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lundi 10 novembre 2014

«Tirer la prise ne résout rien»


Une étude clinique réalisée à Zurich en 2006 estimait que près de 70'000 personnes souffraient de cyberaddiction en Suisse. © Keystone



Volontiers désigné comme étant l’un des maux du XXIe siècle, l’usage excessif des nouvelles technologies demeure pourtant largement méconnu. Interview d’un spécialiste.

Echapper aux jeux vidéo, aux réseaux sociaux, aux smartphones ou à internet? Pratiquement une gageure à l’heure actuelle. A tel point que plus de 80% de la population suisse, âgée de 14 ans et plus, surfe quotidiennement ou plusieurs fois par semaine sur le web, selon des chiffres de l’Office fédéral de la statistique. Ces activités en ligne dans le cadre privé ou professionnel présentent, dans certaines situations, le risque d’une utilisation excessive. La cyberaddiction - c’est la dénomination communément utilisée pour décrire cette situation - est un phénomène apparu il y a une dizaine d’années dans le sillage des nouvelles technologies.

Si de nombreux spécialistes s’y intéressent désormais, ce type de comportement demeure encore largement méconnu. Une étude clinique réalisée à Zurich en 2006 estimait que 70 000 personnes souffraient alors de cyberaddiction en Suisse. Des chiffres largement revus à la baisse ces dernières années par d’autres recherches, mais sans pour autant qu’un consensus scientifique s’établisse sur le sujet. Eclaircissements avec Niels Weber, psychologue, chargé de projet au sein du centre de prévention du jeu excessif Rien ne va plus à Genève, et président de l’association Gaming Federation, dont le but est la promotion de la culture du jeu vidéo en Suisse romande.

Lorsqu’il est question de cyber-addiction, de quoi parle-t-on exactement?

Niels Weber: Tout d’abord, même si le terme «cyberaddiction» parle beaucoup au grand public, je me garde de l’utiliser. Il colle en effet une étiquette assez négative sur cette situation. Il en va de même pour l’usage du mot «cyberdépendance», que les spécialistes s’accordent à abandonner,car la dépendance implique une réaction physiologique à un manque, ce qui ne s’applique pas à ce type de comportement.»Pour ma part, je préfère parler d’hyperconnectivité problématique, car dans notre société nous sommes tous ou presque hyperconnectés, que ce soit via les téléphones portables ou la présence d’écrans dans les lieux publics. Il se peut toutefois que cette hyperconnectivité en vienne à prendre trop de place dans la vie d’une personne, ce qui est problématique et engendre des souffrances.

Comment peut-on identifier les symptômes de l’hyperconnectivité problématique?

De même que pour sa terminologie, il n’y a pas de consensus des experts à ce sujet. Reste que l’idée de souffrance du joueur ou de son entourage, causée par une utilisation excessive des technologies, est l’un des symptômes sur lesquels les spécialistes s’entendent. Cette souffrance peut, par exemple, autant être celle de la famille qui en a ras-le-bol de la situation ou celle d’un conjoint qui se sent délaissé.

Cette pathologie est donc surtout une question de cas par cas…

Oui et cela embête beaucoup de personnes, notamment dans le milieu scolaire ou parmi les parents, car celles-ci voudraient savoir si certains enfants sont cyberaddicts. Pourtant, les critères touchant à l’hyperconnectivité sont complètement subjectifs, car on ne peut quantifier ce type de «consommation». La seule mesure à disposition est le temps, mais celle-ci n’est pas représentative. En effet, un individu peut travailler toute la journée sur un écran d’ordinateur, consulter son smartphone en rentrant chez lui et regarder la télévision le soir, sans que cela ne l’affecte.

Reportage de Radio-Canada sur la cyberdépendance (2009)


Vous évoquez la souffrance comme élément déterminant, quelles formes peut-elle prendre?

C’est à nouveau très subjectif, mais elle peut apparaître dès lors que l’équilibre d’une famille ou d’un couple est mis en péril par une utilisation excessive de ces technologies. Elle se traduit aussi par le désintérêt pour toute autre activité ou la difficulté de s’insérer dans la société. Reste que cela n’est pas forcément déclenché par l’accès à un ordinateur, c’est même rarement le cas, mais peut y être lié.

Est-ce que certaines catégories de personnes sont plus vulnérables?

Le numérique permet aux adolescents de se construire et de se chercher une identité, cette activité peut donc prendre beaucoup de place à cette période, mais finit en général par se régulariser. Par contre, cette utilisation est plus préoccupante auprès d’adultes manquant de confiance ou de valorisation dans leur vie sociale et professionnelle. Ces personnes ont une plus forte tendance à tenter d’obtenir sur internet ce qui leur manque dans la réalité.

Les adeptes de jeux vidéo sont-ils plus touchés?

Les joueurs sont effectivement très atteints. Reste qu’aujourd’hui, tout le monde est joueur, mais à des niveaux différents, notamment avec l’offre de divertissements très importante sur les smartphones. Et les jeux vidéo jouent parfois un rôle important dans les thérapies. En jouant avec une personne, il sera ainsi possible d’élaborer une hypothèse à partir de ce qui se passe dans le numérique.

Quels réflexes peut-on observer pour éviter de voir un proche happé par la cyberaddiction?

Une hyperconnectivité problématique est toujours symptomatique d’un autre souci dans son existence. Parce que quelque chose cloche dans sa vie, une personne sera tentée de se réfugier dans l’utilisation d’outils numériques. Si l’on veut traiter la situation, il ne faut alors pas se contenter de couper la prise ou de jeter la console, mais plutôt chercher l’origine du problème.

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Vincent Bürgy