La centrale de Fukushima est en train d'échapper à tout contrôle, et risque de provoquer une catastrophe nucléaire majeure. La peur est ressentie jusqu'en Europe. En Suisse, la présidente de la Confédération Micheline Calmy-Rey s'est voulue rassurante, tout en indiquant que les états-majors de crise sont à pied d'oeuvre. Pour le patron de Groupe E, Philippe Virdis, cette catastrophe n'est rien moins qu'un «véritable big bang» qui va bouleverser nos politiques énergétiques et nos manières de consommer.
C'est un signe qui atteste la gravité de la situation: le Conseil fédéral a tenu hier à la mi-journée une séance extraordinaire pour faire le point sur la crise qui frappe le Japon et sur ses possibles répercussions sur la Suisse. La présidente de la Confédération Micheline Calmy-Rey s'est voulue rassurante, tout en indiquant que les états-majors de crise sont à pied d'oeuvre. Le point sur l'impact de la catastrophe.
QUEL DANGER SANITAIRE POUR LA POPULATION SUISSE?
«En ce moment, il n'y a pas de danger sanitaire pour la population suisse», explique Micheline Calmy-Rey. Aucune augmentation de la radioactivité n'a été mesurée. Par ailleurs, en cas d'urgence, la Suisse dispose de stocks suffisants de tablettes d'iode. C'est pourquoi l'Office fédéral de la santé publique déconseille aux Suisses de s'approvisionner eux-mêmes en pharmacie. L'OFSP qui a ouvert une ligne téléphonique (031 322 97 28) pour les questions du public.
QUEL IMPACT SUR LES CENTRALES NUCLÉAIRES SUISSES?
Le Conseil fédéral «soutient pleinement» la suspension des procédures concernant la construction de nouvelles centrales, décidée lundi par la ministre de l'Energie Doris Leuthard. Pas besoin d'aller plus loin pour l'instant et de débrancher les vieux réacteurs (Mühleberg, Gösgen I et II), comme l'Allemagne l'a décidé hier. «Ce qui se passe au Japon aura forcément des incidences ici. Mais avant d'en tirer les leçons, il nous faudra connaître tous les tenants et les aboutissants des événements en cours», temporise Micheline Calmy-Rey.
LA SUISSE POURRAIT-ELLE SORTIR À TERME DU NUCLÉAIRE?
L'option fait en tout cas partie des trois scénarios sur lesquels planche l'Office fédéral de l'énergie, a expliqué son directeur Walter Steinmann à la TV alémanique. Elle n'est plus taboue non plus au Parti libéral-radical, pourtant très favorable à l'atome jusqu'ici. A Berne, une nouvelle ère semble avoir commencé.
LES SUISSES DOIVENT QUITTER LES ZONES DANGEREUSES
1890 citoyens helvétiques sont enregistrés au Japon. 1592 ont pu être atteints par l'ambassade de Suisse à Tokyo. Aucune victime n'est à déplorer. Berne conseille aux personnes résidant dans le Nord-est du pays et dans la zone Tokyo/Yokohama de quitter ces régions si leur présence n'y est pas indispensable. Certains Suisses se sont plaints de ne pouvoir quitter le Nord par leurs propres moyens (notre édition d'hier). Micheline Calmy-Rey précise qu'il s'agit de 8 personnes (sur les 105 Suisses vivant au Nord). Quatre ont pu rallier Tokyo toutes seules. Les 4 autres gagneront la capitale vendredi dans le bus du Corps suisse d'aide humanitaire.
VERS UNE ÉVACUATION DES SUISSES DU JAPON?
Les Suisses voulant quitter le Japon peuvent encore le faire par des vols de ligne. Mais le Département des affaires étrangères est prêt à les embarquer sur un vol charter si la place venait à manquer. L'ambassade de Suisse à Tokyo est en train de sonder les personnes intéressées à un tel rapatriement.
L'AMBASSADE RESTE À TOKYO
Contrairement à l'Autriche, qui a déplacé son ambassade à Osaka, la Suisse maintient la sienne à Tokyo, «en tout cas pour le moment», indique Micheline Calmy-Rey. Le DFAE a néanmoins renforcé son bureau de Kobé. L'ambassade fonctionne 24 heures sur 24 (tél. +41 (0)800 24 73 65). Elle a distribué des tablettes d'iode à ses ressortissants.
LES SECOURISTES SUR LE CHEMIN DU RETOUR
Les 23 experts du Corps suisse d'aide humanitaire et les 9 chiens arrivés samedi dernier au Japon seront rapatriés demain. Les chances de retrouver des survivants du tremblement de terre et du tsunami sont en effet nulles désormais. Trois membres de l'équipe de secours seront toutefois déroutés vers Tokyo, où ils épauleront le personnel de l'ambassade de Suisse.
INFORMATION EN FLUX TENDU
Les organes de crise suivent de près l'évolution de la crise au Japon et en informent la population suisse en flux tendu (www.admin.ch/japon). Mais l'analyse n'est pas facile. «Les informations que nous pouvons obtenir des autorités japonaises ne sont pas très nombreuses», reconnaît Hans Wanner, directeur de l'Inspection fédérale de la sécurité nucléaire. «Ce n'est pas par mauvaise volonté, mais parce que la situation sur place est très difficile et que les autorités elles-mêmes ne savent pas comment elle va évoluer.»
Serge GUMY