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mercredi 27 février 2013

Tout ce qu'Yvan Perrin ne dit pas


Le candidat UDC au Conseil d’Etat neuchâtelois sort d’une grave rechute, où il s’est assommé d’alcool et de médicaments.

Yvan Perrin, 46 ans, UDC, candidat au Conseil d’Etat neuchâtelois, conseiller national et directeur adjoint de la société NSA Sécurité.


L’histoire de la candidature de l’UDC Yvan Perrin au Conseil d’Etat neuchâtelois est un drame. Un drame humain d’abord, mais dont les conséquences sont aussi politiques. C’est ce que révèle notre enquête. 

Que s’est-il donc passé en cette mi-décembre de l’an dernier, avant qu’une ambulance ne vienne s’arrêter au domicile d’Yvan Perrin, à La Côte-aux-Fées, pour l’emmener d’urgence à l’hôpital? Dans ses interventions publiques, le candidat évoque une crise d’angoisse, lui ayant fait craindre une rechute du burn-out dont il dit avoir souffert en 2010. «De l’auto-allumage, explique-t-il aux médias, dans un exercice de transparence peu habituel. J’ai paniqué et j’ai voulu aller immédiatement contrôler mon état de santé à l’hôpital.»

Une grave rechute

Et de rassurer ses électeurs en déclarant que les tests n’ont révélé «aucune pathologie particulière». L’incident, dès lors sans conséquences sur ses activités présentes ou futures, ne mériterait plus d’être publiquement exposé.

Le problème, c’est que cette version ne correspond nullement à la réalité. En fait, le politicien neuchâtelois a vécu une très grave rechute, qui l’a conduit aux soins intensifs. Cette crise personnelle, qui débute le 16 décembre, s’inscrit dans un contexte plus large. Yvan Perrin souffre depuis plusieurs années d’une sérieuse dépression qui lui pourrit la vie et le rend par instants terriblement vulnérable. Dans ces moments de détresse, Yvan Perrin s’enferme et disparaît, négligeant toute autre occupation. C’est une crise de ce type qui débute le 16 décembre.

Ce jour-là, le conseiller national va encore acheter du pain avant de se cloîtrer dans la maison héritée de ses parents à La Côte-aux-Fées. On ne le reverra plus en public pendant plusieurs jours.

Le lendemain 17 décembre, la première alarme vient de sa cousine, qui est aussi la secrétaire administrative de l’UDC neuchâteloise. Elle apprend que le député ne s’est rendu à aucun de ses rendez-vous et comprend aussitôt. Elle file chez son cousin. Il lui dit être fatigué et vouloir seulement dormir. Le 18 décembre, revenant aux nouvelles, elle le trouve visiblement sous l’emprise de l’alcool et confus. Elle lui propose d’appeler son médecin traitant. Il refuse.

Le 19, de plus en plus inquiète de ne pas le voir réapparaître, elle reprend à la mi-journée le chemin du domicile d’Yvan Perrin, au centre du village. Ce qu’elle découvre l’affole. Le pain acheté quatre jours plus tôt n’a même pas été déballé. Et, autour du lit où est écroulé son cousin, des bouteilles vides d’alcool fort jonchent le sol, au milieu d’emballages de médicaments puissants.

Le propriétaire des lieux est conscient mais très agité, s’exprimant de manière inintelligible sans paraître comprendre les questions qu’on lui adresse. La cousine appelle alors les secours.

Un dangereux cocktail

A leur arrivée, les ambulanciers notent la présence d’emballages entamés de deux anxiolytiques, de tablettes traitant la dépression aiguë et d’un neuroleptique. A l’hôpital, on constate que plusieurs heures après les faits, le taux d’alcool est encore de 3‰. Souffrant également d’une déshydratation aiguë, le patient est placé aux soins intensifs.

