plus connues figurent Perrier, San Pellegrino et Vittel, de même que la marque Henniez pour ce qui est de la Suisse.
Uniquement avec l’eau en bouteille, Nestlé brasse quelque 10 milliards de francs par année. L’eau reste pourtant un domaine sur lequel Nestlé n’aime pas s’étendre. C’est ce que le journaliste suisse Res Gehriger apprend à ses dépens. Les dirigeants de Nestlé refusent d’accorder des interviews. Mais Gehriger ne baisse pas les bras. Il entreprend un voyage d’investigation au cours duquel il apprendra à quel point le commerce de l’eau peut être source de conflits.

La guerre de l’eau aux Etats-Unis

Pour pouvoir vendre de l’eau, il faut tout d’abord en posséder. Dans de nombreuses contrées des USA, le marché débouché le plus important de Nestlé dans le domaine de l’eau, c’est la loi du plus fort qui prédomine : celui qui possède ou gère des terres a le droit d’y pomper toute l’eau qu’il veut – sans se soucier de son voisin.

Dans l’Etat fédéral du Maine, Nestlé a acheté toute une foule de terrains riches en sources. C’est là que la multinationale puise annuellement plusieurs millions de mètres cubes d’eau et les achemine vers ses entreprises de mise en bouteille, entraînant tout un cortège de camions citernes. Dans les communes de Fryeburg, Newfield et Shapleigh, le journaliste suisse apprend comment Nestlé se bat contre la résistance des habitants à l’égard de ce pompage intempestif de leur eau: avec une armée d’avocats, de lobbyistes et de conseillers en relations publiques.

La stratégie d’expansion de Nestlé

«Bottled Life» met en lumière la stratégie d’expansion de Nestlé dans le domaine du marché globalisé de l’eau. Alors qu’aux USA et en Europe, la multinationale vend avant tout de l’eau de source assortie d’une appellation d’origine, elle applique un concept bien différent dans les pays émergeants et en voie de développement : dans ces régions, il existe «Nestlé Pure Life», de l’eau souterraine purifiée et enrichie grâce à un habile mélange de minéraux dont Nestlé a la recette.

A l’origine, Pure Life est une idée de Peter Brabeck. Le fin stratège de Nestlé a lancé le produit en 1998.
Aujourd’hui déjà, Pure Life est la marque d’eau en bouteille la plus vendue à travers le monde.

Le Pakistan comme marché-pilote de Nestlé

Gehriger se rend au Pakistan, qui a servi de marché-pilote à Nestlé. Alors que la multinationale lui refuse tout accès au centre de production de Pure Life, il apprend à connaître la situation des gens qui vivent à proximité des enceintes de la grande fabrique de Sheikupura, près de Lahore. Ici, le niveau de la nappe phréatique s’est rapidement abaissé, et l’eau des puits qu’utilisent les habitants est devenue un nauséabond bouillon de culture.
«Nestlé Pure Life» est un astucieux modèle commercial, surtout dans les pays du Sud. Là où les systèmes d’approvisionnement en eau s’essoufflent, l’eau en bouteille constitue une alternative sûre, même si elle est coûteuse.

Par exemple à Lagos, la mégalopole du Nigéria, l’eau vaut son pesant d’or. Le film montre qu’ici déjà, la réalité dépasse la fiction : dans cette ville africaine, l’eau est devenue un bien de consommation qui a son prix pour tout le monde. Dans les bidonvilles de Lagos, les familles consacrent la moitié de leur budget à acheter de l’eau en barriques. De leur côté, les classes privilégiées boivent Pure Life.

L’idéalisation de l’eau en bouteille

Nestlé attache une grande importance à sa réputation. Lorsqu’il s’agit de l’eau, c’est avant tout à Peter Brabeck que la multinationale doit sont image. En tant que CEO déjà, mais plus encore depuis qu’il a passé président en 2005, il a développé une stratégique de communication qui s‘aide d’abord de la notion «Corporate Social Responsibility» (responsabilité sociale de l’entreprise) et plus tard de la notiion «Creating Shared Value» (création de valeurs partagées). Est-ce là vraiment la philosophie de l’entreprise ? En soulevant cette question, Gehriger tombe de haut. Tout ce qui lui reste à la fin, c’est l’image d’une multinationale qui s’approprie le droit sur des sources partout à travers le monde à seule fin d’avoir la main sur le commerce de l’eau dans les années à venir.


Documentaire en allemand


10 choses à savoir


1.Stratégiquement parlant, l’eau en bouteille fait partie des domaines majeurs de Nestlé. Aujourd’hui déjà, Nestlé fait avec l’eau en bouteille un dixième de son chiffre d’affaires global, lequel s’élève à 110 milliards de francs suisses.

 2.Nestlé est devenu le leader du marché de l’eau en bouteille en adoptant une politique d’acquisition, rachetant notamment des marques telles que Vittel et Perrier.

 3.Nestlé acquiert constamment les droits sur des sources et des nappes phréatiques, ceci afin de satisfaire la demande croissante pour de l’eau en bouteille, une demande que l’entreprise a créée elle-même.

