Une activité physique adaptée et deux à trois heures de marche par semaine diminueraient le risque de dépendance des séniors, révèle une nouvelle étude menée chez les 70-90 ans.
Photo d'illustration. © Georges Gobet / AFP
Jusqu'à présent, on avait tendance à considérer le sport comme l'apanage de la jeunesse ou encore qu'à partir de 60 à 70 ans il était trop tard pour s'y mettre. Des idées reçues bousculées par les récentes études. Il y a quelques mois l'University College London montrait que, même commencée tard, une activité sportive régulière - au moins une fois par semaine - était associée à trois fois plus de chances de bien vieillir (absence de maladie et d'invalidité, bonne santé mentale, capacités cognitives et sociales préservées). Dans le même temps, l'Inserm a établi que, chez les plus de 75 ans, une activité physique comme le renforcement musculaire ou le tai-chi réduisait le risque de chute et de fracture du col du fémur.
Si on est en bonne santé, pratiquer une activité physique à tout âge permettrait donc de conserver ce capital santé et de bien vieillir. Qu'en est-il des personnes âgées plus fragiles ? La marche et une activité adaptée peuvent-elles retarder ou éviter la dépendance entraînée par une mobilité réduite ? C'est ce qu'ont voulu savoir les chercheurs américains de cette nouvelle étude publiée dans le journal JAMA cette semaine. Plus de 1 600 personnes âgées de 70 à 89 ans ont été suivies à cet effet durant deux ans et demi. Pour une fois, les volontaires pour ce test n'étaient pas de fringants vieillards mais des personnes âgées jugées plutôt fragiles avec un score inférieur à neuf sur douze points à un test de bonne santé physique fréquemment utilisé pour les personnes âgées.
Dignité
Plus de la moitié était sous le score de huit ou équivalent, mais tous étaient capables de marcher au moins 400 mètres sans aide extérieure - le point de référence indiquant un handicap physique. Ensuite, chaque moitié du groupe étudié a été assignée au hasard. La première moitié des volontaires a bénéficié d'un programme d'éducation à la santé et a reçu une à deux fois par mois des informations autour de la nutrition, des soins de santé et d'autres sujets liés au vieillissement. Le deuxième groupe fut, quant à lui, impliqué dans une démarche plus active et "sportive" : musculation du bas du corps avec des poids aux chevilles, deux rendez-vous de marche supervisée chaque semaine avec des promenades de plus en plus longues et trois à quatre séances d'exercices à la maison. L'ensemble visant un total de cent cinquante minutes de marche environ et trois séances de dix minutes d'exercices ou de musculation par semaine.
Après deux ans et demi, les volontaires "sportifs" étaient 18 % moins nombreux que l'autre groupe a avoir connu un épisode d'incapacité physique durant l'expérience et 28 % moins nombreux à être devenus dépendants, c'est-à-dire en mobilité réduite (incapables de marcher 400 mètres par eux-mêmes, sans aide extérieure). En revanche, ce même groupe plus "sportif" a rencontré un peu plus de cas d'hospitalisation durant l'étude que le groupe qui s'était contenté de suivre des enseignements autour de la santé des séniors.
À ce jour, les chercheurs n'ont pas vraiment trouvé d'explication à cette différence et supposent que les volontaires du groupe sportif bénéficiaient d'un suivi médical plus pointu susceptible de repérer plus facilement des dérèglements organiques justifiant une hospitalisation. Si cette première étude mériterait d'être approfondie, elle démontre néanmoins tout l'intérêt de la prévention pour limiter et retarder l'invalidité physique des aînés, véritable fléau économique, psychique et moral de notre société. Cette expérience a également mis en évidence son intérêt économique : le coût de 1 800 dollars par an et par personne suivie (comprenant les remboursements de voyages aux centres de recherche) est largement en deçà des dépenses en soins infirmiers engendrées par les personnes dépendantes. Au-delà de l'aspect économique, c'est surtout la dignité des personnes âgées qui est retrouvée, comme en témoignent certains volontaires qui apprécient de prendre en main leur santé plutôt que d'attendre que quelqu'un les aide.
Sophie Bartczak