Suite à une manœuvre de contournement, pris sur leurs arrières, la plupart des Grecs abandonnèrent la bataille, et seuls les 300 hoplites spartiates commandés par le roi Léonidas Ier, ainsi que 700 soldats des cités de Thèbes et de Thespies, décidèrent de combattre jusqu'au sacrifice, malgré une infériorité numérique prononcée, pour laisser aux Grecs le temps d'organiser leur défense. Cependant Athènes, peu protégée, fut prise, saccagée, et l'incendie réduisit en cendres les édifices de l'Acropole. D'après certaines sources, Éphialtès aurait trahi les Grecs, et aurait montré un sentier à travers les montagnes aux troupes perses, ce qui entraîna la fuite de la plupart des Grecs.
Le courage et le sacrifice des mille Spartiates, Thébains et Thespiens sont devenus légendaires et ont été repris maintes fois par la culture populaire. Cette bataille deviendra l'emblème de la résistance grecque à l'envahisseur, car grâce à cette bataille, et malgré la prise d'Athènes par les Perses, les Grecs purent faire reconnaître leur indépendance, après leurs triomphes à Salamine, le 22 septembre -480, et à Platées, en -479.
Au sommet du Kolonós, théâtre de l'ultime résistance spartiate, sur lequel fut érigé le mausolée, une inscription du poète Simonide de Céos (-556, -467), commémore cette action : « Étranger, va dire à Sparte qu'ici nous sommes morts pour obéir à ses lois. »
Selon le célèbre historien Hérodote, les forces perses engagées dans les guerres médiques à cette période dépassaient les cinq millions d'hommes. Au début du vingtième siècle, un officier britannique, Sir John Frederick Maurice, se basant sur la topographie du terrain et le relevé des ressources d'eau potable des divers cours d'eau et rivière en Grèce, conclut qu'il est impossible qu'une armée beaucoup plus nombreuse qu'environ 200 000 personnes et 70 000 animaux ait pu bivouaquer aussi longtemps. Il estime qu'Hérodote aurait confondu les termes perses « chilliarchie » (10 000) et « myiarchie » (1 000), évaluant ainsi les forces comme étant dix fois plus importantes qu'elles ne l'étaient. En conséquence, Maurice évalue à environ 210 000 hommes et 75 000 animaux les forces perses présentes à la bataille des Thermopyles (Maurice, 1930).
L'historien Nicholas Geoffrey Lemprière Hammond estime quant à lui les forces navales perses présentes quelques mois plus tard (en septembre -480) à la bataille de Salamine à environ 408 000 hommes répartis sur 4 800 navires de guerre
Toutes les grandes cités grecques, si l'on excepte Cyrène, Argos, Syracuse, Corcyre et Phocée, envoient des représentants au temple de Poséidon à Corinthe. Sparte, en tant que plus puissante des cités, préside le congrès. Une réconciliation générale intervient, comme par exemple entre Athènes et Égine, et 31 cités s'engagent par serment dans une ligue défensive contre les Perses et préparent des contingents de soldats. Le commandement des troupes est confié à deux Spartiates, le roi Léonidas Ier pour les fantassins et Eurybiade pour la flotte grecque. Mais durant l'hiver -481/-480, les Grecs tergiversent sur le plan de campagne et ne peuvent s'opposer à la conquête de la Thessalie par les troupes perses au printemps -480.
Les Grecs choisissent alors en août, tandis que les Perses envahissent la Piérie, une position défensive très forte aux Thermopyles qui commande l'accès à la Béotie et à la Grèce centrale. Quant à la flotte, elle s'installe au nord de l'Eubée en un lieu nommé l'Artémision afin d'empêcher la flotte perse de contourner cette position. En effet, les Perses, pour garder le contact avec leur flotte, doivent emprunter la seule route importante qui passe par les Thermopyles (les « Portes chaudes », à cause des sources thermales qui s'y trouvent). Là, entre le golfe Maliaque et la montagne, l'étroite chaussée passe dans un défilé dont certains passages n'excèdent pas dix mètres de largeur et est, de plus, barrée par les vestiges d'un mur construit en zigzag. Enfin, les marais sont nombreux et forment un obstacle supplémentaire.
Entre les 6 000 hommes environ dont dispose Léonidas et la flotte d'Eurybiade (avec Thémistocle à la tête du contingent des navires athéniens, de loin le plus nombreux), les liaisons sont constantes.
C'est alors qu'Achéménès, l'un des demi-frères de Xerxès et amiral de la flotte perse, détache une escadre de deux cents navires et 40 000 hommes environ pour contourner l'Eubée par la haute mer pendant que le reste de la flotte s'installe au mouillage des Aphètes, mouillage plus sûr que celui du cap Sépias. Prévenus de cette diversion qui leur interdit la fuite par le canal de l'Eubée au sud, et de ce nouveau mouillage, les Grecs tentent un coup de force et lancent une attaque surprise sur les Ioniens, alliés des Perses, et leur coulent une trentaine de navires avant de regagner leur point d'attache de l'Artémision. Enfin, une nouvelle tempête éclate et fait de nouveaux dégâts sur une flotte perse dont les navires sont sur leurs ancres, alors qu'à l'Artémision les Grecs, à leur habitude, tirent les navires sur la terre ferme, ce qui les met à l'abri. Surtout, cette nouvelle tempête cause la destruction totale de l'escadre envoyée pour contourner l'Eubée.
