Chu de che / Je suis d'ici / Sono di qui / Ich bin von hier ! Notre liberté ne nous a pas été donnée, mais combattue et priée par nos ancêtres plus d'une fois! Aujourd'hui, comme autrefois, notre existence en tant que peuple libre dépend du fait que nous nous battions pour cela chaque jour. Restez inébranlable et soyez un gardien de la patrie pour que nous puissions remettre une Suisse libre telle que nous la connaissions à la génération suivante. Nous n'avons qu'une seule patrie!

dimanche 5 avril 2009

Le Ranz des vaches (Lyoba) : Hymne du Pays de Gruyère

.
Le ranz des vaches ou kühreihen est le chant traditionnel a cappella des armaillis (vachers) du district de la Gruyère (Suisse) depuis des siècles.
.
Il est habituellement chanté durant la montée des troupeaux à l'alpage et le retour dans les étables à la fin de l'été. Le terme vient de l'arpitan ayôbo (appeler le bétail).
.
Il est en trois parties : l'appel des vaches (le mot lyoba répété), puis l'énumération des noms des vaches et enfin un chant improvisé en vers.
.
La légende veut que les mercenaires suisses s'en allaient (désertaient) des champs de bataille quand ils entendaient cette « ode » qui leur rappelait trop leur Suisse natale.
L'interprétation la plus souvent citée est celle de Bernard Romanens, soliste de la fête des vignerons de 1977.
.
Le Ranz des vaches est une chanson d'armaillis sans aucun accompagnement. Les vachers des Alpes avaient l'habitude de la chanter pour appeler le bétail des pâturages lorsque le moment de la traite était venu. Elle a la même fonction que le cor des Alpes. A l'instar du destin de cet instrument, la pratique du Ranz des vaches avait quasiment disparu après 1800.
.
Le Ranz des vaches comporte trois éléments distincts: le mot «lyoba» souvent répété qui signifie «appeler le bétail» en celtique; l'énumération des noms des vaches; enfin des vers improvisés dans lesquels l'armailli chante sa vie, loue la beauté de la vie alpestre et sa liberté dans les montagnes, mais se plaint quelquefois de sa condition malheureuse de pauvre ouvrier agricole.
.
Au 16e siècle, il est déjà fait mention de cette tradition d'appeler le bétail avec cette chanson. Des touristes cultivés ont décrit le Ranz des vaches au 18e siècle, tel un Léopold comte de Stolberg qui a transcrit la marche des vaches d'Appenzell en 1794 alors qu'il voyageait en Suisse en compagnie de Johann Wolfgang Goethe.En 1805, la première collection de huit Ranz des vaches est parue sous le titre «Acht Schweizer Kühreihen». Cette petite édition a été rééditée et complétée en 1812, 1818 et 1826.
.
Pourquoi donc cette grossière chanson d'armaillis a-t-elle suscité l'intérêt de gens cultivés? Jean-Jacques Rousseau raconte dans son «Dictionnaire de la musique» (1768) qu'il était interdit de chanter le Ranz des vaches en présence de soldats suisses embrigadés dans les gardes étrangères parce qu'ils attrapaient le «mal du pays» et risquaient de mourir. Cette légende a sans doute contribué à attirer l'attention sur une chanson qui n'était probablement pas très douce à l'oreille.
.
En 1921, un jeune professeur de musique, Joseph Bovet, a arrangé le traditionnel Ranz des vaches gruérien en un chant pour chœur d'hommes. Il est devenu célèbre et a valeur d'hymne «national» officieux pour les Suisses francophones. Cette mélodie est au cœur de chaque «Fête des Vignerons» qui se déroule une fois par génération à Vevey dans le canton de Vaud.
.
