Le 28 avril 1789, l’équipage du H.M.S Bounty, dirigé par un certain Fletcher Christian se révolte
contre William Bligh, son capitaine
L’idée de Banks séduit le roi George III, qui ordonne à William Bligh, capitaine du Bounty, de mettre le cap sur Tahiti afin de récupérer des centaines de jeunes plants d’arbres à pain qui seront ensuite replantés en Jamaïque.
L’arbre à pain produit des fruits particulièrement nourrissants
Les historiens sont les premiers à reconnaître que l’idée de Banks était excellente : un seul arbre à pain peut produire près de 200 kilos de fruits par saison, pousse rapidement et ne nécessite que peu d’entretien. Riches en amidon, les fruits à pain sont également une source importante de fibres, de minéraux et de vitamines.
Après un voyage éreintant de plus de 40 000 kilomètres, le Bounty arrive enfin à Tahiti. Après que l’équipage ait profité d’une longue et heureuse permission sur l’île, quelques 1 015 jeunes plants d’arbres à pain sont chargés dans les cales, et le navire met le cap sur les Caraïbes. Moins de trois semaines plus tard, l’équipage se révolte : il s’agit de la fameuse mutinerie du Bounty.
Aujourd’hui encore, les causes exactes de cette mutinerie restent largement discutées par les historiens. Parmi les plus probables, certains évoquent l’arrogance et les abus du capitaine Bligh, tandis que d’autres pensent que l’instabilité mentale de Christian, les privations d’eau (conservée pour arroser les arbres à pain) et l’attachement de certains marins aux femmes tahitiennes ont joué un rôle prépondérant.
Fous de rage, les mutins jettent les plants d’arbres à pain par dessus bord, tandis que Bligh et ses quelques partisans sont laissés à leur propre sort en pleine mer.
Guidés par Fletcher Christian, les mutins abandonnent le capitaine William Bligh et 18 marins
qui lui étaient restés loyaux le 28 avril 1789
Entassés dans une modeste chaloupe, ces derniers qui se sont vus « gracieusement » offrir par Christian et ses hommes un sextant, ainsi que 16 morceaux de porc salé, du rhum et et de l’eau, réussissent l’improbable exploit de rallier le Timor, île faisant alors partie des Indes orientales néerlandaises, après un périple de près de 6 000 kilomètres.
Mais Bligh est loin d’en avoir fini avec l’arbre à pain. Promu capitaine du Providence suite à son improbable exploit, il est de nouveau envoyé à Tahiti en 1791.
Cette fois, il recueille quelques 2 126 plants d’arbres à pain, mais à cause de conditions difficiles à bord (un froid intense, des embruns salés et un manque d’eau douce pour alimenter les plantes), seuls 678 d’entre eux survivront à leur long voyage jusqu’aux Caraïbes. Lorsque Bligh décharge sa cargaison de fruits à pain sur l’île de Saint-Vincent et en Jamaïque, c’est la douche froide : les esclaves refusent catégoriquement de les manger et préfèrent les donner aux cochons.
Appelé ainsi en raison de leur ressemblance supposée avec du pain frais, ces fruits possèdent un goût particulièrement fade que certains comparent à celui d’une pomme de terre mal cuite. Il faudra finalement attendre près de 40 ans (des années après que l’esclavage ait été aboli par l’Empire britannique) pour que le fruit en question devienne un aliment incontournable sur les îles caribéennes.
Aujourd’hui, le fruit à pain constitue un aliment de base de la cuisine jamaïcaine. Pouvant être bouilli, cuit au four, à la vapeur et même frit, il est cultivé partout dans le monde, des îles du Pacifique Sud aux Caraïbes, en passant par l’Asie du Sud, l’Amérique centrale et l’Afrique. Ironie du sort, il prospère également sur l’île Pitcairn, dernière demeure connue des mutins du Bounty qui ne portaient pas vraiment cette plante dans leur cœur.
Yann Contegat