Dans un premier temps, sur terre, les troupes de Léonidas tiennent fermement leur position en phalange dans un défilé et repoussent les Perses, leur infligeant de lourdes pertes. Xerxès décide d'envoyer ses troupes d'élite, les Mélophores (ou Immortels), emmenés par Hydarnès, qui connaissent bientôt le même sort que leurs alliés, ne profitant pas de leur supériorité numérique (dans le défilé trop étroit) et moins bien armés que les Grecs (notamment de lances plus courtes que leurs adversaires). Mais Léonidas est trahi par un certain Éphialtès, fils d'Eurydémos, un citoyen de Malia, qui livre aux Perses le moyen de contourner l'armée grecque, par le sentier d'Anopée. Léonidas décide alors de se sacrifier avec les 300 hoplites spartiates, ainsi que 700 soldats de Thespies, pour laisser aux Grecs le temps d'organiser leur défense et à l'armée de se retirer en bon ordre. Les 400 combattants de Thèbes (probablement des otages pris par Léonidas lui-même pour s'assurer l'engagement au côté des Grecs de cette cité) avaient aussi reçu l'ordre de participer à cette dernière action, mais ils désertent à la première occasion. Dès que les Spartiates se replient sur la butte, ils les abandonnent et vont dire aux Perses qu'ils sont à leur côté. Ces derniers les laissent en vie.
Les Grecs changent de stratégie et avancent hors de leur position. Ils résistent héroïquement autour du roi spartiate Léonidas, qui est tué. Pour son corps, les Spartiates se battent sans relâche et parviennent, en repoussant avec acharnement les assauts perses, à le récupérer. Leur infériorité numérique est accrue avec l'arrivée des Perses menés par Ephialtès et Hydarnès. Ils se replient avec le peu d'armes qui leur reste sur une butte, mais l'intervention perse leur est fatale et ils sont tous massacrés sur ordre de Xerxès. À l'issue de la bataille, ce dernier ordonne qu'on décapite Léonidas et qu'on mette sa tête au bout d'un pieu, ce qui est étrange puisqu'en ce temps, les Perses accordaient de la valeur aux soldats héroïques qu'ils avaient combattus. Cette bataille devint l'emblème de la résistance grecque à l'envahisseur et de l'esprit de sacrifice des Spartiates. Au sommet du Kolonós, théâtre de l'ultime résistance spartiate, sur lequel fut érigé un mausolée, une inscription du poète Simonide de Céos (-556 ; -467), commémore cette action :
« Ὦ ξεῖν’, ἀγγέλλειν Λακεδαιμονίοις ὅτι τῇδε κείμεθα,
« Passant, va dire à Sparte
.
Léonidas Ier de Sparte
Léonidas (en grec ancien Λεωνίδας / Leônidas), né vers 540 et mort en 480 av. J.-C., est le roi agiade de Sparte de 489 à 480 av. J.-C.. Il est resté célèbre par sa résistance héroïque face aux Perses lors de la bataille des Thermopyles, durant laquelle il trouve la mort.
Membre de la famille des Agiades, il est le troisième fils du roi Anaxandridas II : ses frères sont Dorieus, son aîné et Cléombrote, son cadet. Cléomène Ier, le plus âgé, est, lui, son demi-frère. Il épouse d'ailleurs la fille de ce dernier, Gorgô, avec laquelle il a un fils, son successeur, le roi Pleistarchos. Le règne de Léonidas débute avec le suicide de Cléomène Ier. Son principal événement est la bataille des Thermopyles, durant laquelle Léonidas trouve la mort.
Dans les années 490 av. J.-C., le roi achéménide Xerxès Ier prépare une invasion de la Grèce continentale. Se trouve alors à sa cour le roi spartiate en exil Démarate. Selon Hérodote, ce dernier prévient ses concitoyens d'une attaque imminente par un message secret, ce qui pousse Sparte à demander conseil à l'oracle de Delphes. Conformément à la tradition, Apollon fournit une réponse ambiguë :
« Pour vous, citoyens de la vaste Sparte,Votre grande cité glorieuse ou bien sous les coups des PerséidesTombe, ou bien elle demeure ; mais sur la race d'Héraclès,Sur un roi défunt alors pleurera la terre de LacédémonSon ennemi, la force des taureaux ne l'arrêtera pas ni celle des lions,Quand il viendra : sa force est celle de Zeus.Non, je te le dis,II ne s'arrêtera pas avant d'avoir reçu sa proie, ou l'une ou l'autre. »
En d'autres termes, ou bien Sparte perdra son roi pendant la bataille, ou bien elle sera conquise. Aucun roi spartiate n'étant jamais mort à la guerre, le message est très décourageant pour la cité. Sparte décide alors d'envoyer deux hérauts choisis parmi l'aristocratie pour se rendre auprès de Xerxès. Selon Hérodote, il s'agit d'apaiser la « colère de Talthybios », héraut légendaire de l’Iliade, qui s'abat sur Sparte après que la cité a mis a mort le héraut envoyé par Darius en 492 av. J.-C.. Plus prosaïquement, il s'agit probablement de rechercher une issue diplomatique plutôt que militaire à la crise. Xerxès refuse tout compromis et ne prend même pas la peine de réclamer la terre et l'eau, symboles de la suzeraineté achéménides.
