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mardi 13 mai 2014

L’anorexie touche aussi les hommes


L’anorexie masculine demeure taboue. Conséquence: la maladie est sous-diagnostiquée chez les garçons.



Ils seraient 10%, selon le chiffre le plus souvent articulé. En réalité, la proportion d’hommes parmi les patients anorexiques est sans doute bien plus élevée, explique Sandra Gebhard, responsable médicale du Centre vaudois anorexie boulimie: «La majorité des études sont basées sur des cohortes de patients. En élargissant à la population générale, on se rend compte que le pourcentage augmente. Certaines enquêtes de ce type indiquent 25%.»

La spécialiste voit deux raisons à ce sous-diagnostic: «L’anorexie masculine est encore relativement méconnue des professionnels. Elle est tellement associée aux femmes que l’on ne s’attend pas à la trouver chez les hommes. De plus, cette labellisation féminine est aussi présente dans l’esprit des patients. Il est difficile pour un homme de se reconnaître dans cette pathologie.» Alain Perroud, psychiatre à la Clinique Belmont, à Genève, confirme un «vrai problème» de reconnaissance, avec des répercussions sur les soins: «Les diagnostics tardifs entraînent un retard dans la prise en charge, avec des conséquences aggravées.»

L’anorexie reste le trouble alimentaire le plus rare chez les hommes, derrière la boulimie ou l’hyperphagie. «La pression pour rester mince et le fait de considérer l’image du corps comme un élément de valeur personnelle touchent en priorité les femmes», poursuit Alain Perroud, qui rappelle que les régimes constituent l’élément déclencheur de la maladie dans 85% des cas.

La tranche d’âge la plus exposée (12-25 ans) et les facteurs psychologiques de prédisposition (anxiété, faible estime de soi, perfectionnisme) se ressemblent entre hommes et femmes. Mais au moins une différence les sépare, selon les deux spécialistes: les femmes visent plus souvent la minceur pure, tandis que les hommes recherchent plutôt le gain de muscle.

C’est ainsi son rapport au sport qui a poussé Philippe, 40 ans aujourd’hui, dans l’anorexie entre 17 et 25 ans: «Je ne me trouvais pas assez athlétique, raconte ce Lausannois. J’avais pris des kilos, je fumais trop de joints, je buvais trop.» Pour plaire à sa copine, Philippe commence alors un régime, histoire de perdre deux ou trois kilos, puisant ses recettes dans la presse féminine. «Je manquais de confiance en moi, je ne voyais pas le bout de mon apprentissage de dessinateur en bâtiment.»

Des déséquilibres familiaux et une mère en surpoids qui cherche à maigrir assombrissent le tableau. La suite est chaotique: anorexie, boulimie, médicaments. Jusqu’à une tentative de suicide. «Je m’en suis sorti grâce à un psychiatre qui a pris la responsabilité que des médecins du CHUV m’attachent à un lit et me posent une sonde.» Quinze ans plus tard, avec le recul, Philippe pense que se retenir de manger était un moyen de «reprendre le contrôle de sa vie quand tout lui glissait des mains».


TEMOIGNAGE

«A la fin de la neuvième année scolaire, j’ai fondu de huit kilos en trois mois»

Sergio Torres, 25 ans, futur architecte

Difficile d’imaginer qu’il y a quelques années, Sergio Torres pesait presque la moitié de son poids actuel. Ce futur architecte de 25 ans, aujourd’hui en pleine forme, fait partie des 10% d’anorexiques masculins (lire ci-contre). Le «un sur dix», c’est lui. L’étudiant en master à l’EPFL a souffert pendant six ans de la maladie.

«Tout a commencé par un régime à l’âge de 12 ou 13 ans, se souvient le Colombien d’origine, attablé devant un chocolat chaud dans un café lausannois. Je me trouvais plus rondelet que d’habitude. Il faut dire que je traversais une période stressante, liée à la perte de mon père et à mon arrivée en Suisse.» Pour maigrir, il bannit sucreries, protéines, féculents, consulte des livres nutritionnels. Il développe aussi une suractivité. «Je perdais régulièrement du poids puis, à la fin de la neuvième année scolaire, j’ai fondu de huit kilos en trois mois. Je n’avalais plus rien, que des pommes.»

Commence la descente aux enfers. «J’étais épuisé physiquement et je glissais dans la dépression. A la maison, je pleurais au lieu de manger.» Sa mère l’envoie chez le diététicien. «J’y suis allé une ou deux fois, puis j’ai été hospitalisé à Vevey (VD). C’est là que j’ai été diagnostiqué, à l’âge de 15 ans.» Peu avant la fin du gymnase, il est placé en pédiatrie à Aigle (VD), dans une structure hospitalière qui n’est pas adaptée à l’anorexie, où il est le plus âgé. «C’était horrible. Je vivais dans l’appréhension du repas suivant.» Son poids baisse à 34 kilos (pour 1,63 m). Les médecins mettent en garde: deux kilos de moins, et c’est la sonde. «A ce moment-là, j’ai eu très peur.»

Pour quitter l’hôpital, l’objectif est fixé à 42 kilos. Il y parvient en partie grâce au dessin, une passion. «Un jour, ma mère m’a demandé de lui dessiner une grenouille. Je n’ai plus fait que ça. Je dessinais des grenouilles à longueur de journée, ce qui m’a permis de remonter la pente. J’ai fini par sortir. Ces quatre mois à Aigle ont représenté la période la plus difficile.» Il sera encore suivi par un psychologue, un médecin et une diététicienne jusqu’à l’âge de 21 ans, avec des hauts et des bas. Son rapport à la nourriture s’est désormais normalisé. «Si je mange de nouveau des sucreries? Oui, j’adore ça!»


CHIFFRES

10%
 La proportion estimée d’hommes parmi les patients anorexiques. Certaines enquêtes évoquent même le chiffre de 25%.

12-25 ans
 La tranche d’âge la plus exposée.

85%
 La proportion des cas d’anorexie qui sont déclenchés par des régimes.