Chu de che / Je suis d'ici / Sono di qui / Ich bin von hier ! Notre liberté ne nous a pas été donnée, mais combattue et priée par nos ancêtres plus d'une fois! Aujourd'hui, comme autrefois, notre existence en tant que peuple libre dépend du fait que nous nous battions pour cela chaque jour. Restez inébranlable et soyez un gardien de la patrie pour que nous puissions remettre une Suisse libre telle que nous la connaissions à la génération suivante. Nous n'avons qu'une seule patrie!

vendredi 22 juillet 2011

Le logiciel qui prévoit les mouvements de foule

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Il y a un an, une vingtaine de jeunes gens perdaient la vie lors de la Love Parade de Duisburg. Depuis, un simulateur de mouvements de foule a été conçu. Permettra-t-il d’éviter de nouveaux drames?

Si, pour Alain Souchon, la foule se montre sentimentale, pour les organisateurs de grands rassemblements, elle est potentiellement dangereuse. Non seulement pour l’ordre établi mais envers elle-même.

Sans être agoraphobe, Jésus ne craignait-il pas déjà la foule? Dans l’Evangile selon Saint-Marc (3, 7-12 ), on lit: «Il dit à ses disciples de tenir une barque à sa disposition pour qu’il ne soit pas écrasé par la foule.»

Une crainte justifiée. Des bousculades meurtrières surviennent partout dans le monde pour des raisons variées. Selon le magazine «Disaster Medicine and Public Health Preparedness», de tels accidents ont plus que doublé durant ces vingt dernières années.

Le drame de Duisburg, survenu le 24 juillet 2010, est encore dans toutes les mémoires. Etouffées par la foule, 21 personnes perdirent la vie, cinq cents autres furent blessées. Alors que la justice ne s’est toujours pas prononcée, la quête publique d’un responsable a aussitôt été lancée. Il fut vite trouvé en la personne du maire de la ville allemande, Adolf Sauerland.

Lors de la conférence de presse qui suivit le drame, la question lui a été posée: «Etes-vous responsable?». Il répondit d’un «Nein» catégorique qui le transforma en cible de la colère de ses concitoyens. Depuis, une récolte de signatures demande sa démission, l’élu a été aspergé de ketchup, traité d’assassin et jugé indésirable aux manifestations commémoratives.

Les proches des victimes se sont organisés en association et attendent que les responsabilités soit clairement établies. «Des êtres humains sont morts parce que d’autres êtres humains ont commis des fautes», estiment-ils. Le parquet a retenu seize inculpés: un policier, quatre organisateurs, onze fonctionnaires communaux. Adolf Sauerland ne figure pas sur cette liste noire.

Quelles erreurs ont été commises? Comment aurait-on pu éviter ces décès causés par une asphyxie par compression? Le passage presque imperceptible d’une bousculade fraternelle à une pression suffocante est-il prévisible?

«Tout rassemblement de foule crée un risque, c’est-à-dire que le fait même qu’un grand nombre de personnes soient réunies en un même endroit crée un potentiel d’accident à cet endroit précis pendant une unité de temps déterminée. Le risque d’accident peut être limité ou aboutir à une catastrophe», analysent les auteurs d’un article portant sur «L’organisation sanitaire en cas de rassemblement de foule», paru dans la Revue Médicale Suisse.

De son côté, l’Interassociation suisse de sauvetage (IAS) propose une manière chiffrée d’évaluer les risques lors de grandes manifestations et passe en revue les mesures préventives à considérer. Les critères pris en compte sont basés sur l’expérience vécue dans de nombreuses manifestations. De telles mesures sont utiles mais ne constituent pas une garantie contre la survenue du pire.

Les modèles développés par les scientifiques sont-ils plus performants? Jusqu’ici, les modèles de déplacement de foule étaient construits sur la base d’analogies avec des systèmes physico-chimiques. De tels modèles se sont avérés très imparfaits à refléter la réalité. Les humains constituant une foule ne sont pas réductibles aux molécules d’un fluide!

Plus innovante et pertinente, la nouvelle approche proposée par deux chercheurs du Centre de Recherche sur la Cognition Animale de Toulouse, en collaboration avec le spécialiste des phénomènes de panique, Dirk Helbing de l’EPFZ, combine science cognitive et physique des systèmes complexes, modélisation et expérience (les événements survenus à La Mecque en 2006 et à Duisburg en 2010 ont été pris en compte).

Dans ce modèle, «un piéton cherche à minimiser l’encombrement de son champ visuel en se dirigeant vers les espaces libres qu’il perçoit, tout en ajustant sa vitesse afin de conserver une distance de sécurité par rapport à l’obstacle le plus proche».

Ces deux règles simples seraient suffisantes pour reproduire une large palette de comportements collectifs observés dans les foules. Lorsque la densité de piétons augmente, le modèle prédit l’émergence de nouveaux phénomènes, comme l’effet d’accordéon caractérisé par des vagues successives de mouvements vers l’avant, entrecoupées de périodes durant lesquelles les piétons s’arrêtent.

Au-delà d’un seuil critique de densité, la combinaison de ces règles avec l’effet des contacts physiques entre piétons provoque spontanément de gigantesques bousculades collectives. Ce phénomène appelé «turbulence» caractérise la dynamique d’une foule en situation dangereuse. Les piétons subissent alors des mouvements chaotiques qui peuvent être fatals.

Si les organisateurs du grand rassemblement de Duisburg avaient pu disposer de ce précieux outil, ils auraient sans peine pu détecter la dangerosité du tunnel emprunté par cette Love parade et l’empêcher de se transformer en Death parade.

Geneviève Grimm-Gobat