Grâce à son tout premier forage dans une pierre martienne, le robot explorateur a déjà atteint l'un des principaux objectifs de sa mission.
C'est sur ce socle rocheux que Curiosity a fait le prélèvement qui a permis de confirmer que la planète Mars avait bien été habitable dans le passé. © NASA/JPL-Caltech/MSSS
Pour la Nasa, plus de doute possible : les conditions nécessaires à la vie ont été réunies sur Mars il y a plusieurs milliards d'années. "Une question fondamentale à laquelle la mission Curiosity devait répondre était celle de savoir si Mars pourrait avoir été propice à la vie : sur la base de ce que nous savons maintenant, la réponse est affirmative", a déclaré mardi lors d'une conférence de presse, Michael Meyer, le principal scientifique de la mission Curiosity. À ce stade, rien ne permet cependant d'affirmer que des micro-organismes ont effectivement prospéré sur la planète rouge.
Les instruments du robot à six roues sur Mars depuis le 6 août dernier ont analysé le premier échantillon prélevé à l'intérieur d'une roche martienne baptisée John Klein. Celle-ci se trouvait à la fin d'un ancien réseau de rivières ou d'un lac qui aurait pu fournir des ingrédients chimiques et d'autres conditions favorables pour la vie microbienne, ont expliqué ces chercheurs.
À gauche, le premier forage réalisé par Curiosity © Nasa/JPL-Caltech/MSSS
La roche contient de l'argile, des minéraux comme des sulfates et d'autres substances chimiques. "Les minéraux argileux représentent au moins 20 % de la composition de l'échantillon", a précisé David Blake de la Nasa, qui travaille avec l'instrument Chemistry and Mineralogy ou CheMin, qui a effectué ces analyses. Ces minéraux sont produits par la réaction dans de l'eau douce avec d'autres minéraux, comme l'olivine également présente dans le sédiment.
La présence de sulfate de calcium avec de l'argile laisse penser que le sol était neutre et légèrement alcalin. Ainsi, à la différence des autres anciens environnements humides déjà observés sur Mars, celui-ci n'était pas fortement oxydé, acide ou très salé, ont expliqué ces chercheurs. "On aurait pu boire cette eau", a lancé John Grotzinger, de l'Institut de technologie de Californie et responsable du projet Curiosity, précisant aussi que les instruments du robot ne permettent pas de détecter la vie comme telle.
De quoi nourrir une grande variété de microbes terrestres
Les scientifiques se sont dits surpris de trouver un mélange d'ingrédients chimiques oxydés, moins oxydés et pas du tout oxydés, fournissant des sources d'énergie variées qu'une grande variété de microbes sur la Terre peuvent utiliser pour vivre. "L'éventail de substances chimiques que nous avons identifié dans cet échantillon est impressionnant, comme des sulfates et des sulfites qui indiquent une source possible d'énergie chimique pour des micro-organismes", a souligné Paul Mahaffy, du centre des vols Spatiaux Goddard de la Nasa, le scientifique responsable d'un des instruments de Curiosity.
"Nous sommes en présence d'un environnement de Mars très ancien (...) où les conditions ont été dans le passé favorables à la vie", a ajouté John Grotzinger tout en se disant, avec l'équipe scientifique, optimiste quant à la possibilité de "faire encore plus de découvertes excitantes sur Mars dans les prochains mois et années." Ces chercheurs comptent travailler avec Curiosity dans la zone actuelle appelée "Yellowknife Bay", située dans le cratère de Gale à l'équateur de Mars, pendant encore quelques semaines avant d'entamer une longue route vers le mont Sharp distant de plusieurs kilomètres. Le robot, le plus sophistiqué jamais envoyé sur une autre planète avec dix instruments scientifiques à bord, y examinera les couches sédimentaires où des minéraux d'argile et de sulfate ont été identifiés par des orbiteurs martiens de la Nasa.
La mission Curiosity, d'un montant de 2,5 milliards de dollars, est prévue pour durer au moins deux ans. Toutefois, le robot explorateur a récemment connu de sérieuses difficultés. À la suite d'un problème de mémoire flash, son ordinateur principal, voie A, est pour l'instant hors d'usage. Les équipes de la mission l'ont fait basculer sur son ordinateur de secours, voie B, tout en espérant pouvoir, à terme, remédier complètement au problème.