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samedi 16 mai 2015

Les pays européens qui n'ont pas l'euro s'en sortent beaucoup mieux



Aujourd'hui, le bien-fondé de l'euro est largement remis en cause. D'aucuns l'accusent d'être à l'origine des politiques d'austérité mises en place dans les pays du Sud de la zone euro avec par exemple pour conséquence économique un effondrement de la demande intérieure (baisse des salaires et des dépenses publiques/hausse du chômage et des impôts). D'autres lui reprochent d'être mal adapté à l'économie de leur pays (surévaluation) et par conséquent de freiner leurs exportations et leur croissance.

Or le projet de création de l'euro en 1999 était présenté comme une opportunité unique pour les citoyens et les consommateurs européens de bénéficier des avantages macro-économiques d'une monnaie commune. Je vais exposer successivement ces avantages théoriques et pour chacun d'eux l'argument sous-jacent et comparer la situation de la zone euro à celle des pays membres de l'Union Européenne n'ayant pas adopté l'euro* afin de voir si l'avantage s'est concrétisé ou non.

Toutes les données sont issues d'Eurostat (http://ec.europa.eu/eurostat/fr).

*Les pays européens non-membres de la zone euro sont : la Bulgarie, la République Tchèque, le Danemark, la Croatie, la Hongrie, la Pologne, la Roumanie, la Suède et le Royaume-Uni.

Stabilité des prix

Argument : après les épisodes d'inflation très élevée des années 70 et 80 (conséquences des 2 chocs pétroliers), la stabilité des prix est devenue une priorité. Elle permet en effet de protéger le pouvoir d'achat et la valeur de l'épargne des citoyens et donc d'évoluer dans un environnement économique plus certain. C'est l'objectif principal de la Banque Centrale Européenne (BCE).



Constat : avantage à moitié vérifié. Sur la période précédant la crise des subrimes (2008), les taux d'inflation ont été très stables en zone euro (écart-type : 4 pb), mais ils l'ont aussi été pour les autres pays. Cependant, après la crise, la variation est beaucoup plus forte (écart-type : 116 pb).

Taux d'intérêt inférieurs

Argument : comme les taux d'intérêt dépendent en partie de l'inflation et de l'inflation anticipée, si cette dernière est contrôlée et maintenue à un niveau faible (pour rappel, la BCE a un objectif d'inflation de 2 % par an), les taux d'intérêt seront bas.






Constat : avantage vérifié. Les taux d'intérêts à court terme et à long terme dans la zone euro sont incontestablement plus faibles.

Davantage d'investissement et de consommation

Argument : les taux d'intérêt faibles encouragent les secteurs privés (entreprises + ménages) et publics à emprunter pour investir et consommer.







Constat : avantage non vérifié. Il n'y a eu ni plus d'investissement, ni plus de consommation. On note même depuis 2011 un léger avantage pour les pays non membres de la zone euro.

Une croissance élevée

Argument : l'investissement et la consommation encouragés par le crédit via les taux d'intérêt bas sont des moteurs de croissance (en économie on dit qu'ils sont des composants du PIB).




Constat : avantage non vérifié. En dehors de la période de la crise des subprimes (2008 - 2010) où les taux de croissance étaient identiques entre les 2 groupes de pays, les pays non membres de la zone euro ont connu des taux de croissance plus élevés. La moyenne annuelle des taux de croissance entre 2003 et 2014 a été dans la zone euro de 0,83 % contre 1,10 % pour l'ensemble de l'Union Européenne.

Moins de chômage

Argument : un taux de croissance élevé est généralement synonyme d'une baisse du chômage (pour plus d'informations, voir la loi d'Okun).




Constat : avantage non vérifié. On l'a vu, la croissance n'a pas été aussi élevée que prévu en zone euro et a même été inférieure à celle des autres pays. L'évolution du taux de chômage a donc été plus favorable dans les pays n'appartenant pas à la zone euro (à l'exception de la période 2009 - 2011).

Dettes publiques maîtrisées

Argument : comme l'entrée dans la zone euro est (normalement) conditionnée au respect des critères de Maastricht qui imposent notamment un déficit public et une dette publique respectivement inférieurs à 3 % et à 60 % du PIB, les Etats qui adoptent l'euro ne devraient pas s'endetter outrancièrement. Par conséquent, le risque de défaut souverain et d'éclatement de la zone euro est nul.









Constat : avantage à moitié vérifié. Les critères de convergence n'ont pas permis de limiter l'endettement des Etats. Toutefois, l'accroissement des dettes publiques a été plus contrôlé dans la zone euro, surtout pendant la crise de 2008. Cela peut néanmoins s'expliquer par un niveau d'endettement initialement plus faible chez les autres pays, d'où une plus grande souplesse budgétaire.

Commerce intra-communautaire renforcé

Argument : la disparition des risques de change permise par la monnaie unique doit encourager le commerce entre les pays de la zone euro et au final augmenter le poids de cette dernière dans le commerce intra-Union Européenne.







Constat : avantage non vérifié. En dehors de la période de la crise des subprimes, les exportations comme les importations intra-communautaires ont connu des évolutions plus favorables pour les pays de l'UE n'ayant pas l'euro.

Résistance accrue aux chocs externes

Argument : la taille et la force de la zone euro améliorent sa capacité à absorber des chocs externes sans pertes d'emploi massives et sans récession grave.

Constat : avantage vérifié. On l'a vu sur tous les indicateurs macroéconomiques précédemment étudiés, la zone euro a globalement mieux résisté au choc externe qu'a été la crise des subprimes.

Pour résumer, la monnaie unique n'a pas aujourd'hui tenu toutes ses promesses et les pays de l'Union Européenne qui n'ont pas adopté l'euro sont en moyenne plus performants. Sur les indicateurs macroéconomiques majeurs, à savoir la croissance du PIB (1), le chômage (2), l'inflation (3) et la dette publique (4), la zone euro est soit clairement moins performante que les autres ((1) et (2)), soit autant ((3) et (4)). Cependant, on remarque que la zone euro a été économiquement plus efficace (ou dit autrement, a obtenu des résultats moins pires) lors du principal choc externe qu'elle a connu, à savoir la crise des subprimes.