À l'automne 481 av. J.-C., ce que l'historiographie appelle la « Ligue hellénique » se réunit sur l'isthme de Corinthe et choisit Sparte à sa tête. Elle décide l'envoi d'une force armée sous le commandement de Léonidas pour défendre le défilé des Thermopyles, afin de retenir les Perses et laisser à la flotte grecque le temps de se replier au-delà du détroit que forme l'Eubée avec le continent. Selon Hérodote, les forces grecques envoyées aux Thermopyles représentent en tout 6 000 soldats : 300 hoplites spartiates, 1000 Tégéates et Mantinéens, 600 Orchoméniens, 400 Corinthiens, 200 Phliontiens, 80 Mycéniens, 700 Thespiens et 400 Thèbes loyalistes. Face à eux se trouveraient 1,7 million de Perses. Ce chiffre est reconnu comme fantaisiste, d'autant qu'Hérodote se trompe dans son calcul des Péloponnésiens présents, mentionnant 3 100 hommes alors qu'il cite ailleurs une inscription faisant état de 4 000 soldats. Le même chiffre réapparaît encore ailleurs comme le nombre de morts des Thermopyles. Pour ce qui est des Grecs, d'autres sources montrent que le contingent lacédémonien comprend également 900 ou 1000 Périèques, sans oublier les Hilotes qui servent de valets d'armes.
S'agissant des Perses, on a supposé qu'Hérodote confondait les termes « chiliarchie » (10 000) et « myiarchie » (1 000), évaluant ainsi les forces comme étant dix fois plus importantes qu'elles ne le sont. Dès lors, les forces perses présentes à la bataille des Thermopyles seraient plutôt de 210 000 hommes et 75 000 animaux.
Quoi qu'il en soit, le rapport de force numérique est clairement en faveur des Perses. Selon les Spartiates, il s'agit d'une simple avant-garde, le reste des troupes devant arriver dès la fin de la fête des Karneia et des Jeux olympiques. Pour Léonidas, il s'agit clairement d'une mission kamikaze : il ne choisit parmi les 300 hoplites qui constituent sa garde personnelle que des citoyens ayant déjà donné naissance à des fils. Par conséquent, il ne s'agit pas seulement d’Hippeis, corps d'élite composé parmi les dix premières classes d'âges mobilisables, mais d'un mélange d'’Hippeis et de soldats ordinaires.
Après avoir pris position aux Thermopyles, les Grecs repoussent victorieusement plusieurs attaques perses : situés à l'endroit le plus resserré du défilé, ils se battent en rangs très serrés et sont bien protégés par leurs grands boucliers. Après quelques jours, les Grecs sont trahis par un certain Éphialtès : Léonidas se retrouve encerclé par les troupes du satrape Hydarnès. Hérodote rapporte que pour certains, les Grecs ne parviennent à se mettre d'accord sur l'attitude à prendre : certains abandonnent leur poste pour rentrer dans leurs cités respectives, alors que Léonidas décide de rester. Selon Hérodote, Léonidas renvoie la majorité de ses troupes pour épargner leurs vies, mais juge inapproprié pour un Spartiate d'abandonner sa position ; l'oracle rendu par la Pythie ne fait que renforcer sa détermination. Il garde auprès de lui les Lacédémoniens, les Thébains et Thespiens volontaires.
La description de la fin de la bataille varie suivant la source. Chez Hérodote, Léonidas et ses hommes se portent à l'endroit le plus large du défilé et combattent jusqu'au dernier. Diodore de Sicile et Justin abrégeant Trogue Pompée mentionnent une attaque nocturne contre le camp perse : les Grecs, semant le désordre dans les troupes ennemies, en massacrent un grand nombre avant de tomber, encerclés, sous les flèches et les javelines perses récit très probablement fantaisiste, le camp de Xerxès étant éloigné de celui des Grecs de près de 8 kilomètres.
Plus tard, la dépouille de Léonidas est transférée à Sparte où un magnifique mausolée lui est consacré tandis que des fêtes, appelées Léonidées, sont instituées. Il fait également l'objet d'un culte héroïque
Avec Othryadès, héros de la bataille des Champions, Léonidas est l'un des Spartiates les plus cités par les Anciens, notamment par les épigrammatistes de l’Anthologie grecque. Aux débuts de l'ère chrétienne, Origène compare son sacrifice et celui de Socrate à la mort du Christ.
À l'époque moderne, Léonidas reste une figure héroïque, glorifiée pour son combat pour la liberté. Fénelon en fait le monarque parfait dans ses Dialogues des morts. Il inspire à, en 1814, Jacques-Louis David son tableau Léonidas aux Thermopyles. Le peintre écrit : « je veux peindre un général et ses soldats se préparant au combat comme de véritables Lacédémoniens, sachant bien qu'ils ne s'échapperont pas. (…) Je veux caractériser ce sentiment profond, grand et religieux qu'inspire l'amour de la patrie. »
Quelques années plus tard, Léonidas devient l'emblème du philhellénisme. Ainsi, le siège de Missolonghi, pendant la guerre d'indépendance grecque, est comparé à une nouvelle bataille des Thermopyles. Le journal français Le Constitutionnel clame que « tous sont morts comme Léonidas » tandis que le Journal des débats souligne que « les Hellènes sont les dignes descendants de Léonidas».
