Dans le sport professionnel, il est hautement déconseillé de dire un mot plus haut que l’autre. Dans des styles bien distincts, un mannequin et un Haut-Valaisan ont ouvert une brèche cette semaine.
Trois lignes balancées depuis un téléphone portable et la bombe explosait: «Fuck France, fuck Deschamps, What a shit manager!». Lisez, avec l’auriculaire levé, «j’embête la France, je fustige Deschamps. Quel sélectionneur incompétent!» Anara Atanes, mannequin-lingerie de son état, a tweeté ces élégantes attentions à l’adresse du sélectionneur de l’équipe de France Didier Deschamps, coupable de ne pas avoir offert à son petit ami Samir Nasri le billet Paris-Rio. Sur le coup, Madame Froufrou n’a pas eu la même délicatesse que celle des dentelles enrubannées qu’elle porte devant les objectifs. Signe des temps, dire publiquement n’importe quoi sur n’importe qui suffit à se faire une notoriété.
Il est vrai que le ton ordurier de la belle tranche singulièrement avec celui généralement utilisé dans le milieu. Dans le sport professionnel, dire un mot plus haut que l’autre tient désormais de la faute professionnelle. On ne parle plus aux médias, on communique. Tout un art, celui de ne rien dire, que les sportifs ont emprunté sans rechigner à l’économie ou à la politique. Même en Suisse, les athlètes se retrouvent sur les mêmes bancs d’école que les chefs d’entreprise, où leur sont distillés des cours de logorrhée binaire et manichéenne. Sur le royaume du «on respecte l’adversaire, mais on n’a peur de personne» veille une armée de petits soldats - les mal nommés «services de presse» - qui s’évertuent à faire barrage entre journalistes et joueurs, histoire de justifier leur salaire à plein-temps et leur voiture de service.
Mais parfois, certains propos moins insignifiants que ceux de Madame Nasri, passent au travers des mailles du filet. Un exercice pour lequel les footballeurs français, et désormais leurs compagnes, sont champions hors catégorie. Il arrive même aux meilleurs, aux gardiens du temple, de se prendre les pieds dans le tapis. Sepp Blatter «himself» s’est tout de même bien vautré, jeudi soir chez Rochebin, en concédant au présentateur du JT que l’attribution du Mondial 2022 au Qatar avait été une «erreur». Le président de la FIFA en a encore ajouté une couche lorsqu’il a affirmé que ce sont les pressions politiques, notamment celles de la France et de l’Allemagne, qui ont fait pencher la balance en faveur de l’émirat.
Hier, le service de presse de la FIFA s’est empressé de pondérer les propos de son patron, précisant que ce n’était pas le Qatar qui était en cause, mais bien le climat qui y règne durant la saison chaude (40 à 50 degrés). Douloureuse séance de rétropédalage au siège du football mondial. Voilà bien longtemps que Blatter ne nous était plus apparu si perspicace.
Vincent Chobaz