Le lendemain, de nouveau en état de répondre, le patient révélera avoir bu deux à trois litres d’alcool fort et avalé au moins une variété des médicaments retrouvés autour de son lit. Il explique son état par «un important stress dû aux activités professionnelles».

A si haute dose, ce mélange d’alcool et de médicaments aurait pu mettre en danger la vie du conseiller national. Avant de le laisser sortir, les médecins lui enjoignent de consulter un psychiatre. Ce qu’il fera rapidement.

Interrogé à deux reprises sur cette version des événements par «Le Matin», Yvan Perrin la réfute et se contente d’évoquer une «hypersensibilité» au risque de rechute dû à ce qu’il appelle son burn-out. Face à d’autres journalistes, il avoue une «faiblesse psychique» pour laquelle il consulte. Pour le reste, il affirme vouloir «passer à autre chose» et revenir à sa campagne électorale.

Soigneusement recoupés et étayés, les faits présentés ne sont pourtant pas sans conséquences. Un candidat a droit à sa vie privée, cela va sans dire. Peut-il pour autant cacher à ses électeurs une fracture personnelle profonde qui marque sa vie et son engagement actuel, alors même que la charge briguée est indiscutablement plus lourde et plus anxiogène? Peut-il surtout édulcorer sa version auprès de son parti au risque de voir ce dernier mettre son candidat en danger sans même le savoir?

Selon plusieurs cadres de l’UDC, Yvan Perrin n’a pas informé le parti sur la réalité de sa rechute. Mais au sein de la section neuchâteloise, ils sont tout de même quelques-uns à connaître à peu près les troubles et les failles du candidat.

Un médecin UDC a tout tenté

A l’automne dernier, après une nouvelle «disparition» inopinée d’Yvan Perrin, son chef de campagne, Walter Willener, avait confié au «Matin» se faire le plus grand souci au sujet de son poulain et de ses craquages réguliers. La cousine d’Yvan Perrin, elle, refuse de s’exprimer publiquement. A-t-elle au moins dit tout ce qu’elle sait au parti? «Je ne mélange pas le professionnel et le privé», tranche-t-elle.

Avant d’introniser Yvan Perrin comme candidat unique à fin novembre dernier, des discussions aussi gênées que parfois tendues ont encore eu lieu au sein de la direction du parti. Député UDC et médecin, Blaise Courvoisier a été le premier à confronter le candidat potentiel aux risques qu’il prenait pour lui-même et pour le parti. Il a été question de suivi médical bancal, de mauvaise gestion de la prise d’alcool fort avec des médicaments, ainsi que des absences brutales d’Yvan Perrin.

Mais, finalement, ces profonds doutes ont été balayés par l’assurance donnée par le candidat qu’il savait se gérer. Et, surtout, l’UDC a succombé à la tentation tellement forte de le faire accéder au gouvernement. Cette candidature est conforme à la stratégie nationale d’offensive sur les gouvernements cantonaux et une chance historique d’y parvenir semblait se présenter à Neuchâtel. Cet aveuglement a heurté le député Courvoisier, qui a décidé d’arrêter la politique au terme de cette législature.

En résumé, ils auront été quelques-uns à vouloir sauver Yvan Perrin en tentant de l’arrêter. D’autres espéraient au contraire l’aider en lui faisant passer l’épaule. Beaucoup ne se doutaient de rien. C’était avant la «rechute» de fin 2012. Cette dernière a plongé définitivement l’UDC et son candidat dans un psychodrame dont ils ne savent plus comment sortir. 

L’UDC n’a pas osé les vraies questions 

La vraie nature du dossier médical du candidat Perrin n’a pas été abordée à l’interne de l’UDC, y compris lors de l’ultime séance de crise vendredi dernier. «Nous n’avions pas à aborder des données médicales que des journalistes nous ont soumises, mais que nous n’avons jamais vues», confirme Claude-Alain Voiblet, vice-président national de l’UDC chargé de coacher les Neuchâtelois.

