Chu de che / Je suis d'ici / Sono di qui / Ich bin von hier ! Notre liberté ne nous a pas été donnée, mais combattue et priée par nos ancêtres plus d'une fois! Aujourd'hui, comme autrefois, notre existence en tant que peuple libre dépend du fait que nous nous battions pour cela chaque jour. Restez inébranlable et soyez un gardien de la patrie pour que nous puissions remettre une Suisse libre telle que nous la connaissions à la génération suivante. Nous n'avons qu'une seule patrie!

lundi 6 juillet 2015

Big brother is watching you !




Des mannequins intelligents qui espionnent dans les magasins… Avec la crise et le ralentissement de la croissance, dans l’industrie du prêt-à-porter comme ailleurs, certains grands groupes semblent prêts à tout pour contrebalancer la morosité économique qui laisse vide le portefeuille de leurs clients.




Almax SpA, la société italienne leader au niveau mondial dans la production de bustes, mannequins et articles d’étalage, l’a très bien compris et a rebondi sur l’aubaine. Depuis 2010, l’entreprise propose aux grandes marques sur le marché de doter leurs points de vente de mannequins pourvus de caméras cachées (Eye See), afin de leur permettre d’étudier les comportements de consommation de leurs clients les plus difficiles. Que dire de plus : Big Brother is watching us !

Eye See : Une technologie intrusive. Développée en collaboration avec l’Ecole Polytechnique de Milan. Cette technologie permet d’équiper les mannequins de caméras dotées d’un système de reconnaissance faciale et placées dans les yeux. C’est un système similaire à celui qui est utilisé dans les aéroports pour identifier les criminels.

Comme le précise le CEO d’Almax SpA, Max Catanese, « ce logiciel sophistiqué permet d’analyser les caractéristiques somatiques des personnes qui passent devant et apporte des données statistiques et contextuelles utiles à l’élaboration de futures stratégies de marketing, comme par exemple, le nombre de personnes qui s’arrêtent devant la vitrine durant une journée et combien par créneaux horaires, le sexe, l’âge et l’origine ethnique.». C’est ainsi qu’il a été constaté que de manière générale, les deux premiers jours des soldes, les hommes passaient étonnament plus de temps devant une vitrine que les femmes.

Déjà bien implantés aux Etats-Unis, ces mannequins espions débarqueraient à présent dans nos boutiques préférées, pour un prix unitaire de 4.000 EUR. Un investissement non négligeable… Le groupe Benetton, qui n’a pas encore réagi officiellement à cette rumeur, aurait déjà réalisé l’investissement pour équiper ses devantures. C’est aussi le cas de 4 autres grands groupes dans le prêt-à-porter. Leur nom n’a cependant pas été dévoilé par Almax SpA pour des raisons de confidentialité. Une confidentialité remise en question par les militants de la protection des données à caractère personnel. Pour eux, ce système de reconnaissance faciale porterait atteinte à la vie privée des individus.

Des consommateurs violés. En droit belge, comme dans la plupart des législations européennes, la surveillance des individus au moyen d’appareils destinés à capter leur image, puis éventuellement à la fixer et à l’enregistrer, met en cause leur vie privée. Aux confins de la légalité, Almax SpA nuance toutefois sur le fait que son système n’est pas invasif puisque la caméra à l’intérieur du mannequin est «aveugle», c’est-à-dire que les données biométriques personnelles analysées ne sont ni enregistrées ni sauvegardées. Les groupes de protection des données à caractère personnel se montrent néanmoins préoccupés par le déploiement de cette technologie et estiment que la mise en place d’un système de surveillance secret par les magasins, même sous le couvert d’améliorer un service à la clientèle, est complètement disproportionné par rapport au but recherché.

Si la plupart des boutiques sont aujourd’hui effectivement équipées de systèmes de vidéosurveillance, c’est essentiellement pour parer aux vols à l’étalage et autres délits.

Caméras, puces, scannings, scanners corporels, tous les jours, des informations sont collectées, enregistrées, analysées, fichées, échangées, vendues, parfois à notre insu, souvent sans notre consentement et surtout sans aucune possibilité de contrôle. La Ligue des Droits de l’homme a donc décidé de décerner chaque année, dans une quinzaine de pays, des Big Brother Awards aux institutions, entreprises ou personnes s’étant distinguées par leur mépris du droit fondamental à la vie privée ou par leur promotion commerciale de la surveillance et du contrôle des individus. Une remise de prix symbolique mais qui entend garder les consciences en éveil en récompensant « le meilleur du pire » en matière de vie privée.

Pour la Belgique en particulier, le jury a tout de même remis, en 2012, 3 Award à 3 acteurs répartis en 3 catégories dont, pour la catégorie Entreprises, la carte MoBIB de la STIB qui remporte un Award pour les questions en matière de sécurité des données personnelles et d’anonymat que pose la puce qui y est intégrée. Et en 2014, c’est le procureur général, Yves Liégeois, qui s’est vu décerner un award pour sa proposition de collecte d’ADN sur des nourrissons.

Mes données personnelles, ma propriété. Depuis 1992, une loi assure, sur notre territoire, la protection des individus face à l’utilisation de leurs données personnelles. Cette loi instaure un devoir de transparence et de loyauté : il faut prévenir les personnes quand on traite des informations sur elles, annoncer qui l’on est et pourquoi on traite ces informations. La collecte de données, encadrée par la Commission Vie privée, doit donc répondre à un certain nombre de critères bien précis. Un commerçant, par exemple, peut demander l’adresse mail d’un client pour lui envoyer une action promotionnelle mais il n’est pas nécessaire pour une école de demander les revenus des parents lorsque ceux-ci viennent y inscrire leur enfant. Si protéger ses données personnelles reste donc un droit fondamental, avec le développement spectaculaire des technologies, l’individu semble toutefois perdre quelque peu la maîtrise de l’information qui le concerne et les risques d’abus ou de situations à la frontière du légal qui se multiplient. Alors, si vous deviez vous sentir observés lorsque dorénavant vous « shopperez », n’en soyez pas outre mesure étonnés.

Derrière leurs visages en polystyrène presque parfaits, les mannequins de vos marques préférées vous observent peut-être …

Vittoria Trevisana