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Christian Constantin est un pragmatique, un leader aimant le pouvoir et qui préfère être numéro 1 que numéro 2. Keystone
Coach en préparation mentale, notamment versé dans le sport, Romain Ducret brosse le profil psychologique de Christian Constantin, homme public.
Il fait partie des quelques personnalités romandes qui ne laissent personne indifférent. Admiratif ou critique, tout le monde a un avis sur Christian Constantin. Omniprésent dans les médias pour défendre la cause de «son» FC Sion dans son combat contre les instances dirigeantes du football, le Valaisan ne quitte jamais la ligne de front. Dans la posture de l’insoumis, il apparaît pétri de certitudes, que les événements lui soient favorables ou non.
Pour décoder le personnage Constantin, nous avons demandé à Romain Ducret (formateur et coach en préparation mentale) de nous en dire un peu plus sur le profil psychologique du président du FC Sion. Le co-directeur de Global Sport Development à Villars-sur-Glâne (avec son frère Serge) se prête à l’exercice en précisant qu’il ne connaît pas personnellement Christian Constantin et que ses observations ne se basent donc que sur le comportement de l’homme public.
Personnalité marquée
Romain Ducret: «Je me souviens d’un prof, volontiers provocateur, qui nous disait que la personnalité, c’est mécanique et automatique. Quand on connaît son noyau de personnalité, on sait par avance comment un individu va agir dans les grandes lignes. En pratique, on est dans des domaines abstraits et il reste toujours des zones d’ombre. Mais on arrive à savoir globalement comment la personne communique, quelle est sa propension à s’affirmer, son degré d’empathie, etc... A la base, la personnalité humaine est positive. Après, chaque type de personnalité a des «plus» et des «moins». Si on se prête à l’exercice pour M. Constantin, je dirais que c’est une personnalité dite pragmatique. Et que dans le cas du président du FC Sion, cette personnalité est fortement marquée.»
Les «plus»
«A quoi correspond ce type de personnalité? Les «plus» d’abord. Les pragmatiques sont des gens qui sont exigeants envers eux-mêmes et envers les autres. Qui sont déterminés, qui vont tout faire pour atteindre leurs objectifs, et qui ont la volonté pour le faire. Ce sont des leaders, des gens qui aiment le pouvoir, qui préfèrent être numéro 1 que numéro 2. Ils aiment être en compétition. Ils ont volontiers une appro-che autoritaire des choses, donc moins consensuelle. Enfin, ce sont des gens qui ont des ego plus développés que la moyenne. Voilà pour les points que je considère comme positifs. De manière générale, la société a besoin de ce type de personnalités pour faire avancer les choses.»
Les «moins»
«Les points limitants des pragmatiques sont en lien direct avec leurs atouts. Ce sont des personnalités qui peuvent écraser les autres, de par leur ego. Ce sont des personnes qui peuvent avoir une approche parfois trop autoritaire. Leur degré d’empathie est peu élevé. Ce ne sont pas nécessairement les gens qui écouteront l’avis des autres: je sais ce que je dois faire et je suis convaincu que j’ai raison. Leur capacité de remise en question est plus faible que la moyenne. Par rapport à l’image que renvoie Christian Constantin dans les médias, on retrouve bien le personnage.»
Dans la peau du «petit»?
Grand consommateur d’entraîneurs, ou pourfendeur de l’arbitrage suisse, Christian Constantin avait jusque-là adopté la posture du dominant. Dans l’«affaire FC Sion», il cultive volontiers l’image du «petit» qui subit le diktat des puissants. Romain Ducret ne croit pas pour autant que Christian Constantin se soit changé en Winkelried. «Attention! Dans son conflit avec les instances dirigeantes du football, il ne se considère pas comme le petit. Il veut gagner. Après, c’est une question de stratégie. Se mettre dans la peau du petit qui va chercher les failles du grand, ça lui donne une aura supplémentaire. Je ne suis pas juriste, je ne vais donc pas me prononcer sur le fond de l’affaire. Mais trouver des failles chez l’adversaire, c’est un trait de personnalité qui est d’abord positif.»
Une part de jeu?
Dans ses interventions médiatiques, Christian Constantin ne glisse jamais la moindre nuance dans son propos. Romain Ducret le concède: «Tel qu’il se montre en qualité de président du FC Sion, il ne semble effectivement pas douter. Est-ce qu’il est comme ça dans un autre cadre? Je ne peux évidemment rien affirmer. Mais je ne pense pas qu’il soit constamment en train de jouer un rôle. Les pragmatiques ont un degré de confiance assez élevé: je suis convaincu que c’est comme ça, alors c’est comme ça. Et les autres appliquent. On se souvient qu’à fin 2008, M. Constantin était en conflit avec les ultras du FC Sion. Il avait menacé de fermer la tribune nord. Il l’a fait. En tenant sa position de départ.»
Le rapport à l’image
Christian Constantin se dit indifférent à son image. En phase avec sa personnalité de pragmatique? Romain Ducret répond par l’affirmative. «Si je ne plais pas à certains, ce n’est pas mon problème. C’est un type de personnalité qui a un fort potentiel de se mettre du monde à dos, puisque ces gens vont volontiers au bout des conflits. Ça les gêne moins que la moyenne. J’irais jusqu’à dire qu’ils se nourrissent des conflits.»
La finalité
«Les pragmatiques sont focalisés sur l’action –il faut que ça avance– et sur leurs certitudes intérieures nourries par leur ego. Souvent inconsciemment, leur objectif principal, c’est la réussite personnelle, le fait de relever des défis. C’est leur première source de motivation. Dans le cas de Christian Constantin, ça signifie que quoi qu’il arrive, il ne lâchera rien dans l’«affaire FC Sion». Ce serait contre nature.» I
Une question de dosage
«L’être humain juge l’autre par rapport à son type de personnalité. Un émotif qui dit à un analytique qu’il a acheté une maison en trois heures passera pour un aventurier. Alors qu’il n’a pas nécessairement fait une mauvaise affaire. La personnalité, c’est un sujet qui me captive. Et en tant que passionné de sport, celles des sportifs m’intéressent beaucoup», avance Romain Ducret. «En théorie, on fait ressortir que la personnalité humaine est dynamique. C’est une notion très simple: le comportement d’un individu sera différent selon les situations, et la personnalité évolue dans le temps. On peut être empathique dans telle ou telle situation, alors qu’au fond, on n’est pas une personne empathique.»
Le codirecteur de Global Sport Development évoque également l’intensité du type de personnalité. «On pourrait bien avoir un deuxième Christian Constantin, qui aurait également le profil d’un pragmatique, mais avec des caractéristiques moins marquées. Par exemple, l’ancien président de Neuchâtel Xamax Sylvio Bernasconi. Les traits de personnalité de l’un et de l’autre sont assez semblables. Mais leur comportement est différent parce que l’intensité de leur personnalité n’est pas la même. Dans la vie, tout est souvent une question de dosage.»
Vincent Chobaz
La Liberté