Les Thermopyles et Léonidas ont fait l'objet en 2007 d'une illustration cinématographique très libre, entre chant épique et bande dessinée, 300 de Zack Snyder, fondée sur la bande dessinée du même nom de Frank Miller, elle-même adaptée du film The 300 Spartans (La bataille des Thermopyles en français), réalisé en 1962 par Rudolph Maté.
.
La bataille
Vaincre ou mourir ?
Lorsque «le Père de l'Histoire», Hérodote d'Halicarnasse - qui était un sujet de l'Empire perse -, entreprit de rédiger sa monumentale Enquête en neuf livres, sur les tenants et les aboutissants des Guerres médiques et la description de l'immense Empire perse «vaincu» par les Grecs, son propos était moralisateur et patriotique. De larges extraits furent lus aux Jeux Olympiques. En fait, nous ne le répéterons jamais assez, on sait que, pour l'«historien» antique, l'Histoire est un matériau plastique qui doit se plier aux arts dramatique et rhétorique. Hérodote est donc allé à Athènes, écouter les Athéniens et leur version de la bataille de Marathon (490); il est allé à Sparte, interroger les Spartiates et entendre leur version de la bataille des Thermopyles (480). Ceux-ci ont embelli l'héroïque sacrifice de Léonidas et de ses hommes, ciselant un pur joyau d'honneur et de patriotisme. «Passant, va dire à Sparte que nous gisons ici pour obéir à ses lois», proclame l'inscription. Mais quelles lois ? Vaincre ou mourir ? Certes non. Sparte était un Etat aristocratique et guerrier, qui dominait par la force brutale une population de serfs - les Ilotes - descendants des précédents occupants du pays. Mais elle était économe de la vie de ses soldats. Au cours des siècles, sa démographie vacillante fut un problème constant. Mourir au champ d'honneur, oui. Mourir stupidement, non.
Comme tous les Etats aristocratiques (p. ex. Rome avant les Scipions), les ambitions de Sparte sont nettement limitées dans l'espace : continuer à diriger la Ligue du Péloponnèse. Sparte se doit à ses Alliés, rien de plus - elle n'a que faire des fourbes Athéniens, des lointains Thébains, etc. Dans le film de Rudolph Maté, on l'a vu, des propos de circonstances sont prêtés à Léonidas, «Pour un Grec, nulle région de Grèce n'est lointaine...». Ce discours appartiendrait plutôt à l'Etat grec structuré du XXe s. Mais au temps des Guerres médiques, il était parfaitement anachronique et, du reste, le film laisse clairement entrevoir les mesquines rivalités entre voisins grecs. Mais nous pénétrons ici sur le terrain glissant du «roman historique», c'est-à-dire une composition de la seconde moitié du XXe s., destinée à un public contemporain, et visant en filigrane des problématiques marquées du sceau de l'époque où l'oeuvre fut créée.
Reste le splendide mythe de Sparte ! Sparte et le communisme spartiate, qui séduiront des intellectuels athéniens comme Xénophon et Platon. Xénophon y envoya ses fils parfaire leur éducation, tandis que Platon imaginait les Gardiens de sa République idéale comme une caste militaire pratiquant la communauté des enfants et des femmes, lesquelles partageraient avec les mâles les travaux d'Arès (PLAT., Rép., V, 466d). Le modèle de Sparte s'imposera à certains révolutionnaires de 1789, mais aussi aux doctrinaires nazis et communistes. Dans le discours sur la Spartakiade des Peuples de l'ex-U.R.S.S., le concept de Sparte soit la sélection des meilleurs avait fini par remplacer celui de Spartacus, l'esclave révolté.
L'arc contre la lance
En fait, aucune loi, à Sparte, ne fait obligation à ses hoplites de vaincre ou mourir. Pour justifier la mort tragique de Léonidas il faudra fabriquer de toutes pièces et a posteriori un oracle delphique («Sparte vivra, mais son roi mourra»). Si, du fait de la dégradation sociale qui sanctionne les lâches, la mort est bien préférable à la fuite honteuse, il est certes permis d'opérer une retraite stratégique. En 479, l'année qui suit la bataille des Thermopyles, un officier spartiate imitant à Platée l'exemple de Léonidas, refusera de reculer, de céder à la pression des Perses. Et se fit tuer sur place avec ses hommes, inutilement. Son «geste héroïque» lui valut la désapprobation de ses pairs spartiates. Deux poids, deux mesures ? Ici va naître, en tout cas, la réputation du Spartiate-qui-ne-se-rend-pas. Aussi quand, en août 425, dans l'île de Sphactérie, le démagogue Cléon obtint la reddition des 300 Lacédémoniens (dont 120 Spartiates) qu'il avait encerclés, le monde grec tout entier n'en crut pas ses yeux, ou plutôt ses oreilles puisque CNN n'existait pas encore (THUCYDIDE, IV, 32-41). Euripide, dans Héraclès furieux, alla même jusqu'à célébrer la supériorité sur l'hoplite de l'archer Héraclès, qui tue à distance, sans s'exposer lui-même. En effet, la victoire athénienne fut obtenue autant par la faim que grâce à l'habileté des archers mercenaires étoliens qui décimaient les formations lacédémoniennes.Quand on aura rappelé qu'Euripide écrivait, justement, pour un public de citoyens servant dans le corps des hoplites, le lecteur mesurera tout le poids de cette défaite spartiate et la leçon qu'en tirèrent les stratèges du temps.
