Situé à la limite des cantons de Fribourg, de Berne et de Vaud, ce massif est remarquable, tant par son histoire que par ses paysages. textes et photos Éric Loup
Elles sont là, comme si elles avaient jailli des entrailles de la terre. Leurs parois grises en imposent dans ce paysage si vert, et leurs pointes déchiquetées intriguent. Se lancer sur le tour des Gastlosen est incontestablement la plus belle balade en terres fribourgeoises. D’autant que, contrairement à leur nom, elles se montrent des plus hospitalières.
Pour en être convaincu, il suffit de parcourir quelques centaines de mètres dès l’arrivée du télésiège à Musersbergli et de se sentir saisi par cette chaîne de montagnes d’une quinzaine de kilomètres. Son origine, elle la doit à la formation, il y a 160 millions d’années, d’une couche de calcaire qui, à partir de 30 millions d’années, a été soulevée puis redressée par la poussée de la plaque africaine sur l’européenne. Il faudra attendre encore environ 25 millions d’années avant que les Gastlosen n’apparaissent en surface. Puis l’érosion qui a suivi les a modelées sous les contours actuels.
En reprenant le cheminement dans le magnifique vallon, toujours sur le versant nord, le regard reste aimanté aux sommets qui dominent. Et d’apercevoir, le long d’une faille, une cavité, le Grossmutterloch. La légende veut que le diable, selon l’une des versions, ait lancé sa grand-mère contre la paroi dans un accès de colère, perçant ainsi la roche. Une légende qui a son explication, toute scientifique: le phénomène naturel de l’érosion.
La marche gagne un peu plus de hauteur, tout en traversant une forêt, jusqu’à une crête où s’élève le Chalet du Soldat. De ce refuge inauguré en 1945, à la cuisine réjouissante, s’ouvre une autre vision des Gastlosen et un panorama sur les Préalpes vaudoises. Le trajet prend ensuite la direction du col du Loup (Wolfs Ort), du canton de Berne. Une montée en partie rocailleuse, parfois glissante. Parvenu sur l’arête, c’est un tout autre décor. En face, les Alpes bernoises, en bas le Simmental.
Là, l’histoire de vaches qui auraient franchi ce passage incite à s’engager sur un autre sentier afin d’en retrouver une trace. Des recherches vite comblées. Un peu plus bas, fixée à un rocher, une plaque témoignerait de cet extraordinaire exploit, tellement la pente est raide à cet endroit: «Le 10 juillet 1867 J’ai passé ici moi-même la première vache de mon troupeau de 70 pièces depuis mes montagnes Dragenaz, Baufel, Terre-Rouge pour brouter le Prêt. (Berra)» Un mot signé de Joseph fils Michel Niquille.
Du Wolfs Ort, l’itinéraire longe désormais le versant sud des Gastlosen, sur de vastes prairies, jusqu’à Grat. De nouveau, le regard est attiré par les sommets. Sur les parois, des taches rouges, orange, jaunes, en mouvement, rappellent que le site est couru par les grimpeurs. L’un d’entre eux s’était fixé sur le Gross Turm pour réussir sa première escalade en solitaire: Erhard Loretan. Le Chalet Grat dépassé, le chemin plonge alors dans les bois avant de se redresser et de retrouver la station du télésiège.
Le parcours (facile): station du télésiège de Musersbergli – Gustiweidli – Chalet du Soldat – col du Loup – Grat – Musersbergli.
Durée: 4 h 30.
Pour se restaurer sur le chemin: Bärghus à Musersbergli (www.brghs.ch), Chalet du Soldat (www.chaletdusoldat.ch), Chalet Grat (026 929 81 78).
Horaire du télésiège: www.jaun-bergbahnen.ch
Au départ de Gross Rüggli, que l’on peut atteindre en voiture depuis Jaun, il est possible de suivre le sentier géologique des Gastlosen. Un itinéraire didactique de 3 heures.
Autres itinéraires
La vallée de la Brecca
Un passé glaciaire, une nature vigoureuse, un paysage magnifique: la Brecca figure parmi les plus belles vallées alpines de Suisse. La balade démarre à l’arrivée du télésiège de Riggisalp et part sur Untere Euschels, où a été observée la présence d’un couple d’aigles royaux. Puis elle prend de la hauteur en direction de Rippetli par un sentier qui contourne la Spitzflue. Parvenu dans la vallée, première surprise: la tranquillité. Plus loin, ces érables des montagnes, dont certains manifestent élégamment leur présence depuis près d’un demi-millénaire. Plus loin encore, ces sommets, comme le Schopfenspitz, le Chörblispitz. Puis, ici et là, sur les faces rocheuses, ces dépressions circulaires si caractéristiques de la Breccaschlund, des dolines. Enfin, ce vallon verdoyant ouvert sur le lac Noir abrite aussi des chamois et des marmottes. Incontournable.
Le parcours (facile): Riggisalp – Untere Euschels – Stierenberg – Rippetli – Brecca – Cerniets – Bremingard – Unteri Rippa – lac Noir. Durée: 4 heures. Possibilité d’écourter la balade en rejoignant directement Unteri Rippa depuis Brecca.
Mont Vully
Entre canal de la Broye, forêt, abri militaire, bloc erratique issu du massif alpin de la Furka, rempart des Helvètes, pâturages et vignes: un circuit qui mène à la découverte du mont Vully et de son histoire. Au départ de Sugiez, accessible aussi en bateau.
Le parcours (facile): Sugiez – pont Rotary – le Tonkin – Pierre Agassi – Praz – Sugiez. Durée: 3 h 15.
Le tour du Gibloux
Cette tour émettrice, tout un chacun l’a aperçue en empruntant l’autoroute entre Bulle et Fribourg. Une construction de 118 mètres de hauteur qui vaut le détour. De sa terrasse panoramique, ouverte au public de mai à septembre, se contemplent des sommets fribourgeois et bernois, les cimes du Jura et la région des Trois-Lacs. Son ascension se fait tel un jeu de piste, au fil des panneaux sur l’histoire de l’univers, de la terre et de la vie. Cette installation de Swisscom se situe sur un mont Gibloux riche en balades didactiques, sur une colline boisée.
Le parcours (facile): en forme de boucle au départ du camping de Sorens. Durée: 2 h 45.
Eric Loup