L'initiative sur laquelle la Suisse se prononcera en juin serait pilotée par des militants allemands et anglais qui voudraient «tester leur théorie»
La Suisse votera le 10 juin sur l'initiative «Pour une monnaie à l'abri des crises: émission monétaire uniquement par la Banque nationale!», dite aussi «monnaie pleine». Un texte qui exige que seule la BNS soit compétente pour la création monétaire. L'argent de tous les comptes courants serait ainsi entièrement sécurisé. L'Etat n'aurait plus à sauver des banques à coups de milliards versés par les contribuables pour assurer le service des paiements.
Liens étroits des initiants
Mais, selon la Basler Zeitung - un journal dont Christoph Blocher est copropriétaire - jamais une initiative n'a autant été téléguidée par l'étranger. En cause, les liens étroits entre les initiants suisses et les organisations partenaires étrangères.
Pour rappel, le texte a été lancé par l'association Modernisation Monétaire (MoMo) basée à Wettingen. Or celle-ci, qui lancera officiellement sa campagne jeudi devant la presse à Berne, est membre du mouvement international pour une réforme monétaire (IMMR), un mouvement actif dans de nombreux pays et qui souhaite démocratiser l'argent, pour reprendre leur slogan figurant sur leur site internet.
Le MoMo lui-même affirme n'être lié à aucun parti politique. «En collaboration avec un conseil scientifique, il s'engage à mettre l'économie financière au service de l'économie réelle, et le système monétaire au service des êtres humains», écrit-il sur son site internet.
La Basler Zeitung, estime elle que l'association veut surtout lancer un débat public en Suisse sur la réforme monétaire complète prônée par Joseph Huber, un économiste allemand qui serait à la base du concept de «monnaie pleine». Avant même le vote, écrit le journal, Huber a fait des apparitions à l'EPFZ pour promouvoir ses idées. «Aujourd'hui, il utilise la démocratie directe pour faire de la Suisse un terrain de jeu pour un nouveau système monétaire», critique le quotidien bâlois.
Soutien financier étranger
Le journal souligne que jamais encore de l'argent n'avait été récolté aussi intensivement à l'étranger pour une campagne de vote en Suisse. Il explique que le pendant allemand de MoMo, «Monetative», appelle activement sur son site ses membres à apporter un soutien financier à l'initiative. Il incite aussi ses sympathisants à venir aider leurs homologues suisses à distribuer des dépliants en avril et mai ainsi qu'à écrire continuellement des commentaires en ligne.
La coordinatrice de l'action serait une Allemande, Barbara Ziep. Responsable des finances chez Monetative, elle serait aussi l'une des trésorières au sein de MoMo. Ce qui montre, selon la Baz, que l'initiative «monnaie pleine» est «contrôlée et développée à partir de l'Allemagne».
Une autre politicienne étrangère figurerait au sein des instances de MoMo. Il s'agit de la Verte britannique Emma Dawnay, qui s'est déjà présentée à la Chambre des communes. Dans un interview sur YouTube, elle aurait déclaré qu'il serait très intéressant pour elle de voir si le système fonctionne, quelles réactions il pourrait provoquer et quelles en seraient pratiquement les conséquences économiques. Le site web «Positive Money», une association de partisans de l'idée monnaie pleine en Grande-Bretagne, a également lancé un appel aux dons pour l'équipe de campagne suisse.
Leur pendant espagnol, Dinero Positivo, annonce lui aussi sur son site le vote suisse. Comme ses homologues allemands et anglais, il invite ses membres à soutenir financièrement les Suisses. «C'est une occasion historique, écrit-il, car, pour la première fois, un peuple peut décider par un vote si l'argent est produit par des banques privées ou exclusivement par la Banque nationale. En cas de bon résultat, un "débat décisif" pourrait alors être lancé dans toute l'Europe, voire dans le monde entier,» argumente-t-il.