Des combattants rompus à l'art de la guerre
Comme dans notre Moyen Age occidental, les Grecs avaient coutume de se battre en des endroits convenus, favorables à l'évolution de la phalange, selon des règles et un rituel précis. Pendant les Guerres léliennes (VIIe s.) les belligérants avaient même d'un commun accord déclaré prohibées toutes les armes de jet (flèches, javelots, balles de fronde). Les hoplites étaient un peu comme ces costauds des fêtes villageoises, qui se donnent des coups sur la tête, chacun à son tour, jusqu'à ce que l'un des deux s'écroule. Pourtant, les Spartiates sont aussi de fins manœuvriers, rompus aux coups de mains et aux actions de commandos. Tout ce que nous savons de l'éducation spartiate tend à le confirmer : il est permis aux jeunes gens de voler, à condition de ne pas se laisser prendre. Ceci n'étant pas un constat hypocrite, mais une volonté pédagogique d'enseigner la ruse, l'endurance, la survie dans une troupe où la logistique brille le plus souvent par son absence.
La kryptie
Un des rites d'initiation des adolescents spartiates est la kryptie - qu'on traduit par «le [massacre] secret [des Ilotes]». Ce rite consistait à exclure momentanément de la communauté des jeunes gens armés seulement d'un poignard, qui, nus, vivront «sur le pays», égorgeant des serfs trop arrogants, donc suspects. En fait les informations que l'on possède sur la kryptie sont contradictoires. Ce qui est normal, vu son nom même de «secret». Confrérie initiatique liée à l'irènie (l'éphébie spartiate), police politique... Henri Jeanmaire a comparé ce rite à ceux qui se pratiquaient encore dans les tribus d'Afrique noire au début du siècle, dont les Hommes-Léopards sont restés le plus célèbre exemple.
La diamastigôsis
Au temps de sa gloire, Sparte connut un rituel consistant, pour les jeunes gens, à voler des fromages placés sur l'autel de la déesse - lesquels fromages étaient défendus par des gardiens armés de bâtons. Jeu viril, qui n'allait pas sans plaies et bosses, mais jeu de guerriers. En revanche, ne mérite qu'un haussement d'épaules le célèbre rituel de la flagellation longue, la diamastigôsis exécutée en l'honneur de la déesse protectrice de la ville, Artémis Orthia. Tous les ans les jeunes Spartiates se laissaient fouetter jusqu'au sang devant l'autel de la déesse, en dissimulant leur souffrance. Encouragés par leurs parents et amis, certains se seraient laissé battre à mort. Aristote, qui n'appréciait guère la sévérité des Spartiates, n'en parle nulle part dans le livre qu'il leur consacra. En fait, comme l'a montré Bosanquet, ce rite ne nous est connu que par des auteurs d'époque romaine (Plutarque, Pausanias, Cicéron, Sénèque, Stace).
Sous l'Empire romain, un cercle de réactionnaires qui prétendaient remettre à l'honneur les «usages du bon vieux temps», inventèrent de toutes pièces cette flagellation plus cruelle que l'originale. Au Ier s. de n.E., probablement déjà sous Auguste, Sparte était devenue «le Club Med' de l'Empire» - l'expression, qui dit bien ce qu'elle veut dire, était de notre ami Jacques Van Herp - et l'on installa devant le temple de la déesse des sièges destinés aux notables. Et au IIIe s., pour accueillir la foule des curieux, l'on y construisit des gradins en pierre que les fouilles de l'Ecole anglaise ont mis à jour : le supplice des jeunes garçons était devenu une attraction touristique, Sparte ayant depuis près de 400 ans cessé d'être une puissance militaire.
De nombreux romans historiques feront leurs choux gras de cette coutume d'un pittoresque barbare, qui prouvait seulement la dégénérescence de Sparte. Un médecin, le Dr Charles Seltman, précise que la flagellation longue et prolongée ou diamastigôsis aurait à coup sûr détruit l'équilibre nerveux des cadets. Et le décès sanctionnant l'hémorragie rénale ou hépatique qui résulte fréquemment de ce genre de traitement aurait décimé la jeunesse spartiate. La Sparte classique des VIIe-IVe s. n'aurait jamais pu se permettre le luxe d'ainsi gaspiller son potentiel militaire, elle qui prenait toujours soin de n'exposer dans des combats difficiles que des hommes mariés, ayant déjà un héritier.
