Au début du XXe siècle, Schlitzie était un monstre de foire connu à travers toute l’Amérique. Parfois surnommé « Le dernier des Aztèques » ou la « Femme singe », il possédait les facultés mentales d’un enfant de trois ans et ne pouvait s’exprimer que par des phrases courtes
Selon la plupart des sources, Schlitzie (dont on ne connait pas le véritable nom) serait né dans le quartier du Bronx, à New York, en 1901 et souffrait de microcéphalie, une malformation congénitale rare caractérisée par une croissance anormalement faible du crâne et du cerveau. Et si ces difformités allaient lui permettre connaître la gloire, elles allaient également le condamner à une vie de monstre de foire.
Ces malformations étaient extrêmement handicapantes sur le plan physique et mental, et même à l’âge adulte, Schlitzie possédait les facultés mentales d’un enfant de trois ans et ne parvenait à s’exprimer que par des phrases courtes. Mais cela n’allait pas empêcher certains promoteurs véreux de tirer profit de ses difformités physiques en faisant de lui la « star » de leurs spectacles de monstres.
Au début du XXe siècle, Schlitzie gagnait sa vie en se produisant pour le compte des plus grands cirques américains, comme le Bobritsch International Circus, le Clyde Beatty Circus ou le Barnum and Bailey Circus. Et bien qu’il ait été présenté comme la « femme à tête d’épingle » durant des décennies, il était né homme.
Ainsi, Schlitzie se produisait régulièrement en robe, et ses promoteurs justifiaient cela en invoquant des raisons purement pratiques (comme celui-ci souffrait d’incontinence, il était soi-disant plus aisé pour eux de changer sa couche).
Schlitzie dans le rôle du « Dernier des Aztèques »
Si Schlitzie faisait déjà parler de lui à travers tout le pays au début du siècle, sa popularité allait grimper en flèche en 1932 avec la sortie du film Freaks (ou la Monstrueuse Parade en France), évoquant une histoire d’amour et de trahison se déroulant dans le monde des spectacles forains et mettant en avant des « monstres » bien réels.
Largement critiqué pour ses scènes d’horreur grotesques impliquant des personnes souffrant de graves difformités physiques (l’une d’entre elles montrait notamment plusieurs monstres en train de castrer un homme et fut par la suite retirée par la MGM), le film était descendu par la presse et interdit de diffusion dans plusieurs villes du pays.
Schlitzie, qui occupait un rôle important dans le film et dont l’exubérance enfantine irradiait toutes les scènes dans lesquelles il apparaissait, acquérait au cours des mois suivants une certaine notoriété, mais continuait à tourner à travers le pays en tant que monstre de foire.
Schlitzie allait passer trois longues années dans les couloirs froids et austères de l’établissement, et bien qu’il n’ait jamais eu de véritable famille ou de maison, le monde du cirque et des spectacles itinérants lui manquait.
Par pur hasard, un avaleur de sabre nommé Bill Unks, qui travaillait pour le compte du Dobritch International Circus, le reconnaissait lors d’un spectacle organisé au sein de l’établissement psychiatrique et entamait des démarches pour devenir son tuteur légal. Ainsi, après de longues années d’enfermement, Schlitzie retrouvait enfin la vie itinérante qui avait contribué à changer son existence.
Schlitzie dans le film Freaks (La Parade des Monstres) en 1932
Quelques années plus tard, il prenait officiellement sa retraite et s’installait à Los Angeles, ce qui ne l’empêchait pas pour autant de continuer à divertir les passants (on pouvait notamment le voir nourrir pigeons et canards dans les parcs de la ville). Et bien qu’il ait passé sa vie sur les routes, participé à des centaines de spectacles et diverti des milliers de personnes, Schlitzie vivait dans un relatif dénuement jusqu’à sa mort en 1971, des suites d’une pneumonie.
Yann Contegat