Des UDC locaux qui ont complètement perdu les pédales ces dix derniers jours. Les deux cadres chargés de la campagne électorale sont hors service depuis le week-end dernier. Président du groupe UDC au Parlement neuchâtelois, Raymond Clottu a démissionné avec effet immédiat vendredi dernier. Il est fâché de ne pas avoir été suivi dans son sage conseil: «Yvan ne va visiblement pas bien. J’étais d’avis d’annuler sa candidature, afin d’éviter de l’envoyer au casse-pipe.»

Chef de campagne, Walter Willener n’a pas démissionné, mais c’est tout comme. Depuis lundi, il est au Salon de l’agriculture à Paris et ne répond plus aux appels. Il a prévu d’y rester toute cette semaine!

Jeudi dernier, ébranlé par les informations que lui soumettait «Le Matin», il avait pourtant indiqué être déterminé à  faire retirer la candidature d’Yvan Perrin, afin d’éliminer tout risque «pour le bien de l’homme, du canton et du parti».

Mais rien de tout cela n’a été retenu. Samedi dernier, l’UDC annonçait avoir «pesé les chances et les risques» de la candidature Perrin et décidé de la soutenir plus fort que jamais. Une décision prise sans oser aborder les vraies questions.

De fait, l’UDC et Yvan Perrin se sont sentis portés par une vague montante de sympathie dans l’opinion publique, le candidat étant salué pour son «honnêteté» et sa «franchise» à parler de ses faiblesses intimes. La machine médiatique s’est si bien emballée que même des politiciens d’autres partis se mettent à défendre Yvan Perrin. «Autant élire un malade qui se connaît qu’un malade qui s’ignore», a par exemple déclaré le libéral-radical Christian Lüscher, hier dans 24 heures.

Dernier répondant à l’UDC, Claude-Alain Voiblet cache de plus en plus mal son malaise et son inquiétude que tout cela finisse mal. Hier, il s’est contenté de déclarer que «la section neuchâteloise est autonome et l’UDC Suisse se doit de respecter son choix et celui de son candidat de se maintenir en lice». Une manière d’avouer son impuissance.

Ludovic Rocchi

Yvan Perrin, le devoir de vérité 

Au fond, on préférerait ne pas savoir. On aurait envie d’enfoncer sa tête bien profondément dans le trou de l’indifférence et attendre que ça passe. Mais les faits sont là. Exposés au vu et au su de tous: Yvan Perrin est malade. Le candidat au Conseil d’Etat neuchâtelois évoque «une faiblesse psychique», «un problème à gérer les événements». Un mal, de son propre aveu, qui le bouffe.

Pourtant, Yvan Perrin persiste. Il veut aller coûte que coûte au Château. «Au moins, assure-t-il, il n’y aura pas eu de tromperie sur la marchandise.» Les électeurs choisiront en toute connaissance de cause.

Vraiment? Après avoir longuement recoupé et vérifié les informations en notre possession, nous ne pouvons que constater que le mal qui ronge le candidat Perrin est bien plus profond que ce qu’il prétend. Si nous décidons aujourd’hui de publier cette enquête, c’est parce que nous estimons que les électeurs sont en droit de savoir ce qu’il y a vraiment derrière l’étiquette Perrin, pour reprendre sa propre expression. Depuis des années, Yvan Perrin sème des parts de son intimité au gré des entretiens accordés aux médias. L’obésité, les problèmes de peau, la timidité, les angoisses, son burn-out, ses absences inexpliquées.

Mais cette transparence n’est que partielle. Il n’a jamais dit la profondeur de son mal. En est-il seulement conscient? Les médicaments. L’alcool. Les bitures d’une rare intensité. Il est temps de relever la tête et de regarder la vérité bien en face. D’abord pour lui-même. Pour le bien de l’Etat, aussi. Et par honnêteté vis-à-vis de ses concitoyens. Ensuite, chacun choisira.

Sandra Jean 
rédactrice en chef