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Marine Le Pen, lors d'un débat à Paris, le 15 novembre 2016.
Marine Le Pen veut sonner "la fin de la récréation". Ce jeudi 8 décembre, invitée de l'institut de sondage BVA pour un de ses petits-déjeuners "Pop 2017", la présidente du Front national a prôné la fin de la gratuité à l'école pour les enfants étrangers nés de parents en situation irrégulière.
"Je considère que la solidarité nationale doit s'exprimer à l'égard des Français. Je n'ai rien contre les étrangers, mais je leur dis: 'Si vous venez dans notre pays, ne vous attendez pas à ce que vous soyez pris en charge, à être soignés, que vos enfants soient éduqués gratuitement, maintenant c'est terminé'", a-t-elle lancé.
La candidate d'extrême droite n'avait pas dit autre chose lors de son voyage à la Réunion le 29 novembre. "L'école est obligée de prendre en charge une immigration de plus en plus importante", expliquait-elle, assurant vouloir "appliquer la priorité nationale au système scolaire". Cette proposition ne figurait pas dans le volet "école" de son programme de 2012.
"Plus de scolarisation des clandestins. Et contribution au système scolaire de la part des étrangers sauf si ils cotisent en situation légale", a-t-elle précisé à l'AFP.
Selon les chiffres du ministère de l'Éducation nationale, la France dépense 6917 euros par an en moyenne par élève à l'école primaire. Un niveau de dépenses qui classe la France au second rang des nations européennes, derrière l'Allemagne (7579 euros).
Les familles étrangères souhaitant scolariser leurs enfants devraient-ils s'acquitter de ce montant? La présidente du FN ne le précise pas mais évoque une "contribution". Quoi qu'il en soit, cette distinction entre élèves étrangers et français devrait se heurter à des problèmes d'inconstitutionnalité.
Tous les enfants, quelle que soit leur situation, doivent pouvoir accéder au service public de l'enseignement. Un principe d'égalité affirmé dans le préambule de la Constitution de 1946 repris par le préambule de la Constitution de 1958 : "La nation garantit l'égal accès de l'enfant et de l'adulte à l'instruction, à la formation professionnelle et à la culture. L'organisation de l'enseignement public gratuit et laïque à tous les degrés est un devoir de l'État".
La nationalité n'est pas un critère, d'où la scolarisation d'enfants étrangers. Par ailleurs, selon le code de l'Éducation nationale, "l'instruction est obligatoire pour les enfants des deux sexes, français et étrangers, entre six et seize ans". La circulaire ministérielle du 6 juin 1991 rappelle également "qu'aucune discrimination ne peut être faite pour l'admission dans les classes maternelles d'enfants étrangers, conformément aux principes généraux du droit".
La ministre de l'Éducation, Najat Vallaud Belkacem, n'a pas mis très longtemps à réagir. Dans un long texte publié sur son site personnel, elle rappelle "que c'est l'honneur de la République française de garantir aux enfants, à tous les enfants, le droit à l'éducation, c'est à dire le droit à un avenir". Condamnant "avec la plus grande force" les propos de la présidente du FN, Najat Vallaud-Belkacem pointe "sa méconnaissance de tous les principes républicains et de toutes les conventions internationales dont la France est signataire".
"Cette déclaration vient abîmer l'image de notre pays et rappelle à tous ceux qui semblaient l'oublier que Mme Le Pen refuse de s'inscrire dans le cadre républicain qui forge l'histoire et la force de notre Nation", renchérit-elle.
Romain Herreros