Chronologie de la bataille des Thermopyles (16-24 août 480),
d'après Apostolos Dascalakis
(16 août)
Thermopyles, 1er jour / Dans le camp d'Alpenoi-Thermopyles, Léonidas procède depuis quatre jours (approximativement) à la réparation du mur phocidien tout en essayant d'attirer des alliés.Artémision / Vers la tombée du jour, la flotte perse arrive au cap Sépias. - Les Grecs à Artémision sont informés par les torches de Skiathos que les trois bateaux observateurs ont été capturés ou détruits. - 200 vaisseaux perses contournent l'Eubée pour bloquer l'Euripe. - 53 trières athéniennes se portent à la défense du détroit de Chalcis.
(17 août)
Thermopyles, 2e jour / Léonidas poursuit ses préparatifs aux Thermopyles.Artémision / Un vent puissant, accompagné d'une violente tempête, retient la flotte perse au cap Sépias et détruit plusieurs vaisseaux perses.
(18 août)
Thermopyles, 3e jour / L'armée de Xerxès arrive de Thermè en Malide après douze jours de marche. Les Grecs décident en conseil de guerre de tenir leurs positions pour défendre le défilé (dans la nuit du 3e au 4e jour probablement).Artémision / La tempête fait toujours rage. - La flotte perse est confinée à Sépias.
(19 août)
Thermopyles, 4e jour / Xerxès fait des préparatifs dans l'attente de la flotte. - Les Phocidiens sont envoyés pour monter la garde aux sentiers (datation approximative).Artémision / La tempête se poursuit. - La flotte perse demeure toujours à Sépias.
(20 août)
Thermopyles, 5e jour / Xerxès poursuit ses préparatifs dans l'attente de l'issue du combat sur mer. Les Grecs effectuent de leur côté des préparatifs.Artémision / La tempête s'apaise. - La flotte perse navigue vers les Aphètes. - Les commandants de la flotte grecque décident de passer à l'attaque. Le premier engagement sur mer se produit en fin d'après-midi. Les adversaires regagnent leurs positions de départ à la tombée de la nuit.
(21 août)
Thermopyles, 6e jour / Xerxès poursuit toujours ses préparatifs dans l'attente de l'issue du combat sur mer. Les Grecs, aux Thermopyles, s'attendent à l'attaque.Artémision / Un orage qui éclate pendant la nuit, de pair avec un soulèvement des eaux, cause des dégâts à la flotte perse mouillant aux Aphètes et détruit près des Koila ceux des vaisseaux qui essayaient de contourner l'Eubée. Les 53 trières athéniennes assignées à la garde du détroit de Chalcis, retournent à l'Artémision. - Tard dans l'après midi, la flotte grecque se porte à l'attaque. - 2e combat naval et destruction d'une escadre de vaisseaux ciliciens.
(22 août)
Thermopyles, 7e jour / Xerxès passe à l'attaque. - Première bataille des Thermopyles; durée du matin au soir.Artémision / Pas d'action sur mer.
(23 août)
Thermopyles, 8e jour / Deuxième bataille des Thermopyles, environ jusqu'à midi. - Ephialte se présente dans le camp de Xerxès. - L'encerclement des Grecs est décidé. - Dès la tombée de la nuit, l'armée d'Hydarnès entreprend à travers de sentier d'Anopée une marche qui devait durer toute la nuit.Artémision / Pas d'action sur mer.
(24 août)
Thermopyles, 9e jour / Léonidas est informé, à l'aube, de l'imminence de l'encerclement. - Après le conseil de guerre, les alliés se retirent. Les Thespiens et les Thébains demeurent aux côtés des Lacédémoniens. - Assaut de l'armée perse entre 9h et 10h du matin. - Léonidas contre attaque. - Lutte acharnée et à mort; Léonidas est tué et le combat se poursuit autour de son corps. - L'armée d'Hydarnès survient à l'arrière. - Les survivants Lacédémoniens et Thespiens se retirent au Kolônos où ils sont tués jusqu'au dernier. Les survivants Thébains sont capturés. - Xerxès occupe le défilé des Thermopyles.Artémision / La flotte perse quitte les Aphètes vers midi. - Les Grecs prennent leurs formations de combat. Le 3e combat naval est engagé aux premières heures de l'après-midi. Le soir, les adversaires se retirent dans leurs ports de mouillages respectifs. - Arrive Abronichos avec le bateau observateur, embossé au large des Thermopyles, pour annoncer le désastre. - La flotte grecque prend immédiatement la mer en direction des rivages de l'Attique.
La bataille des Thermopyles a suscité les commentaires de nombre d'exégètes. Nous renverrons le lecteur à l'excellente étude d'Apostolos Dascalakis, Problèmes historiques autour de la bataille des Thermopyles (1962), publiée cette même année où sortit sur les écrans le film de Rudolph Maté.
En fait, les Grecs étaient 7.000 environ, à défendre les Thermopyles. Quatre mille d'entre eux venaient du Péloponnèse; les autres dont 700 Thespiens et 400 Thébains étaient de Grèce centrale. Ces chiffres n'incluent pas les effectifs de la flotte athénienne, commandée par Thémistocle, qui couvrait le flanc droit de Léonidas : l'Euripe (bras de mer entre le continent et l'Eubée).
