Chu de che / Je suis d'ici / Sono di qui / Ich bin von hier ! Notre liberté ne nous a pas été donnée, mais combattue et priée par nos ancêtres plus d'une fois! Aujourd'hui, comme autrefois, notre existence en tant que peuple libre dépend du fait que nous nous battions pour cela chaque jour. Restez inébranlable et soyez un gardien de la patrie pour que nous puissions remettre une Suisse libre telle que nous la connaissions à la génération suivante. Nous n'avons qu'une seule patrie!

lundi 8 juillet 2013

Cette Suisse qui n’aime plus personne


L’anti-américanisme de comptoir et le mépris jamais éteint de l’Union européenne fleurissent comme jamais.

Nous voilà donc coincés entre un anti-américanisme virulent — l’affaire Snowden s’ajoutant aux psychodrames fiscaux — et un mépris jamais épuisé de l’Union européenne, revigoré par la relance annoncée du processus des bilatérales. Avec une fois n’est pas coutume un Didier Burkhalter en première ligne pour prendre des pains.

L’affaire Snowden pourrait sembler avoir cet avantage de semer la zizanie entre les deux objets de notre courroux actuel, cette Union qui ne nous passe plus aucun caprice et cette Amérique que nous adorons détester. Difficile cependant, même pour les machiavels aux petits pieds et aux grandes bouches qui hantent les travées des chambres fédérales, d’imaginer comment la colère européenne contre l’espionite US pourrait bien nous profiter.

Et n’allons pas imaginer que seule l’UDC cède à ce nouvel accès de prurit anti-européen. Burkhalter a fait savoir, à sa manière laconique, que le plus dur dans cette affaire de renégociations globales était derrière lui. Sous-entendu, il sera plus facile d’entamer les dites renégociations avec les partenaires européens que ça ne l’a été d’en faire accepter d’abord le principe aux collègues du Conseil fédéral.

Des collègues, dit-on, pas tous franchement acquis à cette idée d’un cadre institutionnel à donner aux relations bilatérales, et frissonnant à l’idée des concessions que la Suisse pourrait être amenée à devoir faire. Se persuadant aussi, contre l’évidence, que la Confédération pouvait continuer à vivre avec les 120 accords bilatéraux existants, un saucissonnage dont l’Union avait pourtant fait savoir assez clairement qu’elle ne voulait plus.

Même si l’on a vu, à contre-emploi, le PDC et son président Darbellay curieusement s’inquiéter d’une main-mise des juges étrangers et invoquer la souveraineté inaliénable de la Suisse, c’est évidemment surtout l’UDC qui y va à la kalachnikov. Son président Brunner assène ainsi que la proposition d’accord–cadre de Burkhalter équivaudrait «à adhérer à l’Union européenne sans voter». Ce ne sont plus, dès lors, que rodomontades et menaces de référendum, d’initiative pour faire primer systématiquement le droit suisse sur le droit international, de coupes dans les contributions suisses à l’Union, on en passe et des plus indignées.

Et tant pis si ce qui se joue dans ces relations avec l’Union européenne est bien davantage d’ordre économique que politique. Un bras de fer où le rapport de force est défavorable à la Suisse et où, à chercher la confrontation on ne gagnera rien, ou pas grand-chose, en vaine et verbeuse indépendance politique, mais on perdra sûrement en facilités concrètes d’accès au marché européen.

Dans son ultime chronique avant la retraite, le journaliste parlementaire D.S. Miéville dresse, après quelque décennies d’observations au microscope, cet impitoyable constat d’une âme suisse recroquevillée à l’extrême: «On ne parle plus depuis des mois que de résistance et de mobilisation contre les ukases de l’étranger. Née des attaques contre le secret bancaire, cette attitude s’est progressivement étendue à toutes les contraintes imposées de l’extérieur. Un rien de plus et on remettait en question l’heure d’été dont on rappellera qu’elle fut en 1978 considérée comme une conspiration internationale visant à démoraliser nos vaches laitières… »

Ce qui semble sûr, c’est que nous n’aimons plus personne, sauf nous-mêmes. Ou du moins, comme à défaut, ce qui n’est plus ni européen ni américain. Encore un effort et la russophilie et la sinophilie seront les valeurs les mieux cotées sous la coupole. Cette Russie où d’abord l’infortuné Snowden avait naïvement pensé trouver accueil et protection, cette Chine sans droits de l’homme ni démocratie avec laquelle nous venons de signer un fraternel accord de libre-échange.