Un peu d'histoire...
On ne connaît ni le compositeur, ni l'origine de cette chanson. La publication du texte et du chant a été effectuée pour la 1ère fois en 1813, par le doyen Bridel, pasteur vaudois. Selon d'autres sources (" Le patois fribourgeois " de Louis Page), le premier qui fit imprimer, en 1710, la musique du Ranz des vaches, fut le professeur bâlois Théodore Zwinger, dans sa curieuse Dissertation sur la Nostalgie. On sait que ce chant existait déjà au 18ème siècle et qu'il était bien connu des Gruériens de l'époque. Les jeunes hommes gruériens embrigadés dans la garde suisse des rois de France, avaient eu la fâcheuse tendance à déserter ou à souffrir du "mal du pays" au son de ce chant. Il fut donc tout simplement interdit de le chanter à Versailles. La garde suisse était constituée de jeunes et solides paysans gruériens, qu'on avait souvent recruté sur les alpages après les avoir quelque peu enivrés pour mieux leur faire signer leur contrat d'engagement.
.
Quelques mots sur le texte
L'expression lyoba provient du verbe patois ayôbo, qui signifie appeler le bétail. ayôba (ou yôba) por ario est une phrase signifiant appelle le bétail pour traire. C'est le commandement donné au bouébo, ou à l'armailli de second rang, de ramener le bétail au chalet pour la traite.La lecture des 19 strophes de ce chant en vaut la peine. On y trouve un épisode de la vie des armaillis d'autrefois. Ils descendent avec le troupeau (la rindya) et les fromages produits sur l'alpage. Bloqués aux "Basses-Eaux", ils ne peuvent passer parce que le terrain est inondé et veulent demander au curé de leur dire une messe. Le dialogue entre l'armailli et le curé est très croustillant. Un Ave Maria sera dit en échange d'un fromage bien gras. Mais le curé ne veut pas que sa jolie servante aille chercher le fromage, car il a peur qu'elle ne veuille plus revenir après avoir rencontré nos deux solides montagnards. tout s'arrange, puisqu'après la prière du curé, le troupeau peut passer. Les refrains (il y a un refrain pair et un refrain impair) nous ramènent aux labeurs quotidiens des armaillis: l'appel du troupeau, constitué de différentes races, pour la traite, suivie de la fabrication du fromage.
.
Le texte original en patois gruérien et en français
Je remercie Monsieur Albert Bovigny, défenseur actif du patois gruérien, de m'avoir fourni le texte patois. Le patois étant, comme les dialectes suisses-allemands, une langue purement orale, Monsieur Bovigny adopte de manière stricte très définie les accents aigus, graves et circonflexes en fonction de la prononciation. Sans rapport avec le titre patois (Lè j’armayi di Kolonbètè), le titre français est le "Ranz des Vaches". Le mot " ranz " provient de Rank en celtique, Reihen en allemand, soit la marche des vaches.
.
Lyoba présent et futur
Ce chant traditionnel conserve aujourd'hui encore toute sa vitalité, sa vigueur et le mystère des émotions qu'il suscite chez l'auditeur. Lyoba est également le symbole de la continuité et le point d'orgue de la fameuse Fête des Vignerons à Vevey. Certains d'entre nous rêvent même secrètement de voir ce chant émouvant accéder au titre de nouvel hymne national ... mais ça, c'est une autre chanson!
.
TITRE DU CHANT EN PATOIS:
Lè j’armayi di Kolonbètè in patê gruvêrin
.
Lè j’armayi di Kolonbètè Dè bon matin chè chon lèvâ.
Kan chon vinyê i Bachè j’Ivouè Tsankro lo mè! n’an pu pachâ.
Tyè fan no ché mon pouro Piéro? No no chin pâ mô l’inrinbyâ.
