.
.
Le Gotteron (ou Gottéron, appelé en allemand Galternbach est un cours d'eau de Suisse qui traverse en largeur une partie du canton de Fribourg.
Il prend sa source dans la commune de Saint-Ours, s'écoule dans la direction de l'ouest dans la vallée homonyme qui, depuis le Moyen Âge, abritait des moulins et des martelleries, avant de se jeter dans la Sarine, à l'entrée de la ville de Fribourg.
Il également donné son nom au seul pont qui le franchit, le pont du Gottéron.
.
Les Moulins de la zone préindustrielle du Gottéron (Fribourg et Singine)
Quartier des Forgerons (intra muros). Dès sa fondation par Berchtold IV de Zaehringen, en 1157, Fribourg s'est développée grâce à diverses industries: les campagnes environnantes ont fourni les matières premières et les rivières, l'énergie hydraulique.
Les crues dévastatrices de la Sarine et du Gottéron, ont poussé les bourgeois de la ville à régulariser le débit de leurs eaux. Dans la vallée du Gottéron un canal à pente régulière a été creusé. Son alimentation a été assurée par trois digues sur un parcours de plus de 1200 mètres. Grâce à ce système parfaitement réglementé, une série de plus de 30 moulins a fonctionné du XIIIème au XIXème siècle *. Sur le territoire propre de la ville, il y a eu jusqu'à 20 roues fournissant l'énergie nécessaire à sa (première zone préindustrielle).
Le quartier des forgerons, situé au confluent des deux rivières, a été entouré de murailles vers 1250. Avec la Tour rouge, cette seconde enceinte orientale de Fribourg protégeait le pont de la Sarine. Le quartier bénéficiait des eaux du Gottéron puis de son canal créé probablement dès le XIIème siècle. Il s'y établirent trois forges, un moulin à foulon ainsi qu'un établissement de bains fort connu.
On sait que le moulin à foulon fonctionnait encore à l'époque où le Père Girard offrait à ses élèves une "description du plan de la ville", le foulon était situé à l'actuel No 8 de la rue. Tout à coté, il y avait un atelier de charronnage et deux forges, tandis qu'en face se trouvait la forge de la Balme. En 1832, Franz Kuenlin y décrit également une fabrique de draps ainsi qu'un "appareil pour décatir les draps" le dit foulon!
Au no 2 se trouvait le moulin à grains des cordeliers (2 roues).
Vallée du Gottéron: les moulins (hors les murs).
Groupe inférieur, proche de la porte de Gottéron. Un ancien plan du milieu du XVIIIème montre la position des différents rouages de la vallée. Les plus anciens remontent au début du XIIIème siècle. Ce sont des établissements religieux qui y installèrent au déplacèrent leurs moulins à grains: Chevaliers de Malte, Cordeliers, Augustins ou l'Hôpital de la Ville.
* Voir les Galternbriefe de 1345, 1580 et 1586. C'est de cette dernière époque que date le système de canaux et de digues encore en place.
Après avoir franchi la porte du Gottéron, à main gauche, on rencontrait successivement 3 moulins à grains: moulin de la Commanderie; moulin double de l'Hôpital Notre Dame et moulin privé de Jean Corpataux (selon acte de 1298). Aux XIXème siècle, ils furent démolis et remplacés par le grand complexe bâti par Aloys Mooser, propriétaire meunier et facteur d'orgues: à savoir, la nouvelle Kreuzmühle avec ses écuries et dépôts. Il reste les bâtiments No 3 et 5 et les constructions annexes. En plus, Mooser fit construire une scierie spéciale pour débiter les bois de ses tuyaux d'orgues. Un jardin au bord de la rivière a remplacé la petite construction. Par un système ingénieux de canalisation encore en place, Mooser pouvait bénéficier du surplus de l'eau du canal principal.
Au No 7 se trouvait le laminoir de l'Etat, qui fonctionne tant que le gouvernement frappait monnaie. On y préparait les lames de métal destinées à la frappe des pièces pratiquées en l'Hôtel des monnaies situé su Stalden (voir plan Martini 1606). Au No 9, était la scierie de la ville, le bâtiment jadis ouvert a été transformé en maison d'habitation. Il est daté de 1810.
Moulin de la Chapelle. Le No 13 est un bâtiment vétuste mais extrêmement intéressant. La bâtisse est en molasse soigneusement taillée et présente un toit à quatre pans. Il était la propriété des chanoines Augustins, avant de passer aux mains de la ville, durant le XIXème siècle. Ce fut le moulin à aiguiser: on y préparait des outils pour les différentes métiers, y compris celui des armes. C'est là qu'on affûtait sabres et épées et qu'on y polissait casques et armures. Le moulin devait être important puisqu'il disposait de trois roues au aubes placées en série. En face, se trouvait une petite chapelle accompagnée d'un ermitage, près du rousseau descendant de Bourguillon, la chapelle da disparue et la Madone qui s'y trouvait (vierge de cire due à Montorge ou la Maigrauge) vient d'être mise en sûreté après avoir longtemps orné la façade du moulin. La ville reste encore propriétaire de la construction, qui avant d'être inoccupée a été utilisé comme moulin à os et comme atelier de menuiserie. En aval se trouve encore une des vannes de régulation du débit du canal.
Groupe intermédiaire, proche de la digue inférieure. Il s'y trouvait une série de 5 à 6 moulins ou pilons dont une partie na été démolie que dans la seconde partie de notre siècle.
Voici les différents rouages de ce groupe:
Moulin à grains dit Grossrieder. Il devint au siècle passé un entrepôt pour la Brasserie Cardinal, situé à l'époque derrière la Providence. Ses grottes artificielles étaient utilisées pour conserver les blocs de glace sciés sur les étangs. Dans la suite, elles servirent de caves à fromages avant de devenir une champignonnière moderne.
