La « Patrouille des Glaciers » :
une place particulière dans l’histoire suisse de la Deuxième Guerre mondiale et
toujours actuelle dans le domaine des activités de plein air :
Aptitude à l’engagement dans des conditions extrêmes,
compétition pour amoureux de la montagne et
grand événement médiatique offrant une vitrine à l’armée suisse : la P D G !
La Patrouille des glaciers est une course internationale de ski alpinisme organisée tous les deux ans par l'armée suisse, ouverte à des équipes de trois militaires ou civils : les patrouilles. Elle a lieu sur les crêtes alpines au sud du canton du Valais, à la fin du mois d'avril. Il existe deux parcours :
le parcours Zermatt - Arolla - Verbier est de 53 kilomètres (courses Z1 et Z2), soit l'équivalent de 110 km/effort.
le parcours Arolla - Verbier est de 27 kilomètres (courses A1 et A2), soit l'équivalent de 53 km/effort
Chaque patrouille est composée de 3 membres qui, pour avoir le droit de participer à la course, doivent pratiquer régulièrement des randonnées et des courses en montagne, être très bons skieurs, savoir skier « encordés » et être capables dans des conditions normales d'effectuer les tronçons de Zermatt à Arolla en 8 h 30 et d'Arolla à Verbier en 8 h 30.
A droite, Rodolphe Tissières, fondateur de la Patrouille des Glaciers avec Roger Bonvin.
Image: ASL
La patrouille a des origines militaires. Durant la Seconde Guerre mondiale, l'armée suisse organise une course réservée à ses soldats pour tester leurs capacités. La première édition a lieu en avril 1943 grâce au travail de deux capitaines de la brigade de montagne 10 (Rodolphe Tissières et Roger Bonvin). Cette année-là, 18 patrouilles, chacune de trois membres, parcourent 63 kilomètres pour rejoindre Verbier. En 1944, 44 équipes participent à une étape allongée. Durant quelques années, la course n'est plus organisée. C'est le 10 avril 1949 que la course reprend, mais le décès de trois participants d'Orsières (Maurice Crettex, Robert Droz et Louis Thétaz) dans la crevasse d'un glacier provoque une polémique. L'organisation de la course est alors interdite par le Département militaire fédéral jusqu'en 1984.
René Martin, Camille Bournissen relancent la compétition. Elle reste toujours sous le contrôle de l'armée qui assure le bon déroulement de la compétition, sans publicité ni parrains. Le rythme d'une organisation bisannuelle a été défini. La course est également plus ouverte avec la possibilité pour les civils (hommes et femmes) d'y participer. En 1986, les conditions météorologiques déplorables forcent les organisateurs à interrompre la course. En 2002, la même mésaventure se produit.
En 2004, une équipe étrangère s'est imposée pour la première fois. La même année, la course a compté 2 934 inscrits (environ 60 % de patrouilles civiles, les 40 % restant étant des patrouilles militaires), dont 984 inscrits pour la grande course, 636 et 1 314 pour les courses sur le petit parcours.
En 2006, les organisateurs sont forcés de refuser un millier d'inscriptions. Pour la première fois, une seconde course est organisée depuis Zermatt. Les médias soulèvent toutefois le problème du dopage : les patrouilleurs ne sont soumis à aucun contrôle ce qui alimente les rumeurs sur les performances des participants. Le commandant de la course, le brigadier Marius Robyr, refuse d'imposer des contrôles et met en avant l'esprit de la course, l'honnêteté des participants qui s'alignent dans d'autres compétitions où des contrôles sont effectués et l'absence de gains financiers pour les vainqueurs1.
En 2012, les organisateurs sont contraints d'annuler la course Zermatt-Verbier du jeudi pour cause de vent. Quant aux courses du samedi, elles furent stoppées et certains départs n'eurent pas même lieu pour cause de coulées de neige le long du Lac des Dix. Ainsi durant cette édition seule la course Arolla-Verbier du Jeudi pu se dérouler dans son intégralité.
Les athlètes grimpent en direction du Col De Riedmatten. (28 avril 2012)
Image: Keystone
L'origine de la PDG remonte à la Deuxième Guerre mondiale (1939-1945). La brigade de montagne 10 était prête pour sa mission : défendre la partie sud-est des Alpes suisses.
L’idée de la PDG a pris forme juste avant que la guerre n’éclate : deux capitaines de la brigade de montagne 10, dont le futur conseiller fédéral Roger Bonvin, en sont les véritables initiateurs. La troupe devait prouver son aptitude à l’engagement dans le cadre d’une course de patrouille d’un genre très particulier. Les organisateurs avaient sélectionné un tracé légendaire, déjà baptisé à l’époque la « Haute Route » entre Zermatt et Verbier. Un trajet qui durait normalement quatre jours de marche et qui devait être accompli d’une seule traite. La compétition s’est déroulée pour la première fois en avril 1943 – la « Patrouille des Glaciers » voyait le jour.
Patrouille No. 17 du sergent Basile Bournissen avec ses camarades, sdt Julien Mayoraz, Hérémence, et sdt Victor Mayoraz, Hérémence à l'arrivée à Verbier en 1943.
Malheureusement, la troisième édition au printemps 1949 fut entachée par un tragique accident. Une patrouille militaire disparut dans une crevasse du glacier du Mont Miné entre Arolla et Verbier et ne fut retrouvée que huit jours plus tard. A l’euphorie des débuts succédaient des images de désolation diffusées aux actualités. Les régions de montagne en furent bouleversées, et le département militaire fédéral de l’époque interdit l’épreuve. Une interdiction qui fut maintenue pendant plus de 30 ans.
Le mythe de la PDG a toutefois perduré, entretenu de père en fils dans les vallées du Vieux Pays. Du souvenir naquit l’envie de remettre la manifestation sur pied. En 1983, le chef de l’instruction de l’armée , le commandant de corps Roger Mabillard, entendit cet appel. Lui-même féru des épreuves d’endurance militaires, il autorisa l’organisation d’une nouvelle PDG. Il confia ce mandat au commandant de la division de montagne 10.
La magie a repris dans la nuit du 5 au 6 avril 1984 : près de 190 patrouilles de trois personnes prirent le départ à Zermatt et Arolla pour Verbier. Tous les efforts possibles furent entrepris afin de sécuriser chaque partie de cette course en haute montagne. Une responsabilité clairement dévolue au commandement de l'armée, et qui l'est restée jusqu'à ce jour.
Depuis, le mythe de la PDG continue de faire rêver. Organisé tous les deux ans, cet événement unique en son genre rencontre un succès grandissant à chaque nouvelle édition. En 2006, le nombre de participants fut tellement élevé que le commandement prit la décision d’organiser deux départs depuis Zermatt – une mesure prise depuis longtemps à Arolla.
Les manifestations en plein air et les épreuves d’endurance extrême attirent un public toujours plus nombreux. Pour la PDG, la procédure d’inscription a dû être adaptée : les patrouilles militaires suisses qui répondent aux exigences physiques et en matière de technique alpine sont prioritaires. Les places restantes sont réparties par tirage au sort entre les patrouilles civiles. Au total, 1'400 cordées de trois patrouilleurs peuvent prendre le départ.
En vert : Zermatt (départ)
En rouge : Verbier (arrivée)
1. Schönbiel
2. Tête blanche
3. Col Bertol
4. Arolla
5. Col de Riedmatten
6. Pas du chat
7. La Barma
8. Rosablanche
9. Col de la Chaux
10. Les Ruinettes
Egger Ph.