Tè fô alâ fiêr a la pouârta, A la pouârta dè l’inkourâ.
Tyè voli vo ke li dyécho? A nouthron brâvo l’inkourâ.
I fô ke dyéchè ouna mècha Po ke no l’y pouéchan pachâ.
L’y è j’elâ fiêr a la pouârta È l’a de dinche a l’inkourâ:
I fô ke vo dyécho ouna mècha Po ke no l’y puéchan pachâ.
L’inkourâ li fâ la rèponcha: Pouro frârè che te vou pachâ,
Tè fô mè bayi ouna motèta Ma ne tè fô pâ l’èhyorâ.
Invouyi no vouthra chèrvinta No li farin on bon pri grâ.
Ma chèrvinta l’è tru galéja Vo porâ bin la vo vouêrdâ.
N’ôchi pâ pouêre, nouthron prithre, No n’in chin pâ tan afamâ.
Dè tru molâ* vouthra chèrvinta Fudrè èpè no konfèchâ.
Dè prindre le bin dè l’èlyije No ne cherin pâ pèrdenâ.
Rètouârna t’in mou pouro Piéro Deri por vo on’Avé Maria.
Prou bin, prou pri i vo chouèto Ma vinyi mè chovin trovâ.
Piéro rèvin i Bâchè j’Ivouè È to le trin l’a pu pachâ.
L’y an mè le kiô a la tsoudêre Ke n’avan pâ la mityi aryâ.
.
Redzingon1-3-5-7-9-11-13-15-17-19:Lyôba, lyôba, por aryâ (bis). Vinyidè totè, byantsè, nêre, Rodzè, mothêlè, dzouvenè ôtrè, Dèjo chti tsâno, yô vo j’âryo, Dèjo chti trinbyo, yô i trintso,Lyôba, lyôba, por aryâ (bis).
.
Redzingon2-4-6-8-10-12-14-16-18:Lyôba, lyôba, por aryâ (bis).Lè chenayirè van lè premirè,Lè totè nêrè van lè dêrêrèLyôba, lyôba, por aryâ (bis).
.
.
TITRE DU CHANT EN FRANCAIS:
Le Ranz des Vaches en français
.
Les armaillis des Colombettes De bon matin se sont levés.
Quand ils sont arrivés aux Basses-Eaux Le chancre me ronge! Ils n'ont pu passer.
Pauvre Pierre, que faisons-nous ici? Nous ne sommes pas mal embourbés (ou "empêtrés")
Il te faut aller frapper à la porte, A la porte du curé.
Que voulez-vous que je lui dise A notre brave curé.
Il faut qu'il dise une messe Pour que nous puissions passer
Il est allé frapperà la porte Et il a dit ceci au curé:
Il faut que vous disiez une messe Pour que nous puissions passer
Le curé lui fit sa réponse: Pauvre frère, si tu veux passer
Il te faut me donner un petit fromage Mais sans écrémer le lait.
Envoyez-nous votre servante Nous lui ferons un bon fromage gras.
Ma servante est trop jolie Vous pourriez bien la garder
N'ayez pas peur, notre curé Nous n'en sommes pas si affamés
De trop "moler"* (voir remarque) votre servante Il faudra bien nous confesser
De prendre le bien de l'Eglise Nous ne serions pas pardonnés
Retourne-t'en, mon pauvre Pierre Je dirai pour vous un Ave Maria.
Beaucoup de biens et de fromages vous souhaite Mais venez souvent me trouver.
Pierre revient aux Basses-Eaux Et tout le train a pu passer
Ils ont mis le kio à la chaudière Avant d'avoir à moitié trait
.
Refrain1-3-5-7-9-11-13-15-17-19:Lyôba (appel des vaches) pour traire (bis). Venez toutes, les blanches, les noires, les rouges, les étoilés sur la tête les jeunes, les autres, Sous ce chêne où je vous traie, sous ce tremble où je fabrique le fromage,Lyôba, lyôba, pour la traite (bis).
.
Refrain2-4-6-8-10-12-14-16-18:Lyôba (appel des vaches) pour traire (bis). Les sonnaillères vont les premières,Les toutes noires vont les dernières.Lyôba, lyôba, pour la traite (bis).
.
*Molo on cuti signifie aiguiser un couteau. La pression de la meule sur la lame traduit bien, au figuré et de manière "gaillarde", ce que pourraient être les assiduités des armaillis avec la servante du curé, traduites par molo la chervinta.
.
.

LA PARTITION (POUR LE COR DES ALPES)
.

.
Extrait de : Das Alphorn in der Schweiz,
Verlag Paul Haupt Bern ISBN 3-258-02363-8 (1976)
.
.
.
.
.
.
.
.
.
Egger Ph.