Moulins à huiles au No 15, 15', 17. Les trois bâtiments mitoyens, propriétés de la ville ont été soigneusement rénovés et munis d'une pompe à chaleur installée là, où jadis se trouvaient les deux roues hydrauliques! Les moulins fonctionnaient encore durant la dernière guerre mondiale et servaient au pressage des noix, des graines de lin, des pavots ou des tourteaux.
.
Au No 19, datée de 1737, se trouve une maison ayant servie d'habitation aux meuniers, en particulier à la famille Betschen.
Pilon à tan ou écorces.
Moulin à huile, ces deux moulins viennent d'être démolis.
Moulin à grains, dit Betschen. Démoli, mais on en retrouve les fondations à la sortie du canal mis sous tuyaux. Ces moulins bénéficiaient de l'eau du canal principal. Une dérivation partant de la digue voisine, réalimentait en eau le dit canal.
Pilon à tabac. Actuellement le moulin est en ruine. On les retrouve sous la végétation, près de la sortie du tunnel livrant passage au canal principal, ainsi mis à k'abri des débordements de la rivière. Il s'agissait d'un établissement (officiel) portant deux poinçons aux armes de l'Etat. Pour éviter l'achat à l'étranger de l?herbe de Nicod) le Gouvernement introduisit dans la Broye, lac culture du tabac, au XVIIIème siècle*.
D'où l'installation au Gottéron, puis en ville d'une rappe à Tabac.
* Concerne le "Mandat de plantation" de tabac en 1723. V. Groupe supérieur. Moulins proches de la haute digue. Ces Moulins situés à cheval sur la frontière Fribourg-Tavel sont les premiers à bénéficier des eaux du canal issu de la digue primitivement formée de troncs d'arbres. On y trouve les constructions suivantes: A. deux moulins à huile au No 10 sur le territoire de la ville.
Les moulins disposant de deux à trois roues sont devenus des maisons d'habitation.
Martinet à fer
Supprimé en 1730, il est devenu une forge puis s'est transformé en une surprenante pinte dite "Aux Trois Canards". L'établissement publique se trouve sur la commune de Tavel No 102. Groupe du canal supérieur alimenté par la longue digue et une digue secondaire situé en aval. Tous ces moulins ont disparu, il ne reste que la base de leurs murs ainsi que le canal d'amenée d'eau qui, aujourd'hui alimente les étangs de la Pisciculture.
On y trouvait:
A. pilon à cuivre, situé au tournant de la route en face du bâtiment d'habitation de la "Teutonia".
B. moulin à huile, tout proche.
C. pilon à tan, aménagé pour la pisciculture et ses étangs (jadis à glace).
D. moulin à ? : dite la ferme Droux.
Dès lors la vallée se rétrécit offrant quelques clairières à pâture. Jadis on produisait du charbon de bois et on exploitait des carrières de pierres ou de tuf. Plus haut, la nature reprend tous ses droits: vallée romantique chantée jadis par un amoureux de sa ville, le colonel Perrier, favorable à la médiation et à l'observation de la flore et de la faune, paradis des pêcheurs et même des chasseurs. Quand la vallée s'ouvre à nouveau dans la Singine, on atteint les deux Ameismühlen alimentés par un canal et une digue spéciale.
Si l'on remonte le cours du Gottéron, on pourra découvrir la dernière série de moulins:
sur la rive droite:
Pulvermühle ou pilon à poudre;
Poffetsmühle avec moulin et scierie en fonction;
Zbindenmühle démoli. sur la rive gauche: 1. Hayozmühle;
Tromoosmühle, en ruine.
NB. Les chiffres indiquent la position des moulins en remontant la rivière. Ainsi avec ses 30 à 35 rouages, la vallée du Gottéron fut une vraie zone artisanale aux activités très diversifiées.
Après plus de six siècles d'intense activité, les moulins du Gottéron immobiliseront leurs rouages. Le bruit des pilons ne résonnera plus dans la gorge humide. Une autre façon d'utiliser la force motrice de l'eau permettra un nouvel essor de l'industrie à Fribourg.
Le 21 mai 1870, La Société générale des Eaux et Forêts, préconisée par l'ingénieur Guillaume Ritter est fondée à Fribourg. Un grand barrage est édifié sur la Sarine à la Maigrauge entre 1871 et 72.
Un câble télédynamique transporte la nouvelle force motrice sur le plateau de Pérolles. De nouveaux ateliers s'y développent d'abord avec succès. Mais en raison des circonstances économiques générales défavorables, la société est mise en faillite, puis rachetée en 1888 par l'Etat de Fribourg. C'est l'origine des nos Entreprises électriques fribourgeoises. L'usine de la Maigrauge avait été prévue pour alimenter la ville en eau potable et pour fournir la force motrice aux industries projetées sur le plateau de Pérolles. En 1890, usine est électrifiée. C'est le début de notre industrialisation moderne: grâce au courant électrique, de nouvelles usines s'établissement aux endroits les plus favorables sans dépendre de la proximité d'un cours d'eau.
Le destin de l'étroite vallée du Gottéron était définitivement scellé. Les derniers moulins reconverties en pilon à engrais s'arrêtent définitivement après la seconde guerre mondiale.
Aujourd'hui, il n'existe plus aucune roue à eau dans toute la vallée du Galterbach. La nature y a repris ses droits. La champignonnière, la pisciculture et la pinte des Trois Canards sont toujours en activité.
Le dragon du Gottéron :
La légende disait qu’on y entendait les cris d'un dragon dans les grottes de la vallée.
Egger Ph.