 4.Dans de nombreux Etats, les dispositions légales au sujet des droits sur l’eau sont vétustes. Nestlé profite de cet état de fait, non seulement dans le Tiers-monde, mais aussi aux USA et dans d’autres pays occidentaux.

 5.Nestlé utilise ses moyens financiers et politiques pour s’opposer aux efforts de communautés locales qui veulent que l’eau souterraine demeure un bien public.

 6.Nestlé utilise de l’eau pour fabriquer de l’eau.

 7.Nestlé propage l’eau en bouteille à grands coups de campagnes marketing et publicitaires. Nestlé affaiblit ainsi la conscience des gens à l’égard de la nécessité de garantir une alimentation en eau publique et efficace.

 8.Nestlé s’affiche en bienfaiteur – à travers une foule de dons et d’actions à l’échelle locale mais aussi en déclarant que les mesures de rationalisation dans la production et la distribution de l’eau en bouteille sont durables à long terme.

 9.Avec l’eau en bouteille, Nestlé crée des dépendances – justement là où les systèmes d’approvisionnement en eau potable s’écroulent, principalement dans le Tiers-monde.

 10.Le commerce de Nestlé avec l’eau n’est pas simplement un commerce comme les autres, c’est un commerce avec une matière première absolument indispensable à la survie des habitants de la planète.


Voici, à titre d’aide, une brève explication au sujet d’une question assez compliquée :

1. Eau minérale naturelle
C’est une eau provenant d’une source géographiquement bien délimitée et répondant à certaines normes légales en termes de minéralisation. Par exemple, Perrier ou Vittel.

2. Eau de source/spring water
Aux USA, c’est une eau mise en bouteille qui peut être le fruit d’un mélange d’eaux provenant de différentes sources. Elle n’est cependant pas considérée comme une eau minérale classique. Dans notre film, c’est par exemple l’eau Poland Spring.
Dans l’UE, l’eau dite de source doit être mise en bouteille directement à la source, mais ses caractéristiques en termes de minéralisation naturelle sont moins contraignantes que celles de l’eau minérale naturelle.
3. Eau de table
C’est une eau généralement pompée dans des nappes phréatiques ou directement dans des systèmes d’approvisionnement en eau. Dans notre film, il s’agit notamment de Nestlé Pure Life ou de l’eau mise en bouteille par Pepsi et Coca Cola.

Le fondateur de l’entreprise lance le commerce de l’eau dès 1843

Henri Nestlé, inventeur du lait en poudre pour bébés, crée une fabrique d’eau à Vevey en 1843. Il y transforme de l’eau d’une conduite en «eau minérale» qu’il vend dans les restaurants de la région. A la retraite, il acquiert une source à Glion, sa commune de résidence, non loin de Vevey. Il utilise l’eau pour alimenter sa propriété et son vaste jardin. Le surplus est acheminé au village pour la population.

Nestlé fait son shopping: de Vittel à Perrier et San Pellegrino

En 1969, Nestlé acquiert des parts dans la Société Générale des Eaux Minérales de Vittel. L’entreprise met ainsi le pied dans l’industrie de l’eau en bouteille. Perrier, leader mondial du secteur, débarque sur le marché américain en 1976. Là, Nestlé est responsable de la distribution de la fameuse bouteille ventrue et observe son succès auprès du jeune public citadin.

L’eau en bouteille s'impose peu à peu comme une alternative aux boissons sucrées telles que Coca Cola et Pepsi – comme une boisson désaltérante sans calories, parfaitement en adéquation avec la tendance naissante de l’alimentation saine. Les ventes progressent et le secteur se développe à vive allure.

En1989, le président du conseil d'administration Helmut Maucher et le directeur du marketing Peter Brabeck décident de miser radicalement sur l’eau. Nestlé entend devenir numéro 1 et amorce le rachat de Perrier. Après une lutte d'acquisition sans merci, les Français rendent les armes en 1992. Avec la reprise de Perrier, de nombreuses marques régionales américaines, dont le très important Poland Spring, tombent automatiquement dans l'escarcelle de Nestlé.

San Pellegrino connaît à peu près le même sort que Perrier. Nestlé met la main sur la marque italienne de prestige en 1997.

Une eau pour toute la planète – Pure Life

Vittel, Perrier et San Pellegrino sont des eaux minérales issues d’une source régionale définie.

Poland Spring et d’autres marques américaines, désignées comme eau de source naturelle (natural spring water), proviennent en fait de différentes «sources», souvent très éloignées l’une de l’autre.

Les marques d’eau minérale et de source visent principalement les consommateurs des classes supérieures ou la classe moyenne large des pays occidentaux.

En 1997, Nestlé concocte un produit à base d'eau souterraine filtrée, additionnée d’un mélange spécial de sels minéraux. L’avantage: cette eau peut être produite partout dans le monde et possède en outre partout le même goût. On la baptise Nestlé Pure Life. Nestlé lorgne sur un nouveau marché d’envergure, les consommateurs des pays émergents et du tiers monde. Quelque dix ans après, Nestlé Pure Life est l’eau en bouteille la plus vendue au monde.






 




Egger Ph.