Le film de Maté ne montre que les 300 Spartiates et les Thespiens (dont il ne précise pas le nombre); accessoirement, il évoque la présence de la flotte athénienne. C'est dommage et injuste; il faut reconnaître ici l'influence partisane d'Hérodote relayant la propagande spartiate, génératrice de nos clichés scolaires et dont les thèses sont reprises par l'historiographie officielle néo-hellénique.
Les 400 Thébains, par exemple, selon Sparte/Hérodote, étaient des otages dont Léonidas se méfiait, et qu'il ne retint près de lui qu'à la seule fin de compromettre l'aristocratique et persophile Thèbes. Mais comment comprendre - s'interroge Dascalakis - que Léonidas aurait livré son «baroud d'honneur» avec une moitié de son effectif considérée comme suspecte ? Ces Thébains n'étaient-ils pas plutôt des volontaires démocrates qui savaient qu'en cas de défaite grecque, c'était de toute façon la mort qui les attendait, retour dans leur patrie où la victoire perse aurait donné toute licence à leurs compatriotes de la faction aristocratique ?
Un autre problème est l'effectif exact des Spartiates. Trois cents dit-on : la Garde Royale, les hippeis, lesquels en dépit de ce que leur nom suggère combattaient à pied. (Fort de 400 chevaux, le premier corps de cavalerie spartiate, médiocre, ne sera créé qu'en 425.) Quand on connaît les mœurs militaires des Spartiates, on peut douter de ce chiffre. Chaque hoplite emmenait avec lui au moins un valet d'arme un Ilote. Inexistants sur le rôle, ces goujats pouvaient se muer en archers, frondeurs ou lanceurs de javelot : «appui feu» non négligeable contre le Perse, lui-même archer. En fait, se méfiant des Ilotes qu'ils laisseraient derrière eux à Sparte, chaque guerrier en emmenait le plus possible, allant exceptionnellement jusqu'à sept Ilotes par hoplite comme ce fut le cas à Platée, l'année suivante (5.000 Spartiates - 35.000 Ilotes). Le film de Maté en laisse entrevoir une poignée, tirant à l'arc derrière la ligne des hoplites. Même si le chiffre de 7 x 300 est rejeté par Dascalakis, on peut penser que Léonidas en emmena un maximum.
Les Périèques lacédémoniens
Isocrate et Diodore de Sicile affirment, quant à eux, qu'aux Thermopyles les Lacédémoniens étaient au nombre de 1.000 et Hérodote lui-même, dont le texte fourmille de contradictions, reconnaît implicitement ce chiffre lorsqu'il fait dire par Démarate, que les Lacédémoniens «ne seraient-ils que mille» n'hésiteraient pas à s'opposer à la multitude perse.
Il faut sans doute comprendre que Léonidas amenait dans l'Alliance grecque 1.000 fantassins lourds, dont 300 hoplites citoyens spartiates et 700 hoplites lacédémoniens - des Périèques qui devaient le service militaire mais n'étaient que des citoyens de seconde zone.
Classe intermédiaire entre les Homoïoï (les Egaux = les Spartiates) et les Hypomeniones (les Inférieurs, c'est-à-dire les serfs d'Etat, les Ilotes), les Périèques, qui représentaient la vie sociale de la cité par leurs activités commerciales ou industrielles, étaient astreints au service militaire dans le corps des hoplites -, ainsi que plusieurs centaines, voire milliers de valets d'armes (Ilotes).
Les Ilotes, valets d'armes et troupes légères
Le roman de Steven Pressfield, Les Murailles de Feu, met l'accent sur le rôle des valets d'arme dans la logistique : chaque combattant non seulement porte un matériel très lourd, mais aussi des armes de rechange, des vivres etc. On évalue entre vingt et trente kilogrammes la panoplie complète d'un hoplite - bouclier (7 kg), casque (2 kg ou plus), cuirasse de bronze (entre 15 et 20 kg, jambières, épée et lance. De frêne ou de cornouiller, la lance mesurait entre 1,80 et 2,50 m, pour un diamètre de 2,5 cm. Mais l'hoplite devait en emmener plusieurs de rechange, et aussi plusieurs boucliers, lesquels se rompaient facilement. C'est sans doute pour cela que le brassard de bronze (porpax) qui servait à les tenir était amovible.
Plus tard, la propagande spartiate d'efforcera de focaliser toute la gloire sur le sacrifice sublime de ses 300 citoyens. Les Périèques furent oubliés. Quant aux Ilotes, serviles de condition, ils n'ont de toute façon jamais compté... quoique Hérodote dise qu'ils se battirent avec courage, et moururent aux côtés de leurs maîtres sur le kolônos. La liberté... c'est peut-être, tout simplement, le droit de choisir ses chaînes.
.
Un pari insensé ?
Sept mille hommes contre 300.000 et 53 trières contre 200 tinrent donc un défilé de la Thessalie, verrou de la Grèce, du 16 au 24 août 480 - dont trois jours de combat, les 22, 23 et le matin du 24. Une gageure insensée ? Non, car la chance était du côté des Grecs. Une tempête inopinée venait de détruire au cap Sépias une bonne partie de la flotte perse, qui transportait les approvisionnements de l'armée de terre. Une campagne avec des effectifs aussi imposants que ceux des Perses dans un pays aussi pauvre que la Grèce, se calcule au jour près sur le plan logistique. Son infanterie bloquée devant les Thermopyles, sa flotte tenue en échec devant le cap Artémision - Xerxès, privé de munitions, devait être aux abois. Il lui fallait absolument piller la Grèce centrale pour refaire des vivres, sinon renoncer et rentrer chez soi.
