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mercredi 31 juillet 2013

L'accord qui fait fuir les Français en Suisse


La convention fiscale sur les successions signée récemment entre France et Suisse effraie déjà. Elus et avocats fiscalistes notent les signes avant-coureurs d'une vague d'exils des futurs héritiers.

«Un impôt exagéré tue la base sur laquelle il est bâti», notait l'économiste Jean-Baptiste Say au début du XIXe siècle. La France pourrait bien vérifier cette théorie une fois encore dans les mois à venir. En cause cette fois-ci: la convention sur les successions signée au début du mois de juillet par Eveline Widmer-Schlumpf et Pierre Moscovici.

Selon la députée Claudine Schmid (UMP), représentante des Français de Suisse et du Liechtenstein, de nombreux héritiers potentiels domiciliés en France, sont sur le point de quitter l'Hexagone pour s'installer en Suisse: «Je suis sans arrêt interpellée sur cette question lorsque j'assure des permanences», assure à l'AFP l'élue, qui se déclare hostile à cette convention, «mauvaise pour tout le monde».

Des exilés plus jeunes

Claudine Schmid pointe un risque déjà évoqué par l'avocate fiscaliste Manon Sieraczek-Laporte dès le lendemain de cette signature: la taxation selon le lieu de résidence de l'héritier et non plus selon le lieu de résidence du défunt risque de susciter de nouvelles vocations d'exil.

«Ce qui pourrait peut-être se produire, c'est que les héritiers se délocalisent aussi en Suisse, afin d'échapper à l'impôt français. On pourrait donc avoir un effet pervers de cet accord avec de nouveaux départs. Et là, ce pourrait être des gens plus jeunes et donc des départs plus préjudiciables encore à l'économie française», craignait-elle le 12 juillet.

Les exemples se multiplient

Or, deux semaines plus tard, Claudine Schmid semble accréditer cette théorie: rien que dans son entourage, elle évoque deux cas au moins de résidents en France, futurs héritiers de personnes vivant en Suisse, ayant décidé de migrer vers la Suisse.

«Un sexagénaire français, habitant Paris, a décidé de rejoindre ses parents et sa sœur habitant depuis longtemps en Suisse dans le canton des Grisons», indique-t-elle à l'AFP. Le second cas est celui d'un ressortissant suisse, vivant en Haute-Savoie, près de Genève, et dont les parents habitent en Suisse: «Il va déménager et rentrer en Suisse, sa maison est en vente.»

53'000 Suisses concernés en France voisine

Pour les héritages compris entre 16'000 et 550'000 euros (entre 21'200 et 729'400 francs), l'Etat français prélèvera 20%; mais ce taux grimpera à 45% pour les volumes supérieurs à 1,8 million de francs. Même si certains abattements peuvent permettre de diminuer la facture, notamment avec des donations du vivant. Mais les taux français effraient tout de même les futurs héritiers, qui cherchent donc à s'expatrier en Suisse, où le taux varie entre 0 et 7%.

Ce qui fait dire à Claudine Schmid que, selon elle, la France, à l'origine de cette nouvelle convention pour renflouer ses caisses, «s'est tiré une balle dans le pied, voire plusieurs».

Car, en plus des familles françaises dont au moins un des membres est déjà installé en Suisse (entre 160'000 et 200'000 Français vivent sur le sol helvétique), les héritiers suisses qui résident en France seraient aussi concernés. Soit «53'000 Suisses rien que dans les départements de l'Ain et de la Haute-Savoie», selon Bertrand Buchs, député PDC au Grand Conseil du canton de Genève.

Des biens déjà vendus

Les craintes de Claudine Schmid sont corroborées par l'avocat fiscaliste suisse Philippe Kenel, qui signale, dans un article du Tages Anzeiger, qu'il connaît plusieurs familles françaises résidant en Suisse qui déconseillent à leurs enfants encore étudiants de chercher un travail en France.

Même son de cloche du côté de l'expert fiscal Philippe Mortgé, également interrogé par le Tages Anzeiger. Il déclare recevoir des appels de Français ayant tout vendu, «voitures, actions, œuvres d'art et même appartement sur la Côte d'Azur», et qui souhaitent connaître les modalités d'une installation en Suisse. «Le secret bancaire est mort, l'heure de l'exil fiscal est arrivée», résume Philippe Mortgé.

La fronde des élus suisses

Cependant, l'application de cet accord (en 2015 au plus tôt) reste soumise à la validation par les deux parlements. Si les Français devraient l'approuver, il n'en va pas de même en Suisse: quelques élus ont lancé une véritable fronde contre la convention depuis deux semaines.

«Cette convention est entièrement défavorable à la Suisse, elle enterre le fédéralisme et l'état de droit», déclarait récemment Philippe Nantermod, député PLR qui a fédéré contre ce texte une dizaine d'élus du centre, des verts et de la droite.