Epousant le point de vue perse, Gore Vidal, dans Création, expédie en deux lignes la bataille des Thermopyles qu'il décrit comme un incident de frontière où un roitelet grec s'était fait tuer.
L'importance même des effectifs engagés, que les historiens modernes réduisent à 300.000 h (plutôt que les 2.600.000 h dont parle Hérodote !) marchant sur trois colonnes - mer, littoral et intérieur - prouve toutefois le contraire.
Xerxès envisage de rentrer chez lui, sous prétexte d'une vision qu'il a eue cette nuit là... Il a perdu. Mais il faut sauver la face. C'est alors qu'un traître malien, Ephialtès, renseigne un chemin de chevriers - le sentier de l'Anopæa - permettant de contourner la position de Léonidas à travers le mont Callidromos. Cette tâche est confiée aux troupes d'élite d'Hydarnès, les 10.000 Immortels qui ont été fort malmenés la veille.
Informé par des transfuges avant l'aube du 24 août, Léonidas tient un conseil de guerre avec les chefs alliés. Dès le début de la guerre, les Péloponnésiens avaient égoïstement manifesté préférer défendre l'Isthme de Corinthe et abandonner aux Perses la Grèce centrale - la Béotie (Thèbes, Thespies), les deux Locrides et la Phocide - ainsi que l'Attique. Léonidas ne les retint pas. Il fallait «sauver les meubles» et préserver du massacre ces troupes excellentes. Pour lui-même, il se sacrifia avec ses Lacédémoniens, ainsi que les contingents de Grèce centrale (les Thespiens et les [démocrates] Thébains de toute façon condamnés) afin de retarder de quelque six heures le franchissement des Thermopyles par la redoutable cavalerie médo-perse. On a un peu tendance, autre cliché scolaire, à mépriser les armées perses, vaincues dans les Guerres médiques, puis écrasées par Alexandre le Grand. Il est vrai que nombre de troupes sujettes, réquisitionnées, offraient peu de «mordant». Mais l'élite de l'armée, reflétant l'ethnie au pouvoir - l'infanterie des Immortels et la cavalerie médo-perse -, constituaient des troupes motivées et redoutables. A propos des Perses qui combattirent à Platées, Hérodote note qu'«ils n'étaient inférieurs ni en courage ni en force, mais en même temps que d'un armement solide, ils manquaient d'instruction militaire» (HDT., IX, 62).
Le cliché de la supériorité du fantassin lourd contre l'archer légèrement armé fait sourire : pourtant, avec son casque, son bouclier, son thorax et ses cnémides de bronze - plus de trente-cinq kilos, plus de la moitié du poids de celui qui les porte et qui doit se faire aider par un ou deux valets pour les transporter - l'hoplite est fortement handicapé sous le soleil de l'été grec. Les hoplites, la chose est connue, n'endossaient leur cuirasse qu'à la dernière seconde, et ne peuvent combattre que pendant un temps limité.L'histoire des guerres de l'Antiquité est éloquente : le vaincu a toujours des pertes disproportionnées par rapport à celles du vainqueur. Pas seulement parce que c'est le vainqueur qui écrit l'Histoire - mais surtout parce que la coutume était de poursuivre et massacrer l'ennemi en déroute.
Cela, Léonidas le savait pertinemment. Lui et un millier de volontaires se sont donc sacrifiés, non par vaine gloriole, mais pour gagner ces quelques heures une matinée qui mettraient hors de portée de la cavalerie perse la précieuse infanterie péloponnésienne en retraite.
Les Perses seront à ce point furieux de leur victorieux... échec, qu'ils décapiteront et crucifieront le cadavre de Léonidas. Ce qui, dira Hérodote qui les connaissait bien était assez inaccoutumé de leur part, eux d'ordinaire vainqueurs magnanimes.
Les Thermopyles furent franchies...avant
-480 : par les Thessaliens pillards ensuite de quoi les Phocidiens construisirent un mur pour le barrer, que Léonidas fera restaurer; août
-480 : par les Perses, qui tuèrent Léonidas;
-279 : Brennus y fut arrêté par Callipos mais les Gaulois contourneront la position des Grecs, lesquels pourront toutefois décrocher sans problème;
-191 : 40.000 Romains, conduits par le consul M. Acilius Glabrio et son légat M. Porcius Cato, descendant du nord, s'y heurtent aux 10.000 Gréco-Syriens d'Antiochos III les Romains encercleront les Syriens (seulement 500 d'entre eux survivront au massacre);
-146 : Critolaos, stratège de la Ligue achéenne, y sera vaincu et capturé (il se suicidera) par le Romain Q. Cecilius Metellus Macedonicus, préteur de Macédoine;
395 de n.E. : les Goths d'Alaric;
VIe s. : Justinien en fait restaurer les fortifications;
1205 : les Croisés y passent;
21-23 avril 1941 : les Allemands forcent les Thermopyles, défendues par les Australiens.